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07/02/2012 | FRANCE | N°09/06738

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 07 février 2012, 09/06738


R. G : 09/ 06738

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 07 Février 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de ROANNE Au fond du 03 septembre 2009

RG : 2008/ 115 ch no

SA MAAF

C/
X... Y... Z... SARL ABITEA MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

APPELANTE :

Compagnie MAAF ASSURANCES représentée par ses dirigeants légaux Chaban de Chauray 79081 NIORT CEDEX 09

représentée par la SCP BRONDEL TUDELA
assistée de la SCP VINCENT ABEL DESCOUT ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, substituée par Me ABEL, avocat <

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INTIMES :

Monsieur Samuel X... né le 26 Avril 1973 au PUY EN VELAY (19120)... 42300 ROANNE

représenté par la ...

R. G : 09/ 06738

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 07 Février 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de ROANNE Au fond du 03 septembre 2009

RG : 2008/ 115 ch no

SA MAAF

C/
X... Y... Z... SARL ABITEA MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS

APPELANTE :

Compagnie MAAF ASSURANCES représentée par ses dirigeants légaux Chaban de Chauray 79081 NIORT CEDEX 09

représentée par la SCP BRONDEL TUDELA
assistée de la SCP VINCENT ABEL DESCOUT ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON, substituée par Me ABEL, avocat

INTIMES :

Monsieur Samuel X... né le 26 Avril 1973 au PUY EN VELAY (19120)... 42300 ROANNE

représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE
assisté de Me Yves BISMUTH, avocat au barreau de LYON, substitué par Me CHOUTEAU, avocat

Madame Sabrina Y... née le 06 Mars 1972 à FORT-DE-FRANCE (97200)... 42300 ROANNE

représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE
assisté de Me Yves BISMUTH, avocat au barreau de LYON, substitué par Me CHOUTEAU, avocat

Monsieur David Z... exerçant sous l'enseigne " EURL David Z... " né le 03 Septembre 1982... 43720 POUILLY SOUS CHARLIEU

représenté par Me Christian MOREL
assisté de Me Alain BECKERT, avocat au barreau de LYON

SARL ABITEA représentée par ses dirigeants légaux 47 rue Jean Jaurès 69240 THIZY

représentée par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre
assistée de Me André BUFFARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, substitué par Me BARBERO, avocat

LA MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS ès qualités d'assureur de la SARL ABITEA représentée par ses dirigeants légaux 9 rue Hamelin 75783 PARIS CEDEX 16

représentée par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre
assistée de Me André BUFFARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, substitué par Me BARBERO, avocat

INTERVENANT :

Maître Martine A... ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL ABITEA...... 69400 LIMAS

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 30 Novembre 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Décembre 2011
Date de mise à disposition : 07 Février 2012 Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Françoise CLEMENT, conseiller

assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt réputé ontradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * Monsieur Samuel X... et madame Sabrina Y... ont acquis le 10 février 2005 un immeuble situé à CHANDON ; dans l'intention de réaliser des travaux de rénovation afin d'y constituer leur habitation principale de plus de 300 m ², ils ont contacté l'entreprise de gros œ uvre Z... avec laquelle ils ont signé un marché de travaux, selon devis du 4 décembre 2004.

