DT/SH
Numéro 18/00329
COUR D'APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 25/01/2018
Dossier : 16/00028
Nature affaire :
Demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ou d'une personne substituée dans la direction, ou en réparation complémentaire pour faute inexcusable
Affaire :
[R] [M]
C/
Société ESSOR, CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 Janvier 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
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APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 06 Novembre 2017, devant :
Madame THEATE, magistrat chargé du rapport,
assistée de Madame HAUGUEL, greffière.
Madame THEATE, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame THEATE, Présidente
Madame COQUERELLE, Conseiller
Madame NICOLAS, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANT :
Monsieur [R] [M]
[Adresse 1]
[Adresse 2]
représenté par Maître FOSSE, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEES :
Société ESSOR
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Adresse 4]
[Adresse 5]
représentée par Maître PICOT de la SELARL PICOT VIELLE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de BAYONNE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE
[Adresse 6]
[Adresse 7]
Ni présente, ni représentée
sur appel de la décision
en date du 20 NOVEMBRE 2015
rendue par le TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SÉCURITÉ SOCIALE DE BAYONNE
RG numéro : 2013/0227
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Monsieur [R] [M] a été engagé 2 juin 1998 par la SA ESSOR en qualité de technicien SAV III C, promu au statut de cadre en août 2000.
Le 28 mai 2009, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le 13 novembre 2007, Monsieur [R] [M] avait déclaré une maladie professionnelle à l'appui d'un certificat médical du docteur [Z] mentionnant « Harcèlement professionnel. Dépression sévère ».
Le CRRMP de Bordeaux, saisi par la caisse primaire d'assurance maladie, a estimé que l'affection dont souffrait Monsieur [R] [M] était en lien direct et essentiel avec son activité professionnelle.
La caisse primaire d'assurance maladie a, en conséquence, notifié au salarié et à l'employeur sa décision de prendre en charge la pathologie au titre d'une maladie professionnelle.
La commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance-maladie a rejeté le recours de l'employeur et confirmé la décision de la caisse par décision du 10 février 2009, notifiée le 16 février 2009.
Contestant cette décision, la SA ESSOR a, par courrier recommandé avec demande d'avis de réception en date du 10 avril 2009, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne.
Par jugement en date du 29 avril 2011, cette juridiction a désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Toulouse pour donner son avis.
Le CRRMP de Toulouse a conclu que la pathologie présente effectivement un lien direct et essentiel avec l'activité professionnelle incriminée et qu'elle peut être reconnue comme maladie professionnelle
Par jugement en date du 29 juin 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne a débouté la SA ESSOR de sa demande en contestation du caractère professionnel de la maladie affectant Monsieur [R] [M] ainsi que de sa demande aux fins d'inopposabilité de la prise en charge
Après un procès-verbal de non-conciliation en date du 14 décembre 2012, Monsieur [R] [M] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne afin de voir statuer sur la faute inexcusable de son employeur avec toutes les conséquences de droit.
Par jugement du 20 novembre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bayonne a rejeté la demande de Monsieur [R] [M] tendant à la reconnaissance d'une faute inexcusable de l'employeur, l'a débouté de l'ensemble de ses prétentions et a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par lettre recommandée du 2 janvier 2016, le conseil de Monsieur [R] [M] a fait appel de ce jugement au nom et pour le compte de son client à qui il a été notifié le 8 décembre 2015.
Par conclusions enregistrées au greffe le 24 juillet 2017, reprises oralement à l'audience du 6 novembre et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [R] [M] demande à la Cour de :
- retenir la faute inexcusable à l'encontre de la SA ESSOR dans le cadre de la maladie
professionnelle dont il est victime ;
- fixer la majoration de la rente au montant maximum prévu par l'article L452-2 du code
de la sécurité sociale ;
- ordonner une expertise pour évaluer le préjudice causé par les souffrances physiques
et morales, le préjudice esthétique, d'agrément, la date de consolidation, le taux d'incapacité temporaire totale, le taux d'incapacité partielle permanente, le préjudice professionnel ;
- appeler la caisse primaire d'assurance maladie aux fins de déclaration de jugement commun
- condamner la SA ESSOR aux dépens.
