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14/02/1990 | FRANCE | N°88-13781

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 février 1990, 88-13781


LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mademoiselle Lucile X..., employée d'assurances, demeurant ... (champ d'Arbaud),

en cassation d'un arrêt rendu le 22 février 1988 par la cour d'appel de Basse-Terre, au profit :

1°/ de Monsieur Gérard D..., commerçant, demeurant à Saint-Claude (Guadeloupe),

2°/ de Madame veuve A...
Z..., née Suzanne D..., demeurant à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), ... n° 3,

3°/ de Monsieur Henri D..., commerçant, demeurant à Basse-Terre (Guadeloupe),

fendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassat...

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mademoiselle Lucile X..., employée d'assurances, demeurant ... (champ d'Arbaud),

en cassation d'un arrêt rendu le 22 février 1988 par la cour d'appel de Basse-Terre, au profit :

1°/ de Monsieur Gérard D..., commerçant, demeurant à Saint-Claude (Guadeloupe),

2°/ de Madame veuve A...
Z..., née Suzanne D..., demeurant à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), ... n° 3,

3°/ de Monsieur Henri D..., commerçant, demeurant à Basse-Terre (Guadeloupe),

défendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 10 janvier 1990, où étaient présents :

M. Camille Bernard, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Bernard de Saint-Affrique, rapporteur, MM. B..., E..., Thierry, Averseng, Lemontey, conseillers, Mme Y..., M. Savatier, conseillers référendaires, M. Charbonnier, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Bernard de Saint-Affrique, les observations de Me Jacoupy, avocat de Mlle X..., les conclusions de M. Charbonnier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut contre les consorts D... ; J E E J Attendu qu'il résulte des énonciations des juges du fond que suivant jugement du 27 juillet 1972, confirmé en appel le 14 mai 1973, le tribunal de grande instance de Basse-Terre, a retenu qu'il s'était crée entre Louis D..., décédé le 12 avril 1969 et Mlle X..., une société de fait dont il a ordonné la liquidation, en prescrivant le partage des biens composant son actif ; qu'à la suite de difficultés ayant opposé les consorts D..., venant aux droits du défunt et Mlle X..., l'arrêt attaqué a ordonné une expertise aux fins d'évaluation, au jour le plus proche du partage, des biens attribués préférentiellement à Mlle X..., débouté cette dernière de sa demande, tendant à ce que les consorts D... soient déclarés redevables, envers l'indivision, des intérêts au taux légal sur une somme dont ils avaient eu la jouissance exclusive, déclaré bien fondée la demande des consorts D... pour que soit fixée l'indemnité due par Mlle X... au titre de l'occupation privative du premier étage d'un immeuble indivis, depuis l'ouverture de la succession, dit que Mlle X... devrait faire connaître au notaire liquidateur l'état de son patrimoine, et notamment de ses

comptes bancaires, au jour du décès de Louis D..., pour être pris en compte dans l'actif de l'indivision à partager entre les parties ; Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que Mlle X... fait grief à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande d'évaluation des biens immobiliers, au jour de l'ouverture de la succession de Louis D..., en retenant que selon l'article 832 du Code civil, ces biens, attribués à titre préférentiel, devaient être évalués au jour le plus proche du partage, alors, selon le moyen, que d'une part, il appartient aux juges du fond, de déterminer souverainement, eu égard aux circonstances de la cause, et en s'inspirant de l'intérêt respectif des copartageants, quelle doit être la date d'évaluation d'où partira la jouissance divise, afin d'assurer l'égalité en valeur entre les intéressés, de sorte qu'en s'abstenant de rechercher s'il n'y avait pas lieu de fixer cette date à l'ouverture de la succession, à compter de laquelle Mlle X... et les consorts D... avaient disposé à titre privatif, la première d'un bien immobilier, et les seconds de sommes figurant sur les comptes bancaires du défunt, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, et alors que, d'autre part, en ne répondant pas aux conclusions, dans lesquelles l'intéressée faisait valoir, qu'en raison de l'évolution notable de la situation économique durant le long laps de temps écoulé entre l'ouverture de la succession et le partage, il apparaissait équitable de retenir comme date d'évaluation, celle de la jouissance divise, pour ce qui concernait tant les biens immobiliers que les soldes créditeurs de comptes bancaires du défunt, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la cour d'appel a exactement énoncé que, selon l'article 832 du Code civil, le bien attribué préférentiellement à Mlle X..., devait être évalué à la date la plus proche du partage ; que la fixation de cette date relève de l'appréciation souveraine des juges du fond ; que c'est dans l'exercice de ce pouvoir souverain que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre Mlle X... dans le détail de son argumentation, a décidé que le bien à elle attribué serait estimé, à dire d'expert, à sa valeur actuelle, rejetant ainsi implicitement mais nécessairement les conclusions tendant à l'évaluation de ce bien à la date d'ouverture de la succession ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Sur le troisième moyen :

