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26/01/2023 | FRANCE | N°21/00063

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - b, 26 janvier 2023, 21/00063


République française

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B



ARRET DU 26 Janvier 2023

(n° 23 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/00063 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDKJ4



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Sens RG n° 11-19-000118



APPELANT



Monsieur [P] [T] [X] (débiteur)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Véronique LYAND,

avocat au barreau d'AUXERRE substitué par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010



INTIMES



Monsieur [K] [A]

[Adresse 8]

...

République française

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 26 Janvier 2023

(n° 23 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/00063 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDKJ4

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Sens RG n° 11-19-000118

APPELANT

Monsieur [P] [T] [X] (débiteur)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Véronique LYAND, avocat au barreau d'AUXERRE substitué par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

INTIMES

Monsieur [K] [A]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

non comparant

Monsieur [V] [G]

[Adresse 23]

[Adresse 23] (ALLEMAGNE)

non comparant

Monsieur [C] [Z]

[Adresse 22]

[Adresse 22] (ALLEMAGNE)

non comparant

[17]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

non comparante

[14]

[Adresse 21]

[Adresse 21]

[Adresse 21]

non comparante

[19] (EX [10])

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

non comparante

[16]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

non comparante

[13]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

non comparante

[11] ([18])

[Adresse 7]

[Adresse 7]

non comparante

[12]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

non comparante

[15]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

M. [M] [N], Directeur de la coopérative [15], représenté par M. [I] [B] en vertu d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Fabienne TROUILLER, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Muriel DURAND, présidente

Madame Fabienne TROUILLER, conseillère

Madame Laurence ARBELLOT, conseillère

Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats

ARRET :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 6 février 2018, M. [P] [T] [X] a saisi la commission de surendettement des particuliers de [Localité 20] qui a, le 24 avril 2018, déclaré sa demande recevable.

Le 29 janvier 2019, la commission a imposé un rééchelonnement des dettes moyennant des mensualités d'un montant de 1 131,10 euros dans l'attente de la vente du bien immobilier dont M. [X] est propriétaire, estimé à 230 000 euros, le produit de la vente étant destiné à désintéresser les créanciers.

M. [X] a contesté les mesures recommandées, réclamant une diminution de ses mensualités de remboursement.

Par jugement réputé contradictoire en date du 18 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Sens a :

- déclaré recevable le recours,

- infirmé la décision de la commission ,

- ordonné un rééchelonnement des dettes sur une durée provisoire de 24 mois, moyennant des mensualités de 800 euros, sans intérêts, dans l'attente de la vente du bien immobilier au prix de 230 000 euros.

La juridiction a estimé que les ressources de M. [X] s'élevaient à la somme de 1 650 euros ses charges à la somme de 846,50 euros, et qu'il disposait ainsi d'une capacité de remboursement de 800 euros pour rembourser son passif d'un montant de 170 000 euros. La juridiction a retenu que M. [X] était séparé de son épouse, qu'il était propriétaire du bien immobilier dans lequel il vivait ainsi que d'un véhicule et qu'il était retraité.

Le jugement a été notifié à M. [X] le 30 décembre 2020.

Par déclaration adressée le 13 janvier 2021 au greffe de la cour d'appel de Paris, M. [X] a interjeté appel du jugement, réclamant la prise en compte de l'ensemble de ses charges et par conséquent une diminution de ses mensualités de remboursement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 29 novembre 2022.

À cette audience, M. [X] est représenté par son conseil qui a sollicité l'infirmation du jugement et un rétablissement personnel sans liquidation.

Il a fait valoir que M. [X] était dans l'impossibilité de vendre le bien immobilier en question, constitué d'une ferme avec des bâtiments attenants, puisqu'il n'en était que nu-propriétaire et sa mère, âgée de 93 ans, usufruitière. Il a indiqué qu'il résidait dans cette maison, sa mère vivant en maisons de retraite.

Il a précisé que M. [X] était divorcé depuis le 11 mai 2022 et qu'il était retraité sans aucun patrimoine. Il a ajouté que ses charges avaient augmenté et que son ex-épouse avait obtenu un effacement de ses dettes. Il a souligné que son budget est déficitaire et qu'il ne parvenait à survivre que parce que sa nouvelle compagne disposait de quelques revenus.

La [15] est représentée par M. [B] muni d'un pouvoir qui a précisé que sa créance s'élevait à 18 541 euros, liée à l'achat de produits phytosanitaires. Elle a réclamé un rééchelonnement des créances.

Aucun autre créancier n'a comparu.

Par courrier reçu au greffe le 7 novembre 2022, la société [13] a maintenu sa créance.

Par courrier reçu au greffe le 24 novembre 2022, M. [V] [G] a maintenu sa créance de 4 000 euros.

Par courrier reçu au greffe le 26 octobre 2022, la société [24], mandatée par la société [14] a réclamé la confirmation du jugement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, il doit être rappelé que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les créanciers non comparants.

La bonne foi du débiteur n'est pas contestée et n'est pas susceptible d'être remise en cause au vu des éléments dont la cour dispose. Il n'y a donc pas lieu de statuer spécialement sur ce point.

En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise est confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours.

Sur l'existence d'une situation irrémédiablement compromise

En vertu des dispositions de l'article L.724-1 du code de la consommation, le débiteur qui se trouve dans une situation irrémédiablement compromise, caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en 'uvre les mesures de traitement prévues par les articles L.732-1, L.733-1, L.733-7 et L.733-8 du même code, est éligible à la procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire s'il est constaté qu'il ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle ou que l'actif est constitué de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.

