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10/06/2024 | FRANCE | N°23/17440

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 10 juin 2024, 23/17440


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 10 JUIN 2024



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17440 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CINZL



Décision déférée à la Cour : Arrêt du 29 Août 2023 -Juge de la mise en état de PARIS - RG n° 21/15441





APPELANT



Monsieur [S] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

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Représenté par Me Bertrand DE CAMPREDON de la SELARL GOETHE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE



E.U.R.L. BFG CAPITAL GESTION PRIVEE

Prise en la personne de son représentant légal
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 10 JUIN 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17440 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CINZL

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 29 Août 2023 -Juge de la mise en état de PARIS - RG n° 21/15441

APPELANT

Monsieur [S] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Bertrand DE CAMPREDON de la SELARL GOETHE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

E.U.R.L. BFG CAPITAL GESTION PRIVEE

Prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 530 962 869

Représentée par Me Anaïs GALLANTI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente de chambre

Monsieur Xavier BLANC, Président

Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Maxime MARTINEZ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente et par Maxime MARTINEZ, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [S] [I] reproche à la société BFG Capital Gestion Privée d'avoir manqué à ses devoirs d'information et à ses obligations de conseil à son égard lorsqu'elle est intervenue en qualité de conseiller en gestion de patrimoine dans le cadre d'une opération de défiscalisation.

L'investissement consistait à acheter auprès de sociétés civiles de construction vente (SCCV), le plus souvent dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement (VEFA), un ou plusieurs lots dans un immeuble devant être exploité en résidence de services pour seniors par le groupe Aquarella, puis à en confier l'exploitation, en vertu d'un bail commercial, à une société d'exploitation chargée de verser à l'investisseur un loyer destiné à rembourser le prêt immobilier ayant financé l'acquisition. En adoptant le statut de loueur en meublé non professionnel (LMNP), l'investisseur devait également bénéficier d'un avantage fiscal.

Les investissements litigieux ont été réalisés entre 2012 et 2015. Les investisseurs ont, après l'achat de leur bien, fait état de pertes financières dues notamment à des retards de livraison, des malfaçons, le défaut de règlement des loyers et la surévaluation des biens à l'achat.

En l'espèce, M. [I] a acquis un bien par contrat de vente en état futur d'achèvement le 27 mars 2013, auprès de la SCCV Renrardats, ce bien consistant en un appartement situé dans la résidence " Tallet " à [Localité 4].

Par exploit d'huissier du 17 novembre 2021, M. [I] a fait assigner la société BFG CGP devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d'obtenir sa condamnation.

Par ordonnance rendue le 29 août 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a statué comme suit :

- Dit M. [S] [I] irrecevable en ses demandes formées à l'encontre de la SARL BFG Capital Gestion Privée, par assignation du 17 novembre 2021 ;

- Condamne M. [S] [I] aux dépens de l'incident, qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles.

Par déclaration du 26 octobre 2023, M. [I] a interjeté appel de l'ordonnance du juge de la mise en état.

Par dernières conclusions signifiées le 12 janvier 2024, M. [I] demande à la cour de :

Infirmer l'ordonnance rendue le 29 août 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris, en toutes ses dispositions.

En conséquence :

- Dire recevable l'action de l'appelant à l'encontre de la société BFG Capital Gestion Privée.

- Renvoyer cette affaire à une audience ultérieure devant le tribunal judiciaire de Paris, pour conclusions sur le fond de la société BFG Capital Gestion Privée.

- Condamner l'intimée à payer à l'appelant la somme de 1 500 € au titre des frais de procédure, conformément aux dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamner l'intimée aux entiers dépens dont distraction à Me Bertrand de Campredon du cabinet Goethe Avocats en sa qualité d'avocat.

Par dernières conclusions signifiées le 8 février 2024, la société BFG Capital demande à la cour de :

Vu les articles 902, 906 et 654 du code de procédure civile, vu l'article 524 du code de procédure civile, vu les articles 9 et 16 du code de procédure civile, vu les articles 32, 122 et 789 du code de procédure civile, vu la jurisprudence, vu les pièces versées aux débats.

- Rejeter les pièces numérotées de 1 à 25 qui n'ont pas été versées aux débats par les demandeurs ni régulièrement communiquées ;

- Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 29 août 2023, dans l'ensemble de ses dispositions,

- Condamner Monsieur [I], au paiement de la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure Civile.