Monsieur X... et madame Y... ont contacté ensuite la société d'architecture SARL ABITEA à qui ils ont confié en août 2005, une mission de maîtrise d'œ uvre limitée aux seuls lots maçonnerie et charpente/ couverture.
Les travaux ont commencé en février 2006 après obtention du permis de construire et ils ont été interrompus dès le mois d'avril suivant en raison de désaccords persistants entre les maîtres d'ouvrage et les intervenants sur le chantier, au titre notamment du taux de TVA applicable.
Par acte d'huissier du 17 octobre 2006, monsieur X... et madame Y... ont saisi le juge des référés aux fins de voir organiser une mesure d'expertise.
Par ordonnance de référé du 31 octobre 2006, le juge des référés a désigné monsieur I... en qualité d'expert ; ce dernier a déposé son rapport le 13 juillet 2007.
Par acte d'huissier en date du 24 janvier 2008, monsieur X... et madame Y... ont assigné la SARL ABITEA et monsieur Z... David devant le tribunal de grande instance de Roanne, la société MAAF étant mise en cause en cours d'instance en qualité d'assureur de ce dernier.
Par jugement en date du 3 septembre 2009, le tribunal de grande instance de Roanne a :
- constaté que monsieur David Z... et la SARL ABITEA ont, par leur fautes contractuelles, été à l'origine de divers préjudices dont ils doivent réparation envers monsieur X... et madame Y...,
- condamné in solidum monsieur David Z... et la SARL ABITEA à payer à monsieur X... et madame Y..., la somme de 31. 639, 62 € en réparation de ces divers préjudices, chacun d'eux devant supporter en définitive la moitié de la charge de ladite dette,
- condamné monsieur David Z... à rembourser à monsieur X... et à madame Y... la somme de 17. 655, 22 € qu'il avait reçue de ceux-ci,
- condamné la SARL ABITEA à rembourser à monsieur X... et à madame Y... la somme de 5. 557, 21 € qu'elle avait reçue de ceux-ci,
- condamné in solidum monsieur David Z... et la SARL ABITEA aux entiers dépens de la procédure, ainsi qu'à payer à maître J..., avocat au barreau de Roanne, la somme de 2. 000, 00 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la compagnie MAAF Assurances à relever et garantir monsieur David Z... des condamnations prononcées,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- ordonné l'exécution provisoire.
La MAAF, en sa qualité d'assureur de monsieur Z..., a interjeté appel du jugement selon déclaration du 28 octobre 2009.
Par jugement du 7 janvier 2010, la SARL ABITEA a été déclarée en liquidation judiciaire et maître NOIRAIX-PEY désignée en qualité de liquidateur judiciaire.
La MAF, Mutuelle des Architectes Français, en sa qualité d'assureur de la SARL ABITEA a été assignée en intervention forcée par acte d'huissier en date du 11 octobre 2010, à la requête de monsieur X... et de madame Y....
Vu les conclusions signifiées le 4 novembre 2011 par la Compagnie MAAF ASSURANCES qui demande à la cour de :
- débouter monsieur Z... de sa demande tendant à être relevé et garanti par la compagnie MAAF ASSURANCES,
- mettre la MAAF ASSURANCES hors de cause,
En tout état de cause,
- débouter les consorts X... et Y... de l'ensemble de leurs demandes au titre du surcoût des travaux,
- condamner les consorts X... et Y... et monsieur Z..., ou qui d'entre eux mieux le devra à rembourser à la compagnie MAAF ASSURANCES les sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Roanne le 3 septembre 2009, soit 15. 352, 75 €, outre intérêts de droit à compter du 11 novembre 2009, date de ce règlement,
- condamner les consorts X... et Y... et monsieur Z..., ou qui d'entre eux mieux le devra, à verser à la compagnie MAAF ASSURANCES toutes sommes supplémentaires qu'elle serait amenée à régler, toujours au titre de l'exécution provisoire prononcée par le tribunal de grande instance de Roanne le 3 septembre 2009.
Dans l'hypothèse extraordinaire où la cour devrait considérer que la garantie de la MAAF doit s'appliquer,
- dire et juger que les consorts X... et Y... ont participé à l'aggravation de leurs dommages et qu'ils doivent conserver à leur charge une partie des sommes sollicitées au titre de l'indemnisation de leurs préjudices,
- condamner dans ce cas la compagnie MAF à relever et garantir la MAAF pour la fraction concernant la SARL ABITEA en raison des fautes de cette dernière,
En tout état de cause,
- débouter les consorts X... et Y... de leur réclamation tendant à être indemnisés d'un préjudice moral, demande nouvelle et injustifiée.
- condamner monsieur Z..., la MAF, ou qui d'entre eux mieux le devra, à verser à la MAAF la somme de 4. 000, 00 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions signifiées le 30 septembre 2011 par monsieur Samuel X... et madame Sabrina Y... qui demandent à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a reconnu la responsabilité de monsieur Z... et de la société ABITEA,
- faire droit à l'appel incident des consorts X... et Y...,
- fixer la créance des consorts X... et Y... au passif de la société ABITEA à la somme de 2. 740, 55 euros, conformément à leur déclaration de créances,
- faire droit à la mise en cause de la MAF, assureur de la société ABITEA,
- condamner monsieur Z... ou qui mieux le devra à payer les sommes suivantes :-17. 655, 27 € en remboursement des factures réglées,-19. 317, 48 € au titre du surcoût relatif à la maçonnerie,

