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11/06/2024 | FRANCE | N°22/01476

France | France, Cour d'appel de Riom, 1ère chambre, 11 juin 2024, 22/01476


COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE







Du 11 juin 2024

N° RG 22/01476 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F3FO

-DA- Arrêt n° 270



[Y] [Z] / [K] [L]



Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 08 Juin 2022, enregistrée sous le n° 20/01624



Arrêt rendu le MARDI ONZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE



COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Dan

iel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller



En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé



ENTRE :



M. [Y] [...

COUR D'APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 11 juin 2024

N° RG 22/01476 - N° Portalis DBVU-V-B7G-F3FO

-DA- Arrêt n° 270

[Y] [Z] / [K] [L]

Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CLERMONT-FERRAND, décision attaquée en date du 08 Juin 2022, enregistrée sous le n° 20/01624

Arrêt rendu le MARDI ONZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l'appel des causes et du prononcé

ENTRE :

M. [Y] [Z]

[Adresse 5]'

[Localité 4]

Représenté par Maître Isabelle CONSTANT, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND

Timbre fiscal acquitté

APPELANT

ET :

M. [K] [L]

[Adresse 5]'

[Localité 4]

Représenté par Maître Jean-Louis TERRIOU de la SCP TERRIOU RADIGON FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Timbre fiscal acquitté

INTIME

DÉBATS : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 avril 2024, en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. ACQUARONE et Mme BEDOS, rapporteurs ;

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 11 juin 2024 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme DHOME, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

I. Procédure

M. [K] [L] est propriétaire au lieu-dit « La Prangère », à [Localité 4] (Puy-de-Dôme), des parcelles cadastrées [Cadastre 6] et [Cadastre 1]. M. [Y] [Z] est propriétaire des terrains voisins cadastrés [Cadastre 7], [Cadastre 2] et [Cadastre 3].

Se plaignant de diverses nuisances de voisinage causées par M. [Z], M. [L] l'a fait assigner le 6 mai 2020 devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, afin qu'il soit condamné à retirer des végétaux plantés irrégulièrement ; couper ou retourner les pointes de sa clôture ; procéder dans les règles de l'art à des travaux de raccordement des eaux provenant de la propriété [L] ; le tout outre astreintes, dommages-intérêts et article 700 du code de procédure civile.

À l'issue des débats, par jugement du 8 juin 2022, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a rendu la décision suivante :

« Le tribunal, statuant en premier ressort par jugement contradictoire et par misé à disposition au greffe,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à enlever les plantations situées à moins de 50 centimètres de la limite séparative entre son fonds et celui de Monsieur [K] [L], ainsi qu'à s'assurer du respect des conditions de hauteur et de distances des végétaux imposées par l'article 671 du code civil,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à couper ou retourner les pointes de sa clôture située en limite du fonds de Monsieur [K] [L], et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la présente décision,

DÉBOUTE Monsieur [K] [L] de sa demande relative à l'écoulement des eaux,

RAPPELLE aux parties qu'il leur incombe de laisser libre cours à l'écoulement normal et habituel des eaux, sans créer de déviation préjudiciable à autrui,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 830,50 euros en réparation de son préjudice matériel,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 400 euros en réparation de son préjudice moral,

DÉBOUTE Monsieur [Y] [Z] de sa demande relative au préjudice de jouissance,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] aux dépens,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts supplémentaires correspondant au coût du constat d'huissier. »

Dans les motifs de sa décision le tribunal a donné raison pour l'essentiel à M. [L], sauf concernant « l'existence d'un blocage de l'écoulement des eaux » que le premier juge a estimé n'être pas suffisamment démontré.

