LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Transports KEMPF François, société à responsabilité limitée, dont le siège social est à Dambach-la-Ville (Bas-Rhin), ..., agissant en la personne de ses représentants légaux en exercice, notamment son gérant, domiciliés en ladite qualité audit siège,
en cassation d'un jugement rendu le 6 avril 1987 par le conseil de prud'hommes de Sélestat (section commerce), au profit de Monsieur Jean-Jacques Y..., demeurant à Dambach-la-Ville (Bas-Rhin), ...,
défendeur à la cassation ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 janvier 1990, où étaient présents :
M. Cochard, président, Mme Charruault, conseiller référendaire rapporteur, MM. Benhamou, Zakine, conseillers, M. X..., Mme Beraudo, conseillers référendaires, M. Dorwling-Carter, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Charruault, les observations de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Transports Kempf, les conclusions de M. Dorwling-Carter, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 122-14.4 et L. 122-14.6 du Code du travail ; Attendu que l'article L. 122-14.6 du Code du travail prévoit que les indemnités spécifiques instituées par l'article L. 122-14.4 du même code pour violation de la procédure de licenciement ne sont pas applicables au salarié ayant moins de 2 ans d'ancienneté ; Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement attaqué que M. Y... avait moins de 2 ans d'ancienneté au moment de son licenciement, qu'il s'ensuit que le conseil de prud'hommes qui, pour accorder le bénéfice de l'indemnité prévue par l'article L. 122-14.4 du Code du travail, s'est borné à affirmer, sans constater l'existence d'un préjudice, que la procédure de licenciement n'avait pas été respectée, a violé les textes susvisés ; Sur le second moyen :
Vu les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; Attendu que pour décider que M. Y... n'avait pas commis de faute grave, le jugement se borne à énoncer que "la jurisprudence n'a
jamais retenu pour faute grave l'incapacité professionnelle qui est avancée par la défenderesse, que le conseil considère que les incidents dont le salarié est l'auteur sont reconnus comme cause réelle et sérieuse de licenciement" ; Attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, dont la généralité ne permet pas à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle sur la nature de la faute imputable au salarié, le conseil de prud'hommes a méconnu les exigences du texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 6 avril 1987, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Sélestat ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Saverne ; Condamne M. Y..., envers la société Transports Kempf, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du conseil de prud'hommes de Sélestat, en marge ou à la suite du jugement annulé ;