FP/LL
[W] [D]
C/
[Z] [O]
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
3ème Chambre Civile
ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2022
N° RG 21/01556 - N° Portalis DBVF-V-B7F-F2UW
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 09 novembre 2021,
rendue par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Chalon sur Saône - RG : 20/00474
APPELANT :
Monsieur [W] [D]
né le 21 Juin 1954 à [Localité 4] (ITALIE)
domicilié :
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Sophie LITTNER-BIBARD, membre de la SCP LITTNER-BIBARD, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
INTIMÉE :
Madame [Z] [O]
née le 22 Décembre 1963 à [Localité 5] (71)
domiciliée :
[Adresse 1]
[Localité 3]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/676 du 17/03/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Dijon)
représentée par Me Laurent DELMAS, membre de la SCP LAURENT DELMAS, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 octobre 2022 en audience publique devant la cour composée de :
Frédéric PILLOT, Président de Chambre, Président, ayant fait le rapport,
Anne SEMELET-DENISSE, Conseiller,
Cendra LEBLANC, Conseiller,
qui en ont délibéré.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Sylvie RANGEARD, Greffier
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 15 Décembre 2022,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Frédéric PILLOT, Président de Chambre, et par Sylvie RANGEARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. [W] [D] et Mme [Z] [O] ont vécu en concubinage durant plusieurs années jusqu'à leur séparation intervenue le 7 janvier 2013.
Par acte d'huissier du 16 avril 2020, M. [D] a assigné Mme [O] devant le tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône aux fins d'obtenir le remboursement de la somme de 70 000 euros au titre de travaux financés et réalisés par lui au temps de la vie commune dans le domicile de sa compagne (création d'une cuisine, installation d'un escalier, travaux de couverture)
Par jugement du 9 novembre 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire) a :
- débouté M. [D] de sa demande de remboursement en raison de la prescription quinquennale,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné M. [D] au paiement de la somme de 2 000 euros à Mme [O] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [D] aux dépens,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Par déclaration du 8 décembre 2021, enregistrée le 10 décembre 2021, M. [D] a relevé appel de tous les chefs de ce jugement.
Selon le dernier état de ses conclusions transmises par voie électronique le 7 mars 2022, M. [D], appelant, demande à la cour, de :
condamner Mme [O] à payer à M. [D] la somme de 70 000 euros au titre des travaux financés et réalisés au temps de la vie commune,
subsidiairement, et avant dire droit,
ordonner une expertise judiciaire mission étant donnée à l'expert de décrire les travaux réalisés par M. [D] à partir des factures versées aux débats, chiffrer leur coût, en tenant compte du temps et de la main d''uvre que M. [D] y a consacré,
en toute hypothèse,
condamner Mme [O] à payer à M. [D] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel et autoriser la SCP CABINET LITTNER BIBARD à les recouvrer directement en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.'
Dans le dernier état de ses écritures transmises par voie électronique le 6 mai 2022, Mme [O], intimée, conclut à la confirmation du jugement déféré et demande à la cour, de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône le 9 novembre 2021,
- déclarer irrecevable l'action engagée par M. [W] [D] à l'égard de Mme [Z] [O] pour cause de prescription,
- dire et juger que M. [W] [D] n'apporte pas la preuve qu'il aurait personnellement supporté le coût des travaux effectués au domicile de Mme [Z] [O],
subsidiairement
- dire et juger que l'enrichissement invoqué par M. [W] [D] lui a personnellement profité et le débouter de ses demandes,
- débouter M. [W] [D] de sa demande d'expertise judiciaire avant dire droit,
- condamner M. [W] [D] à payer à Mme [Z] [O] une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [W] [D] aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés directement par la SCP Laurent Delmas conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, à leurs dernières conclusions sus-visées.
La clôture a été prononcé le 22 septembre 2022 et l'affaire a été appelée à l'audience du 27 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION
- Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
Le jugement critiqué a déclaré irrecevable l'action de M. [D] comme initiée plus de cinq années après la séparation du couple, ladite séparation remontant au 07 janvier 2013.
Appelant, M. [D] sollicite l'infirmation en estimant que s'agissant au titre du droit de propriété son action est imprescriptible, et que s'agissant d'une action sur l'enrichissement sans cause, le point de départ du délai de prescription, ne peut être fixé que au moment où a eu connaissance de la réalité de la situation, c'est à dire quand Mme [O] a refusé toute indemnisation amiable'en 2019.
Intimée, Mme [O] fait valoir que le point de départ de la prescription quinquennale se situe au 7 janvier 2013, date de la séparation des concubins, estimant que lors de la séparation, M. [D] connaissait à minima, ou aurait dû connaître son éventuel appauvrissement, mais qu'aucune action en paiement, ou acte interruptif de la prescription n'est intervenu entre le 7 janvier 2013 et le courrier du 2 juillet 2019, M. [D] n'ayant par ailleurs pas sollicité la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.
En droit, l'article 122 du code de procédure civile prévoit que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »
L'article 2224 du code civil précise que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».
En l'espèce, le couple s'est séparé le 07 janvier 2013.
Il est jugé que l'action en remboursement de travaux effectués sur le bien personnel d'un concubin procède de l'enrichissement sans cause et non du droit de propriété.
M. [D], qui produit de nombreuses factures datant de l'époque des travaux, soit antérieurement à la séparation, et qui prétend avoir financées et / ou réalisés les travaux litigieux, était ainsi nécessairement informé de son éventuel appauvrissement dés le temps de la séparation, soit le 07 janvier 2013, le délai pour engager une action en remboursement expirant ainsi le 07 janvier 2018, de sorte que l'action en paiement de la somme de 70 000 euros initiée par l'assignation du 16 avril 2020 doit être déclarée irrecevable comme tardive, aucun acte interruptif n'ayant été formalisé par M. [D], le refus de paiement opposé par Mme [O] courant 2019, soit en toute hypothèse postérieurement à l'expiration du délai de prescription, étant sans aucun emport et ne pouvant servir de point de départ au délai de l'article 2224 précité.
C'est donc par une juste appréciation que le premier juge a constaté la prescription quinquennale.
Le jugement critiqué sera ainsi confirmé, sauf à y ajouter qu'il s'agit d'une irrecevabilité et non d'un débouté.
- Sur les autres demandes
M. [D] qui succombe au principal, supportera les entiers dépens d'appel.
Il est équitable de condamner M. [D] à verser à Mme [O] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la Cour, sauf, y ajoutant, à déclarer irrecevable l'action de M. [D],
Condamne complémentairement M. [W] [D] à payer à Mme [Z] [O] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [W] [D] aux dépens d'appel et dit que ceux-ci pourront être directement recouvrés par la SCP LAURENT DELMAS en application de l'article 699 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le Greffier, Le Président,