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12/01/2023 | FRANCE | N°21/01031

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 1, 12 janvier 2023, 21/01031


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 1



ARRÊT DU 12/01/2023





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/01031 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TOQS



Jugement (N° 19/04482)

rendu le 08 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer







APPELANTS



Monsieur [S] [F]

né le 16 décembre 1944 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 3]

[Localité

1]



Monsieur [U] [F]

né le 15 Mai 1955 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 9]

[Localité 7]



représentés par Me Moussa Koné, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat constitué aux lieu et place de Me ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 12/01/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/01031 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TOQS

Jugement (N° 19/04482)

rendu le 08 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer

APPELANTS

Monsieur [S] [F]

né le 16 décembre 1944 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 3]

[Localité 1]

Monsieur [U] [F]

né le 15 Mai 1955 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 9]

[Localité 7]

représentés par Me Moussa Koné, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat constitué aux lieu et place de Me François Lestoille, avocat

INTIMÉES

Madame [Z] [D]

née le 12 août 1967 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Romain Bodelle, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat constitué

Madame [V] [F] épouse [D]

née le 15 mai 1947 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 4]

[Localité 6]

représentée par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Caroline Matrat-Maenhout, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat plaidant

Madame [X] [B] épouse [P]

née le 17 juillet 1970 à [Localité 5] ([Localité 5])

demeurant [Adresse 10]

[Localité 6]

représentée par Me Hervé Leclercq, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 29 septembre 2022 tenue par Camille Colonna magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2023 après prorogation du délibéré en date du 1er décembre 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 29 septembre 2022

****

Mme [C] [A] [K], née le 9 janvier 1927 à [Localité 5], veuve non remariée de M. [E] [I] [G] [F], est décédée le 12 janvier 2015.

Suivant acte de notoriété dressé par Me [L], Mme [K] a laissé pour lui succéder, en qualité d'héritiers : M. [S] [F], M. [U] [F] et Mme [V] [F] épouse [D] (ses enfants) et Mme [X] [B] (sa petite-fille venant en représentation de [J] [F], sa mère pré-décédée, elle-même fille de la défunte).

Un immeuble à usage commercial sis [Adresse 8] à [Localité 5] et la moitié d'une maison à usage d'habitation sise [Adresse 12] à [Localité 7] dépendent de la succession.

Mme [Z] [D], fille de Mme [V] [F] épouse [D], a reçu de sa grand-mère avant le décès de celle-ci, la somme de 77 000 euros.

M. [S] [F] et M. [U] [F] ont engagé une procédure judiciaire afin d'obtenir le rapport à la succession de cette somme et l'ouverture des opérations de partage.

Par jugement contradictoire du 8 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer a :

-déclaré irrecevables les demandes de MM. [S] et [U] [F] aux fins d'ouverture des opérations de partage et de rapport à la succession,

-condamné in solidum MM. [S] et [U] [F] à payer à Mme [Z] [D], Mme [V] [F] et Mme [X] [B] la somme de 1 200 euros chacune au titre des frais irrépétibles,

-condamné les mêmes in solidum aux dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître Romain Bodelle, Maître Caroline Matrat et Maître Frédérique Van Rooy »,

Par déclaration du 15 février 2021, MM. [S] et [U] [F] ont interjeté appel de ce jugement et, aux termes de leurs dernières conclusions remises le 27 septembre 2022, demandent à la cour de :

- ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [C] [K],

- désigner Maître [R], notaire à [Localité 5], pour y procéder ou tel notaire qu'il plaira à la cour,

- dire et juger que Mme [Z] [D] doit rembourser à la succession la somme de 77 000 euros au titre du prêt reçu,

- à titre subsidiaire, au cas la cour estimerait que Mme [Z] [D] a reçu une donation, dire et juger que Mme [Z] [D] devra intervenir aux dites opérations pour que soit chiffré le rapport à succession qu'elle doit effectuer au titre de la donation reçue,

- dire et juger n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile au profit des intimées,

- annuler le constat de l'étude Sinequae,

- dire et juger que M. [U] [F] n'est pas tenu à une indemnité d'occupation pour l'immeuble de la défunte sis [Adresse 12] à [Localité 7],

- dire et juger que Mme [D] [F] est tenue à une indemnité d'occupation pour l'immeuble de la défunte sis [Adresse 12] à [Localité 7] et pour l'immeuble commercial sis à [Adresse 13].