Il a par ailleurs rejeté les demandes indemnitaires de M. [Z], considérant que l'écoulement d'eau, limité dans le temps, provenant du fonds [L], « cantonné à une fraction du fonds adverse (le poulailler), et quelle qu'en soit la cause réelle, n'est pas de nature à causer un préjudice de jouissance. »

***

M. [Y] [Z] a fait appel de cette décision le 13 juillet 2022, précisant :

« Objet/Portée de l'appel : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués en ce que le Tribunal a : Condamné Monsieur [Y] [Z] à enlever les plantations situées à moins de 50 cm de la limite séparative entre son fonds et celui de Monsieur [L], ainsi qu'à s'assurer du respect des conditions de hauteur et de distances des végétaux imposées par l'article 671 du Code Civil ; Condamné Monsieur [Y] [Z] à couper ou retourner les pointes de sa clôture située en limite du fonds de Monsieur [L], et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la présente décision ; Condamné Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 830,50 € en réparation de son préjudice matériel ; Condamné Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 400 €en réparation de son préjudice moral ; Débouté Monsieur [Y] [Z] de sa demande relative au préjudice de jouissance ; Condamné Monsieur [Y] [Z] aux dépens ; Condamné Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du CPC ; Condamné Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts supplémentaires correspondant aux frais du constat d'huissier. »

Dans ses conclusions nº 3 ensuite du 21 février 2024 M. [Z] demande à la cour de :

« INFIRMANT le Jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de CLERMONT FERRAND le 08 juin 2022,

STATUANT à nouveau,

DÉBOUTER Monsieur [L] de l'intégralité de ses demandes et de son appel incident,

CONDAMNER Monsieur [L] à payer à Monsieur [Z] la somme de 6 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de jouissance,

CONDAMNER Monsieur [L] à payer à Monsieur [Z] la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER Monsieur [L] aux entiers dépens, incluant les frais de constat d'huissier établi par Me [P] du 17 décembre 2020. »

***

En défense, dans des conclusions du 17 mai 2023, M. [L] demande pour sa part à la cour de :

« - Vu les articles 555, 672, 673, 1240 et 1241 du Code civil,

- DÉBOUTER Monsieur [Y] [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- CONFIRMER le Jugement entrepris en ce qu'il a :

- condamné Monsieur [Y] [Z] à enlever les plantations situées à moins de 50 centimètres de la limite séparative entre son fonds et celui de Monsieur [K] [L], ainsi qu'à s'assurer du respect des conditions de hauteur et de distance des végétaux imposées par l'article 671 du Code civil,

- condamné Monsieur [Y] [Z] à couper ou retourner les pointes de sa clôture située en limite du fonds de Monsieur [K] [L], et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard passé le délai d'un mois suivant la décision à intervenir,

- condamné Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 830,50 € en réparation de son préjudice matériel,

- RÉFORMER le Jugement entrepris pour le surplus,

- CONDAMNER Monsieur [Y] [Z] à effectuer de façon définitive dans sa propriété un raccordement de la sortie des eaux en provenance de la propriété de Monsieur [L] dans les règles de l'Art jusqu'au point d'écoulement de la marre [sic], et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du mois suivant la décision de la Cour,

- CONDAMNER Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 3 000 € en réparation de son préjudice moral,

- CONDAMNER Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 6 000 € en réparation de son préjudice de jouissance,

- CONDAMNER Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront le coût du constat d'Huissier, Maître [G]. »

***

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fait ici expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées, étant précisé que le litige se présente céans de la même manière qu'en première instance.

Une ordonnance du 21 mars 2024 clôture la procédure.

II. Motifs

1. Sur les plantations

Devant le premier juge, M. [L] se plaignait de ce que les végétaux plantés sur le fonds de son voisin M. [Z] avaient pris de l'ampleur et débordaient sur sa propriété.

Selon l'article 671 du code civil :

« Il n'est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété voisine qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par des usages constants et reconnus et, à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres plantations. »

Le propre expert de l'assureur de protection juridique de M. [Z] avait indiqué à celui-ci que la demande de son voisin « était légitime » et qu'il lui appartenait « de procéder aux travaux nécessaires pour régulariser la situation » concernant notamment l'élagage des arbres et l'entretien des végétaux longeant sa clôture (cf. rapport Auvergne Expertises, sous la plume de M. [N] [F], en date du 28 juillet 2020).