- condamner la MAF à payer les sommes suivantes :-5. 557, 21 € en remboursement des honoraires perçus par ABITEA,-1. 342, 79 € au titre du surcoût au regard des honoraires du nouvel architecte,

- condamner solidairement monsieur Z... ou qui mieux le devra et la MAF à payer les sommes suivantes :-17. 761, 36 € au titre du surcoût hors maçonnerie,-55. 298, 74 € au titre des préjudices immatériels,-50. 000 € au titre du préjudice moral,

- condamner monsieur Z... ou qui mieux le devra et la MAF aux dépens et à payer aux consorts X... et Y... la somme de 8. 000, 00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions signifiées le 22 novembre 2011 par monsieur Z... David qui demande à la cour de :

A titre principal,
- débouter entièrement monsieur Samuel X... et de madame Sabrina Y... de toutes leurs demandes à l'encontre de monsieur David Z...,
- ordonner la démolition de la nouvelle construction sous une astreinte de 1. 000, 00 € par jour de retard à compter d'un délai de deux mois à partir de la date de la signification de l'arrêt à intervenir,
- condamner monsieur Samuel X... et madame Sabrina Y... à régler à monsieur David Z... la somme de 4. 000, 00 € à titre de dommages et intérêts pour une action et des demandes manifestement abusives outre une somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire et juger que la SARL ABITEA a manqué à son obligation de contrôle, de conseil et de surveillance sur le chantier,
- rejeter tout partage de responsabilité entre la SARL ABITEA et monsieur David Z...,
- dire et juger que la MAF devra relever et garantir entièrement monsieur David Z... de toute condamnation, tant en principal, qu'en dommages-intérêts, intérêts de droit, accessoires, frais, dépens, article 700 du code de procédure civile,
- condamner la MAF, assureur de la SARL ABITEA à payer à monsieur David Z... une somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire et juger que la MAAF assurances doit entièrement garantir monsieur David Z... de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre lui tant en principal qu'en dommages-intérêts, intérêts de droit, accessoires et frais, dépens, article 700 du code de procédure civile,
- condamner la MAAF à verser à monsieur David Z... une somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement monsieur Samuel X... et madame Sabrina Y..., la MAAF et la MAF aux entiers dépens,

Vu les conclusions signifiées le 27 mai 2011 par la MAF qui demande à la cour de :

- réformer le jugement du 3 septembre 2009 en ce qu'il a constaté que la société ABITEA a commis des fautes contractuelles à l'origine des divers préjudices de monsieur X... et de madame Y...,
- réformer le jugement du 3 septembre 2009 en ce qu'il a condamné la société ABITEA in solidum avec monsieur Z... à payer la somme de 31. 639, 62 € et la somme de 2. 000, 00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- réformer le jugement du 3 septembre 2009 en ce qu'il a condamné la société ABITEA à rembourser à monsieur X... et à madame Y... la somme de 5. 557, 21 €,
- confirmer le jugement du 3 septembre 2009 en ce qu'il a estimé que monsieur Z... a commis des fautes contractuelles à l'origine des préjudices des consorts X.../ Y...,
- confirmer le jugement du 3 septembre 2009 en ce qu'il a condamné la compagnie MAAF à relever et garantir monsieur Z...,
- dire que monsieur X... et madame Y... ont commis des fautes en lien direct avec leurs préjudices,
- les condamner à relever et garantir, au moins partiellement, la MAF de toutes condamnations éventuellement prononcées à son encontre,
- dire que l'intégralité des préjudices subis par monsieur X... et madame Y... sont dus à des fautes commises par l'entreprise Z...,
- condamner l'entreprise Z... à relever et garantir la MAF de toutes condamnations éventuellement mises à sa charge,
- dire que la compagnie d'assurance MAAF devra relever et garantir monsieur Z...,
- dire que la société d'architecte ABITEA n'a commis aucune faute à l'origine des préjudices de monsieur X... et madame Y...,
- constater que la MAF ne garantit pas la société d'architecte ABITEA pour une condamnation au titre d'un remboursement d'honoraires,
- débouter monsieur X... et madame Y... de l'intégralité de leur demande au titre de l'indemnisation du préjudice,
- les condamner à restituer à la MAF les sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement du 3 septembre 2009 outre intérêts de droit,
A titre subsidiaire,
- réduire les prétentions des consorts X... et Y... à de plus justes proportions,
- condamner les consorts X... et Y... ou qui mieux le devra, aux dépens et à payer à la MAF la somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître A... ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL ABITEA n'a pas constitué avoué.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 novembre 2011.

