AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le premier février mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire LOUISE, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général RABUT ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
X... Anne-Marie, épouse Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 30 juin 1987, qui, pour violences légères, l'a condamnée à 300 francs d'amende ainsi qu'à des réparations civiles ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu que la contravention poursuivie commise avant le 22 mai 1988 est amnistiée par application de l'article 1er de la loi du 20 juillet 1988 ;
Attendu qu'il existe des intérêts civils en la cause ; qu'il y a lieu, dès lors, de statuer sur le pourvoi en ce qui les concerne ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles R. 38 paragraphe 1 et 321 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré la demanderesse coupable de violences légères sur la personne de M. Z..., et l'a condamné à verser des dommages-intérêts à ce dernier ;
"aux motifs que les deux prévenus reconnaissent l'un et l'autre s'être rendus coupables de violences réciproques qui leur sont reprochées ; que la demanderesse confirme ses déclarations antérieures sur la genèse de l'incident, et admet avoir administré une gifle à M. Z... sous les injures qu'il a proférées à son encontre ; que ce dernier reconnaît avoir exercé sur sa personne les violences dont il est aujourd'hui prévenu ; que les faits sont suffisamment établis par les éléments de la procédure, les débats à l'audience et les aveux respectifs des deux prévenus ;
"alors que, d'une part, la contravention de violences légères suppose que les agissements reprochés à l'auteur aient été accomplis intentionnellement et volontairement, dans le but de nuire à autrui ; qu'en l'espèce la cour d'appel, qui s'est bornée à affirmer que la demanderesse a administré une gifle à M. Z... sous les injures proférées à son encontre, sans aucunement caractériser l'élément volontaire de l'infraction retenue, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article R. 30 paragraphe 1 du Code pénal ;
"alors que, d'autre part, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que la demanderesse avait giflé M. Z... sous le coup de l'émotion créée par les outrages dont celui-ci s'était rendu coupable à son égard ; qu'il s'ensuit que l'acte d'agression était aussi caractérisé et constituait une cause de justification ; que la Cour ne pouvait légalement écarter cette excuse propre à supprimer toute répression de l'infraction" ;
Attendu, d'une part, que le caractère volontaire du geste reproché à Anne-Marie Y... résulte de sa nature même ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne ressort ni des énonciations de l'arrêt attaqué ni d'aucunes conclusions que la demanderesse ait invoqué devant la cour d'appel, l'excuse de provocation ; que le moyen, pris en sa seconde branche, est nouveau, mélangé de fait et de droit et, dès lors, irrecevable ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
DECLARE l'action publique ETEINTE ;
Pour le surplus, REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Louise conseiller rapporteur, MM. Morelli, de Bouillane de Lacoste, Jean Simon, Blin conseillers de la chambre, Mme Ract-Madoux, M. Maron conseillers référendaires, M. Rabut avocat général, Mme Gautier greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;