La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/08/2024 | FRANCE | N°24/00350

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 01 août 2024, 24/00350


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 170

N° RG 24/00350 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VB6V



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Véronique VEILLARD, présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a

ssisté de Julie ROUET, greffière,





Statuant sur l'appel formé le 31 Juillet 2024 à 17h04 par :



M. [N] [V]

né le 30 Décembre 1992...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 170

N° RG 24/00350 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VB6V

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Véronique VEILLARD, présidente de chambre à la cour d'appel de RENNES, déléguée par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Julie ROUET, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 31 Juillet 2024 à 17h04 par :

M. [N] [V]

né le 30 Décembre 1992 à [Localité 3]

de nationalité Géorgienne

ayant pour avocat Me Klit DELILAJ, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 30 Juillet 2024 à 17h16 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [N] [V] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 30 juillet 2024 à 24h00;

En présence de M. [B] [F], représentant du préfet de Préfecture d'Ille et Vilaine, muni d'un pouvoir remis à l'audience, dûment convoqué,

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, (avis du 01 août 2024)

En présence de [N] [V], assisté de Me Klit DELILAJ, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 01 Août 2024 à 14 H 30 l'appelant assisté de Mme [L] [P], interprète en langue géorgienne, et son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et le 01 août à 17 heures 15, avons statué comme suit :

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

Vu l'arrêté du préfet de Vienne du 16 mai 2024 notifié à M. [N] [V] le 16 mai 2024 ayant prononcé l'obligation de quitter le territoire français,

Vu l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 26 juillet 2024 notifié à M. [N] [V] le 26 juillet 2024 ayant prononcé son placement en rétention administrative,

Vu la requête introduite par M. [N] [V] à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative,

Vu la requête motivée du représentant du préfet d'Ille-et-Vilaine du 30 juillet 2024, reçue le 30 juillet 2024 à 9h32 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes,

M. [N] [V] a été placé en rétention dans les locaux non pénitentiaires depuis le 26 juillet 2024 à 18h45 et pour une durée de 4 jours.

Par ordonnance du 30 juillet 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes a :

- rejeté les exceptions de nullité soulevées ;

- rejeté le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative,

- ordonné la prolongation du maintien de M. [N] [V] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours à compter du 30 juillet 2024 à 24h00,

- dit que le procureur de la République a la possibilité dans un délai de 24 heures à partir de la notification de la présente ordonnance de s'y opposer et d'en suspendre les effets,

- notifié que la présente décision est susceptible d'être contestée par la voie de l'appel interjeté dans les 24 heures du prononcé de la présente ordonnance, devant le premier président de la cour d'appel de Rennes, et par requête motivée,

- rappelé à M. [N] [V] que dès le début du maintien en rétention, il peut demander I ' assistance d'un interprète, d'un médecin, d'un conseil et peut, s'il le désire, communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix.

M. [V] a interjeté appel le 31 juillet 2024.

MOTIVATION

1. Sur le moyen relatif à la réitération de la rétention dans un délai de sept jours

Le conseil de M. [V] fait valoir que la décision de placement en rétention administrative est irrégulière en ce qu'elle serait intervenue moins de sept jours après la mainlevée d'une précédente mesure de rétention dont faisait l'objet son client en méconnaissance des dispositions de l'article L. 741-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA). Il précise que la précédente rétention administrative de l'intéressé n'avait pas pris fin le 20 juillet 2024 en raison d'une soustraction de l'étranger aux mesures de surveillance mais qu'il a été libéré par le juge des libertés et de la détention le 20 juillet 2024 en raison d'un vice de procédure. En outre, sauf erreur, il n'existe selon lui pas au dossier de constatation de la part des forces de l'ordre d'un non-respect des obligations de pointage au moment lors de la notification du second placement en rétention administrative alors que ce nouvel élément de fait doit être constaté antérieurement à la notification de l'APR et qu'en l'espèce, le préfet indique cet élément uniquement au stade du débat par devant le juge des libertés et de la détention.

Réponse de la cour :

L'article L. 741-7 du CESEDA, dans sa version issue de la loi du 26 janvier 2024, énonce que "La décision de placement en rétention ne peut être prise avant l'expiration d'un délai de sept jours à compter du terme d'un précédent placement prononcé en vue de l'exécution de la même mesure ou, en cas de circonstance nouvelle de fait ou de droit, d'un délai de quarante-huit heures. Toutefois, si ce précédent placement a pris fin en raison de la soustraction de l'étranger aux mesures de surveillance dont il faisait l'objet, l'autorité administrative peut décider d'un nouveau placement en rétention avant l'expiration de ce délai."

En l'espèce, M. [V] a vu la précédente mesure de rétention dont il faisait l'objet levée le 20 juillet 2024 sur décision du juge des libertés et de la détention, avant d'être à nouveau placé en rétention le 26 juillet 2024. Il a été assigné à résidence dès le 21 juillet 2024, mesure qu'il a dûment émargée en présence d'un interprète, mais n'a pas respecté notamment l'interdiction de sortir de la commune de [Localité 1], puisqu'il a été interpelé à [Localité 2] le 26 juillet suivant.

Cet élément s'analyse à lui seul en une circonstance nouvelle de fait et de droit, autorisant un nouveau placement en rétention à l'expiration d'un délai de 48 heures, ce qui est le cas en l'espèce.

