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09/02/2023 | FRANCE | N°22/00197

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - b, 09 février 2023, 22/00197


République française

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B



ARRET DU 09 Février 2023

(n° 40 , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 22/00197 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGL32



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Avril 2020 par le tribunal judiciaire de Paris RG n° 11-20-004239



APPELANTS



Monsieur [V] [R] (débiteur)

Né le 23 février 1939 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 10

]

représenté par Me Claude-laurence GOLTZMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : R117



Madame [H] [G] épouse [R] en qualité de curatrice de M. [V] [R]

[Adresse 2]

[Localit...

République française

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 09 Février 2023

(n° 40 , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 22/00197 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGL32

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 01 Avril 2020 par le tribunal judiciaire de Paris RG n° 11-20-004239

APPELANTS

Monsieur [V] [R] (débiteur)

Né le 23 février 1939 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 10]

représenté par Me Claude-laurence GOLTZMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : R117

Madame [H] [G] épouse [R] en qualité de curatrice de M. [V] [R]

[Adresse 2]

[Localité 10]

comparante en personne, assistée de Me Claude-laurence GOLTZMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : R117

INTIMES

Monsieur [O] [J] (prêt)

[Adresse 3]

[Localité 10]

non comparant

[6] (36403639992900)

[7]

[Adresse 1]

[Localité 4]

non comparante

[9] (jugement du 07/07/2016)

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 10]

représentée par Me Céline NETTHAVONGS de l'AARPI RABIER & NETHAVONGS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1075 substituée par Me Amélie GRAGLIA, avocate au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Décembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence ARBELLOT, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Muriel DURAND, présidente

Madame Laurence ARBELLOT, conseillère

Madame Fabienne TROUILLER, conseillère

Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats

ARRET :

- Réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [V] [R] assisté de son épouse Mme [H] [R], désignée curatrice suivant ordonnance du juge des tutelles du 5 mars 2018, a saisi la commission de surendettement des particuliers de [Localité 10] qui a déclaré sa demande recevable le 26 septembre 2019.

Le 7 février 2020, la commission a indiqué qu'elle envisageait d'imposer une mesure de rééchelonnement des créances sur une durée de 84 mois sur la base d'une mensualité de remboursement de 1 297 euros.

M. [R] assisté de sa curatrice a contesté les mesures imposées ainsi que l'un des créanciers M. [O] [J] à qui la décision avait été notifiée.

Par jugement réputé contradictoire du 1er avril 2021, le tribunal judiciaire de Paris a déclaré recevable les deux recours et a rééchelonné le paiement des créances d'un montant total de 185 179,45 euros sur une durée de 84 mois avec des mensualités maximales de 1 297 euros au taux d'intérêts nul. Certaines créances ont été effacées à l'issue du plan à savoir celle détenue par Mme [H] [R] en totalité pour 1 839,90 euros et pour partie celle détenue par la société [9] et associés à hauteur de 162 159 euros effacée pour 75 260 euros.

La juridiction a relevé que les ressources du foyer étaient de 5 649 euros par mois correspondant à la pension de retraite de monsieur, que les charges pouvaient être fixées à une somme mensuelle de 4 352 euros incluant le versement d'une prestation compensatoire de 2 314 euros à l'ex-épouse de monsieur. La capacité de remboursement a été retenue à hauteur de 1 297 euros par mois.

Par déclaration adressée le 19 avril 2021 au greffe de la cour d'appel de Paris, M. [R] assisté de sa curatrice et par l'intermédiaire de son avocat a interjeté appel du jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 6 décembre 2022.

Mme [R] en qualité de curatrice de son époux est comparante à l'audience et M. [R] est représenté par un avocat qui aux termes d'écritures développées oralement sollicite la cour :

- de voir constater le désistement d'instance de M. [O] [J],

- de voir constater le défaut d'intérêt à agir de la société [6],

- de voir débouter la société [9] de l'ensemble de ses demandes tant irrecevables que mal fondées,

- de réformer la décision entreprise et ce faisant,

- d'ordonner l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel,

- d'ordonner les mesures de notification aux débiteurs et créanciers et publication de ladite décision dans les termes des dispositions légales applicables,

- subsidiairement, de modifier les mesures de désendettement et de ramener le montant des échéances dues à la société [9] à la somme de 315 euros par mois à compter de la décision à intervenir sur une durée ne pouvant excéder 7 années,

- de statuer ce que de droit sur les dépens.

