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01/07/2015 | FRANCE | N°12/04048

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 01 juillet 2015, 12/04048


JN/AM



Numéro 15/2759





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 01/07/2015





Dossier : 12/04048





Nature affaire :



Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction







Affaire :



[U] [A] épouse [Y]

[V] [Y]



C/



[H] [M]

MUTUELLE DES ARCHI

TECTES FRANCAIS

SMABTP

[P] [R], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL [B] [X] [T], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL [B]









Grosse délivrée le :



à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU P...

JN/AM

Numéro 15/2759

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 01/07/2015

Dossier : 12/04048

Nature affaire :

Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction

Affaire :

[U] [A] épouse [Y]

[V] [Y]

C/

[H] [M]

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

SMABTP

[P] [R], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL [B] [X] [T], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL [B]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 01 juillet 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 05 mai 2015, devant :

Madame PONS, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame NICOLAS, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

assistés de Madame VICENTE, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTS :

Madame [U] [A] épouse [Y]

née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 7] (40)

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Monsieur [V] [Y]

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 8] (15)

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentés et assistés de Maître Lydia LECLAIR, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMES :

Madame [H] [M]

[Adresse 3]

[Localité 1]

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentés par Maître Olivia MARIOL, avocat au barreau de PAU

assistés de Maître David CZAMANSKI, avocat au barreau de BORDEAUX

SMABTP

[Adresse 1]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représentée par Maître Jean-Yves RODON, avocat au barreau de PAU

assistée de la SCP HEUTY - LORREYTE - LONNE - CANLORBE, avocats au barreau de DAX

Maître [P] [R], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL [B] [Adresse 5]

[Localité 2]

assigné

Maître [X] [T], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL [B]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

assigné mais ayant fait parvenir un courrier

sur appel de la décision

en date du 24 OCTOBRE 2012

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DAX

*

* *

*

FAITS - PROCÉDURE

Par contrat du 16 juin 2006, les époux [Y] [V] et [U] née [A], ont confié à Mme [M], architecte, une mission de maîtrise d''uvre complète, portant sur des travaux d'agrandissement de leur maison d'habitation située à [Localité 7].

La société [B], assurée auprès de la compagnie SMABTP, s'est vu confier le lot maçonnerie carrelage.

Dans un document du 14 février 2008, l'architecte et le maître de l'ouvrage ont relevé des malfaçons sur les travaux de carrelage-faïence, auxquels la société [B] n'a pas remédié, malgré la demande de l'architecte.

La société [B] a fait l'objet d'une liquidation judiciaire prononcée le 6 mai 2009 par le tribunal de commerce de Dax.

Les époux [Y], ont saisi le juge des référés, d'une demande d'expertise, laquelle a été ordonnée le 30 juin 2009, au contradictoire de l'architecte et de son assureur, la Mutuelle des architectes français (MAF), puis étendue, le 4 mai 2010, à la compagnie SMABTP.

Le rapport de l'expert [C] est en date du 30 septembre 2010.

Par actes d'huissier des 29 avril et 2 mai 2011, les époux [Y] ont assigné l'architecte, son assureur (MAF), Me [T], ès qualités de liquidateur de la société [B], et la SMABTP, devant le tribunal de grande instance de Dax, en responsabilité et réparation des malfaçons et non-conformités, et invoquant la défaillance de l'architecte dans l'exécution de sa mission.

Par un jugement du 24 octobre 2012, le tribunal de grande instance de Dax a :

- déclaré irrecevables les demandes des époux [Y] dirigées contre l'architecte (Mme [M]) et sa compagnie d'assurances (la MAF), pour défaut de respect de la clause contractuelle de demande d'avis préalable,

- avant dire droit sur les demandes dirigées contre Me [T], ès qualités de liquidateur de la société [B], ordonné la réouverture des débats et invité les époux [Y] à justifier de la déclaration de leur créance, et le cas échéant, à produire une décision du juge-commissaire statuant sur sa compétence,

- renvoyé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 16 janvier 2013,

- débouté les époux [Y] de leurs demandes dirigées contre la SMABTP,

- condamné les époux [Y] aux dépens exposés par Mme [M], la compagnie MAF et la compagnie SMABTP,

- débouté Mme [M], la compagnie MAF et la compagnie SMABTP de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- réservé les dépens afférents à la mise en cause de Me [T], ès qualités de liquidateur de la société [B].

