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06/12/2022 | FRANCE | N°21/01106

France | France, Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 a, 06 décembre 2022, 21/01106


GLQ/KG







MINUTE N° 22/925

















































NOTIFICATION :



Pôle emploi Alsace ( )







Clause exécutoire aux :

- avocats

- délégués syndicaux

- parties non représentées



Le



Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR
>CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



ARRET DU 06 Décembre 2022



Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/01106

N° Portalis DBVW-V-B7F-HQNR



Décision déférée à la Cour : 26 Janvier 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE STRASBOURG



APPELANTE :



Madame [D] [B]

[Adresse 3]

[Localité 1]



Re...

GLQ/KG

MINUTE N° 22/925

NOTIFICATION :

Pôle emploi Alsace ( )

Clause exécutoire aux :

- avocats

- délégués syndicaux

- parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

ARRET DU 06 Décembre 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/01106

N° Portalis DBVW-V-B7F-HQNR

Décision déférée à la Cour : 26 Janvier 2021 par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [D] [B]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Amandine RAUCH, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE :

S.A. BNP PARIBAS

Prise en la personne de son représentant légal.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Christine BOUDET, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme DORSCH, Président de Chambre, et M. PALLIERES, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

- signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [D] [X] épouse [B] a été engagée par la S.A. BNP PARIBAS le 1er septembre 2003 dans le cadre d'un contrat de qualification puis en contrat à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2005, pour exercer les fonctions de conseiller clientèle.

A compter du mois de mars 2013, Mme [D] [B] a sollicité et obtenu un emploi à temps partiel de 80 %.

Mme [D] [B] a été placée en arrêt de maladie pour motifs professionnels à compter du 23 mai 2017.

Le 23 août 2017, le médecin du travail a déclaré la salariée inapte à tout poste dans l'entreprise, son état de santé faisant obstacle à tout reclassement dans un emploi dans le groupe BNP-PARIBAS.

Par courrier du 03 octobre 2017, la S.A. BNP PARIBAS a notifié à Mme [D] [B] son licenciement pour inaptitude médicale.

Par courrier du 12 juin 2018, la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin (CPAM) a reconnu l'origine professionnelle de la maladie déclarée par Mme [D] [B].

Le 25 septembre 2018, Mme [D] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Strasbourg pour obtenir notamment la reconnaissance de manquements aux obligations de sécurité, de non-discrimination et de formation, la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude, la requalification du licenciement en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de sécurité ainsi que la condamnation de la S.A. BNP PARIBAS au paiement d'indemnités et de dommages et intérêts.

Par jugement du 26 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a :

- dit que Mme [D] [B] a droit aux indemnités spécifiques applicables aux ruptures du contrat de travail pour inaptitude professionnelle,

- condamné la S.A. BNP PARIBAS à payer à Mme [D] [B] la somme nette de 7 275,41 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2018 au titre du solde de l'indemnité spécifique de licenciement,

- condamné la S.A. BNP PARIBAS à payer à Mme [D] [B] la somme brute de 4 201,86 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2018 au titre de l`indemnité compensatrice de préavis,

- condamné la S.A. BNP PARIBAS à payer à Mme [D] [B] la somme brute de 420,18 euros majorée des intérêts au taux légal a compter du 22 novembre 2018 au titre des congés payés y afférents,

- condamné la S.A. BNP PARIBAS à remettre à Mme [D] [B] les documents de fin de contrat (certificat de travail, reçu pour solde de tout compte, attestation destinée à Pôle Emploi et dernier bulletin de paye) rectifiés au vu des condamnations qui précèdent,

- débouté Mme [D] [B] de sa demande d'astreinte,

- condamné la S.A. BNP PARIBAS à payer à Mme [D] [B] la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté Mme [D] [B] de ses demandes relatives au manquement à l'obligation de sécurité, à la requalification de la rupture du contrat de travail en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, au manquement à l'obligation de formation, à la discrimination et à l'inégalité de traitement, ainsi que de toutes demandes subséquentes,

- condamné la S.A. BNP PARIBAS aux dépens.