MOTIFS ET DÉCISION

-I-Sur les désordres
Il ressort des constatations faites par l'expert I... dans le cadre de ses opérations d'expertise que :

- les travaux de gros oeuvre entrepris par monsieur Z... David ont été interrompus en cours de chantier sans que la protection des murs en pisé ait été assurée ; l'expert a ainsi pu constater lors de sa visite sur les lieux le 22 février 2007, que l'arase d'un long pan de mur en pisé de terre situé face à la façade principale exposée Sud-Est, était dépourvue d'une protection provisoire et ainsi exposée à toutes les intempéries, de nombreuses fissures verticales et horizontales affectant le face intérieure de l'ouvrage,

- le pignon exposé Sud-Ouest et le reste de la façade pignon Nord-Est en pisé de terre étaient en ruine et menaçaient de s'effondrer,
- les linteaux des ouvertures existantes composés de planches de bois étaient dans un état de pourrissement très avancé, des fléchissements naturels étant relevés,
- l'examen des premiers travaux réalisés par l'entreprise de maçonnerie Z... permettait de constater l'absence de planches de coffrage pour la création et le coulage de linteaux en béton, l'absence d'acier TOR 0, 80 au niveau des chaînes d'angle composées de moellons creux et l'absence de film polyane dans la structure de la dalle en béton coulée au niveau rez-de-jardin.
Face à de telles constatations, l'expert préconisait alors la réalisation, en urgence, de travaux de protection du mur de façade en pisé avec mise en place d'une bâche, mise en place d'étaiements fixés sur les madriers tant en façade intérieure qu'extérieure et intervention d'un ingénieur en structure béton armé chargé d'établir les plans détaillés d'une structure secondaire au mur existant.
Monsieur I... ajoutait par ailleurs que les fondations étaient à conserver.
Un constat dressé par huissier le 28 février 2008 à l'initiative de l'entreprise de maçonnerie démontre que le maître de l'ouvrage a entrepris la démolition totale de l'existant y compris les ouvrages réalisés par monsieur Z... tels qu'ils figurent au rapport de l'expert I....

