La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/01/2023 | FRANCE | N°20/02350

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale d salle 1, 27 janvier 2023, 20/02350


ARRÊT DU

27 Janvier 2023







N° 166/23



N° RG 20/02350 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TKCO



PN/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROUBAIX

en date du

02 Novembre 2020

(RG 18/00121 -section 4)






































<

br>



GROSSE :



aux avocats



le 27 Janvier 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [X] [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christophe PAUCHET, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉE :



S.A. ONEY BANK

[Adresse 2]

[Localité ...

ARRÊT DU

27 Janvier 2023

N° 166/23

N° RG 20/02350 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TKCO

PN/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROUBAIX

en date du

02 Novembre 2020

(RG 18/00121 -section 4)

GROSSE :

aux avocats

le 27 Janvier 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [X] [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christophe PAUCHET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A. ONEY BANK

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Noémie DUPUIS, avocat au barreau de LILLE substituée par Me Bruno PLATEL, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 01 Décembre 2022

Tenue par Pierre NOUBEL

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

Laure BERNARD

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 10 Novembre 2022

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Mme [X] [E] a été engagée par la banque ACCORD, aux droits de laquelle vient actuellement la société ONEY BANK suivant contrat à durée déterminée en date du 1er juin 1999 puis suivant contrat à durée indéterminée en date du 31 décembre 1999, avec reprise d'ancienneté au 1er juin 1999, en qualité de conseillère commerciale.

La convention collective nationale applicable est celle des banques.

Au dernier état de la relation contractuelle, elle occupait les fonctions de manager d'équipe, catégorie cadre au sein de la direction des partenaires de la banque Accord (devenue ONEY BANK)

Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 30 mars 2018, Mme [X] [E] a été convoquée à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, fixé au 9 avril 2018.

Suivant courrier recommandé avec accusé de réception en date du 12 avril 2018, Mme [X] [E] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse.

Le 7 juin 2018, Mme [X] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Roubaix afin de contester son licenciement et d'obtenir réparation des conséquences financières de la rupture du contrat de travail.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes du 2 novembre 2020, lequel a :

- dit que le licenciement de Mme [X] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [X] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- laissé à la charge des parties les frais engagés par chacune,

- condamné Mme [X] [E] aux entiers dépens,

-débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Vu l'appel formé par Mme [X] [E] le 7 décembre 2020,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Mme [X] [E] transmises au greffe par voie électronique le 18 octobre 2022 et celles de la société ONEY BANK transmises au greffe par voie électronique le 18 mai 2021,

Vu l'ordonnance de clôture du 10 novembre 2022,

Mme [X] [E] demande :

- de " réformer " le jugement déféré,

- de condamner la société ONEY BANK à lui payer :

- 62.720 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société ONEY BANK aux éventuels dépens de la procédure.

La société ONEY BANK demande :

à titre principal :

- de juger que le licenciement de Mme [X] [E] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouter Mme [X] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- de confirmer le jugement déféré,

- de condamner Mme [X] [E] à lui payer 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de mettre à sa charge les entiers dépens,

à titre subsidiaire :

- de limiter le montant de l'indemnisation allouée à Mme [X] [E] à l'équivalent de 3 mois de salaires, soit la somme de 7.759,62 euros et, en tout état de cause, à une somme qui ne saurait excéder 38.798,10 euros.

SUR CE, LA COUR

Sur le bien-fondé du licenciement

Attendu que la cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité ;

Qu'elle doit être existante et exacte ;

Que la cause sérieuse concerne une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles ;

Que le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce ;

Attendu qu'aux termes du courrier de licenciement du 12 avril 2018, l'employeur reproche à deux griefs, à savoir :

- une pratique de discrimination à l'embauche en raison de l'état de santé de Madame [M] [C],

- une non détection de la situation de détresse de Madame [L] [O] ;

Qu'il est allégué en substance par l'employeur :

-que Madame [M] [C], salarié de la société Auchan, principal actionnaire de l'employeur a été mis à disposition de la société ONEY BANK dans le cadre d'une mission à durée déterminée et affectée dans l'équipe manager par la salariée. Alors qu'il était question que Mme [C] soit engagée par la société ONEY BANK, celle-ci a informé Mme [X] [E] de ce qu'elle risquait de subir une intervention chirurgicale susceptible de la rendre indisponible pendant deux à trois mois. Dans le cadre d'une conversation du 7 février 2018, Mme [X] [E] lui a déclaré que l'on ne pouvait se permettre de la prendre si elle faisait l'objet d'un arrêt, en précisant de façon catégorique que l'on ne la prendrait pas s'il s'absentait 2 mois. Par la suite, en dépit des solutions proposées par Mme [C], qui lui proposait de ne pas se faire opérer de demander de ne pas se mettre en arrêt maladie, la salariée lui a répondu qu'il était trop tard, alors que le lendemain elle faisait observer à Mme [C] que de toute façon elle aurait été remerciée pendant la période d'essai. Ces déclarations ont fortement perturbé cette dernière. Finalement, celle-ci sera engagée. Les propos tenus par Mme [X] [E] sont constitutifs d'une pratique discriminatoire à l'embauche en raison de l'état de santé de Mme [C], incompatible avec la mission allouée à Mme [X] [E] et susceptible d'engager la responsabilité de l'employeur.

