LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société à responsabilité limitée OCM, dont le siège social est rue Jean-Marie Merle, zone d'activité-ouest, à Vaulx-en-Velin (Rhône),
en cassation d'un arrêt rendu le 17 juin 1986 par la cour d'appel de Lyon, au profit de Monsieur Lucien Y..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 10 octobre 1989, où étaient présents :
M. Goudet, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Benhamou, conseiller rapporteur, M. Lecante, conseiller, Mmes X..., Tatu, conseillers référendaires, M. Dorwling-Carter, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Benhamou, les observations de la SCP Riché-Blondel et Thomas-Raquin, avocat de la société OCM, les conclusions de M. Dorwling-Carter, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 17 juin 1986), M. Y... a été engagé le 4 février 1980, en qualité de fraiseur-outilleur par la société Outillage Construction Mécanique (OCM) ; qu'à la suite d'un incident qui l'avait opposé le 2 juillet 1982 au gérant de la société et au cours duquel ce dernier l'avait fait tomber et l'avait blessé, une mise à pied de 4 jours lui a été notifiée ; qu'après avoir reçu un certificat médical d'arrêt de travail du salarié, la société, par courrier du 12 juillet 1982, a reporté à cette date, la mise à pied ; que, le 30 août suivant, elle lui a écrit qu'à la suite de l'incident du 2 juillet il méritait d'être licencié pour faute grave, qu'elle voulait bien toutefois s'en tenir à la mise à pied mais qu'elle reconsidérerait sa position s'il ne retirait pas la plainte qu'il avait déposée contre le gérant et n'arrêtait pas l'action prud'homale qu'il avait engagée ; que, le 2 septembre 1982, M. Y... a contesté les faits qui lui étaient reprochés et a fait connaître à son employeur qu'il maintenait sa plainte et sa demande en justice ; qu'il a alors été licencié le 3 septembre 1982 ; Attendu qu'il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de M. Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné l'employeur à payer à ce salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, que, d'une part, le fait pour un salarié d'insulter son employeur, et ce à plusieurs reprises comme l'ont
relevé les juges du fond, constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement nonobstant l'existence de mise en garde ou de sanctions disciplinaires ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article L. 122-14-3 du Code du travail et violé l'article L. 122-14-4 du même Code ; et alors que, d'autre part, le fait pour un salarié de déposer plainte contre son employeur et de persister dans la volonté de voir condamner ce dernier constitue manifestement une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en jugeant différemment, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-4 du Code du travail ; Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé qu'une même faute ne pouvait faire l'objet de plusieurs sanctions successives, la cour d'appel a justement relevé que l'employeur qui avait épuisé son pouvoir disciplinaire en sanctionnant par une mise à pied le comportement fautif du salarié responsable de l'incident du 2 juillet 1982, ne pouvait ensuite décider, à raison des mêmes faits, le licenciement de l'intéressé ; qu'elle a en outre retenu que la société ne pouvait reprocher à M. Y... d'avoir maintenu une plainte et une action en justice qu'il était en droit d'intenter ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, elle n'a fait qu'user du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail en décidant que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;