Mme [D] [B] a interjeté appel le 19 février 2021.

Par ordonnance du 10 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné à la S.A. BNP PARIBAS de produire et communiquer à Mme [D] [B] les pièces suivantes :

- les indicateurs chiffrés publiés dans la base de données économiques et sociales (BDES) de l'entreprise pour les années 2013 à 2017 sur l'égalité professionnelle,

- le PV de consultation du comité d'entreprise (CE) sur le bilan social de 2015,

- le rapport rendu par l'expert missionné par le CE, ainsi que le rapport annuel égalité professionnelle femmes-hommes,

- les bulletins de paie des salariés conseiller de clientèle femmes et hommes sur le périmètre du Bas-Rhin de décembre 2013, décembre 2014, décembre 2015, décembre 2016 et décembre 2017.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 30 juin 2022, Mme [D] [B] demande d'infirmer partiellement le jugement du 26 janvier 2021 et, en conséquence, de :

- dire que le licenciement est dénué de toute cause réelle et sérieuse,

- dire que la S.A. BNP PARIBAS a procédé à une discrimination et à une rupture d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes,

- condamner la S.A. BNP PARIBAS à lui payer les sommes suivantes :

* 7 275,41 euros nets au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement portant intérêts de retard au taux légal à compter de la demande introductive d'instance,

* 4 201,86 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 420,18 euros au titre des congés payés y afférents, portant intérêts de retard au taux légal à compter de la demande introductive d'instance,

* 25 200 euros nets à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice pour perte d'emploi,

* 3 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la formation professionnelle,

* 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le retard de carrière résultant de l'irrespect de l'égalité entre femmes et hommes,

* 5 690 euros brut au titre du rappel de salaire résultant de l'inégalité de traitement, outre 569 euros brut au titre des congés payés y afférents,

- condamner la S.A. BNP PARIBAS à lui remettre les bulletins de paie régularisés ainsi que les documents de fin de contrat (attestation Pôle emploi, certificat de travail, solde de tout compte) sous astreinte de 10 euros par jour de retard et par document à compter de la notification de la décision à intervenir,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner la S.A. BNP PARIBAS à verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d'appel,

- condamner la S.A. BNP PARIBAS aux dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 27 septembre 2022, la S.A. BNP PARIBAS demande d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la S.A. BNP PARIBAS à verser à Mme [D] [B] les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2018 :

* à titre de d'indemnité spéciale de licenciement : 7 275,41 euros,

* à titre d'indemnité compensatrice de préavis : 4 201,86 euros,

* au titre de congés payés afférents : 420,18 euros,

* au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 1 200 euros,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions,

- débouter Mme [D] [B] de ses demandes,

- condamner Mme [D] [B] à payer à la S.A. BNP PARIBAS la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [D] [B] aux dépens en première instance et en cause d'appel.

Pour un exposé plus complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux écritures précitées, en application de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 30 septembre 2022. L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 14 octobre 2022 et mise en délibéré au 06 décembre 2022.

MOTIFS

Sur l'origine professionnelle de l'inaptitude

Aux termes de l'article L. 1226-12 alinéa 2 du code du travail, applicable en cas d'inaptitude consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.

L'article L. 1226-14 dispose par ailleurs que la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

En l'espèce, Mme [D] [B] a fait l'objet d'une déclaration d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise et dans le groupe BNP PARBIBAS par le médecin du travail le 23 août 2017. Cet avis, qui mentionne comme pathologie un épisode dépressif sévère, est intervenu alors que Mme [D] [B] était déclarée en arrêt de travail pour maladie ordinaire depuis le 29 mai 2017 (pièce n°8 de l'intimée).

Le premier certificat médical faisant état de l'origine professionnelle de l'arrêt de travail a, quant à lui, été établi le 24 août 2017. Mme [D] [B] produit également un certificat médical établi par son médecin traitant le 16 septembre 2017 lequel atteste que celle-ci 'souffre d'un syndrome anxio-dépressif dans un contexte d'épuisement au travail (burn-out)'. L'origine professionnelle de l'arrêt de travail a également été reconnu par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles dont les avis s'imposent à la caisse primaire d'assurance maladie. Dans un courrier du 12 juin 2018, la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin a ainsi informé Mme [D] [B] de cet avis et de la prise en charge de sa maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels.

