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31/07/2024 | FRANCE | N°24/00347

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre etrangers/hsc, 31 juillet 2024, 24/00347


COUR D'APPEL DE RENNES



N° 24/168

N°RG 24/00347 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VBYE



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT





O R D O N N A N C E



articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile



Nous, Hervé BALLEREAU, Président de chambre à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assi

sté de Françoise BERNARD, greffière,





Statuant sur l'appel formé le 30 Juillet 2024 à 13h52 par :



M. [M] [V]

né le 05 Août 2003 ...

COUR D'APPEL DE RENNES

N° 24/168

N°RG 24/00347 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VBYE

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Nous, Hervé BALLEREAU, Président de chambre à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Françoise BERNARD, greffière,

Statuant sur l'appel formé le 30 Juillet 2024 à 13h52 par :

M. [M] [V]

né le 05 Août 2003 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

ayant pour avocat Me Myrième OUESLATI, avocat au barreau de RENNES

d'une ordonnance rendue le 29 Juillet 2024 à 17h46 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a ordonné la prolongation du maintien de M. [M] [V] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de quinze jours à compter du 28 juillet 2024 à 15h10;

En l'absence de représentant du préfet de Préfecture de Loire Atlantique, dûment convoqué, qui a transmis son mémoire le 30 juillet 2024 à 15h54

En l'absence du procureur général régulièrement avisé, et qui a transmis son avis le 30 juillet 2024 à 15h30

En présence de [M] [V], assisté de Me Myrième OUESLATI, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 31 Juillet 2024 à 11 H 00 l'appelant assisté de M. [H] [P], interprète en langue arabe, et son avocat en leurs observations,

Avons mis l'affaire en délibéré et le 31 Juillet 2024 à 16h00, avons statué comme suit :

M. [V], ressortissant de nationalité algérienne, a été placé en détention provisoire au Centre pénitentiaire de [Localité 2] le 7 février 2024 et condamné le 8 février 2024 par le tribunal correctionnel de Saint Nazaire à la peine de six mois d'emprisonnement pour des faits de non-respect de l'obligation de présentation périodique aux services de police ou de gendarmerie par un étranger assigné à résidence et violation de domicile, maintien dans le domicile d'autrui à la suite d'une introduction par manoeuvres, menace, voie de fait ou contrainte, en récidive.

Précédemment, il a fait l'objet d'une interdiction du territoire français prononcée pour une durée de 5 ans par le tribunal judiciaire de Fontainebleau le 2 janvier 2023.

Un arrêté préfectoral a été pris le 10 novembre 2023 aux fins de renvoi vers l'Algérie.

Il était placé en garde à vue par les policiers de [Localité 4] le 28 mai 2024 dans le cadre d'une enquête concernant des faits de viol. Cette affaire a été classée sans suite.

M. [V] a été placé en rétention administrative le 29 mai 2024 en vue de l'exécution de l'ITF prononcée pour une durée de 5 ans par le tribunal judiciaire de Fontainebleau le 2 janvier 2023.

Par ordonnance rendue le 1er juin 2024, confirmée par décision du conseiller délégué du Premier président de la cour d'appel de Rennes le 4 juin 2024, la prolongation de la rétention de M. [V] pour une durée de 28 jours a été autorisée.

Par ordonnance du 28 juin 2024, confirmée par décision du conseiller délégué du Premier président de la cour d'appel de Rennes le 2 juillet 2024, la prolongation de la rétention de M. [V] pour une durée de 30 jours a été autorisée.

Suivant requête en date du 27 juillet 2024, le préfet de Loire-Atlantique a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes aux fins de troisième prolongation de la mesure.

Par ordonnance rendue le 29 juillet 2024, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la rétention administrative de M. [V] pour une durée de 15 jours.

M. [V] a interjeté appel de cette décision le 30 juillet 2024 à 13h52.

Il fait valoir en substance que:

- Il n'est pas justifié de perspectives d'éloignement au mépris de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 dite 'Directive retour' ; qu'il n'a pas été reconnu par les autorités algériennes, pays dont il pourtant toujours déclaré être rassortissant ; que l'Algérie ne répond pas aux sollicitations des autorités préfectorales ; qu'il n'est pas plus reconnu comme ressortissant tunisien et que les autorités marocaines, également interrogées sans avoir toutefois été relancées, n'ont pas répondu ;

- Il n'est pas justifié des diligences nécessaires, de telle sorte que sa rétention est irrégulière.

A l'audience, M. [V], assisté de son avocat et en présence d'un interprète en langue arabe, a fait soutenir oralement les termes de sa requête en appel.

Selon avis en date du 30 juillet 2024 à 15h30, le Procureur général a indiqué qu'il sollicitait la confirmation de l'ordonnance entreprise.

Selon mémoire notifié au greffe le 30 juillet 2024 à 15h54, le Préfet de Loire-Atlantique a sollicité la confirmation de l'ordonnance querellée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel formé dans les forme et délai prévus par la loi est recevable.

1- Sur le moyen tiré de l'absence de perspective d'éloignement:

L'article L742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose:

'A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours

(...)'.