Par un second jugement du 29 mai 2003, le tribunal de grande instance de Dax a :

- déclaré la société [B] responsable des désordres affectant le carrelage de la maison des époux [Y],

- fixé au passif de la société [B] la somme de 7 300 €, à titre échu et chirographaire, au titre des travaux de reprise des désordres,

- déclaré les époux [Y] irrecevables en leurs demandes indemnitaires supplémentaires à l'égard de la société [B],

- condamné Me [T], ès qualités, aux dépens et à payer aux époux [Y], une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le premier jugement du 24 octobre 2012, a été frappé d'appel, le 29 novembre 2012, par Mme [Y], puis le 5 février 2013, par M. [Y], lesquels ont délivré, le 27 décembre 2013, assignation en intervention forcée contre Me [R], en qualité de mandataire ad hoc de la SARL [B].

Ces procédures ont été respectivement enrôlées sous les numéros RG n° 12/04048, 13/00467 et 14/00255.

Le second jugement du 29 mai 2013, a fait l'objet d'une déclaration d'appel de M. et Mme [Y] en date du 4 juillet 2013, enrôlée sous le RG n° 13/02528.

Par ordonnances du juge de la mise en état des 13 juin 2013, 21 février 2014 et 27 juin 2014, l'ensemble des procédures a été joint à la procédure RG n° 12/04048.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 novembre 2014.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par leurs dernières conclusions du 20 juin 2014, les époux [Y] sollicitent :

- la réformation du jugement du 24 octobre 2012,

- la condamnation in solidum, de la SMABTP, en qualité d'assureur de la société [B], de Mme [M] et de la MAF, à leur payer les sommes suivantes :

- 12 033,30 € en réparation du préjudice matériel, outre intérêts à compter du 29 avril 2011,

- 6 000 € en réparation du préjudice de jouissance et moral,

- 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les entiers dépens.

Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir que :

- la réception de l'ouvrage est intervenue le 28 mars 2008, avec réserves, en vertu d'un document du 14 février 2008, et nonobstant son intitulé de « procès-verbal d'opérations préalables à la réception des travaux »,

- les désordres dont ils se plaignent, entrent dans le cadre de la garantie de parfait achèvement, et bénéficient d'une action directe contre l'assureur de l'entreprise en liquidation judiciaire, en application de l'article L. 124-3 du code des assurances,

- cette garantie couvre indifféremment tous les désordres, le premier juge ayant à tort ajouté au texte, en estimant qu'elle était réservée aux désordres de nature décennale ou qu'elle devait porter sur un élément d'équipement,

- en cas de réserves à la réception, et tant que ces réserves ne sont pas levées, la garantie de parfait achèvement coexiste avec la responsabilité contractuelle de droit commun de l'entrepreneur, laquelle peut également être recherchée,

- les désordres en carrelage, résultent de la non-conformité aux stipulations du marché ou à une mauvaise exécution des prestations, et la SMABTP en doit garantie, dès lors que la réception a été prononcée,

- la déclaration de créances porte sur la somme de 10 000 €, et c'est à tort que le premier juge a refusé de fixer leur créance à un montant supérieur à la créance déclarée, alors même que la créance née du trouble de jouissance et du préjudice moral, sont postérieures à l'ouverture de la procédure collective et ne sont pas soumises à la formalité de déclaration,

- en tout état de cause, il s'agissait d'une déclaration de créances à titre provisionnel, nécessitant le dépôt du rapport d'expertise, pour pouvoir être finalisée,

- la responsabilité de l'architecte est également engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la saisine préalable de l'ordre des architectes n'étant pas une condition de recevabilité d'une action en responsabilité, nonobstant l'article 9 du contrat de maîtrise d''uvre,

- l'architecte a manqué à son obligation de direction et de surveillance du chantier, ainsi qu'à son obligation générale de conseil envers les maîtres de l'ouvrage, en leur conseillant la société [B], et à son obligation de conseil et d'assistance dans le litige qui les a opposés à cette société.