L'employeur fait valoir à juste titre qu'il n'était pas partie à la procédure devant l'organisme de sécurité sociale et que la décision de la caisse primaire d'assurance maladie ne lui est de ce fait pas opposable. Cette décision constitue toutefois un élément de preuve parmi d'autres de l'origine professionnelle de l'inaptitude et il convient de constater que la S.A. BNP PARIBAS ne produit aucun élément susceptible de remettre en cause l'origine professionnelle de l'inaptitude qui apparaît suffisamment établi par le certificat établi par le médecin traitant de la salariée et de l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Il résulte par ailleurs des pièces produites par les parties que la procédure de licenciement pour inaptitude a été initiée par la S.A. BNP PARIBAS le 06 septembre 2017, date de la convocation de Mme [D] [B] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 22 septembre 2017, le licenciement pour inaptitude médicale ayant été notifié par courrier du 03 octobre 2017. Si la S.A. BNP PARIBAS soutient qu'elle n'a été informée des premiers arrêts de travail mentionnant l'origine professionnelle que le 19 septembre 2017, après la convocation de la salariée à l'entretien préalable, il apparaît toutefois qu'elle en avait déjà connaissance avant cette convocation puisque, par un courrier du 1er septembre 2017, elle a retourné à Mme [D] [B] le certificat d'arrêt de travail pour la période du 24 août au 24 septembre 2017 en considérant qu'il avait été établi par erreur sur le formulaire correspondant aux accidents de travail et maladies professionnelles et en lui demandant de faire établir par son médecin un arrêt de travail au format adapté (pièce n°23 de l'appelante).

Il apparaît ainsi que, lorsqu'elle a engagé la procédure de licenciement, la S.A. BNP PARIBAS avait déjà été destinataire de l'arrêt de travail mentionnant l'origine professionnelle de la maladie. Elle ne pouvait en outre considérer que la déclaration de maladie professionnelle ne résultait que de l'utilisation du mauvais formulaire par le médecin traitant dès lors que Mme [D] [B] n'avait pas donné suite à sa demande de régularisation. Lorsqu'elle a engagé la procédure de licenciement, la S.A. BNP PARIBAS avait donc connaissance de la volonté de la salariée de faire reconnaître l'origine professionnelle de la maladie, ce qu'elle a obtenu postérieurement au licenciement.

Il convient dès lors de confirmer le jugement du 26 janvier 2021 en ce qu'il a considéré que Mme [D] [B] avait droit à la protection applicable en matière d'inaptitude pour maladie professionnelle. Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a condamné la S.A. BNP PARIBAS à payer à Mme [D] [B] les sommes de 7 275,41 euros à titre de solde sur l'indemnité spécifique de licenciement, 4 201,86 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 420,18 euros au titre des congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis, majorées des intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 2018, montants qui ne sont pas remis en cause par les parties. Il sera enfin confirmé en ce qu'il a condamné la S.A. BNP PARIBAS à remettre à Mme [D] [B] les documents de fin de contrat rectifiés et débouté Mme [D] [B] de sa demande d'astreinte.

Sur le manquement à l'obligation de sécurité

En application de l'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa version applicable jusqu'au 1er octobre 2017, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

En l'espèce, Mme [D] [B] considère que son inaptitude résulte d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Elle reproche en effet à la S.A. BNP PARIBAS de n'avoir pris aucune mesure alors que l'employeur était informé de la souffrance qu'elle ressentait après une modification de son poste de travail.

