Ordonnance N°683
N° RG 24/00718 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JJEC
J.L.D. NIMES
31 juillet 2024
[W]
C/
LE PREFET DU VAR
COUR D'APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 02 AOUT 2024
(Au titre des articles L. 742-4 et L 742-5 du CESEDA)
Nous, Mme Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assistée de Mme Ellen DRÔNE, Greffière,
Vu l'arrêté préfectoral ordonnant une obligation de quitter le territoire français en date du 02 juin 2024 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 02 juin 2024, notifiée le même jour à 08h35 concernant :
M. [U] [W]
né le 30 Janvier 1992 à [Localité 2]
de nationalité Algérienne
Vu l'ordonnance en date du 04 juin 2024 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;
Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 31 juillet 2024 à 08h41, enregistrée sous le N°RG 24/3538 présentée par M. le Préfet du Var ;
Vu l'ordonnance rendue le 31 Juillet 2024 à 16h21 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES sur troisième prolongation, à titre exceptionnel qui a :
* Déclaré la requête recevable ;
* Ordonné pour une durée maximale de 15 jours commençant à l'expiration du précédent délai de 30 jours déjà accordé, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [U] [W] ;
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter du 1er aout 2024 à 08h35 ;
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [U] [W] le 1er Août 2024 à 12h30 ;
Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;
Vu l'absence du Préfet du Var, régulièrement convoqué,
Vu l'assistance de Monsieur [E] [J], interprète en langue arabe, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Nîmes,
Vu la comparution de Monsieur [U] [W], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Marie-Camille CHEVENIER, avocat de Monsieur [U] [W] qui a été entendue en sa plaidoirie ;
MOTIFS
Monsieur [U] [W] a reçu notification le 2 juin 2024 d'un arrêté du Préfet du Var du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pendant deux ans.
Monsieur [U] [W] a fait l'objet d'un contrôle d'identité le 31 mai 2024, à [Localité 3], à 15h15.
Par arrêté de la même préfecture en date du 2 juin 2024 et qui lui a été notifié le jour même à 8h35, il a été placé en rétention administrative aux fins d'exécution de la mesure d'éloignement.
Par requête du 3 juin 2024, le Préfet du Var a saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes d'une demande en prolongation de la mesure.
Par ordonnance prononcée le 4 juin 2024, à 12h22, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [U] [W] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours, décision confirmée en appel le 6 juin 2024.
Sur nouvelle requête de la Préfecture et par ordonnance du Juge des libertés et de la détention en date du 2 juillet 2024, sa rétention administrative a été encore prolongée de trente jours supplémentaires.
Sur requête du Préfet du Var en date du 31 juillet 2024, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a ordonné une troisième prolongation de cette rétention pour 15 jours, et ce par ordonnance du 31juillet 2024, à 16h21.
Monsieur [U] [W] a relevé appel de cette ordonnance le 1er août 2024, à 12h30.
Sur l'audience, il déclare que :
- il exécuterait la mesure d'éloignement s'il était remis en liberté, il irait dans son pays et il va acheter son billet tout seul car il sait que les choses sont bloquées avec l'Algérie,
- cela fait deux mois qu'il est enfermé, il va se débrouiller pour qu'on lui ramène ses documents,
- il en a marre d'être au centre de rétention, il n'en peut plus de cette situation.
Son avocat soutient que :
- les conditions de fond sont défaillantes pour permettre la prolongation de la mesure,
- il est compliqué de faire un retour en Algérie actuellement en raison du contexte, la délivrance des documents de voyage n'aura certainement pas lieu.
Le Préfet du Var n'est pas représenté à l'audience.
SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :
L'appel interjeté par Monsieur [U] [W] sur une ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il est donc recevable.
SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:
L'article L.743-11 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que « à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure. »
L'article 563 du Code de Procédure Civile ajoute encore que « pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »
En l'espèce, ne restent recevables que le moyen d'irrecevabilité de la requête en prolongation sur laquelle l'ordonnance dont appel a statué et les moyens de fond, même nouveaux en appel. Monsieur [U] [W] soutient qu'aucune condition de fond n'est remplie pour autoriser une nouvelle prolongation de la mesure. Ce moyen de fond est recevable.
SUR LE FOND :
L'article L742-5 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en son alinéa 5 dispose que, « A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »
Ces dispositions doivent s'articuler avec celles de l'article L.741-3 du même code, selon lesquelles il appartient au juge judiciaire d'apprécier la nécessité du maintien en rétention et de mettre fin à la rétention administrative, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient : « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. »
En l'espèce, l'administration poursuit ses diligences, avec une relance adressée aux autorités algériennes le 16 juillet 2024. Si des difficultés diplomatiques existaient, il y a lieu de dire qu'elles pourraient trouver leur résolution d'un jour à l'autre et que ce n'est pas à l'autorité judiciaire de se prononcer sur cette question.
En tout état de cause, la condition tenant à la menace à l'ordre public prévue par les textes est parfaitement remplie dès lors que le retenu a été interpellé, en flagrance, pour des faits de vols commis en réunion.
Les conditions légales permettant la troisième prolongation demandée sont ainsi remplies. En conséquence, le moyen soulevé sera rejeté et la décision du juge des libertés et de la détention sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L742-1 à L743-9 ; R741-3 et R.743-1 à L.743-19 et L.743-21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
DECLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [U] [W] ;
CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].
Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,
le 02 Août 2024 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 4] à M. [U] [W], par l'intermédiaire d'un interprète en langue arabe.
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel à :
Monsieur [U] [W], pour notification par le CRA,
Me Marie-Camille CHEVENIER, avocat,
M. Le Préfet du Var,
M. Le Directeur du CRA de [Localité 4],
Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES,
M. / Mme Le Juge des libertés et de la détention.