Il expose avoir subi un harcèlement moral et une discrimination au sein de l'entreprise à compter de 2005 caractérisés par des insultes le 29 janvier 2005 de la part de son supérieur hiérarchique, une mise au ban des salariés du fait de sa situation de «privilégié» telle que dénoncée par sa supérieure hiérarchique et la direction de l'entreprise, ce qui a fait naître chez lui un sentiment d'injustice.
Alors qu'il sollicitait l'employeur sur le contrôle de son activité et le décompte de ses journées de travail, celui-ci ne répondait pas et ce n'est qu'après saisine du conseil des prud'hommes que la société reconnaissait ses torts et lui réglait plus de 8.000 €, après lui avoir cependant imposé une bataille de six années pour faire valoir ses droits .
Il soutient que le premier juge a commis une erreur en considérant qu'il avait souffert de problèmes familiaux et financiers alors que c'est la dépression qu'il vivait au sein de l'entreprise qui a eu un impact sur sa vie personnelle.
D'ailleurs, son dossier médical atteste de son état de stress et de dépression sévère du fait du comportement de l'employeur.
C'est dans ces conditions qu'il été déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise le 14 avril 2009.
Il ajoute qu'à aucun moment l'employeur n'a accordé de crédit à sa situation laissant s'instaurer un climat de stress, de harcèlement moral et discrimination allant jusqu'à contester la déclaration de maladie professionnelle ; la faute inexcusable de l'employeur est en conséquence caractérisée.
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Par conclusions enregistrées au greffe le 11 octobre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de BAYONNE demande à se voir donner acte qu'elle s'en remet à justice sur la faute inexcusable de l'employeur.
Dans l'affirmative, elle demande à la Cour de :
- fixer le quantum de la majoration de la rente qui prendra effet à la date d'attribution de
la rente ;
- fixer le montant total du préjudice de la victime ;
- condamner la SA ESSOR à rembourser à la caisse primaire les sommes dont elle aura
l'obligation de faire l'avance au titre des articles L452-2 et 452-3 du code de la sécurité sociale, avec intérêts au taux légal à compter du jour du règlement, et ce afin d'éviter une nouvelle procédure en vue d'obtenir un titre exécutoire.
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La SA ESSOR a déposé des conclusions le 5 décembre 2017 au greffe de la Cour, soit plusieurs jours après la clôture des débats.
MOTIFS
- Sur les conclusions tardives :
L'intimée a déposé des écritures postérieurement à l'audience de plaidoirie, sans les avoir préalablement communiquées à la partie appelante. Conformément aux dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile, les conclusions déposées par la société ESSOR le 5 décembre 2017 sont écartées des débats.
- Sur la prescription :
La société ESSOR ne soutient pas, en appel, la prescription de l'action engagée par Monsieur [R] [M]. Celui-ci a cependant précisé que son appel était général, et portait sur l'intégralité de la décision bien que le tribunal ait rejeté la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable. La cour est, en conséquence, saisie de ce chef.
En matière de maladie professionnelle, le point de départ de l'action est la date à laquelle la victime est informée par certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle, soit la cessation du travail en raison de la maladie contractée, soit de la cessation de paiements des indemnités journalières, soit encore la reconnaissance du caractère professionnel de la pathologie.
La prescription biennale de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable est interrompue par l'exercice de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ou d'un accident.
En l'espèce, le comité régional de BORDEAUX du 9 octobre 2008 a reconnu l'existence d'un lien direct et essentiel entre la pathologie dont souffrait Monsieur [R] [M] et son activité professionnelle.
Par lettre du 24 octobre 2008, la caisse a notifié à Monsieur [R] [M] la reconnaissance de la maladie déclarée le 13 novembre 2007 au titre des risques professionnels.
Le 17 décembre 2008, l'employeur a exercé un recours à l'encontre de cette décision devant la commission de recours amiable puis saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale le 10 avril 2009.