M. [R] indique que M. [J] a été désintéressé et a fait parvenir des écritures de désistement ensuite du protocole d'accord régularisé et exécuté. S'agissant de la société [6], il estime qu'il y a lieu de constater son défaut d'intérêt à agir du fait de l'apurement de la créance. Mme [H] [R] épouse de monsieur est créancière à hauteur de 1 839,90 euros et indique à l'audience renoncer à cette somme.

S'agissant de la demande de retrait du rôle, il fait observer avoir demandé une fixation prioritaire de son dossier en raison de sa situation personnelle et de santé, que la cour n'est pas compétente mais le conseiller de la mise en état ou encore le premier président, qu'il s'agit d'une exception de procédure qui doit être formée avant toute défense au fond en application de l'article 74 du code de procédure civile, que le retrait du rôle serait une contrainte injustifiée et qui aggraverait la précarité de l'appelant tout en privant l'intéressé d'un double degré de juridiction.

L'appelant indique qu'il ne reste donc plus que la créance de la société [9] et associés à hauteur de 162 159 euros correspondant aux sommes dues en sa qualité de caution de la société [12] en liquidation judiciaire et que la société [9] vient aux droits de la [5]. Il estime que s'agissant de cette dette professionnelle, l'effacement partiel est insuffisant, faisant observer que le montant en intérêts dépasse le montant réclamé à titre principal.

S'agissant de sa situation personnelle, il indique être âgé de 83 ans, marié, son épouse ne percevant aucune retraite, et être atteint d'une maladie dégénérative grave et mortelle (démence fronto-temporale comportementale) générant des troubles neurocognitifs majeurs de type irascibilité, agressivité, gloutonnerie, troubles du langage, réticence à se faire soigner, nécessitant un suivi dans un service hospitalier de gériatrie. Il précise que cet état a vocation à se détériorer et nécessite des soins et la présence constante de son épouse avec un placement envisagé en EPHAD (demande effectuée en 2020).

La société [9] par le biais de son conseil et aux termes d'écritures développées à l'audience sollicite :

- de voir ordonner le retrait du rôle de l'affaire pour défaut d'exécution du jugement de première instance,

- à titre subsidiaire, de voir juger l'appel mal fondé,

- de débouter M. [R] de l'intégralité de ses demandes,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner M. [R] aux dépens de l'instance.

Elle fait valoir que le jugement est assorti de l'exécution provisoire, qu'il n'a pas reçu exécution et que sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile, il doit être procédé au retrait du rôle de l'appel.

A titre subsidiaire, elle sollicite confirmation de la décision, fait remarquer que les revenus de l'intéressé devraient avoir augmenté puisqu'il indique ne plus régler la pension alimentaire de 416 euros par mois à son enfant, qu'il est surprenant qu'il n'ait pas formé de demande de diminution de la rente mensuelle servie à son ex-épouse au vu de son montant très élevé, qu'il ne se trouve pas dans une situation irrémédiablement compromise.

Par un courrier reçu le 24 novembre 2022 au greffe de la cour d'appel, le centre des finances publiques de Paris communique un bordereau actualisé de sa créance pour 88 euros correspondant au paiement de la taxe d'habitation de 2021.

Aucun autre créancier n'a comparu ni ne s'est fait représenter.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.

Sur la demande de retrait rôle pour défaut d'exécution du jugement

La société [9] se fonde sur l'article 524 du code de procédure civile pour solliciter le retrait du rôle de l'affaire faute pour la M. [R] de justifier de l'exécution spontanée de la décision de première instance, assortie de l'exécution provisoire.

En application de l'article R.713-10 du code de la consommation, les décisions du juge rendues en matière de surendettement sont immédiatement exécutoires nonobstant appel sauf demande de sursis à l'exécution formée auprès du premier président de la cour d'appel.

En application de l'article 524 du code de procédure civile, en sa rédaction applicable aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020, lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

Cependant, l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile sous réserve des dispositions propres au surendettement.

Les dispositions de l'article 524 du code de procédure civile ne trouvent pas à s'appliquer. En revanche, en cas d'inexécution des mesures prévues au plan, le créancier est légitime à solliciter la caducité de ce plan en conformité avec les dispositions de l'article R.732-2 du code de la consommation, demande non formulée en l'espèce alors que M. [R] reconnaît ne pas avoir exécuté le plan tout en ayant déposé une demande de référé tendant à voir ordonner la suspension de l'exécution provisoire de la décision, demande radiée par suite des différents protocoles d'accord intervenus.

