République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 30/05/2011
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N° de MINUTE :
N° RG : 11/01774
DEFERE
Ordonnance (N° 10/07276)
rendue le 01 Mars 2011
par le Conseiller de la mise en état de la Cour d'Appel de DOUAI
REF : JD/AMD
DEMANDEUR AU DEFERE
Monsieur [P] [N]
né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 7] (ITALIE)
demeurant [Adresse 5]
[Localité 3]
Représenté par la SCP LEVASSEUR CASTILLE LEVASSEUR, avoués à la Cour
Assisté de Maître Jacques WALLON, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER
DEFENDERESSES AU DEFERE
S.A. ALLIANZ IARD venant aux droits d'AGF IART
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 2]
S.A. ALLIANZ VIE anciennement dénommée AGF VIE
ayant son siège social [Adresse 4]
[Localité 2]
Représentés par la SCP DELEFORGE ET FRANCHI, avoués à la Cour
Assistées de Maître Stéphane BOUILLOT, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ
Evelyne MERFELD, Président de chambre
Martine ZENATI, Président de chambre
Joëlle DOAT, Conseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Nicole HERMANT
DÉBATS à l'audience publique du 04 Avril 2011 après rapport oral de l'affaire par Evelyne MERFELD
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2011 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Evelyne MERFELD, Président, et Nicole HERMANT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par jugement en date du 2 juin 2009, le tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER a :
- débouté M. [P] [N] de sa demande de compensation
- condamné celui-ci à verser aux sociétés AGF IART et AGF VIE la somme de 531 185, 65 euros
- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2004, date de la première mise en demeure
- dit que les intérêts au taux légal se capitaliseront, en application de l'article 1154 du code civil
- condamné M. [P] [N] à payer aux sociétés AGF IART et AGF VIE la somme de 3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant les frais d'expertise.
M. [P] [N] a interjeté appel de ce jugement, par déclaration remise au greffe de la Cour le 18 octobre 2010.
Par ordonnance en date du 1er mars 2011, le conseiller de la mise en état de la Cour a déclaré irrecevable l'appel interjeté par M. [P] [N] à l'encontre du jugement en date du 2 juin 2009, débouté la SA ALLIANZ IARD et la SA ALLIANZ VIE de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. [P] [N] aux dépens de l'incident.
Par conclusions en date du 14 mars 2011, M. [P] [N] a déféré cette ordonnance à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 914 alinéa 2 du code de procédure civile.
Il demande à la Cour d'infirmer l'ordonnance et de dire que son appel est recevable.
Il soutient qu'il n'a pas eu connaissance de l'acte de signification, qu'en effet, il n'a pas trouvé dans sa boîte aux lettres l'avis de passage déposé par l'huissier, ni le courrier simple adressé par ce dernier.
Il fait observer que l'huissier, qui le connaît, n'a pas pris soin de se présenter à son domicile à une heure à laquelle il était assuré de le rencontrer.
Il explique qu'il habite dans un immeuble qui comporte deux passages avec des portails différents, et deux boîtes aux lettres, l'une sur laquelle figure son nom, la seconde portant le numéro 100 sans aucun nom, que l'acte d'huissier ne mentionne pas l'existence des deux portails portant tous les deux le numéro 3 de façon très apparente, que tout laisse à penser que l'huissier, puis le facteur ont déposé l'avis de passage et le courrier simple dans la boîte aux lettres métallique rectangulaire posée sur le mur qui ne porte pas son nom et qu'il ne relève jamais, et non pas dans sa boîte aux lettres en fonte sur pied.
Il en déduit qu'il existe un doute quant à la régularité de l'acte de signification dans ses éléments concernant le dépôt de l'avis de passage et l'envoi du courrier simple.
Dans leurs conclusions en date du 17 mars 2011, les sociétés ALLIANZ IARD et ALLIANZ VIE (anciennement dénommées AGF IART et AGF VIE) demandent à la Cour :
- de confirmer l'ordonnance
- de dire l'appel de M. [N] tardif et par suite irrecevable
- de débouter M. [N] de sa demande de jonction de procédure et de sa demande de sursis à statuer
- de le condamner au paiement de la somme de 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elles font valoir que la signification du jugement a été effectuée à l'adresse mentionnée sur la déclaration d'appel et sur toutes les conclusions signifiées dans l'intérêt de M. [N], que le domicile a été confirmé par la présence de son nom sur la boîte aux lettres, que l'affirmation de celui-ci selon laquelle il n'a pas vu dans sa boîte aux lettres l'avis de passage et le courrier simple n'a aucune influence sur la régularité de la signification du jugement critiqué.