Par leurs dernières conclusions du 2 septembre 2013, Mme [M] et la MAF concluent à :

- à titre principal, à la confirmation des jugements déférés, sauf, s'agissant du jugement du 24 octobre 2012, en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes reconventionnelles d'un montant de 3 000 € dirigées contre les époux [Y] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- à titre subsidiaire, au débouté des appelants, de l'ensemble de leurs demandes formées contre elles, au motif que l'architecte n'a commis aucun manquement, seule la SARL [B] étant responsable des désordres,

- en toute hypothèse, à ce que :

$gt; il soit jugé que la MAF est fondée à opposer les limites de garantie prévues dans la police d'assurance souscrite par Mme [M], et notamment les franchises et plafonds contractuellement prévus,

$gt; la ou les parties succombantes soient condamnées à leur verser 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 21 août 2013, la SMABTP demande la confirmation du jugement du tribunal de grande instance de Dax du 24 octobre 2012 en ce qu'il a débouté les époux [Y] de leurs demandes dirigées contre elle, et sollicite leur condamnation à lui payer 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Me [R] [P], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL [B], n'a pas constitué avocat et ne fait valoir aucune observation.

Il en est de même de Me [T] [X], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL [B], mais ce dernier, par un courrier du 10 juillet 2013 qu'il a rédigé en qualité « d'ancien liquidateur de la SARL [B] », a indiqué que la procédure de liquidation judiciaire de ladite société, avait été clôturée pour insuffisance d'actif par jugement du tribunal de commerce de Dax en date du 2 novembre 2011, ce qui avait entraîné cessation de ses fonctions et son dessaisissement.

La présente décision sera réputée contradictoire, en application des dispositions de l'article 460-14 du code de procédure civile.

SUR QUOI LA COUR

Il résulte de la pièce n° 26 produite par les appelants, que la procédure de liquidation judiciaire dont a fait l'objet la SARL [B], a été clôturée, et Me [T], son liquidateur, dessaisi.

C'est la raison pour laquelle les appelants ont sollicité du président du tribunal de commerce de Dax, la désignation d'un mandataire ad hoc, afin de représenter les intérêts subsistants de cette société dans les instances pendantes devant la cour d'appel.

En conséquence, les fonctions de Me [T] [X], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL [B], ont cessé et ce dernier n'est plus dans la cause.

Sur les désordres

Il est constant, et établi par l'expertise judiciaire, que les désordres dont il est demandé réparation, consistent en de nombreuses malfaçons et non-conformités, imputables à l'entreprise de carrelage (SARL [B]), dont l'expert indique qu'elle « a agi en dépit de toutes les règles en vigueur ».

Selon l'expert, la solution de reprise par une réfection complète est chiffrée à 8 000 €.

Sur la recevabilité des demandes dirigées contre l'architecte et son assureur

Le contrat de maîtrise d''uvre, en son article 9, prévoit qu'« en cas de différend portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire. Cette saisine intervient à l'initiative de la partie la plus diligente ».

L'architecte et son assureur se prévalent du non-respect de cette clause, pour conclure à l'irrecevabilité des demandes formées contre eux.

La clause contractuelle, qui institue une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge, constitue une fin de non-recevoir, qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.

Le libellé de la clause, permet d'en déduire le caractère impératif convenu par les parties.

En conséquence, le premier juge sera confirmé, en ce qu'il a jugé irrecevables les demandes des époux [Y] formées contre l'architecte et sa compagnie d'assurances.

Sur la réception des travaux

Le premier juge est critiqué en ce qu'il a retenu que les travaux n'avaient pas fait l'objet d'une réception, pour écarter les garanties légales, alors que les appelants recherchent à titre principal, la responsabilité de l'entrepreneur, au titre de sa garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant le délai d'un an à compter de la réception.

Les appelants soutiennent en effet que le document qu'ils produisent en pièce n° 2, intitulée « procès-verbal d'opérations préalables à la réception des travaux », vaudrait réception.

Ce document est établi au contradictoire des parties, ainsi que l'exige les dispositions de l'article 1792-6 du code civil.

En effet, les maîtres de l'ouvrage, l'architecte et l'entrepreneur sont signataires du second feuillet, lequel retient la non-conformité (faïences les joints) des travaux de carrelage en salle d'eau du rez-de-chaussée, et WC du premier étage, lesquels sont à refaire entièrement.

Le premier feuillet, contient trois clauses pré-imprimées, et précise que doit être utilisée celle d'entre elles qui correspond à la mention appropriée.