Par jugement du 29 avril 2011, le tribunal des affaires de sécurité sociale a désigné un nouveau comité régional, celui de TOULOUSE qui a confirmé que la maladie de Monsieur [R] [M] devait être reconnue comme maladie professionnelle.
Par jugement du 29 juin 2012, le tribunal des affaires de sécurité sociale a débouté la SA ESSOR de son recours tendant d'une part à dire que la maladie n'avait pas un caractère professionnel, d'autre part à voir déclarer la décision inopposable à l'employeur.
Il importe de rappeler que Monsieur [R] [M] avait été appelé en la cause dès lors qu'il était contesté, dans les délais de recours, le principe même de la prise en charge de sa pathologie au titre du risque professionnel.
Par courrier en date du 15 octobre 2012, Monsieur [R] [M] a déposé une requête aux fins de tentative de conciliation suite à la maladie professionnelle dont il avait été victime précisant qu'il avait d'ores et déjà engagé une procédure de
reconnaissance de faute inexcusable le 6 juillet 2009, interrompue cependant lors de la tentative de conciliation du 17 novembre 2009, en raison de la contestation par l'employeur du caractère professionnel de la maladie.
Il en découle que la prescription biennale de l'action en reconnaissance de faute inexcusable a été interrompue par l'exercice de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit que l'action de Monsieur [R] [M] était recevable car non prescrite.
- Sur la faute inexcusable :
Monsieur [R] [M] soutient qu'il a été victime au sein de l'entreprise de discriminations et harcèlements auxquels l'employeur n'a jamais accordé de crédit, n'entreprenant aucune action pour le protéger, allant même jusqu'à contester la reconnaissance de la pathologie dont il souffrait au titre de la maladie professionnelle.
La SA ESSOR soutient pour sa part avoir tout mis en oeuvre pour atténuer le sentiment du salarié d'être victime de harcèlement et discrimination, privilégiant le dialogue aux échanges de correspondance.
Elle précise que le salarié ne s'est plaint que d'un seul incident avec une collègue de travail reconnaissant par la suite que l'employeur avait réussi à rétablir un climat satisfaisant entre eux.
Sur le rappel de salaire qui lui est également reproché au titre de la faute inexcusable, l'employeur affirme ne pas être responsable de la durée de la procédure prud'homale, de la négligence de Monsieur [R] [M] et de la régularisation de la situation lorsque ce dernier a enfin signé l'avenant.
En application de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale, l'employeur est tenu envers le salarié d'une obligation de sécurité de résultat. Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La faute commise par l'employeur doit être une cause nécessaire à l'accident. La preuve de l'existence d'un danger et de l'absence de mesures préventives incombe à celui qui allègue la faute inexcusable
Il appartient dès lors à Monsieur [M] qui invoque la faute inexcusable de démontrer, d'une part, que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger et, d'autre part, qu'il n'avait pris aucune mesure pour l'en préserver.
Monsieur [R] [M], salarié depuis 1998 en qualité de technicien, est devenu cadre en 2000.
Le point de départ des difficultés relationnelles avec l'employeur réside dans la dénonciation le 29 janvier 2005 d'une altercation survenue, la veille, ainsi qu'en témoigne Monsieur [S], collègue de travail, devant l'ensemble de l'équipe technique, entre Monsieur [M] et une salariée de l'entreprise au cours de laquelle cette dernière, a traité Monsieur [R] [M] de «voleur d'heures », « minable », « tu m'écoeures » outre diverses insultes.
Malgré 9 lettres successives adressées à l'employeur entre janvier et août 2005 lui reprochant son absence de réaction à des propos aussi violents et injustes à ses yeux puisqu'ils mettaient en cause son investissement professionnel et les nombreuses heures consacrées à son travail, l'employeur n'a procédé à aucune enquête, aucune convocation, aucune réprimande , mettant au surplus en doute les paroles de Monsieur [R] [M] (18 avril : «de quelles insultes s'agit-il '», 17 mai 2005 : «au titre des risques professionnels», 7 juin : «il ne sert à rien de persister à s'interroger sur des faits anciens », « vous créez des problèmes où il n'y en a pas »).