SUR CE,

Sur la demande de rejet des pièces

La société BFG CGP soutient que les pièces n° 1 à 25 n'ont pas été communiquées concomitamment au dépôt des conclusions de M. [I] qui cite lesdites pièces, conformément à l'article 906 du code de procédure civile.

Elle demande, si par extraordinaire, la présente instance ne devait pas faire l'objet d'une radiation ou être frappée de nullité, que les pièces soient jugées irrecevables.

Ceci étant exposé, il convient à titre liminaire de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure, la cour ne statue que sur les prétentions des parties figurant au dispositif de leurs dernières écritures.

Or, la société BFG CGP demande à la cour, au titre du dispositif de ses conclusions, de " rejeter les pièces numérotées de 1 à 25 qui n'ont pas été versées aux débats par les demandeurs ni régulièrement communiquées ". La cour n'est donc pas saisie des demandes de radiation et de nullité de l'instance énoncées dans la motivation des écritures sans être reprises à leur dispositif, demandes au surplus pour lesquelles aucun fondement n'est par ailleurs précisé.

Si la société intimée soutient que les pièces n° 1 à 24 n'ont pas été communiquées concomitamment au dépôt des conclusions de l'appelant en violation du principe du contradictoire de sorte qu'il convient de les rejeter des débats, elle ne conteste pas que les pièces lui ont bien été communiquées.

Il ressort du procès-verbal d'huissier en date du 9 janvier 2024 que Monsieur [I] a fait signifier à l'encontre de la société BFG Capital Gestion Privée l'avis de fixation de l'affaire à bref délai, sa déclaration d'appel, ses conclusions et les pièces n° 1 à 25. Si le procès-verbal transmis au greffe ne contient pas les pièces indiquées, le procès-verbal indique que l'acte a été dressé sur 370 feuilles, ce qui établit que les pièces ont été bien été signifiées.

Si cette signification a été faite en l'étude de l'huissier, l'intimée ne conteste pas l'avoir reçue et ne conteste pas les mentions de l'acte. Elle a d'ailleurs constitué avocat et conclu en réponse le 8 février 2024. L'appelant a déposé ses conclusions au greffe par RPVA le 12 janvier 2024.

L'intimée ne justifie pas qu'elle n'a pas été en mesure de répliquer utilement aux conclusions de l'appelant ni que ce dernier aurait violé le principe du contradictoire.

Les pièces de l'appelant seront dès lors déclarées recevables.

Sur la qualité à agir de M. [I] à l'encontre de la société BFG Capital Gestion privée

M. [I] soutient, au visa des arts. L.541-1 et L. 550-1 du code monétaire et financier que son action à l'encontre de la société BFG CGP est recevable dans la mesure où, elle est dirigée à son encontre en sa qualité de conseiller en investissements financiers (au titre de ses manquements à ses obligations d'information et de conseil lors du montage de l'investissement défiscalisé et non lors de la vente du support immobilier de son investissement). Il fait valoir qu'il s'agit là de la seule société du groupe à avoir cette qualité qui est en lien avec celle critiquée par M. [I] dans le cadre de la présente instance puisque c'est son activité de conseil en gestion de patrimoine qui est visé par l'action.

Il ajoute qu'aucune action ne peut être dirigée à l'encontre de la société BFG Invest Immo puisque cette dernière n'est intervenue auprès de lui que pour la vente du support de son investissement ; qu'elle référencée sous l'activité " Administration d'immeubles et autres immobiliers " (contrairement à la société BFG CGP).

Il affirme que la confusion, entre les différentes entités du groupe BFG Capital, entretenue par ce dernier, l'a conduit à diriger son action vers la société BFG CGP et fait valoir qu'il n'a pas eu affaire au même interlocuteur du début à la fin de son opération d'investissement. Enfin, il souligne qu'il importe peu qu'il ait ou non été directement en contact avec la société BFG CGP, dans la mesure où il agit sur le terrain délictuel (et non contractuel) ; que c'est en raison de confusion entretenue par le groupe BFG Capital, qu'une mise en demeure a été envoyée en septembre 2021 à ce dernier qui, suite à sa réception, n'a pas jugé utile de préciser, en réponse, qu'il aurait fallu l'adresser à la société BFG Invest Immo. Il considère que cette man'uvre s'apparente à une violation du principe de loyauté procédurale et qu'il conviendra à ce titre d'écarter les moyens utilisés par la société. A cet effet, M. [I] met en exergue 10 ordonnances du juge de la mise en état de 2022 qui ont déclaré recevables les demandes faites à l'égard de chaque demandeur à l'égard de la société BFG Capital.

