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20/08/2024 | FRANCE | N°24/00592

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Rétentions, 20 août 2024, 24/00592


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00592 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLMP



O R D O N N A N C E N° 2024 - 607

du 20 Août 2024

SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE



dans l'affaire entre,



D'UNE PART :



Monsieur [X] [Y]

né le 09 Novembre 1998 à [Localité 5] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne



retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,





Comparant par visio conférence à la demande de Monsieur le préfet des Pyrénées Orientales et assisté de Maître Mohamed JARRAYA, avocat commis d'o...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

N° RG 24/00592 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QLMP

O R D O N N A N C E N° 2024 - 607

du 20 Août 2024

SUR PROLONGATION DE RETENTION D'UN ETRANGER DANS UN ETABLISSEMENT NE RELEVANT PAS DE L'ADMINISTRATION PENITENTIAIRE

dans l'affaire entre,

D'UNE PART :

Monsieur [X] [Y]

né le 09 Novembre 1998 à [Localité 5] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

retenu au centre de rétention de [Localité 4] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire,

Comparant par visio conférence à la demande de Monsieur le préfet des Pyrénées Orientales et assisté de Maître Mohamed JARRAYA, avocat commis d'office

Appelant,

et en présence de [Z] [I], interprète assermenté en langue arabe,

D'AUTRE PART :

1°) MONSIEUR LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Monsieur [P] [U], dûment habilité,

2°) MINISTERE PUBLIC

Non représenté

Nous, Karine ANCELY conseiller à la cour d'appel de Montpellier, délégué par ordonnance de Monsieur le premier président, plus spécialement pour les attributions dévolues par les articles L 741-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Alexandra LLINARES, greffière,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l'arrêté du 25 septembre 2023 de MONSIEUR LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE portant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour de 2 ans pris à l'encontre de Monsieur [X] [Y].

Vu la décision de placement en rétention administrative du 14 août 2024 de Monsieur [X] [Y] pendant 4 jours dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Vu l'ordonnance du 17 Août 2024 à 17 h 45 notifiée le même jour à la même heure du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Perpignan qui a décidé de prolonger la rétention administrative pour une durée maximale de vingt-six jours.

Vu la déclaration d'appel faite le 19 Août 2024 par Monsieur [X] [Y], du centre de rétention administrative de [Localité 4], transmise au greffe de la cour d'appel de Montpellier le même jour à 14 h 44.

Vu les courriels adressés le 19 Août 2024 à MONSIEUR LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES, à l'intéressé, à son conseil et au Ministère Public les informant que l'audience sera tenue le 20 Août 2024 à 10 H 00.

L'avocat et l'appelant, qui ont pu préalablement prendre connaissance de la procédure, se sont entretenus, librement, dans la salle de visio conférence du centre de rétention de Perpignan, les portes de la salle étant fermées pour assurer la confidentialité de l'entretien, en la seule présence de l'interprète et ce, sur le temps de l'audience fixée, avec l'accord du délégué du premier président de la cour d'appel de Montpellier.

L'audience publique initialement fixée à 10 H 00 a commencé à 10 h 16.

PRETENTIONS DES PARTIES

Assisté de [Z] [I], interprète, Monsieur [X] [Y] déclare sur transcription du greffier à l'audience : 'Je m'appelle [X] [Y], je suis né le 09 Novembre 1998 à [Localité 5] (ALGERIE). J'ai communiqué le nom de [J] au début, quand je suis arrivé en France, pour ne pas être reconnu. La France n'est pas vraiment mon objectif, je vis en Espagne et je viens en France pour voir un oncle et des cousins. En Algérie, j'ai tout le reste de ma famille, mes parents et mes frères. Je n'ai pas d'enfant ni de compagne en France, je n'ai que mon oncle. Mon oncle vit à [Localité 3] et j'ai des amis à [Localité 2]. L'adresse que je vous ai communiquée est celle de mon oncle. Je n'ai pas de papiers en France, j'ai pour objectif de régulariser ma situation en Espagne. J'accepte de quitter la France.'

L'avocat Me Mohamed JARRAYA développe les moyens de l'appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a prolongé le maintien en rétention de l'étranger.

- exception de nullité : absence de notification des droits au retenu dès le début de la retenue. Placement en retenue à 21 h 05, avis au procureur à 21 h 07 mais notification des drois seulement à 21 h 55. Aucune circonstance insurmontable n'est évoquée dans le dossier. Un formulaire des droits en langue arabe a été remis à l'intéressé à 22 h 05, soit après la notification. Il s'agit d'un délai excessif qui justifie l'annulation de la procédure. Le fait que 5 personnes ont été interpellées en même temps ne saurait justifier ce délai. Demande remise en liberté.

- subsidiairement, demande assignation à résidence. Il est en possession d'un passeport en cours de validité et a produit une attestation d'hébergement de son oncle.

Monsieur le représentant de MONSIEUR LE PREFET DES PYRENEES-ORIENTALES demande la confirmation de l'ordonnance déférée. Il indique à l'audience :

- sur l'absence de remise d'un formulaire d'information des droits en arabe : ce n'est pas une obligation légale dans le cadre d'un placement en rétention, mais seulement en cas de placement en garde à vue, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.