Or, si la clause relative à la réception sans réserve a été biffée comme inappropriée, les parties ont laissé subsister les 2 autres clauses pré-imprimées, pourtant antinomiques qui sont les suivantes :

« La réception est prononcée avec effet à la date du 28 mars 2008 (la date a été ajoutée par une mention manuscrite) assortie des réserves mentionnées dans l'annexe jointe »,

« La réception est refusée pour les motifs consignés dans l'annexe précitée ».

Le premier juge, a relevé à juste titre que ce procès-verbal était équivoque.

Il a ensuite jugé que « les travaux de carrelage restaient en cours de réalisation, et que de toute évidence, le maître de l'ouvrage n'avait jamais entendu accepter, même avec des réserves, des travaux principalement non conformes au marché », si bien que le premier juge a estimé que ce document ne pouvait valoir réception des travaux.

Ce faisant, le premier juge a adopté la position des maîtres de l'ouvrage, qui soutenaient l'absence de réception, étant observé qu'ils ont modifié leur analyse devant la présente Cour, pour conclure à une réception avec réserves.

Devant le caractère équivoque de cet acte, il convient de faire application des dispositions des articles 1156 et suivants du code civil, pour en permettre l'interprétation, et la recherche de la commune intention des parties.

Toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier (article 1161 du code civil).

Or au cas particulier, la question qui se pose est de savoir si les maîtres de l'ouvrage ont entendu accepter les travaux, ou non.

Les trois éléments qui permettent de répondre par l'affirmative sont les suivants :

- l'intitulé de l'acte (« procès-verbal d'opérations préalables à la réception des travaux »), indique l'intention des parties de procéder à la réception des travaux,

- les clauses de l'acte, qui rappellent que la réception des travaux constitue le point de départ des garanties légales de parfait achèvement, de bon fonctionnement, et de la responsabilité décennale des constructeurs, et dont la mention permet d'établir que les parties entendent y avoir recours en tant que de besoin, ce qui présuppose leur volonté de procéder à la réception de l'ouvrage,

- enfin, et tout particulièrement, le fait que l'une des trois mentions pré-imprimées ait été privilégiée par les parties, puisqu'elle a été complétée de façon manuscrite.

Il convient en effet de rappeler que la logique de l'acte, impose aux parties de ne retenir qu'une seule des trois mentions pré-imprimées, laquelle est exclusive des deux autres, et que le fait que l'une d'entre elles ait été expressément complétée à la main, est démonstratif de l'option choisie.

Or, c'est bien la mention relative au prononcé de la réception, qui a été privilégiée, puisque les parties, ont indiqué de façon manuscrite la date du « 28 mars 2008 », comme la date d'effet du prononcé de la réception, assortie des réserves mentionnées dans l'annexe jointe.

Cette analyse est en outre conforme aux données de l'espèce, puisque le document, en son feuillet n° 2, précise que les clients devaient prendre possession des lieux le 15 avril 2008, si bien que l'intention des parties était de procéder à la réception des travaux antérieurement à cette prise de possession, et si possible, les réserves levées à cette date.

Enfin, c'est à tort que l'expert judiciaire, dans son très bref rapport, pour conclure que la réception n'avait pas été prononcée, retient que l'entreprise [B] se serait vue refuser son travail par un courrier du maître de l'ouvrage en date du 2 mai 2008 ; en effet, ce courrier, produit par les appelants (leur pièce n° 22), ne fait ni état, ni même allusion à un quelconque « refus des travaux » ; au contraire, par ce courrier, les maîtres de l'ouvrage, après avoir rappelé leur défaut de satisfaction, demandent à la société [B] de remédier aux problèmes, sous peine de lui réclamer des indemnités de retard, et de saisir le tribunal' manifestant ainsi leur volonté d'exercer leurs droits.

Les appelants demandent en conséquence à bénéficier de la garantie de parfait achèvement, conformément aux dispositions de l'article 1792-6 du code civil, selon lesquelles :

« La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres

signalés par le maître de l'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour se révéler postérieurement à la réception », qui pourrait trouver à s'appliquer dès lors que le cas d'espèce ne concerne pas l'exclusion de garantie prévue par le dernier alinéa de cet article, s'agissant des « travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usure normale ou de l'usage ».

Il convient d'examiner le bien-fondé de leurs demandes.

Sur les demandes dirigées contre la société [B]

Les appelants fondent leur action à l'égard de l'entrepreneur, sur la garantie de parfait achèvement, ou à défaut, sur la responsabilité contractuelle.