Elles ajoutent que, devant le conseiller de la mise en état, M. [N] faisait plaider que l'explication résidait peut-être dans le fait que ces actes avaient été établis en période estivale, tandis qu'il soutient aujourd'hui qu'il n'était pas en congé le mercredi 29 juillet 2009, qu'il a en outre attendu cinq mois après la signification des conclusions d'ALLIANZ le 14 mai 2010 dans le cadre de la procédure d'appel du jugement rendu le 27 novembre 2007 par le tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER, accompagnée de la communication du jugement critiqué et du certificat de non appel, pour interjeter appel le 18 octobre 2010.
Elles relèvent que le constat d'huissier a été dressé à la demande de M. [N] le 10 décembre 2010, soit plus d'un an après la signification du jugement, de sorte que rien ne prouve que les lieux avaient cette configuration à la date de la dite signification, qu'il ressort du constat d'huissier qu'il n'existe qu'une seule boîte aux lettres au numéro 3, qu'il apparaît d'ailleurs que la personne qui habite au rez-de-chaussée de la villa est liée à M. [N] puisque le nom porté sur le deuxième interphone est [N] [S].
Elles affirment que l'huissier n'avait pas l'obligation de se présenter au domicile à une heure à laquelle il était assuré de rencontrer M. [N].
SUR CE :
L'article 538 du code de procédure civile énonce que le délai de recours
par voie ordinaire est d'un mois.
Selon l'article 528 du même code, ce délai court à compter de la notification du jugement.
M. [P] [N] soulève l'irrégularité de la signification du jugement rendu le 2 juin 2009 effectuée le 29 juillet 2009.
En application de l'article 655 du code de procédure civile, si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence; l'huissier de justice doit laisser, dans tous les cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise.
L'article 656 du même code précise que si personne ne peut ou veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice dont il sera fait mention dans l'acte de signification que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile, que, dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655, que cet avis mentionne en outre que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier en justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.
L'acte de signification a été délivré à M. [P] [N], [Adresse 6], par dépôt en l'étude de l'huissier.
Cet acte mentionne que la signification à domicile ou à résidence s'est avérée impossible au motif que le destinataire était absent lors du passage de l'huissier, que son lieu de travail était inconnu, qu'aucune personne n'était présente au domicile et que l'intéressé n'avait pas donné suite à la convocation de l'huissier.
L'acte précise que le nom du destinataire figure sur la boîte aux lettres, qu'un avis de passage daté a été laissé le même jour au domicile l'avertissant du dépôt en l'étude de l'huissier de la copie et mentionnant la nature de l'acte et le nom du requérant et que l'intéressé a été avisé de la signification au plus tard le premier jour ouvrable suivant la date de l'acte par lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage.
La copie de la lettre simple de l'huissier datée du 30 juillet 2009 est versée aux débats.
S'agissant de la configuration des lieux, le constat d'huissier dressé le 10 décembre 2010 fait apparaître la présence d'un numéro 3 et celle d'une boîte aux lettres métallique positionnée très exactement à l'aplomb du numéro 3, sur laquelle est apposée une plaque en aluminium gravée M. et Mme [N].
Un second portail d'accès se trouve un peu plus bas, à l'extrémité d'une allée, portant également le numéro 3 et une boîte aux lettres sans nom.
M. [N] n'explique pas dans ces conditions pour quel motif l'huissier, puis le facteur, auraient déposé l'avis de passage et la lettre simple dans une autre boîte aux lettres que celle qui se trouvait à côté du numéro 3 et qui portait en toutes lettres le nom de M. [N], l'huissier ayant expressément mentionné dans l'acte de signification que le nom du destinataire figurait sur la boîte aux lettres.
Les prescriptions des articles 656 et 658 du code de procédure civile relatives au dépôt de l'avis de passage et à l'envoi de la lettre simple ayant été respectées, c'est à juste titre que le conseiller de la mise en état a dit que le jugement avait été régulièrement signifié le 29 juillet 2009, que M. [P] [N] disposait d'un délai d'un mois, soit jusqu'au 29 août 2009 pour interjeter appel et que la voie de recours exercée plus d'un an après était en conséquence irrecevable.
L'ordonnance doit être confirmée.
Pour des raisons d'équité, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. [N] les frais irrépétibles exposés par les sociétés ALLIANZ IARD et ALLIANZ VIE.
PAR CES MOTIFS
La Cour , statuant par arrêt contradictoire :
CONFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état
CONDAMNE M. [P] [N] aux dépens de la procédure de déféré et dit qu'ils pourront être recouvrés par la SCP DELEFORGE ET FRANCHI, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
DEBOUTE les sociétés ALLIANZ IARD et ALLIANZ VIE de leur demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,
Nicole HERMANT.Evelyne MERFELD.