Qu'alors que le 15 janvier 2018, à Mme [L] [O] collaboratrices de la salariée, l'a pas interrogée sur les conditions de sa reprise à temps partiel de 80 % à l'issue de son congé maternité prévu pour le 13 février suivant, au motif qu'elle avait souhaité bénéficier d'un aménagement horaire, tout particulièrement en raison du caractère tardif d'une journée qui l'amenait à terminer à 21 heures, heure incompatible avec l'allaitement de son dernier-né. Cette requête a fait l'objet d'un refus de la part de Mme [X] [E] occasionnant une situation de détresse émotionnel à Mme [O] que Mme [X] [E] a minimisé auprès de sa supérieure hiérarchique, en considérant que ce trouble est la conséquence du caractère de l'intéressé. Cet égard, l'employeur considère qu'en dépit de son rôle de manager, Mme [X] [E] n'a pas été capable de détester ce qui constitue une situation de détresse d'une de ses collaboratrices.

Attendu que la teneur des griefs reprochés à Mme [X] [E] se voit en tout premier lieu démontrée par la production des témoignages de Mme [M] [C], qui confirme sans équivoque les propos de par Mme [X] [E], ;

Qu'au surplus, la teneur de ces déclarations n'est pas formellement contestée par l'appelante ;

Qu'il en est de même s'agissant de sa prise de position prise au sujet des modifications sollicitées par Mme [O] ;

Que toutefois, Mme [X] [E] produit aux débats une attestation émanant de Mme [I] [P] dont il ressort que Mme [X] [E] avait fait part de sa parfaite satisfaction quant au travail fourni par Mme [C], soulignant qu'elle comptait la garder dans la cadre d'un CDI, de sorte qu'elle a demandée d'accélérer sa formation et qu'elle soit prioritaire sur un poste ;

Que le témoin souligne qu'a cet égard, le souhait de la salariée a été constant ;

Que même si les propos tenus par la suite par Mme [X] [E] n'étaient en rien recevables, cette attitude se voit relativisée par le fait qu'in fine, il n'apparaît pas que la décision définitive d'embauche lui revenait ;

Que s'agissant du grief relatif à la situation de Mme [O], la cour constate que le courrier adressé par Mme [X] [E] cette dernière le 17 janvier 2018 a été avalisé par M. [U] [G] [R], alors que Mme [A] [K], supérieure hiérarchique de l'appelante en avait connaissance ;

Que dans le cadre d'une attestation circonstanciée, la même Mme [L] [O] déclare qu'est sans fondement le fait d'affirmer, dans le courrier de licenciement de Mme [X] [E] que cette dernière a manqué à détecter sa situation de détresse ;

Que le témoin souligne qu'elle n'a, de façon générale, rien à lui reprocher, à l'issue d'une collaboration d'une dizaine d'années, et qu'il eut été opportun de la contacter afin de recueillir son avis ;

Qu'il s'ensuit que le grief retenu par l'employeur particulièrement en termes de conséquences sur la santé et le quotidien de Mme [O] se voit très largement relativisé par ses propres déclarations ;

Attendu qu'en tout état de cause, Mme [X] [E] avait, au moment de licenciement une ancienneté de l'ordre de 19 ans au sein de l'entreprise ;

Qu'elle n'a jamais fait l'objet d'une quelconque sanction au long de la durée la relation contractuelle, tout particulièrement depuis que le statut de cadre lui a été accordé ;

Que dans ces conditions, même si l'employeur pouvait être fondé à la sanctionner pour attitude parfaitement inadéquate envers Mme [C], les griefs retenus dans le cadre du courrier de licenciement ne suffisaient pas pour autant à justifier la rupture de contrat de travail de la salariée ;

Que la mesure prise revêt donc un caractère disproportionné, et rend le licenciement de Mme [X] [E] sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que la cour a les éléments suffisants compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée la salariée (qui a perçu un salaire brut fiscal de l'ordre de 34 264 euros en 2017) de son âge (pour être née en 1972), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, (la salariée ayant retrouvé un emploi en janvier 2019 ) de son ancienneté dans l'entreprise (pour avoir été engagé en juin 1999 ) et de l'effectif de celle-ci, pour fixer le préjudice à 34.000 euros, en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, tel qu'applicable en l'espèce ;

Sur l'application d'office des dispositions de l'article L1235-4 du code du travail en faveur de Pôle Emploi

Attendu que le salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté et l'entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur à Pôle Emploi des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de six mois en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail ;

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement entrepris,

STATUANT à nouveau,

DIT le licenciement de s sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société ONEY BANK à payer à Mme [X] [E] :

- 34.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ORDONNE le remboursement par la société ONEY BANK à Pôle Emploi des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de six mois en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail,

CONDAMNE la société ONEY BANK aux dépens,

VU l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société ONEY BANK à payer à Mme [X] [E] :

- 2.000 euros au titre de ses frais de procédure,

DÉBOUTE la société ONEY BANK de sa demande au titre de ses frais irrépétibles

LE GREFFIER

Annie LESIEUR

LE PRÉSIDENT

Pierre NOUBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale d salle 1
Numéro d'arrêt : 20/02350
Date de la décision : 27/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-27;20.02350 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award