Le moyen est inopérant.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

2. Sur le moyen relatif à l'infraction pour laquelle l'intéressé a été placé en garde à vue

Le conseil de M. [V] soutient, notamment sur le fondement de la directive dite "retour" du 16 décembre 2008 (Dir. CE n° 2008/115 du Parlement européen et du Conseil du 16 déc. 2008), que la procédure est irrégulière au motif que la garde à vue de son client n'était pas justifiée au vu de l'infraction reprochée qui ne serait nullement caractérisée au moment du placement en garde à vue.

Réponse de la cour :

L'article 62-2 du code de procédure pénale définit la garde à vue de la manière suivante : "la garde à vue est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, par laquelle une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs."

Il en résulte que pour être régulier, le placement en garde à vue suppose l'existence préalable d'une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que la personne a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement.

En l'espèce, l'intéressé a été placé en garde à vue pour "non-respect d'une assignation à résidence par un étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français."

Il résulte de la procédure que l'intéressé, contrôlé à [Localité 2], a manqué à son interdiction de sortir de la commune de [Localité 1].

Ainsi, il existe bien au moins une raison plausible de soupçonner que le susnommé a commis ou tenté de commettre le délit de violation d'obligations d'assignation à résidence, infraction définie aux articles L.824-4 et L.824-5 du CESEDA.

La procédure est donc régulière et le moyen sera écarté.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

3. Sur le moyen relatif aux diligences de diligences de la préfecture

Le conseil de M. [V] soutient que la procédure est irrégulière, faisant valoir que les diligences de la préfecture en vue de la mise à exécution de la mesure d'éloignement seraient tardives en ce sens que l'on pouvait supposer que son client disposait d'un passeport en cours de validité dans la mesure où la copie de ce passeport a été transmise aux autorités consulaires géorgiennes, et que dès lors la saisine desdites autorités aux fins de délivrance d'un laissez-passer était inutile et que la réservation d'un vol aurait dû intervenir sans attendre le retour favorable des autorités compétentes.

Réponse de la cour :

L'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) dispose qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ" et que "l'administration exerce toute diligence à cet effet."

Il est constant que l'obligation faite à l'administration de limiter le temps de rétention par des diligences appropriées ne s'impose qu'à partir du moment où cette mesure a pris effet.

En l'espèce, ainsi que l'a justement relevé le premier juge, la préfecture a saisi les autorités géorgiennes aux fins de délivrance d'un document de voyage dès le 27 juillet 2024, soit dès le lendemain du placement en rétention intervenu le 26 juillet. Si la saisine desdites autorités est accompagnée d'une copie du passeport de l'intéressé en cours de validité, aucun élément de la procédure ne permet d'établir que l'intéressé ou la préfecture était en possession du passeport original ' l'intéressé ne le soutient d'ailleurs pas ', d'autant que le susnommé a indiqué dans son audition du 16 juillet 2024 avoir perdu son passeport et que la préfecture souligne dans l'arrêté de placement en rétention que l'intéressé n' a pas remis son passeport original. En sollicitant ainsi les autorités consulaires géorgiennes, puis en sollicitant, après obtention d'un laissez-passer, dès le 29 juillet 2024 la réservation d'un vol à destination de la Géorgie, la préfecture a bien accompli toutes diligences utiles.

Le moyen sera donc rejeté.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

4. Sur le fond

L'intéressé a été pleinement informé, lors de la notification de son placement en rétention, des droits lui étant reconnus par l'article L. 744-4 du CESEDA et placé en état de les faire valoir, ainsi que cela ressort des mentions figurant au registre prévu à cet effet.

L'article L 741-3 du CESEDA dispose qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, l'administration devant exercer toute diligence à cet effet.

Les services de la Préfecture d'Ille-et-Vilaine justifient d'ores et déjà de démarches auprès du Consulat de Géorgie dont M. [N] [V] se déclare ressortissant, celui-ci étant dépourvu de tout document d'identité, ainsi que de démarches aux fins de réservation d'un vol. Il convient donc de permettre à l'autorité administrative d'effectuer toutes démarches utiles en vue de la mise en oeuvre de la mesure d'éloignement.

Par ailleurs, l'intéressé ne présente pas de garanties suffisantes de représentation et ne dispose pas d'un passeport. Il ne remplit donc pas les conditions préalables à une assignation à résidence.

Après s'être soustrait à une mesure d'assignation à résidence, il réfute toute intention de regagner son pays d'origine, nonobstant la décision judiciaire d'interdiction du territoire français et les mesures administratives subséquentes dont il a fait l'objet. Il ne justifie ni d'un travail ni d'un domicile stable sur le territoire français, pas plus que d'attaches familiales. Il a démontré qu'il ne respectait pas les mesures d'assignation à résidence.

M. [V] est ainsi manifestement dépourvu de toutes garanties sérieuses de représentation.

Il convient en conséquence de faire droit à la requête du préfet d'Ille-et-Vilaine.

L'ordonnance entreprise sera dès lors confirmée.

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel recevable,

Confirme l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 30 juillet 2024,

Rappelle à M. [V] qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,

Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.

Fait à Rennes, le 01 août 2024 à 17 heures 15

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LA PRESIDENTE,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à M. [N] [V], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00350
Date de la décision : 01/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-01;24.00350 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award