Mme [D] [B] soutient notamment qu'elle devait faire face à une surcharge de travail suite à une modification de l'organisation au sein de l'agence bancaire où elle exerçait . Elle explique que cette nouvelle organisation lui imposait de cumuler les fonctions de conseiller clientèle avec un temps consacré à l'accueil des clients. Mme [D] [B] ne démontre pas toutefois que l'accueil et l'orientation des clients ne relevaient pas de ses fonctions et attributions en qualité de conseiller client. Il résulte en effet de la fiche de poste de conseiller client (pièce n°38 de l'intimée) que celui-ci assure 'le service au client' et qu'il 'contribue au meilleur niveau de service et d'accueil et s'assure de la satisfaction des clients, en lien avec le projet de service de son agence'. Elle ne justifie pas non plus de la surcharge de travail alléguée, étant relevé qu'elle ne soutient pas avoir effectué des heures supplémentaires.

L'employeur justifie par ailleurs de la mise en place d'outils de prévention à destination des salariés (observatoire médical du stress, de l'anxiété et de la dépression, ligne d'écoute du service de santé au travail, dispositif externe d'écoute et de soutien psychologique) (pièces n°31 et 33) que la salariée n'a pas sollicités. Elle a certes adressé le 29 septembre 2016 un message au directeur de l'agence suite à une modification du planning accueil dans lequel elle se plaint d'une répartition inéquitable des temps d'accueil qui ne lui permet pas, selon elle, de gérer correctement ses autres tâches (pièce n°6). Elle n'indique pas la réponse donnée à sa demande mais force est de constater que l'évaluation du 30 janvier 2017 ne fait état d'aucune observation de la salariée sur sa charge de travail ou sur l'organisation mise en place. Le médecin du travail n'a en outre mentionné aucune réserve à ce titre sur la fiche d'aptitude médicale établie le 16 mars 2017.

Mme [D] [B] ne justifie pas non plus qu'elle aurait fait part de son opposition au réaménagement de l'agence, ce qui relevait en toute hypothèse du pouvoir de direction de l'employeur, et elle ne produit aucun élément permettant de démontrer que ce réaménagement était susceptible d'entraîner une dégradation des conditions de travail des salariés.

Il résulte par ailleurs de l'enquête réalisée par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin que Mme [D] [B] avait contacté Mme [O] [J], déléguée du personnel, au mois de juin ou de juillet 2016 et qu'elle lui avait exprimé une souffrance au travail, ce dont Mme [J] déclare avoir fait part oralement à la hiérarchie (pièce n°3 de l'appelante). La déléguée du personnel précise également qu'elle n'a plus été sollicitée par la salariée jusqu'à l'annonce de l'inaptitude, Mme [D] [B] justifiant uniquement d'un message adressé à Mme [J] le 19 mai 2017, quelques jours avant son arrêt de travail. Cette seule indication de la déléguée du personnel sur une information transmise 'à la hiérarchie', sans précision sur l'identité de l'interlocuteur, la teneur des éléments communiqués et les conditions dans lesquelles cette communication est intervenue, ne permet pas de démontrer que l'employeur était alerté que Mme [D] [B] se trouvait dans une situation de souffrance au travail qui aurait justifié une réponse particulière de sa part.

Au vu de ces éléments, aucun manquement à l'obligation de sécurité ne peut être retenu à l'encontre de la S.A. BNP PARIBAS dès lors que l'employeur avait mis en place des outils de prévention qui n'ont pas été utilisés par la salariée et qu'il n'avait été informé que de manière informelle et à une seule reprise avant son arrêt de travail de difficultés qu'elle aurait rencontrées. Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [D] [B] de sa demande de requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur la discrimination

En application de l'article L. 1142-1 du code du travail, nul ne peut (...) prendre en considération du sexe ou de la grossesse toute mesure, notamment en matière de rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation.

L'article L. 3221-1 dispose que tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.