Aux termes des articles R.731-1 à R.731-3, « pour l'application des articles susvisés, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues à l'article L.731-1 à L.731-3, par référence au barème prévu à l'article R.3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L.262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.

La part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L.731-2.

Le montant des dépenses courantes du ménage est apprécié par la commission soit pour leur montant réel sur la base des éléments déclarés par le débiteur, soit en fonction du barème fixé par son règlement intérieur et prenant en compte la composition de la famille. Le règlement intérieur précise à quelles conditions et selon quelles modalités les dépenses sont prises en compte pour leur montant réel ou selon le barème.

Lorsque la commission prend en compte des dépenses courantes du ménage pour leur montant réel, elle peut demander au débiteur d'en fournir des justificatifs. Si le débiteur ne les fournit pas, les dépenses concernées sont appréciées selon le barème susvisé ».

En application de ces textes, il incombe au juge de se référer aux éléments objectifs qui lui sont soumis, c'est-à-dire le rapport entre le montant des dettes et les revenus disponibles ou ceux prévisibles et de déterminer la part des revenus que le débiteur peut affecter au paiement de ses dettes au regard des éléments dont il dispose, en prenant en compte l'évolution prévisible des revenus du débiteur.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la situation n'est pas irrémédiablement compromise dès lors qu'elle est susceptible d'évoluer, du fait de l'âge du débiteur, de sa qualification et de sa situation personnelle.

La cour doit prendre en considération la situation du débiteur à la date à laquelle elle statue et déterminer la part des revenus que les débiteurs peuvent affecter au paiement de leurs dettes, en prenant en compte l'évolution prévisible de ses revenus.

En l'espèce, M. [X] justifie disposer d'une somme de 1 567,35 euros au titre de ses retraites et indique que sa concubine perçoit une somme de 1 248,60 euros au titre de ses revenus.

Concernant ses charges, il justifie régler une somme de 2 031,88 euros, dont 1 216,74 euros pour loger sa mère en Ehpad. La répartition des charges entre les concubins n'est pas précisée.

Il n'est pas contesté que M. [X] est nu-propriétaire d'un ensemble immobilier évalué à 230 000 euros, sa mère étant usufruitière d'une partie des biens.

Force est de constater que la vente de ce bien immobilier serait susceptible de désintéresser l'ensemble des créanciers mais que M. [X] et sa mère font le choix de ne pas vendre ce bien au motif que cette dernière s'y opposerait, ce qui n'est pas démontré.

Ainsi, l'insolvabilité invoquée est en réalité liée à la prise en charge des frais d'hébergement de la mère de M. [X], supérieure à la mensualité fixée par le premier juge et que cette situation ne saurait être qualifiée d'irrémédiable, sauf à nier les droits des créanciers, dont trois sont des particuliers.

Il doit être également rappelé que si en application des articles L.732-3 et L.733-3 du code de la consommation, la durée totale du plan ne peut excéder sept années, les mesures peuvent cependant excéder cette durée lorsqu'elles concernent le remboursement des prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elles permettent d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale.

Il en résulte que le délai maximum de sept ans peut faire l'objet d'un déplafonnement pour permettre au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession de la résidence principale. En l'espèce, M. [X] avait exprimé devant le premier juge son désir de vendre mais invoque aujourd'hui, sans en justifier, le refus de sa mère.

Dès lors, force est de constater que si l'appelant réclame le bénéfice d'un rétablissement personnel sans liquidation, il ne justifie nullement d'une situation irrémédiablement compromise et encore moins qu'il ne dispose d'aucun patrimoine. Si sa capacité de remboursement apparaît compromise en raison du choix d'héberger à ses frais, au détriment de ses créanciers, sa mère usufruitière en Ehpad, rien n'établit l'absence de perspective d'amélioration à moyen terme.

L'existence d'un tel bien est susceptible de permettre l'élaboration d'un plan d'apurement excédant le délai de 84 mois dans l'hypothèse où la vente du bien ne serait pas envisageable.

Dans ces conditions, il convient d'accorder à M. [X] un moratoire de douze mois et de renvoyer le dossier à la commission de surendettement afin qu'elle prenne en compte l'évolution de la situation financière et immobilière du débiteur et qu'elle établisse un nouvel échelonnement des dettes ou une répartition du prix de vente des biens immobilier.

Partant, le jugement est infirmé et la demande de rétablissement personnel sans liquidation, non fondée, est rejetée.

PAR CES MOTIFS 

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort rendu par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré recevable le recours exercé ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit qu'en considération de son patrimoine immobilier, M. [P] [X] ne peut bénéficier d'un effacement de ses dettes ;

Rejette la demande de rétablissement personnel sans liquidation ;

Accorde à M. [P] [X] un moratoire de douze mois ;

Suspend en conséquence l'exigibilité des créances pendant une durée de douze mois à compter de la notification de l'arrêt jusqu'à réexamen de sa situation ;

Dit que les dettes ne produiront pas intérêts dans ce délai ;

Dit qu'à l'issue de ce délai de suspension ou en cas de cessation de la prise en charge de frais d'hébergement de Mme [O] [X] et de vente du bien immobilier, M. [P] [X] devra impérativement saisir la commission de surendettement de [Localité 20] pour une nouvelle évaluation de sa situation ;

Renvoie le dossier à la commission de surendettement des particuliers de [Localité 20] qui sera chargée de ré-examiner la situation financière et immobilière de M. [P] [X], d'actualiser sa capacité de remboursement et d'établir un plan de remboursement de ses dettes ;

Laisse à la charge de chaque partie les éventuels dépens d'appel exposés par elle ;

Dit que l'arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - b
Numéro d'arrêt : 21/00063
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;21.00063 ?
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