Il n'y a donc pas lieu à retrait du rôle de l'affaire.

Sur la recevabilité du recours

En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a déclaré recevables les recours formés par M. [O] [J] et par M. [V] [R] assisté de sa curatrice.

Sur le désistement de M. [O] [J]

Il convient de constater que M. [O] [J] a fait parvenir préalablement à l'audience, des écritures non datées non signées tendant à prendre acte de son désistement en raison du protocole d'accord transactionnel intervenu le 29 novembre 2021. Il n'a ni comparu ni ne s'est fait représenter à l'audience.

Le protocole signé entre les parties (pièce 33) précise qu'il met un terme définitif au contentieux ayant existé entre les parties par application des articles 2044 et 2052 du code civil.

Il convient donc de constater que la créance détenue par M. [J] est éteinte, sans qu'il y ait lieu de constater son désistement.

Sur la créance de la société [6]

M. [R] conteste l'intérêt à agir de la société [6] dans la mesure où elle a bénéficié d'un apurement de sa créance.

La cour constate que tant devant le premier juge qu'à hauteur d'appel, la créance de la société [6] admise pour 1 209,49 euros, n'a jamais été contestée ni par M. [R] ni par la banque elle-même et que cette dernière n'est pas représentée à la présente instance. Il n'y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur l'intérêt à agir de cette société.

En revanche, M. [R] communique un courriel du chargé de recouvrement de la créance pour le compte de la société [6] daté 25 mars 2022 et adressé à son avocat, attestant de ce que le dossier est soldé par suite du versement de 600 euros avec octroi d'une remise.

Il y a donc lieu de constater que la créance de la société [6] est éteinte.

Sur les autres créances

Il convient de constater qu'à l'audience, Mme [H] [R] renonce à poursuivre le paiement de la somme de 1 839,90 euros incluse dans le plan, au titre d'un prêt familial. Il convient donc de constater que cette créance est éteinte.

La créance détenue par la société [9] pour 162 159 euros ne fait pas l'objet de contestation.

Dès lors il convient de fixer le passif à la somme de 162 159 euros constituée uniquement de la créance détenue par la société [9].

Sur la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement

Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

Aucun élément du dossier et des débats ne permet de remettre en cause la bonne foi de M. [R] de sorte qu'il ne sera pas statué spécifiquement sur ce point.

Sur les mesures

Aux termes de l'article L.733-1 du code de la consommation, en l'absence de mission de conciliation ou en cas d'échec de celle-ci, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, imposer tout ou partie des mesures suivantes :

1° Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ;

2° Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;

3° Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal;

4° Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.

L'article L.733-3 du même code énonce que la durée totale des mesures mentionnées à l'article L. 733-1 ne peut excéder sept années.

Aux termes de l'article R. 731-1 du code de la consommation : « Pour l'application des dispositions des articles L. 732-1, L. 733-1 et L. 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L. 731-1, L.731-2 et L. 731-3, par référence au barème prévu à l'article R. 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur ».

 

           L'article R. 731-2 précise : « La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L. 731-2 ».

 

           Enfin selon l'article R.731-3 : « Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission, soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème. Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».   

En vertu des dispositions de l'article L.724-1 du code de la consommation, le débiteur qui se trouve dans une situation irrémédiablement compromise, caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en 'uvre les mesures de traitement prévues par les articles L.732-1, L.733-1, L.733-7 et L.733-8 du même code, est éligible à la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire s'il est constaté qu'il ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle ou que l'actif est constitué de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.

En application de ces textes, il incombe au juge de se référer aux éléments objectifs qui lui sont soumis, c'est-à-dire le rapport entre le montant des dettes et les revenus disponibles ou ceux prévisibles et de déterminer la part des revenus que le débiteur peut affecter au paiement de ses dettes au regard des éléments dont il dispose, en prenant en compte l'évolution prévisible des revenus du débiteur.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la situation n'est pas irrémédiablement compromise dès lors qu'elle est susceptible d'évoluer, du fait de l'âge du débiteur, de sa qualification et de sa situation personnelle.

Le rééchelonnement ordonné relatif à un passif de 185 179,45' euros sur une durée de 84 mois avec des mensualités maximales de 1 297 euros au taux d'intérêts nul est devenu sans objet compte tenu de l'actualisation du passif et du non-respect de ces mesures par M. [R].