Il résulte par ailleurs de l'article L. 1144-1 et L. 3221-8 que, lorsque survient un litige relatif à l'application des dispositions des articles L. 1142-1 et L. 1142-2, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe, la situation de famille ou la grossesse. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, Mme [D] [B] produit un message que lui a adressé Mme [O] [J], déléguée du personnel, le 03 octobre 2016 (pièce n° 8) dans lequel cette dernière explique que, sur la base d'un temps plein, la rémunération de Mme [D] [B] s'élève à 27 244 euros alors que 'la médiane pour les femmes classification E est de 27 797 € en DR EST (source bilan social), ce chiffre ne [tenant] pas compte du métier et de l'ancienneté' et qu''en 2015 (...), un conseiller clientèle femme gagne 28 382 € pour une ancienneté moyenne de 15 ans et un âge moyen de 38 ans'. Ces éléments ne laissent toutefois supposer aucune discrimination hommes/femmes dès lors que la situation de Mme [D] [B] est comparée à celle des autres salariées femmes et que la différence de rémunération trouve son explication dans la différence d'âge (Mme [D] [B] étant âgée de 33 ans en 2015) et d'ancienneté (12 ans pour Mme [D] [B] en 2015).

La déléguée du personnel indique par ailleurs que 'pour les hommes, [la] classification la plus représentée est F ... cherchons l'erreur...'. Le rapport égalité hommes-femmes établi en 2015 par l'employeur fait ainsi apparaître des différences entre les hommes et les femmes dans la répartition des salariés entre les différents niveaux de classification et dans les moyennes de rémunérations. Ces éléments de comparaison sont toutefois trop généraux pour considérer qu'ils concernent des salariés effectuant un travail équivalent. Ils ne permettent donc pas de laisser supposer l'existence d'une discrimination au détriment de Mme [D] [B].

Mme [D] [B] fait enfin valoir qu'elle n'a bénéficié d'aucune évolution dans ses fonction et d'aucune revalorisation de sa classification depuis le 1er avril 2008. Elle ne justifie toutefois d'aucune demande de revalorisation avant l'entretien d'évaluation de l'année 2015 à l'issue duquel elle indique qu'elle se sent 'prête à évoluer sur des fonctions de conseiller patrimonial' (pièce n°21 de l'intimée). Elle reproche à ce titre à la S.A. BNP PARIBAS d'avoir promu en 2017 un autre salarié, M. [M] [R], au poste de conseiller patrimonial au sein de l'agence où elle exerçait ses fonctions. Il résulte toutefois des éléments produits par l'employeur que, si Mme [D] [B] bénéficiait d'une ancienneté plus importante dans les fonctions de conseiller client, le choix de M. [R] pour le poste de conseiller patrimonial peut s'expliquer par le fait que ce salarié justifiait de diplômes d'un niveau plus élevé et d'une mobilité plus importante au sein des agences de [Localité 5], ce qui permet de considérer que la décision de l'employeur était justifiée par des éléments étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe.

Il en résulte que la discrimination invoquée par la salariée n'est pas établie. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] [B] de ses demandes fondées sur la discrimination et l'inégalité de traitement.

Sur l'obligation de formation

Vu les articles L. 6111-1 du code du travail,

En l'espèce, la S.A. BNP PARIBAS produit un récapitulatif des formations suivies par la salariée au cours des années 2009 à 2016 ainsi que de celles auxquelles elle était inscrite pour l'année 2017. Mme [D] [B] ne conteste pas ces éléments et ne fait état d'aucune formation précise qu'elle aurait sollicitée et qui lui aurait été refusée par son employeur. Elle ne démontre dès lors aucun manquement de la S.A. BNP PARIBAS à l'obligation de formation et le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [D] [B] de la demande présentée à ce titre.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la S.A. BNP PARIBAS aux dépens de première instance ainsi qu'au paiement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de l'issue du litige, Mme [D] [B], appelante principale, sera condamnée aux dépens de l'appel. L'équité s'oppose en revanche à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel. Mme [D] [B] et la S.A. BNP PARIBAS seront donc déboutés de leurs demandes présentées sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Strasbourg du 26 janvier 2021 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme [D] [X] épouse [B] aux dépens de la procédure d'appel ;

DÉBOUTE Mme [D] [X] épouse [B] et la S.A. BNP PARIBAS de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 06 décembre 2022, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine Thomas, Greffier.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Colmar
Formation : Chambre 4 a
Numéro d'arrêt : 21/01106
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;21.01106 ?
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