De même, alors que durant toute l'année 2005 l'employeur avait refusé de répondre aux demandes réitérées de son salarié, s'étant déclaré las de ces échanges de correspondances en dépit d'un nouvel incident survenu en avril 2005 avec Madame [R], qu'il écrivait le 27 janvier 2007 au salarié, faisant référence à un courrier du 8 octobre 2006 :
'Nous n'avions pas jugé utile en son temps de relever les propos que vous avez tenu, étant donné qu'ils étaient erronés pour ne pas dire mensongers. Notamment, le fait que nous aurions admis «l'existence d'excès d'autorité et de différentes malveillances à votre égard ».
L'employeur, par sa carence, a non seulement laissé Monsieur [R] [M] dans le désarroi, face aux insultes et propos dévalorisants tenus devant l'ensemble de l'équipe technique mais de plus, a contribué à l'accroître en mettant en doute cespropos.
De plus, ainsi que le rapporte Monsieur [S], lors d'une réunion d'avril 2005, l'employeur s'est exprimé sur le salaire de Monsieur [R] [M] en déclarant qu'il faisait naître des sentiments d'injustice et d'inégalité parmi les autres techniciens, le témoin précisant ne pas comprendre l'acharnement de l'employeur à faire passer Monsieur [R] [M] pour un privilégié.
Les nombreux courriers échangés entre les parties de 2005 à 2007 attestent que non seulement ce reproche a blessé Monsieur [R] [M], mais qu'il l'a injustement isolé par rapport à ses collègues et de certains responsables fonctionnels alors même que le forfait jour lui avait été proposé par l'employeur en 2000 afin de lui permettre de remplir sa mission.
Monsieur [W], responsable technique de l'entreprise, témoigne également que de nombreuses heures réalisées par Monsieur [M] n'étaient pas comptabilisées, considérées pour certains en forfait heures et pour d'autres, en forfait jours, ce qui a rapidement créé des tensions reprises dans l'ensemble des courriers de 2005 à 2007 et auxquelles l'employeur n'a pas répondu alors qu'il avait tous moyens pour les apaiser, maintenant ainsi le salarié dans un statut équivoque, émettant des doutes ou refusant même de procéder aux vérifications d'heures effectuées par Monsieur [R] [M] qui ne seront finalement payées ainsi que la garantie d'ancienneté que fin 2008 et début 2009.
Tous les documents médicaux produits qui mentionnent de 2005 à 2009 des dépressions majeures et une situation de stress professionnel, attestent de l'incidence de ce comportement sur la santé du salarié.
C'est ainsi que Monsieur [R] [M] a été placé en arrêt de travail pour dépression du 22 avril 2005 au 13 septembre 2005, puis à nouveau en mars 2007 et le 13 novembre 2007 et que le docteur [Z] a rédigé un certificat médical mentionnant une dépression sévère engendrée par des problèmes professionnels avec harcèlement psychologique depuis quatre ans.
Il est ainsi établi que Monsieur [R] [M] a été confronté pendant plusieurs années à des stress professionnels majeurs, qu'il en a informé son employeur à plusieurs reprises lequel, compte- tenu des messages envoyés par le salarié et des arrêts maladie de longue durée et fréquents, ne pouvait qu'avoir conscience du danger mais n'a pris aucune mesure, pourtant de sa compétence, pour l'en préserver.
Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement et de dire que la SA ESSOR a commis une faute inexcusable à l'origine de la maladie professionnelle affectant Monsieur [M].
- Sur les conséquences de la faute inexcusable :
- Sur l'indemnisation des préjudices subis par la victime indemnisables par la caisse primaire d'assurance maladie :
Les préjudices personnels allégués par la victime devront au préalable faire l'objet d'une appréciation médicale dans les formes de l'article L. 452-4 du code de la sécurité sociale.
Il convient avant dire droit d'ordonner une expertise.