- II-Sur les responsabilités

Aucune réception des travaux n'a pu intervenir alors même que ces derniers ont été interrompus en cours de chantier ; la responsabilité des constructeurs ne peut donc être recherchée que sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, dans le cadre de l'obligation de résultat pesant sur ces derniers.
Les conclusions de l'expert judiciaire ne sont d'aucune ambiguïté ; monsieur I... indique que la société d'architecture maître d'oeuvre qui avait pour mission la réalisation des plans dans le cadre de l'avant-projet et la coordination des lots maçonnerie et charpente/ couverture, n'a fourni qu'un travail succinct, mené avec beaucoup de légèreté, sans faire appel à tort à un technicien en structure béton armé ou sans établir selon ses compétences en la matière, un projet adapté à une structure existante comportant manifestement de gros risques ; il ajoute que la réalisation du projet devait permettre pour satisfaire les exigences de l'administration, la conservation du mur de façade existant en le désolidarisant cependant de la nouvelle structure.
L'expert note que seulement deux réunions de chantier ont été organisées à l'initiative du maître d'oeuvre, alors même que les travaux ont débuté le 2 mars 2006 pour être interrompus fin avril suivant.
L'expert I... ajoute encore que l'entreprise Z... a agi également avec la plus grande légèreté, établissant un devis avant même la réalisation du projet et des plans par l'architecte, réalisant des travaux de gros oeuvre sans respecter les règles de l'art compte tenu notamment de la structure existante et s'abstenant d'assurer la protection du chantier lors de son interruption contrairement aux préconisations alors faites par l'architecte ; l'expert indique en effet que les travaux ont été interrompus à l'initiative de la SARL ABITEA et de monsieur Z... qui craignaient de ne pas être intégralement payés de leurs prestations, compte tenu notamment de la discussion alors en cours avec les maîtres d'ouvrage s'agissant du taux de TVA applicable ; il propose ainsi une responsabilité partagée à raison de 60 % à la charge du maître d'oeuvre et 40 % à la charge de l'entreprise de maçonnerie.
Les manquements susvisés, commis tant par la SARL ABITEA que monsieur Z... ont manifestement participé ensemble à la survenance des désordres tels que relevés par l'expert I... ; ils ont été à l'origine du préjudice subi par les maîtres de l'ouvrage qui contrairement à ce qu'a retenu à tort le premier juge, n'ont commis aucune faute, ni en soumettant des plans réalisés par eux-mêmes au maçon à qui il appartenait alors en tant que professionnel, d'attendre les plans détaillés du maître d'oeuvre pour envisager les travaux nécessaires sauf à refuser la réalisation de ces derniers, ni en discutant le montant du taux de TVA applicable dans la mesure où cette dernière devait être fixée par les constructeurs incapables de prendre position en la matière en annonçant d'abord une TVA à 5, 5 % pour appliquer en second lieu une TVA à 19, 6 %, ni enfin en ne procédant pas eux-mêmes aux travaux de protection indispensable des ouvrages qui relevaient de la mission du maçon, peu important l'absence de précipitations à l'époque de l'arrêt du chantier comme le souligne de façon non pertinente ce dernier qui ne pouvait ignorer l'existence persistante du risque climatique.
La responsabilité de la SARL ABITEA et de monsieur Z... doit donc être retenue en l'espèce, et ces derniers devront réparer l'entier préjudice subi par monsieur X... et madame Y... ; ils supporteront dans leurs rapports entre eux, la charge des paiements dans les proportions justement fixées par l'expert.
La demande présentée par monsieur Z... tendant à voir ordonner la démolition de la construction réalisée par monsieur X... et madame Y... n'est justifiée sur aucun fondement juridique ; elle doit donc être rejetée.
- III-Sur les préjudices
Il ne ressort nullement des conclusions expertales que la démolition intégrale du bâtiment, propriété de monsieur X... et madame Y..., y compris les ouvrages édifiés par l'entreprise Z..., devait être réalisée, l'expert I... indiquant seulement qu'il y avait urgence à réaliser les travaux de protection et étaiements indispensables.
Ni monsieur Z... ni la SARL ABITEA qui ont assisté aux opérations d'expertise et connaissaient donc le caractère urgent des préconisations de l'expert, ne sont intervenus postérieurement au dépôt du rapport de monsieur I... de façon à prendre ou faire prendre toute mesure conservatoire alors même qu'aucune opposition des maîtres de l'ouvrage n'est justifiée en la matière.
Face à l'inaction des constructeurs, la démolition du bâtiment qui menaçait ruine a donc été rendue indispensable à la fin de l'année 2007, la reprise de désordres anciens par de nouveaux locateurs d'ouvrage s'avérant inenvisageable compte tenu des responsabilités encourues ; monsieur X... et madame Y... ont donc été contraints d'accéder aux préconisations des artisans interrogés visant à la démolition entière de l'immeuble ; celle-ci a rendu impossible la remise en état des désordres et l'achèvement du projet architectural initial de l'ouvrage tel qu'il avait pu être prévu initialement.
Contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, le préjudice subi par ces derniers doit donc être retenu à hauteur du surcoût engendré par la reconstruction complète de l'immeuble à laquelle il a été procédé, au titre des lots concernés.
La somme globale justifiée en la matière par monsieur X... et madame Y... s'élève à la somme de 38. 421, 63 € (surcoûts maçonnerie, charpente/ couverture, frais d'architecte), sans que les devis et factures produits au dossier ne révèlent comme le soutient à tort la MAF, l'utilisation de matériaux de qualité supérieure à celle prévue dans le cadre du projet initial.
Il n'est nullement établi par les maîtres de l'ouvrage que la somme de 17. 655, 27 € versée à monsieur Z... à titre d'acompte ne correspond pas à un montant de travaux effectivement réalisés, l'existence de malfaçons qui conduit à l'indemnisation des préjudices ne justifiant nullement le remboursement de cette dernière.
La SARL ABITEA était chargée, aux termes du bon de commande passé le 9 août 2005, de réaliser dans le cadre d'un marché de travaux de gros oeuvre maçonnerie charpente couverture à hauteur de 72. 056, 50 €, un levé d'état des lieux, un avant-projet sommaire, un avant-projet définitif avec demande de permis de construire et la direction des travaux avec vérification des situations.
Il est manifeste qu'en interrompant le chantier avant la fin des travaux alors même que seules deux réunions de chantier avaient été tenues en deux mois, la société d'architecture n'a pas réalisé les prestations pourtant facturées intégralement ; une somme de 1. 296, 45 € TTC devra être remboursée à ce titre aux maîtres de l'ouvrage, remboursement accepté en cause d'appel par l'assureur de la SARL ABITEA qui reconnaît que la mission de direction des travaux et vérification des situations n'a pas été intégralement réalisée.
Il s'avère enfin que dans la mesure où les travaux entrepris par ces derniers ont pris un retard certain du fait de l'interruption du chantier, de l'existence de désordres et de la démolition intervenue après une procédure en référé expertise, des frais de logement supplémentaires ont dû être supportés par monsieur X... et madame Y... qui ne disposaient pas d'une surface financière leur permettant de faire face à une telle situation alors même qu'ils étaient contraints à rembourser les échéances du prêt bancaire contracté pour la rénovation de leur habitation.
L'expert I... indique que les travaux de rénovation entrepris par monsieur X... et madame Y... auraient pu s'étaler sur une durée de neuf mois, prévision justifiant que les intéressés aient donné congé pour l'appartement qu'ils occupaient à la fin décembre 2006 ; les frais de loyers supplémentaires qu'ils ont dû engager devront leur être remboursés jusqu'en septembre 2008, date à laquelle ils auraient dû pouvoir prendre possession de leur nouvelle maison dont la reconstruction avait redémarré dès le mois de janvier précédent ; ils ne justifient d'ailleurs nullement des frais de loyers postérieurs qu'ils invoquent ; une somme de 13. 575, 00 € incluant les frais de bail doit donc leur être allouée de ce chef, outre une somme de 1. 234, 87 € au titre d'un déménagement supplémentaire.
Monsieur X... et madame Y... ont dû également assurer le remboursement des intérêts et frais d'assurance relatifs au prêt bancaire qu'ils avaient contracté pour leur permettre la réalisation des travaux de gros oeuvre ; une somme de 14. 745, 62 € dont le montant n'est pas discuté ne serait-ce qu'à titre subsidiaire, doit encore leur être allouée en la matière sans toutefois que soient pris en compte les nouveaux prêts contractés en 2010 dans le cadre de l'avancement des travaux.
La demande de monsieur X... et madame Y... tendant à l'octroi à leur bénéfice de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral est nouvelle en cause d'appel au sens des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ainsi que le relève à juste titre la MAAF ; elle doit donc être déclarée irrecevable.