- condamner chacune des intimées, exceptée Mme [B], à payer à Messieurs [F] 1 500 euros par application de l'article 700 code de procédure civile,

- condamner solidairement les intimées en tous les frais et les dépens de premier ressort et d'appel dont distraction au profit de Me Lestoille. »

Au soutien de leurs prétentions, sur le fondement des articles 815 et suivants et 1347 et 1348 du code civil et 648 du code de procédure civile, les appelants font valoir que leurs demandes sont recevables dès lors qu'ils ont effectué de vaines démarches amiables tant par l'envoi de courriers de leur notaire, Me [R], aux successifs notaires des défenderesses (Me [L], puis Me [H] de l'étude [T]), que par la diligence d'une procédure de médiation à laquelle Mme [Z] [D] ne s'est pas présentée malgré deux convocations. Ils soutiennent que Mme [Z] [D], n'ayant pas la qualité d'héritière, n'a aucune qualité juridique (selon l'article 31 code de procédure civile) pour refuser ou demander l'ouverture des opérations et proposer le choix d'un notaire.

Ils soutiennent que Mme [Z] [D] doit rapporter à la succession la somme perçue à titre de prêt consenti par la défunte, l'absence d'écrit ne justifiant pas que soient écartés les autres éléments de preuve apportés, et subsidiairement, si la preuve de la remise à titre de prêt n'était pas admise, le montant de la donation reçue dans la limite de la quotité disponible.

Ils indiquent que M. [U] [F] ne demeure pas dans l'immeuble dépendant de la succession situé [Adresse 12] à [Localité 7] mais dans l'immeuble voisin, au numéro 8, et soulèvent la nullité de l'acte d'huissier produit par Mme [V] [F] épouse [D].

Ils ajoutent que Mme [V] [F] épouse [D] est redevable d'une indemnité d'occupation pour avoir détenu les clefs des immeubles sans leur accord et perçu des loyers.

Par conclusions remises le 29 septembre 2022, Mme [Z] [D] demande à la cour de confirmer le jugement déféré, subsidiairement, de déclarer la demande d'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession de Mme [K] irrecevable à son égard.

Au visa de l'article 847 du code civil, elle demande à la cour de débouter les appelants de leur demande de rapport à la succession de la donation et, subsidiairement, d'ordonner l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession de Mme [K], de désigner tel notaire qu'il lui plaira pour y procéder à l'exception de Maître [R], de débouter Messieurs [F] de leur demande indemnitaire et de les condamner au paiement d'une indemnité d'occupation, à fixer par le notaire, justifiée par sa jouissance privative de l'immeuble dépendant de la succession, sis à [Localité 11] ; en tout état de cause, de les condamner solidairement aux entiers frais et dépens outre la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Romain Bodelle, avocat aux offres de droit.

Sur le fondement des articles 31 et 847 du code civil, Mme [Z] [D] fait valoir que les appelants ne peuvent régulariser les causes d'irrecevabilité acquises en première instance.

Au fond elle soutient qu'elle n'a pas vocation à être attraite en ouverture des opérations de liquidation partage de la succession de sa grand-mère, n'ayant pas la qualité d'héritière, que les appelants échouent à apporter la preuve que la somme reçue de sa grand-mère l'aurait été à titre de prêt et qu'elle n'est pas tenue de rapporter ce don.

Aux termes de ses dernières conclusions reçues le 29 juin 2022, Mme [V] [F], épouse [D], demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné MM. [S] et [U] [F] à lui payer la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, et statuant à nouveau, de :

- ordonner l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de Mme [K],

- désigner tel notaire qu'il plaira à la cour pour y procéder, à l'exception de Maître [R] et de Maître [M] ou de tout autre notaire associé [T],

- dire que le notaire désigné devra notamment procéder à l'évaluation des immeubles dépendant de la succession,

- condamner M. [U] [F] au paiement d'une indemnité d'occupation, qui sera fixée par le notaire désigné, au titre de sa jouissance privative de l'immeuble dépendant de la succession sis à [Adresse 12],

- débouter MM. [S] et [U] [F] de leur demande de fixation d'une indemnité d'occupation à son encontre pour les immeubles sis [Adresse 12] à [Localité 11] et [Adresse 8] à [Localité 5],

- dire que Mme [Z] [D] n'a pas qualité d'héritière et qu'elle n'a pas à faire rapporte à la succession de sa grand-mère,

- débouter Messieurs [F] de leurs prétentions plus amples ou contraires,

- confirmer leur condamnation pour frais irrépétibles,

- dire n'y avoir lieu à condamnation des intimées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les frais et dépens seront employés en frais privilégiés de partage dans le cadre des opérations à venir.