- sur assignation à résidence : risque de soustraction à la mesure au vu de son entrée irrégulière, de son absence de demande de titre de séjour, il s'est soustrait à l'assignation à résidence ordonnée en 2023, n'a pas de résidence effective et stable et a indiqué ne pas souhaiter retourner dans son pays d'origine mais en Espagne.

Assisté de [Z] [I], interprète, Monsieur [X] [Y] a eu la parole en dernier et a déclaré sur transcription du greffier à l'audience : 'la première assignation à résidence ne m'a pas été notifiée. J'ai vu un avocat qui m'a dit que je pouvais quitter la France pour aller en Espagne'

Le conseiller indique que l'affaire est mise en délibéré et que la décision sera notifiée par les soins du Directeur du centre de rétention de [Localité 4] avec l'assistance d'un interprète en langue arabe à la demande de l'étranger retenu.

SUR QUOI

Sur la recevabilité de l'appel

Le 19 Août 2024, à 14 h 44, Monsieur [X] [Y] a formalisé appel motivé de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Perpignan du 17 Août 2024 notifiée à 17 h 45, soit dans les 24 heures de la notification de l'ordonnance querellée, qu'ainsi l'appel est recevable en application des articles R 743-10 et R743-11 du CESEDA.

Sur l'appel

Au visa de l'article L 743-12 du CESEDA, M. [Y] fait valoir n'avoir reçu de document d'information de ses droits en arabe que 50 minutes après 1e début de la mesure. Il considère qu'avoir été privé de ses droits pendant 50 minutes lui a fait nécessairement grief.

Aux termes de l'article L 813-5 du CESEDA, l'étranger auquel est notifié un placement en retenue en application de l'article L. 813-1 est aussitôt informé, dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, des motifs de son placement en retenue, de la durée maximale de la mesure et du fait qu'il bénéficie des droits suivants :

1° Etre assisté par un interprète ;

2° Etre assisté, dans les conditions prévues à l'article L. 813-6, par un avocat désigné par lui ou commis d'office par le bâtonnier, qui est alors informé de cette demande par tous moyens et sans délai ;

3° Etre examiné par un médecin désigné par l'officier de police judiciaire ; le médecin se prononce sur l'aptitude au maintien de la personne en retenue et procède à toutes constatations utiles ;

4° Prévenir à tout moment sa famille et toute personne de son choix et de prendre tout contact utile afin d'assurer l'information et, le cas échéant, la prise en charge des enfants dont il assure normalement la garde, qu'ils l'aient ou non accompagné lors de son placement en retenue, dans les conditions prévues à l'article L. 813-7 ;

5° Avertir ou de faire avertir les autorités consulaires de son pays.

Lorsque l'étranger ne parle pas le français, il est fait application des dispositions de l'article L. 141-2.

L'article L141-2 énonce que lorsqu'un étranger fait l'objet d'une décision de refus d'entrée en France, de placement en rétention ou en zone d'attente, de retenue pour vérification du droit de circulation ou de séjour ou de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire.

Ces informations sont mentionnées sur la décision de refus d'entrée, de placement ou de transfert ou dans le procès-verbal prévu au premier alinéa de l'article L. 813-13. Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure.

Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français.

En l'espèce, comme l'a relevé le premier juge, M. [Y] a été interpelé à 21 h 05, dès 21 h 07, les forces de l'ordre ont fait appel à un interprète et à 21 h 55, il a pu être entendu avec l'assistance d'un interprète. Aucun placement en garde à vue n'a été prononcé.

Il n'est démontré d'aucun grief alors que la procédure a été respectée.

Le moyen de nullité sera donc rejeté.

SUR LE FOND

En vertu de l'article L742-3 du ceseda : 'Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L. 741-1.'

En application des dispositions de l'article L612-2 du ceseda: 'Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :

1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;

2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ;

3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.'

Et selon l'article L 612-3 du ceseda: 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;

3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;

6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;

7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;

8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.'

En l'espèce, l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure qui est considéré comme établi au visa des articles L 612-2 et L612-3-1°, 5° et 8° du ceseda.

L'article L 743-13 du CESEDA':' «'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'»

En l'espèce, M. [X] [Y], alias [X] [J], ne remplit pas les conditions pour bénéficier d'une assignation à résidence dans la mesure où il ne présente aucune garantie de représentation effective en l'absence de domiciliation fixe et stable en France, la seule adresse d'un oncle fournie étant insuffisante pour en justifier. Il ne dispose d'aucun travail licite sur le territoire. Il reconnait être rentré de manière illégale en France et souhaite repartir en Espagne. Il n'a pas respecté l'assignation à résidence prononcée le 25 septembre 2023.

L'assignation à résidence ne peut en conséquence en l'état être ordonnée.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

Déclarons l'appel recevable,

Rejetons le moyen de nullité et la demande d'assignation à résidence,

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article R743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile,

Fait à Montpellier, au palais de justice, le 20 Août 2024 à 11 h 11.

Le greffier, Le magistrat délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Rétentions
Numéro d'arrêt : 24/00592
Date de la décision : 20/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-20;24.00592 ?
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