Il résulte des pièces communiquées que M. [R] est âgé de 83 ans et marié sous le régime de la séparation de biens avec son épouse âgée de 62 ans, qui ne perçoit aucun revenu ni aucune pension de retraite. Tant la commission de surendettement que le premier juge ont relevé que les revenus étaient constitués d'une pension de retraite de monsieur de 5 649 euros par mois.

Si M. [R] soutient que ses revenus ont évolué à la baisse depuis ces décisions en raison de l'augmentation des prélèvements sociaux à compter l'année 2021 et qu'il ne disposerait que de 5 419 euros par mois en 2021, son avis d'imposition de 2022 pour les revenus déclarés en 2021 fait état de 67 385 euros de revenus déclarés avant abattement fiscal de 10 %, ce qui correspond à une moyenne de 5 615 euros de revenus par mois, soit un différentiel peu significatif de 34 euros par mois.

Les charges ont été évaluées mensuellement à 4 352 euros incluant le versement d'une prestation compensatoire de 2 314 euros à l'ex-épouse de monsieur. Il a également été tenu au compte au titre des forfaits applicables du fait que monsieur supporte la charge de son épouse sans revenu et de sa fille née en 1996 qui à l'époque poursuivait des études en Master, sans retenir une somme mensuelle de 600 euros par mois prétendument versée à l'intéressée et d'ores et déjà prise en compte dans les forfaits.

M. [R] soutient que ses dépenses mensuelles réelles doivent être réévaluées afin de prendre en compte sa situation actuelle et notamment afin de tenir compte de ses dépenses de santé (soins non remboursés, assistance à domicile) et de leur évolution prévisible compte tenu de l'évolution de la pathologie dont il est atteint. Il communique un budget mensuel pour le mois de novembre 2022 faisant état de 4 941,76 euros de dépenses mensuelles, absorbant en grande partie ses revenus et sans prise en compte de dépenses exceptionnelles et après déduction de la prestation à servir à son ex-épouse.

La cour constate dans un premier temps que contrairement à ce qu'indique la société [9], M. [R] justifie avoir saisi le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nanterre le 1er décembre 2015 d'une demande tendant à voir réviser le montant de la rente mensuelle versée au bénéfice de son ex-épouse depuis 1995, demande déclarée irrecevable motif pris que la modification sollicitée ne pouvait intervenir que par une nouvelle convention entre parties, en raison du renoncement des parties au bénéfice des dispositions de l'article 179 du code civil.

Il s'ensuit que le montant de la prestation compensatoire de 2 314 euros servie à l'ex-épouse et non modifiée vient amputer largement le budget mensuel de M. [R].

La cour constate que l'avis d'imposition 2022 sur les revenus 2021 mentionne une pension alimentaire de 5 000 euros par an versée à la fille du couple, non reprise dans le budget proposé puisque M. [R] indique que la contribution alimentaire versée à sa fille majeure a été remplacée par les frais d'assistance à domicile de l'ordre de 500 euros par mois.

Il fait état d'un loyer de 805 euros par mois et non de 725 euros, de frais d'électricité de 169,77 euros par mois, de frais de santé non remboursés pour 200 euros par mois, de frais de mutuelle pour 223,08 euros par mois, de frais d'assurance habitation et véhicule pour 93,42 euros, de frais de téléphonie pour 103,99 euros par mois, d'un poste alimentation en augmentation lié à une hyperphagie évalué à 730 euros par mois, de frais d'assistance à domicile pour 500 euros par mois, d'impôts (taxe habitation) de 11,50 euros par mois, de frais de transport de 75 euros, de frais d'essence de 30 euros par mois.

Les pièces médicales communiquées aux débats (compte-rendu de consultation du Docteur [Z], du pôle gériatrique du site Broca de l'hôpital de jour du CMRR d'Île-de-France Sud des 28 août 2022, 25 août 2021, 14 avril 2021, 14 octobre 2019 et 18 septembre 2017) démontrent que M. [R] âgé de 83 ans, est atteint d'une maladie atteinte neurocognitive majeure fronto-temporale générant des troubles neurocognitifs majeurs de type irascibilité, agressivité, gloutonnerie, troubles du langage, désinhibition verbale et physique, troubles de la mémoire, réticence à se faire soigner, nécessitant un suivi dans un service hospitalier de gériatrie. Les deux derniers compte-rendus médicaux attestent de ce que son comportement et son état cognitif déclinent progressivement, qu'il devient apathique et mutique, que si son épouse s'absente, il arrive qu'il quitte le domicile et se perdre, qu'il est de plus en plus désinhibé, impatient et irascible, que son état nécessité la mise en place d'une auxiliaire de vie une fois et demi par semaine et une semaine par mois, que madame [R] est épuisée et souhaiterait pouvoir placer son époux en institution mais qu'elle est confrontée à des difficultés financières.