Sur le fondement des articles 815 et suivants du code civil et 1360 du code de procédure civile, Mme [D] soutient qu'il convient que soient ordonnées les opérations de partage judiciaire de la succession de Mme [K] et détaille les éléments d'actif et de passif. Elle fait valoir que les liquidités englobent les loyers perçus encaissés par le notaire en charge de la gestion locative et soutient qu'elle ne détient pas les clefs des immeubles, qu'au contraire M. [U] [F] se réserve une jouissance privative de l'immeuble du [Adresse 12] à [Localité 7], ce qui le rend débiteur d'une indemnité d'occupation et que le constat de l'huissier de justice n'est pas nul, la date y apparaissant. Elle ajoute que sa fille, Mme [Z] [D], n'a pas à rapporter à la succession de sa grand-mère la donation qui lui a été faite de la somme de 77 000 euros.

Par conclusions remises le 20 septembre 2022, Mme [X] [B] demande à la cour d'infirmer la décision du 8 décembre 2020, et, en conséquence, de :

- ordonner les opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [K],

- désigner tel notaire qu'il plaira à la cour pour y procéder,

- dire que le notaire désigné devra notamment procéder à l'évaluation des deux immeubles dépendant de la succession,

- condamner M. [U] [F] au paiement d'une indemnité d'occupation qui sera fixée par le notaire désigné au titre de sa jouissance privative de l'immeuble dépendant de la succession, sis à [Adresse 12],

- débouter MM. [S] et [U] [F] de leurs demandes de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les frais et dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

Elle fait valoir que les démarches en vue d'un partage amiable ont été effectuées dans le cadre de la procédure d'appel et que la situation demeure figée, raison pour laquelle elle sollicite que soit ordonné le partage. Elle soutient que M. [U] [F], occupant l'immeuble sis [Adresse 12] à [Localité 11], est débiteur d'indemnité d'occupation à rapporter à la succession.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non-recevoir

L'article 1360 code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, l'assignation en partage contient un descriptif sommaire du patrimoine à partager et précise les intentions du demandeur quant à la répartition des biens ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable.

Il est néanmoins constant que l'irrecevabilité est écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.

En l'espèce, les diligences amiables dont il était fait état en première instance concernaient le rapport à la succession de la somme remise à Mme [Z] [D] qui n'a pas la qualité d'héritière et non des démarches envers les cohéritiers en vu du partage amiable des biens. A défaut de remplir les exigences posées par l'article 1360 précité, l'action en première instance l'action était irrecevable.

Cependant, la démonstration des démarches requises par l'article 1360 du code de procédure civile est faite en cause d'appel et l'action est désormais recevable, toutes les parties y adhérant au demeurant.

Sur le fond

Sur la demande d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage

Selon l'article 720 du code civil, les successions s'ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt.

Aux termes de l'article 815 du même code, nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention.

L'article 31 du code de procédure civile rappelle que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Mme [Z] [D], petite-fille de Mme [K], n'est pas héritière de cette dernière et ne peut donc se voir assigner en ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de celle-ci, mais la demande de MM. [F] à cette fin n'est pas dirigée expressément contre elle ; elle ne peut davantage demander cette ouverture, sa demande à cette fin est donc irrecevable.

Compte tenu toutefois de l'accord des quatre héritiers sur l'ouverture des opérations successorales en raison de l'échec des démarches visant au partage amiable, il y a lieu de l'ordonner.

Dans un souci d'impartialité et de sérénité, il y a lieu de désigner pour y procéder un notaire n'ayant pas eu à connaître particulièrement des intérêts de l'une au l'autre des parties.

Sur le rapport à la succession des sommes perçues par Mme [Z] [D]

L'article 843 du code civil dispose que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement. Mme [Z] [D], n'étant pas héritière de sa grand-mère, n'est donc pas tenue de rapporter un éventuel don reçu de celle-ci à la succession.

L'article 847 précise que « les dons et legs faits au fils de celui qui se trouve successible à l'époque de l'ouverture de la succession sont toujours réputés faits avec dispense du rapport ; le père venant à la succession du donateur, n'est pas tenu de les rapporter ». Il en résulte que Mme [V] [F], épouse [D], ne serait pas tenue de rapporter à la succession un éventuel don fait à sa fille [Z] par la défunte.

Mais ces questions ne se posent pas puisque, si les appelants utilisent certes parfois le terme de « rapport », il ressort de leurs écritures qu'ils demandent en réalité le remboursement d'un prêt que la défunte aurait consenti à Mme [Z] [D].