Dans le dispositif de sa décision, considérant que M. [Z] avait « manifestement commencé à s'exécuter en élaguant certains arbres » le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand l'avait condamné à enlever les plantations situées à moins de 50 centimètres de la limite séparative entre son fonds et celui de M. [L], ainsi qu'à s'assurer du respect des conditions de hauteur et de distances des végétaux imposées par l'article 671 du code civil.

Dans ses conclusions à la cour, M. [L] écrit page 4 :

Il y a lieu de constater que Monsieur [Z] a coupé effectivement un certain nombre de branches qui dépassaient ; toutefois, la coupe a été faite de manière non-professionnelle et elle engendre des rejets particulièrement importants dès le mois d'avril/mai 2021, qui vont dépasser sur la propriété de Monsieur [L] (cf. photos nº 20 et 21).

Le plus récent constat dressé par huissier le 28 mars 2023 à la demande de M. [L] montre en effet qu'un grand arbre poussant sur la propriété [Z] à proximité de la limite des parcelles respectives des parties débordait largement sur celle de M. [L] (cf. photographie nº 33).

Au moyen de photographies qu'il produit à son dossier (pièce nº 3), M. [Z] prouve qu'il a élagué cet arbre, certes grossièrement, mais en tout cas, ainsi qu'on peut le voir également sur une photographie produite par l'intimé dans son dossier (pièce nº 20), les branches qui autrefois vagabondaient au-dessus du fonds [L] ont été supprimées.

M. [L] persiste cependant dans ses demandes, disant que son voisin a procédé à de nouvelles plantations qui ne respectent pas la distance imposée par l'article 671 du code civil. Il écrit ainsi dans ses conclusions page 4 :

Monsieur [Z] a, d'autre part, planté de nouveaux arbustes qui sont à moins de 50 cm de la clôture de Monsieur [L], qu'ils devront également être élagués s'ils dépassaient sur la propriété [L] (cf. photos nº 20 et 21).

Force est de constater que les arbustes ne sont pas plantés à 50 cm de la clôture de Monsieur [L], mais sur la clôture, et que des arbres de plus de deux mètres ne sont pas plantés à deux mètres de distance de la clôture de Monsieur [L].

Manifestement, au vu des photographies produites par Monsieur [L], et d'ailleurs non contestées par Monsieur [Z], celui-ci avait planté de nouveaux arbustes à moins de 50 cm de la clôture et que certains dépassaient déjà sur la propriété de Monsieur [L].

M. [Z] conteste les affirmations de son adversaire, disant que « Ce type d'exigence, totalement prématurée et abusive démontre la volonté exacerbée de Monsieur [L] de nuire à son voisin », et soutenant en outre que les arbustes dont il est question « sont en réalité des arbres qui ont plus de 30 ans » (conclusions page 5).

Or les photographies produites au dossier par M. [L] (pièces nº 20 et 21) montrent au contraire que M. [Z] a procédé à la plantation de jeunes arbres, près du mur de la propriété de M. [L]. Étant donné la modeste taille de ces végétaux il n'est pas possible de soutenir sérieusement qu'ils sont âgés de plus de 30 ans.

Du point de vue du droit de la preuve, dans la mesure où l'existence de plantations à proximité de la propriété [L] est démontrée, il appartient à M. [Z] de prouver que ces plantations respectent les distances prévues par l'article 671 du code civil, ce qu'il ne fait pas.

Dans ces conditions, le jugement doit être confirmé dans ses dispositions concernant les distances des plantations, la cour précisant que si les plantations croissant sur la propriété de M. [Z] respectent les limites imposées par l'article 671 du code civil, il pourra les conserver ; sinon, il devra les enlever.