- Sur l'action récursoire de la CPAM :
Lorsque l'accident du travail ou la maladie professionnelle dont a été victime l'assuré social ont été causés par la faute inexcusable de son employeur ,l'article L452-2 du code de la sécurité sociale dispose que l'assuré social a droit à une majoration de la rente qu'il perçoit ou du capital. Le montant de la majoration varie en fonction du taux d'invalidité dont reste atteint l'assuré social. Mais, en vertu de l'article L452-3-1 de ce même code, applicable au litige, lorsque la faute inexcusable est reconnue, l'employeur doit rembourser à la caisse de sécurité sociale la totalité des sommes dues à la victime en vertu de la reconnaissance de la faute inexcusable, y compris la majoration de la rente.
La société ESSOR devra donc s'acquitter de l'intégralité des sommes allouées à la victime avancées par la caisse et du capital représentatif de la majoration de la rente qui sera effectivement versée au profit de le demandeur.
En l'absence de faute du salarié, il y a lieu de fixer la majoration de la rente au maximum.
PAR CES MOTIFS
La COUR statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, et en dernier ressort :
REJETTE des débats les écritures déposées par la société ESSOR le 5 décembre 2017 ;
CONFIRME le jugement en ce qu'il a dit que l'action engagée par Monsieur [R] [M] n'est pas prescrite ;
L'INFIRME pour le surplus ;
STATUANT À NOUVEAU :
DIT que la maladie professionnelle dont a été victime Monsieur [R] [M] est dûe à la faute inexcusable imputable à la société ESSOR ;
DIT que la rente allouée à Monsieur [R] [M] est fixée au maximum prévu par l'article L452-2 du code de la sécurité sociale ;
DIT que la société ESSOR est tenue des conséquences financières de cette faute inexcusable ;
AVANT DIRE DROIT SUR LES PRÉJUDICES SUBIS,
ORDONNE une expertise médicale et désigne le Docteur [S] [L] épouse [I], [Adresse 8] pour y procéder avec pour mission de :
* convoquer les parties ;
* prendre connaissance de l'entier dossier médical de Monsieur [R] [M] ;
* décrire l'affection causée par la maladie professionnelle déclarée le 13 novembre 2007 ;
* préciser la durée des arrêts de travail au vu des justificatifs produits et dire s'ils sont
liés au fait dommageable ;
* déterminer le déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons
médicales en relation certaine, directe et exclusive avec la maladie professionnelle, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou ses activités habituelles ;
* si l'incapacité fonctionnelle n'a été que partielle, en préciser le taux et la durée ;
* décrire et quantifier le prix de la douleur qui comprend les douleurs morales, le
préjudice esthétique en les quantifiant sur une échelle de 1 à 7 ;
* décrire et quantifier le préjudice d'agrément ;
* décrire et quantifier le préjudice sexuel éventuel ;
* dire si la maladie a provoqué une perte ou diminution des possibilités de promotion
professionnelle de la victime ;
DIT que l'expert accomplira personnellement sa mission, il pourra recueillir les déclarations de toute personne informée et prendra l'avis de spécialistes de son choix dans une spécialité distincte de la sienne ;
RAPPELLE que l'expert devra convoquer le médecin-conseil de la caisse primaire d'assurance-maladie de BAYONNE, l'employeur, la société ESSOR ;
DIT que l'expert déposera son rapport daté et signé au greffe de la Cour d'appel de PAU dans les trois mois de sa saisine ;
DIT que le coût de l'expertise sera avancé par la caisse primaire d'assurance maladie en application de l'article L. 144-5 du code de la sécurité sociale et qu'elle en récupérera le montant auprès de l'employeur ;
CONDAMNE la société ESSOR à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de Bayonne la totalité des sommes que celle-ci versera à Monsieur [R] [M] ;
RENVOIE l'affaire et les parties à l'audience de la Chambre Sociale de la Cour d'Appel de PAU du Jeudi 18 octobre 2018 à 14 heures 10 pour la reprise des débats sur la liquidation des préjudices.
Arrêt signé par Madame THEATE, Présidente, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière,La Présidente,