- IV-Sur la garantie de la MAAF

Monsieur Z... soutient qu'il bénéficie d'une garantie responsabilité civile auprès de la MAAF qui doit donc garantir intégralement son assuré des condamnations susvisées ; la MAAF soutient quant à elle que le contrat MULTIPRO souscrit par l'intéressé exclut la garantie des dommages causés par les eaux consécutifs à un non bâchage et la garantie des dommages immatériels.
Il est produit au dossier un contrat d'assurance multirisque professionnelle " MULTIPRO " souscrit le 21 avril 2006 à effet du 1er avril précédent par monsieur Z... qui ne conteste pas avoir reçu et accepté les conditions générales, aux termes desquels il est prévu au titre des conventions spéciales no 5 que sous réserve des limites et exclusions prévues au contrat, l'intéressé est garanti lors d'un sinistre, des conséquences pécuniaires (dommages corporels, matériels et immatériels consécutifs) de la responsabilité civile qu'il peut encourir vis-à-vis des tiers, tant pendant l'exercice de son activité professionnelle ou l'exploitation de son entreprise qu'après réception de ses travaux ou livraison de ses produits.

Il est précisé que sont notamment garantis les dommages aux biens existants, survenus avant livraison de biens et/ ou réception de travaux, tant matériels subis par les biens existants (mobiliers et/ ou immobiliers) appartenant aux clients et que l'assuré a endommagés dans le cadre de ses activités professionnelles indiquées aux conditions particulières, qu'immatériels subis par ses clients et seulement s'ils sont Ia conséquence des dommages sus-visés.