2. Sur les pointes de clôture

Au moyen d'un constat dressé par huissier le 7 mai 2019 et de deux photographies, M. [L] démontrait en première instance que de très nombreuses pointes de clous dépassaient largement vers son fonds à travers les planches de bois composant la clôture installée par M. [Z].

Le tribunal judiciaire, considérant que ces pointes faisant saillie vers la propriété [L] présentaient un danger pour les personnes, a condamné M. [Z] « à couper ou retourner les pointes de sa clôture située en limite du fonds de Monsieur [K] [L], et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai d'un mois suivant la présente décision ».

Dans ses conclusions à la cour M. [Z] soutient que « le nécessaire a été fait » et produit pour preuve des photographies (pièce nº 3) où l'on voit que des pointes ont été pliées le long du bois. M. [L] maintient néanmoins que « de très nombreuses pointes rouillées tournent » vers sa propriété (conclusions page 5). Il verse pour preuve un constat dressé le 28 mars 2023, postérieur au jugement dont appel, où l'huissier note : « je constate la présence d'une paroi de fortune composée d'un enchevêtrement de palettes, planches et autres morceaux de bois, laquelle est constellée de pointes saillantes du côté donnant sur le fonds appartenant au requérant. » Les photographies jointes à ce constat confirment clairement les dires de l'huissier.

Les photographies produites par M. [Z], où l'on voit que des pointes de clous ont été martelées et pliées de manière à ne plus dépasser le bois comme auparavant, ne montrent cependant qu'une partie de l'ouvrage, et il est impossible de savoir si ces images sont postérieures au constat du 28 mars 2023, en conséquence de quoi M. [Z] ne justifie pas avoir pleinement satisfait à la demande du tribunal, dont la décision sera par conséquent confirmée, la cour supprimant toutefois l'astreinte dans la mesure où apparemment M. [Z] a fait déjà un effort pour supprimer une partie des pointes saillantes. Il lui appartient maintenant de terminer son travail en pliant ou arrachant toutes les pointes qui dépassent encore sur la propriété [L].

3. Sur les encombrants posés sur la clôture de M. [L]

De ce chef, le tribunal judiciaire a condamné M. [Z] à payer à M. [L]à titre de dommages-intérêts, sur la foi d'un procès-verbal de constat du 7 mai 2019, produit également en appel, la somme de 830,50 EUR en réparation du préjudice matériel subi par M. [L] en raison de la dégradation de sa clôture sur laquelle M. [Z] avait entassé une grande quantité de morceaux de bois.

L'examen du constat du 7 mai 2019, ainsi que les photographies annexées à cet acte, montrent suffisamment la dégradation très importante de la clôture de la propriété [L], moyennant quoi le jugement doit être confirmé.

4. Sur l'écoulement des eaux de la propriété [L]

Dans le dispositif de ses écritures M. [L] demande à la cour de :

CONDAMNER Monsieur [Y] [Z] à effectuer de façon définitive dans sa propriété un raccordement de la sortie des eaux en provenance de la propriété de Monsieur [L] dans les règles de l'Art jusqu'au point d'écoulement de la marre [sic], et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du mois suivant la décision de la Cour.

Telle que formulée, la demande manque singulièrement de précision, au moins d'un point de vue technique. En outre, et surtout, les éléments manifestement insuffisants produits au dossier par M. [L] n'éclairent pas mieux la cour qu'ils n'éclairaient le premier juge, ce qui avait conduit celui-ci à considérer que « l'existence d'un blocage de l'écoulement des eaux » n'était pas démontré, et à prudemment rappeler dans le dispositif de sa décision qu'il incombe aux parties « de laisser libre cours à l'écoulement normal et habituel des eaux, sans créer de déviation préjudiciable à autrui. »