Le docteur [K], gériatre à la Maison des aidants et en charge du suivi de M. [R] indique par courrier du 21 avril 2022 qu'il est difficile d'envisager de poursuivre un suivi à Broca car le patient ne sort plus de chez lui.

Il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que l'état de santé de M. [R] nécessite actuellement une prise en charge à domicile par une auxiliaire de vie en complément des soins prodigués par son épouse, et que son état est amené à se détériorer de telle sorte que son entrée dans une institution de type EHPAD est inéluctable à moyen terme.

Mme [R] justifie avoir d'ores et déjà déposé un dossier en ce sens au mois de mai 2022 et être en attente d'une évaluation d'une prestation dépendance en fonction du GIR retenu.

L'intégralité des frais dont fait état M. [R] dans son budget provisionnel est justifiée, ce compris les frais de santé non remboursés pour environ 200 euros par mois (soins de pédicure, protections urinaires, mélatonine, ostéopathie), d'auxiliaire de vie (de 400 à 500 euros par mois selon les mois) mis à part les frais d'alimentation, habillement évalués à 730 euros par mois. Toutefois, cette évaluation est crédible au regard de l'hyperphagie dont souffre M. [R].

Il en résulte que pour des revenus de 5 615 euros par mois, les sommes affectées aux dépenses de la vie courante peuvent être retenues au réel pour 4 941,76 euros soit une disponible de 673,24 euros par mois.

Cependant, il est justifié que la situation de santé de M. [R], âgé de 83 ans, s'est fortement dégradé interdisant toute possibilité d'amélioration avec une situation financière amenée à se dégrader au regard de l'augmentation prévisible des dépenses de santé et de prise en charge à domicile ainsi que des frais potentiels de placement dans un établissement spécialisé de type EHPAD.

M. [R] ne dispose d'aucun bien immobilier dont la vente serait susceptible de désintéresser son créancier.

Il convient donc de constater que la situation de M. [R] est irrémédiablement compromise et de dire qu'il bénéficiera d'une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Le jugement est donc infirmé. Le surplus des demandes est rejeté.

Chaque partie supportera ses éventuels dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

 

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :

Dit n'y avoir lieu à retrait du rôle de l'affaire,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré recevable les recours,

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Constate que les créances détenues par M. [O] [J], la société [6], Mme [H] [R] sont éteintes,

Fixe le passif à la somme de 162 159 euros constituée de la créance détenue par la société [9],

Constate que la situation de M. [V] [R] assisté de sa curatrice Mme [H] [G] épouse [R] est irrémédiablement compromise,

Ordonne l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire au profit de M. [V] [R] assisté de sa curatrice Mme [H] [R],

Clôture immédiatement cette procédure,

Dit que cette procédure entraîne l'effacement total des dettes de M. [V] [R] mentionnées dans l'état des créances arrêté par la commission de surendettement des particuliers de Paris et le jugement rendu le 1er avril 2021 par le tribunal judiciaire de Paris, modifié par la présente décision,

Dit qu'il ne peut donc plus légalement être demandé à M. M. [V] [R] assisté de sa curatrice Mme [H] [G] épouse [R] le paiement de ces dettes qui n'ont plus d'existence juridique à leur égard,

Rappelle que ne sont pas effacées les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires allouées aux victimes et les amendes prononcées dans le cadre d'une condamnation pénale et les dettes ayant pour origine des manoeuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale énumérés à l'article L.114-12 du code de la sécurité sociale,

Ordonne la publication du présent arrêt au BODACC pour permettre aux éventuels créanciers qui n'auraient pas été convoqués dans le cadre de la présente procédure de pouvoir le cas échéant former 'tierce opposition', à peine d'extinction de leurs créances, à l'issue de l'expiration du délai de 2 mois qui suivra la date de cette publication,

Dit que cette procédure entraîne l'inscription de M. [V] [R] au fichier national recensant les informations sur les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels (F.I.C.P ) pour une période de 5 ans,

Rejette le surplus des demandes,

Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle,

Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - b
Numéro d'arrêt : 22/00197
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;22.00197 ?
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