La société BFG CGP soutient qu'elle n'a aucun lien contractuel, ni factuel, avec le requérant et fait valoir que les 3 sociétés du groupe disposent d'activités distinctes et n'ont aucun lien capitalistique entre elles. Elle ajoute que, lors de la vente, M. [I] a été en relation avec la société BFG Invest Immo dont le rôle est de prodiguer des conseils en matière d'investissements immobiliers.

Elle fait valoir également qu'aucun élément ne permet à M. [I] d'avoir connaissance de l'existence même de la société BFG CGP à l'encontre de laquelle il dirige son action ; qu'au contraire, c'est avec les consultants de la société BFG Invest Immo qu'il a été en contact et avec qui il a eu une correspondance et qu'en conséquence, son cocontractant est la société BFG Invest Immo.

Elle soutient qu'aucune confusion n'a été entretenue en l'espèce puisque M. [I] ne peut soutenir que la société BFG CGP à la qualité de CIF et en même temps ignorer que l'investissement qu'il a réalisé est un investissement immobilier et non financier (donc du ressort de la société BFG Invest Immo). La répartition des activités au sein desdites sociétés est donc claire. Elle souligne que c'est en connaissance de cause que l'action a été mal dirigée.

Elle considère qu'aucune des sociétés " BFG " ne peut se voir reprocher les griefs qui sont formulés par M. [I]. Seule la société civile de construction vente devrait avoir à y répondre (aujourd'hui radiée du RCS).

Elle fait valoir que la mise en demeure visait l'article 56 du code de procédure civile doit être interprétée comme une tentative préalable à toute action en justice de résolution amiable du litige.

Ceci étant exposé, aux termes de l'article 31du code de procédure civile l'action est ouverte à tous eux qui ont un intérêt légitime au succès d'une prétention.

L'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la société BFG Capital Gestion Privée est une société de conseil ayant qualité de conseil en investissements financiers (CIF) au sein du groupe BFG, dépourvu de personnalité juridique.

La société BFG Gestion Privée n'a pas de lien contractuel avec Monsieur [I] dans la mesure où l'opération souscrite par ces derniers porte sur une opération de défiscalisation, qui a été conclue avec la société Aquarellia, appartenant au groupe Aquarelia.

Monsieur [I] poursuit la société BFG Gestion Privée sur le terrain de la responsabilité délictuelle en lui faisant grief de lui avoir communiqué des informations trompeuses et erronées, d'avoir manqué à son devoir d'information quant à la réalité des risques, d'avoir manqué à son devoir de conseil. Il agit à l'encontre de la société qui a procédé au montage de l'investissement en sa qualité de conseiller.

A l'appui de sa prétention, il produit une étude du gestionnaire Aquarelia par BFG Capital, une plaquette du groupe BFG Capital, sur laquelle figure la société BFG Capital Gestion Privée immatriculée à l'Orias ; une lettre de mission de BFG Capital Gestion Privée, adressée à un tiers, agissant en qualité de CIF. Elle verse également les statuts de la société BFG Capital, qui est une société de conseil en matière de gestion de patrimoine et d'immobilier.

Ces éléments attestent de l'intervention du groupe BFG sans exclure la possibilité d'une intervention de la société BFG Gestion Privée en qualité de conseil auprès de Monsieur [I].

Au regard de ces éléments, sans préjuger du fond, il convient de déclarer la demande de Monsieur [I] recevable.

L'ordonnance entreprise sera dès lors infirmée.

La société BFG CGP sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et déboutée de sa demande d'indemnité de procédure. Elle sera condamnée, sur ce même fondement, à payer à Monsieur [I] la somme de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Déclare recevables les pièces produites par l'appelant ;

Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit Monsieur [S] [I] recevable en son action ;

Condamne la société BFG Capital Gestion Privée aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Bertrand de Campredon du cabinet Goethe Avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Déboute la société BFG Capital Gestion Privée de sa demande d'indemnité de procédure ;

Condamne la société BFG Capital Gestion Privée à payer à Monsieur [S] [I] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE

S.MOLLÉ C.SIMON-ROSSENTHAL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 23/17440
Date de la décision : 10/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-10;23.17440 ?
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