Pour tenter de démontrer que son voisin avait « bouché la sortie naturelle de l'eau qui s'écoule dans la cour de sa propriété » M. [L] produit en effet à son dossier deux photographies d'où il est tout à fait impossible de tirer la moindre démonstration d'une faute imputable M. [Z]. Par ailleurs, les deux rapports d'expertise « protection juridique » du cabinet PRUNAY, mandaté par l'assureur de M. [L], en date des 3 décembres 2019 et 25 juin 2020, ne font nullement référence à une telle obstruction de l'écoulement des eaux. Le constat dressé par l'huissier Maître [G] le 7 mai 2019 rapporte la plainte à ce sujet de M. [L], mais ne constate rien. Un second constat du 28 mars 2023, par Maître [C], n'en fait même pas mention.

Les deux photographies produites au dossier par M. [L] (pièces nº 23 et 24) montrent certes de l'eau stagnante en un endroit indéterminé encombré de pierres, de morceaux de bois et de végétaux, mais rien ne permet au vu de ces photographies et des seuls éléments ci-dessus rapportés, d'imputer cette situation à M. [Z]. La cour ne peut donc pas ici mieux dire que le premier juge dont la décision sera confirmée.

5. Sur les dommages-intérêts

Compte tenu des éléments ci-dessus examinés, le préjudice moral de M. [L] a été parfaitement arbitré par le premier juge à la somme de 400 EUR ; il n'y a pas lieu de lui allouer un montant supérieur, ni une indemnité supplémentaire au titre d'un préjudice de jouissance que rien ne démontre.

Concernant la demande de M. [Z] au titre d'un préjudice de jouissance, elle n'est fondée sur aucun élément concret, et de ce chef la cour fait siens les pertinents motifs du premier juge qui avait rejeté cette réclamation en ces termes :

Le tribunal considère que le détournement limité de l'écoulement des eaux (Monsieur [Y] [Z] ne remettant pas en cause la durée de deux semaines évoquée), cantonné à une fraction du fonds adverse (le poulailler), et qu'elle qu'en soit la cause réelle n'est pas de nature à causer un préjudice de jouissance. Un tel dommage suppose une impossibilité avérée et durable de jouir d'un bien. Il ne peut résider dans un inconvénient ponctuel dont les tenants et les aboutissants sont mal connus et qui s'inscrit, en tout état de cause, dans un conflit de voisinage avéré.

Il convient par ailleurs d'infirmer la décision en ce que le tribunal judiciaire « CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts supplémentaires correspondant au coût du constat d'huissier ». En effet, les frais non compris dans les dépens ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile (Soc. 16 septembre 2009, nº 07-45.725).

6. Sur les frais irrépétibles

L'équité commande que M. [Z] paye à M. [L] la somme de 1500 EUR en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

7. Sur les dépens

Les dépens d'appel seront à la charge de M. [Z]. La cour rappelle que le coût d'un constat d'huissier qui n'a pas été ordonné judiciairement n'entre pas dans les dépens mais relève de l'article 700 du code de procédure civile (3e Civ., 17 mars 2004, nº 00-22522 ; 2e Civ., 12 Janvier 2017, nº 16-10.123).

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement, sauf en ce que le tribunal judiciaire impose à M. [Y] [Z] une astreinte de 50 EUR par jour de retard concernant la suppression des pointes de la clôture, et en ce qu'il « CONDAMNE Monsieur [Y] [Z] à verser à Monsieur [K] [L] la somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts supplémentaires correspondant au coût du constat d'huissier » ;

Y ajoutant, la cour précise que si les plantations croissant sur la propriété de M. [Z] respectent les limites imposées par l'article 671 du code civil, il pourra les conserver ; sinon, il devra les enlever ;

Condamne M. [Y] [Z] à payer à M. [K] [L] la somme de 1500 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel ;

Condamne M. [Y] [Z] aux dépens d'appel ;

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Riom
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/01476
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;22.01476 ?
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