Au titre des exclusions de garantie, il est indiqué notamment à l'article 5 (14o et 19o) de la convention spéciale no5 que ne sont garantis ni les frais constitués par le remplacement, la remise en état ou le remboursement de la partie des biens livrés ou des travaux exécutés, cause ou origine du dommage, ainsi que les dommages immatériels en découlant, ni les dommages causés par les eaux, consécutifs à un non bâchage, bâchage non fixé ou bâchage en mauvais état, après abandon du chantier c'est-à-dire l'interruption momentanée des travaux se traduisant par l'absence d'ouvriers sur le chantier, lesquels n'auraient pas pris des précautions élémentaires.
Contrairement à ce que soutient de façon peu sérieuse monsieur Z..., il s'avère que ce contrat s'applique bien à l'entreprise de ce dernier, dont le lieu d'activité est indiqué comme étant situé à Pouilly-sous-Charlieu, commune ne constituant donc nullement le lieu d'un nouveau chantier.
Les condamnations susvisées prononcées à l'encontre de monsieur Z... concernent manifestement des frais constitués par le surcoût lié au remplacement des travaux exécutés ainsi que les dommages immatériels en découlant ; il n'est pas sérieusement contestable par ailleurs que les dommages résultant de l'absence de mesures conservatoires de protection indispensable (étaiements et bâchage sollicités par l'architecte) pour éviter l'effondrement des murs en pisé ne pouvaient présenter un caractère accidentel et être alors pris en charge par la garantie responsabilité civile professionnelle souscrite.
Il sera donc fait droit à l'exception de garantie soulevée par la MAAF qui ne doit pas pour autant être mise hors de cause de la présente instance dans la mesure où sa présence en tant qu'assureur responsabilité civile professionnelle était justifiée.

- V-Sur la garantie de la MAF

Il n'est pas discuté par les parties que la MAF ne garantit pas la restitution par son assuré de tout ou partie du montant de ses honoraires ; la garantie de la MAF n'est cependant pas discutée pour le surplus et elle doit donc être condamnée à payer les sommes susvisées aux maîtres de l'ouvrage ayant initié à son encontre une action directe.

- VI-Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité et la situation économique des parties commandent l'octroi à monsieur X... et madame Y..., en cause d'appel et à la charge in solidum de monsieur Z... et de la MAF, assureur de la SARL ABITEA, d'une indemnité de 4. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Toute autre demande formulée de ce chef sera rejetée.

- VII-Sur la demande en restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement dont appel

Le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement outre intérêts au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ; il n'y a donc pas lieu de statuer sur les demandes présentées à ce titre.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Roanne le 3 septembre 2009 en ce qu'il a constaté que monsieur Z... David et la SARL ABITEA ont, par leurs fautes contractuelles, été à l'origine de divers préjudices dont ils doivent réparation envers monsieur X... et madame Y...,
Le réforme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit et juge que monsieur Z... David et la SARL ABITEA sont entièrement responsables des préjudices subis par monsieur X... et madame Y... au titre des travaux de gros oeuvre charpente et couverture,
Condamne in solidum monsieur Z... David et la MAF en qualité d'assureur de la SARL ABITEA, à payer à monsieur X... et madame Y... les sommes de :
-38. 421, 63 € à titre de dommages-intérêts au titre des surcoûts de construction,
-29. 555, 49 € à titre de dommages-intérêts au titre des dommages immatériels (loyers, frais de bail, déménagement, intérêts et frais d'assurance liés aux prêts bancaires),
Dit et juge que la MAAF ne doit pas sa garantie à son assuré Z... David,
Fixe la créance de monsieur X... et madame Y... à l'encontre de la liquidation judiciaire de la SARL ABITEA à la somme de 1. 296, 45 € à titre de remboursement partiel d'honoraires,
Dit et juge que la demande nouvelle présentée en cause d'appel par monsieur X... et madame Y... au titre de leur préjudice moral est irrecevable,
Condamne monsieur Z... David et la MAF in solidum à payer à monsieur X... et madame Y... une somme de 4. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que dans leurs rapports entre eux, les condamnations mises à la charge in solidum de monsieur Z... David et de la MAF seront supportées à concurrence de 60 % à la charge de la MAF et 40 % à la charge de monsieur Z... David, y compris la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne in solidum monsieur Z... David et la MAF aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront notamment les frais d'expertise qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/06738
Date de la décision : 07/02/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2012-02-07;09.06738 ?
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