Attendu que Mlle X... reproche encore à l'arrêt attaqué d'avoir accueilli les consorts D..., en leur demande d'indemnité formée à son encontre, pour

jouissance privative d'un bien immobilier depuis l'ouverture de la succession, alors, selon le moyen, qu'aucune demande n'était recevable, de ce chef, plus de cinq années après la date à laquelle

l'indemnité aurait dû être perçue, de sorte qu'en statuant comme elle a fait la cour d'appel a violé l'article 815-10 du Code civil ; Mais attendu que la cour d'appel n'était pas tenue de suppléer d'office le moyen d'irrecevabilité découlant de l'expiration du délai prévu par l'article 815-10, alinéa 2, du Code civil, dès lors que Mlle X... ne s'en était pas prévalue dans ses écritures en appel ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ; Sur le quatrième moyen :

Attendu que Mlle X... reproche enfin à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'elle devait faire connaître, au notaire liquidateur, l'état de son patrimoine, et notamment de son ou ses comptes bancaires au jour du décès de Louis D..., pour être pris en compte dans l'actif de l'indivision découlant de la société de fait ayant existé, entre eux, sauf à démontrer la provenance extra-sociale des sommes figurant sur ces comptes, alors, selon le moyen, que la cour d'appel n'a pu, sans inverser la charge de la preuve, imposer à l'intéressée d'établir que les biens composant son patrimoine ne faisaient pas partie de l'actif de la société de fait précitée ; Mais attendu que par un motif non critiqué, la cour d'appel a estimé que l'actif et le passif de la société de fait ayant existé entre feu Louis C... et Lucile X... devait comprendre les patrimoines respectifs des deux associés ; que dès lors, c'est sans inverser la charge de la preuve qu'elle a déclaré Mlle X... tenue de faire connaître l'état de son patrimoine au jour du décès de son associé, et plus spécialement le solde de ses comptes bancaires à la même date, sauf à établir que les sommes y figurant ne pouvaient être incluses dans l'actif de la société en raison de leur provenance extra sociale ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Rejette les premier, troisième et quatrième moyens ; Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 815-9, alinéa 2, du Code civil ; Attendu, selon ce texte, que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ; Attendu que la cour d'appel énonce, d'abord, que les sommes dépendant d'une indivision, et devant figurer au partage pour leur montant nominal, ne sont pas productives d'intérêts, sauf s'il est établi qu'une indivisaire en a fait un usage générateur de profits à inclure dans l'actif à partager ; que constatant, ensuite, que Mlle X... n'établissait pas que ses coindivisaires, les consorts D..., aient tiré des profits ou bénéfices des sommes qui leur avaient été confiées jusqu'au partage, avec charge de les représenter, la juridiction du second degré en a déduit qu'ils n'étaient pas redevables, à l'égard de l'indivision, de

l'indemnité prévue par l'article 815-9, alinéa 2, du Code civil ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que cet article n'exige pas, pour l'attribution de l'indemnité précitée, qu'il soit établi que l'indivisaire ait tiré profit du bien dont il a eu la jouissance privative, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions déclarant les consorts D... non redevables de l'indemnité prévue par l'article 815-9, alinéa 2, du Code civil, l'arrêt rendu le 22 février 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ; Condamne les consorts D..., envers Mlle X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Basse-Terre, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du quatorze février mil neuf cent quatre vingt dix.


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