L'examen de la recevabilité de l'action au regard des dispositions de la prescription, est dans la cause, puisqu'il est évoqué par les appelants eux-mêmes en page 6 de leurs conclusions.

Sur le premier fondement, leur action tendant à solliciter la garantie de parfait achèvement est irrecevable, faute pour les maîtres de l'ouvrage de l'avoir introduite dans le délai de prescription d'un an à compter de la réception fixée par les parties au 28 mars 2008 (pour mémoire, le premier acte interruptif, constitué par l'assignation devant le juge des référés, est en date du 29 mai 2009, et donc postérieur à l'expiration du délai de prescription).

Les maîtres de l'ouvrage sont en revanche fondés à solliciter réparation du préjudice qu'ils subissent, sur le fondement de la responsabilité contractuelle de l'entrepreneur, dont la faute en lien de causalité directe avec les dommages dont il est demandé réparation, est établie par les pièces du dossier.

En revanche, en application des dispositions des articles L. 622-22 et L. 641-3 du code de commerce, ils ne peuvent prétendre qu'à la fixation de leur créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société [B], et seulement dans la limite des sommes visées par leur déclaration de créances du 22 juillet 2009, soit à concurrence de la somme de 7 300 € sollicitée par cette déclaration de créance au titre des travaux de rénovation, et dans la limite de la somme de 2 700 € pour les frais de procédure.

C'est à tort que les appelants soutiennent que le trouble de jouissance et le préjudice moral, qui naissent concomitamment avec la connaissance des désordres, et étaient donc connus au 28 mars 2008, seraient nés postérieurement à l'ouverture de la procédure collective, étant rappelé que la liquidation judiciaire de l'entrepreneur est en date du 6 mai 2009.

De même, c'est de façon erronée, mais également inopérante, au vu des dispositions du code du commerce rappelées ci-avant, qu'ils soutiennent, pour prétendre pouvoir y ajouter, que la déclaration de créances contenue dans leur courrier du 22 juillet 2009, serait faite « à titre provisionnel ».

Le premier juge sera en conséquence confirmé en ce qu'il a, dans le jugement du 29 mai 2013 :

$gt; déclaré la société [B] responsable des désordres affectant le carrelage de la maison des époux [Y],

$gt; fixé à la somme de 7 300 €, à titre échu et chirographaire, la créance des époux [Y] au passif de la société [B], au titre des travaux de reprise des désordres,

$gt; déclaré les époux [Y] irrecevables en leurs demandes indemnitaires supplémentaires à l'égard de la société [B],

$gt; condamné le représentant de la société [B] aux dépens et à payer aux époux [Y] une indemnité de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les demandes dirigées contre la SMABTP (assureur de l'entreprise [B])

Les appelants exercent à l'encontre de la SMABTP, en sa qualité d'assureur de l'entrepreneur ayant réalisé les travaux entachés de désordres, une action directe au visa de l'article L. 124-3 du code des assurances, ce qui ne fait l'objet d'aucune contestation.

Les documents produits, s'agissant de l'attestation d'assurance, et des conditions particulières, démontrent que le contrat garantit les conséquences de la responsabilité incombant au sociétaire (l'entrepreneur) quel qu'en soit le fondement juridique, mais distingue les deux postes de garantie suivants :

$gt; la responsabilité en cas de dommage à l'ouvrage après réception, ce qui n'est pas le cas d'espèce, puisqu'au cas particulier, les dommages préexistaient à la réception,

$gt; la responsabilité civile en cours ou après travaux, qui ne couvre que la responsabilité encourue par l'assuré vis-à-vis des tiers, et ne s'applique pas davantage aux maîtres de l'ouvrage, qui ne sont pas des tiers pour l'entrepreneur, mais ses cocontractants.

Le premier juge sera confirmé, en ce qu'il a débouté les époux [Y] de leurs demandes dirigées contre la compagnie SMABTP.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Dax en date du 24 octobre 2012.

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Dax en date du 29 mai 2013.

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux [Y] à payer la somme de 1 000 € (mille euros) tant à la SMABTP d'une part, qu'à Mme [M] et la MAF, pris ensemble, d'autre part, et rejette le surplus des demandes à ce titre.

Condamne les époux [Y] aux dépens d'appel.

Autorise les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sandra VICENTEFrançoise PONS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12/04048
Date de la décision : 01/07/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°12/04048 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-07-01;12.04048 ?
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