La remise de 77 000 euros par Mme [K] à sa petite-fille, Mme [Z] [D], en septembre 2012 n'est pas contestée.

Il est constant que l'intention libérale ne se présume pas.

Or, Mme [Z] [D], à qui incombe la preuve de la qualification de don qu'elle attribue à cette remise, n'apporte aucun élément probant en ce sens, alors que différents éléments plaident en faveur d'un prêt, notamment la disproportion que présenterait un don de ce montant par rapport aux revenus et besoins de la défunte dont le discernement n'est pas discuté, l'existence d'une précédente remise de fonds par Mme [K] à sa petit-fille sans écrit et dont il n'est pas contesté qu'il s'agissait d'un prêt, démontrant que la défunte se contentait d'un engagement de remboursement verbal, l'absence de déclaration par Mme [Z] [D] à l'administration fiscale de la somme remise qui se serait imposée, compte tenu de son montant, s'il s'était agi d'une donation, enfin la réticence de Mme [Z] [D] à s'expliquer à ce sujet que traduit son défaut de comparution à la médiation qui lui a été proposée.

Il appartient donc à Mme [Z] [D] de rembourser ce prêt à la succession.

Sur les demandes d'indemnité d'occupation

L'article 815-9 du code civil dispose notamment que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

Il est constant que seule l'impossibilité pour les autres indivisaires de jouir du bien indivis caractérise un usage privatif susceptible de fonder un droit à indemnité.

Si l'encombrement par les effets personnels de M. [U] [F] d'une partie du garage de l'immeuble du [Adresse 12] à [Localité 7] n'est pas démentie, les intimées ne démontrent pas être privées d'accès à l'immeuble et il ressort au contraire des pièces versées aux débats qu'elles disposent des clés du logement et ont pu y accéder librement pour faire réaliser un constat d'huissier de justice le 21 août 2019, dont la nullité alléguée n'est pas démontrée dès lors que la date est mentionnée en bas des pages et qui ne mentionne aucune constatation relative à une impossibilité d'accès, et faire procéder à des opérations d'estimation qu'attestent les avis de valeur produits aux débats sans que ne soient démontrées des difficultés d'accès.

Les appelants, pour leur part, ne démontrent pas davantage ne pas avoir pu pénétrer librement dans l'immeuble sis à [Localité 5], le fait que les clés dudit immeuble soient déposées à une étude notariale n'indiquant nullement qu'elles ne leur soient pas accessibles et a fortiori par la faute de Mme [V] [F], épouse [D], et dans ces conditions, l'éventuelle perception par celle-ci de loyers revenant à l'indivision successorale peut donner lieu à rapport à la succession mais non caractériser une jouissance privative.

Les demandes de condamnation au paiement d'indemnités d'occupation ne peuvent donc qu'être rejetées.

***

Les demandes de donner acte, dire et juger ou constater ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile et il ne sera pas statué sur ces demandes.

Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile, la nature du litige, l'accord des parties sur la demande d'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage, et chaque partie succombant partiellement en ses demandes, il est équitable de laisser à chacune d'elles la charge des frais irrépétibles qu'elle a exposés et de dire que les frais et dépens seront employés en frais privilégiés de partage dans le cadre des opérations à venir.

PAR CES MOTIFS

La cour

infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau,

déclare recevables les demandes de MM. [S] et [U] [F],

déclare irrecevable la demande de Mme [Z] [D] d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [C] [K], veuve [F],

ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [C] [A] [K], veuve [F],

désigne le président de la chambre interdépartementale des notaires du Nord-Pas de Calais, avec faculté de délégation, sauf au profit de l'étude Opérandi, de Me [L], de Me [R] et de Me [N], afin d'y procéder, en ce compris l'évaluation des immeubles dépendants de la succession,

condamne Mme [Z] [D] à payer à l'indivision successorale la somme de 77 000 euros,

déboute M. [S] [F] et M. [U] [F] de leur demande d'annulation du procès-verbal de constat du 21 août 2019,

déboute Mme [V] [D], Mme [Z] [D] et Mme [X] [B] de leur demande de condamnation de M. [U] [F] au paiement d'une indemnité d'occupation,

déboute M. [S] [F] et M. [U] [F] de leur demande de condamnation de Mme [V] [D] au paiement d'une indemnité d'occupation,

déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

dit que les frais et dépens seront employés en frais privilégiés de partage.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 1
Numéro d'arrêt : 21/01031
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;21.01031 ?
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