En vertu de l'article L741-3 du même code, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

Par ailleurs, aux termes de l'article 15.1 de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 dite 'Directive retour', à moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement, en particulier lorsque:

a) il existe un risque de fuite, ou

b) le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement.

Toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise (...).

L'article 15.4 de la même directive dispose: 'Lorsqu'il apparaît qu'il n'existe plus de perspective raisonnable d'éloignement pour des considérations d'ordre juridique ou autres ou que les conditions énoncées au paragraphe 1 ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté'.

Il est constant que si la personne retenue ne présente ni passeport ni garanties suffisantes de représentation, et ne remplit donc pas les conditions préalables à une assignation à résidence, il importe de permettre à l'autorité administrative d'effectuer toutes démarches utiles auprès des autorités consulaires compétentes de façon à mettre en 'uvre la décision de reconduite à la frontière qui a été prise.

A cet égard, l'administration doit être en mesure de justifier de l'accomplissement de diligences aux fins d'éloignement dès le placement en rétention.

En l'espèce, le consulat d'Algérie, pays dont M. [V] soutient être ressortissant, préalablement sollicité aux fins de délivrance d'un laisser-passer consulaire, a informé la préfecture de Loire-Atlantique par courrier du 31 janvier 2024 que l'intéressé ne serait pas de nationalité algérienne.

Egalement interrogé le 18 décembre 2023, le consulat de Tunisie a informé le préfet par lettre reçue en préfecture le 29 janvier 2024 que la nationalité de M. [V] 'n'a pas été établie' sur la base de ses empreintes digitales.

Il est justifié que la préfecture a interrogé les 29 et 30 mai 2024 les consulats d'Algérie et du Maroc, précisant au consul d'Algérie afin de poursuivre les utilement recherches entreprises que M. [V] répondrait à une autre identité, sous le nom de M. [M] [T], né le 5 août 2004 à [Localité 3], tandis que sous l'identité de [M] [V], sa date de naissance déclarée est celle du 5 août 2003.

Un courriel du 18 juillet 2024 permet de vérifier que les autorités algériennes ont été récemment relancées sur la demande de réexamen du dossier de M. [V] alias [T], tandis que les démarches entreprises auprès du consulat du Maroc comprenant la transmission de quatre photographies d'identité et d'un relevé d'empreintes digitales sont en cours.

Il doit être relevé que l'identification de l'intéressé par les pays interrogés et singulièrement par la République algérienne dont il s'est toujours déclaré ressortissant, est rendue d'autant plus délicate qu'il apparaît connu sous deux identités distinctes.

L'administration ne peut se voir utilement reprocher le temps consacré par les autorités étrangères et souveraines à l'identification d'un ressortissant et à la délivrance d'un document de voyage indispensable à l'exécution de la mesure d'éloignement.

Au regard de ces éléments de fait, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que la perspective d'éloignement de M. [V] n'était pas déraisonnable dans le contexte de la troisième prolongation de rétention dont s'agit.

Le moyen soulevé est ainsi mal fondé et doit être rejeté.

2- Sur le moyen tiré d'un défaut de diligence:

L'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet'.

Il est constant que l'obligation faite à l'administration de limiter le temps de rétention par des diligences appropriées ne s'impose qu'à partir du moment où cette mesure a pris effet.

En l'espèce, ainsi que l'a justement relevé le premier juge et ainsi que cela résulte des développements qui précèdent, il est patent que l'administration a effectué les diligences qui lui incombaient dès le placement de M. [V] en rétention administrative et même avant cette date, puisqu'il résulte des termes du courrier du consulat d'Algérie en date du 31 janvier 2024, que cette autorité avait été interrogée dès le 29 novembre 2023.

Au regard de ces éléments de fait, il doit être considéré que le préfet a fait diligence pour obtenir les documents nécessaires au départ de M. [V] et fait en sorte que la rétention soit limitée au temps strictement nécessaire à l'organisation du départ de l'intéressé.

Le moyen doit être rejeté.

Enfin, le premier juge a utilement relevé que M. [V] était dépourvu de document de voyage.

L'intéressé, condamné à deux reprises le 9 novembre 2022 et le 2 janvier 2023, notamment pour des faits de violence et qui après s'être soustrait à une mesure d'assignation à résidence, réfute toute intention de regagner son pays d'origine, nonobstant la décision judiciaire d'interdiction du territoire français pour 5 ans et les mesures administratives subséquentes dont il a fait l'objet, ne justifie ni d'un travail ni d'un domicile stable sur le territoire français, pas plus que d'attaches familiales.

M. [V] est ainsi manifestement dépourvu de toutes garanties sérieuses de représentation.

La prolongation pour quinze jours de la mesure de rétention administrative est en conséquence justifiée et l'ordonnance entreprise sera dès lors confirmée.

La demande de l'avocat de M. [V] fondée sur l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

Déclare l'appel recevable ;

Confirme l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes en date du 29 juillet 2024 ;

Rappelle à M. [V] qu'il a l'obligation de quitter le territoire français ;

Rejette la demande formée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.

Fait à Rennes, le 31 juillet 2024, à 16 heures.

La greffière Le président de chambre délégué

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [M] [V], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre etrangers/hsc
Numéro d'arrêt : 24/00347
Date de la décision : 31/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-31;24.00347 ?
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