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30/03/2004 | FRANCE | N°JURITEXT000006944324

France | France, Cour d'appel de colmar, 30 mars 2004, JURITEXT000006944324


DV MINUTE N° 1M279/2004 Copie exécutoire à : - SCP CAHN ET ASSOCIES - Me Michel WELSCHINGER Copie à M. le Procureur Général Arrêt notifié aux parties Copie Mr le TPG 67 Le 30/03/2004 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A ARRET DU 30 Mars 2004 Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 02/05793 Décision déférée à la Cour : 02 Décembre 2002 par le TGI A COMPETENCE COMMERCIALE STRASBOURG APPELANTE et défenderesse : LA S.A. BANQUE POPULAIRE D'ALSACE, ayant son siège social 5/7, Rue du 22 Novem

bre à 67000 STRASBOURG, prise en la personne de son représentant lé...

DV MINUTE N° 1M279/2004 Copie exécutoire à : - SCP CAHN ET ASSOCIES - Me Michel WELSCHINGER Copie à M. le Procureur Général Arrêt notifié aux parties Copie Mr le TPG 67 Le 30/03/2004 Le Greffier REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A ARRET DU 30 Mars 2004 Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A 02/05793 Décision déférée à la Cour : 02 Décembre 2002 par le TGI A COMPETENCE COMMERCIALE STRASBOURG APPELANTE et défenderesse : LA S.A. BANQUE POPULAIRE D'ALSACE, ayant son siège social 5/7, Rue du 22 Novembre à 67000 STRASBOURG, prise en la personne de son représentant légal, Représentée par la SCP CAHN ET ASSOCIES, Avocat à la Cour, INTIME et demandeur : Maître Christian RAEIS, mandataire ad hoc de la SARL RESTO HO NET INTERNATIONALE, demeurant 17, Rue Schweighaeuser à 67084 STRASBOURG CEDEX, Représenté par Me Michel WELSCHINGER, Avocat à la Cour, Plaidant : Me FRAMERY, Avocat à STRASBOURG, COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 16 Février 2004, en audience en chambre du conseil, devant la Cour composée de :

M. HOFFBECK, Président de Chambre

Mme VIEILLEDENT, Conseiller

M. DIE, Conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats :

Mme SCHOENBERGER, Ministère Public : représenté lors des débats par M. François X..., Avocat-Général, qui a fait connaître son avis. ARRET :

- Contradictoire

- prononcé publiquement par M. Michel HOFFBECK, président

- signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Marie SCHOENBERGER, greffier présent au prononcé.

Par jugement prononcé le 26 juin 2000, le tribunal de grande instance de Strasbourg, chambre commerciale, a ouvert une procédure de

redressement judiciaire à l'égard de la SARL Rest Ho Net Internationale, en désignant Maître Gall Heng en qualité de représentant des créanciers et Maître Christian Raeis en tant qu'administrateur judiciaire. La date de cessation des paiements a été fixée au 1er septembre 1999.

Suivant déclaration reçue le 25 juillet 2000 par Maître Gall Heng, la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg a, notamment, déclaré une créance de 2.733.849,27 francs au titre d'un prêt consenti à la SARL Rest Ho Net Internationale par acte notarié reçu le 21 décembre 1998.

Suivant déclaration rectificative du 1er septembre 2000, reçue le 5 septembre 2000, la banque s'est prévalue du caractère privilégié de cette créance en raison d'un nantissement sur le fonds de commerce.

Par acte signifié le 16 août 2000, Maître Christian Raeis, agissant en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Rest Ho Net Internationale, a fait assigner la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg à comparaître devant le tribunal de grande instance de Strasbourg, chambre commerciale, pour entendre :

- déclarer nulles, au visa des articles 110, 108, et 107-4 de la loi du 25 janvier 1985, cinq opérations débitrices opérées le 23 juin 2000 par la Banque Populaire ;

- condamner en conséquence la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg à extourner les écritures débitrices du 23 juin 2000 et à créditer le compte de la SARL Rest Ho Net Internationale, respectivement celui ouvert dans le cadre du redressement judiciaire, de 178.437 francs (soit 27.202,55 ä);

- condamner la banque aux dépens et au paiement d'une somme de 9.000 francs (1.372,04 ä) par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives, Maître Christian Raeis a

également invoqué le dol imputable à la banque.

La Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg a conclu à l'irrecevabilité et à l'absence de fondement de la demande, au débouté de Maître Christian Raeis et à sa condamnation aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 4.544,80 ä en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par jugement prononcé le 2 décembre 2002, le tribunal de grande instance de Strasbourg a :

- déclaré la demande recevable et fondé au regard des dispositions de l'article L 621-107-4° du Code de commerce ;

- en conséquence déclaré nulles les opérations effectuées par la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg sur le compte courant de la SARL Rest Ho Net Internationale pour les montants de 36.687,40 francs X 5 ; - ordonné la réouverture des débats ;

- invité Maître Christian Raeis à s'expliquer sur sa demande d'extourne de ces opérations et de crédit du compte de la SARL Rest Ho Net Internationale respectivement celui ouvert dans le cadre du redressement judiciaire , - réservé à statuer pour le surplus ; - renvoyé l'affaire à une audience ultérieure.

Sur la recevabilité, le tribunal a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité de Maître Christian Raeis pour agir au motif que :

- d'une part il avait régulièrement introduit la procédure en qualité d'administrateur provisoire de la SARL Rest Ho Net Internationale, qualité qu'il avait conservée du 26 juin 2000 (date du jugement d'ouverture) au 30 octobre 2000 (date du jugement ayant arrêté le plan de cession de la SARL Rest Ho Net Internationale) ;

- d'autre part, à la date des débats, il s'était prévalu de la qualité de mandataire ad 'hoc qui lui avait été conférée par ce même jugement du 30 octobre 2000.

En conséquence et par référence aux dispositions de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985, le tribunal a déclaré la demande recevable.

Sur le fond, les premiers juges ont écarté les moyens tirés :

- de l'application des dispositions de l'article L 621- 108 du Code de commerce dans la mesure où il n'était pas établi que la banque avait connaissance de l'état de cessation des paiements de la SARL Rest Ho Net Internationale au moment où les actes litigieux ont été effectués ;

- du dol, au motif que les victimes des agissements prétendus auraient été les associés de la SARL Rest Ho Net Internationale et non la société elle même.

Sur le fondement de l'article L 621-107- 4° du Code de commerce en revanche, le tribunal a considéré que si les prélèvements effectués, à échéance périodique, sur un compte courant, ne caractérisaient pas, en eux-mêmes, un mode de paiement anormal- et ce d'autant moins qu'en l'espèce, il s'agissait d'une modalité conventionnelle de paiement - le prélèvement, le même jour, et à la faveur d'un important versement de fonds, de cinq échéances arriérées d'un prêt ne pouvait en revanche, être assimilé à un paiement normal. Il a en conséquence prononcé la nullité des opérations litigieuses mais ordonné la réouverture des débats sur la situation du "compte ouvert dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire".

Suivant déclaration enregistrée au greffe le 16 décembre 2002, la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg a interjeté appel de ce jugement.

En l'état de ses conclusions d'appel déposées le 5 février 2003, l'appelante demande à la cour : - de recevoir l'appel ; - d'infirmer le jugement entrepris.

Et statuant à nouveau :

- de déclarer la demande et les conclusions de Maître Christian Raeis, es qualités, irrecevables; - de rejeter en conséquence la demande.

Subsidiairement : - de rejeter la demande comme mal fondée .

En tout état de cause :

- de condamner Maître Christian Raeis es qualités aux entiers dépens des deux instances ainsi qu'au paiement d'une somme de 4.000 ä à titre d'indemnité de procédure pour chacune des deux instances.

La banque rappelle que, le 21 décembre 1998, elle avait consenti à la SARL Rest Ho Net Internationale, un prêt de 2.900.000 francs, en complément d'apports en compte courant effectués par les associés, pour financer des travaux de rénovation de l'Hôtel Saint Hubert. Les cinq mensualités litigieuses n'avaient pu être payées à leur échéance, par la SARL Rest Ho Net Internationale, en raison d'une insuffisance de provision du compte courant de la société, trouvant son origine dans le dépassement du budget des travaux et dans l'ouverture retardée de l'hôtel. Elle explique qu'il avait en conséquence été convenu entre les parties de la mise en place d'un prêt complémentaire de 450.000 francs par la Banque Populaire moyennant un apport préalable des associés permettant le règlement des échéances impayées du prêt et la levée de l'interdiction bancaire. C'est ainsi que le 8 juin 2000, M. Y... avait effectué un premier apport de 100.000 francs, et le 22 juin 2000, un second apport de 250.000 francs. Ce dernier versement avait, comme convenu, été affecté au paiement des échéances arriérées du prêt initial et la banque s'apprêtait à mettre en place le prêt complémentaire, lorsqu'elle avait été avisée de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire par Maître Christian Raeis.

En premier lieu, la Banque Populaire d'Alsace considère la demande de Maître Christian Raeis irrecevable dès lors que, postérieurement au

30 octobre 2000, ce mandataire n'était plus administrateur de la SARL Rest Ho Net Internationale, qu'il n'est jamais intervenu à la procédure en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan pour poursuivre la procédure précédemment introduite, en sorte que la demande doit être considérée comme abandonnée.

L'appelante fait valoir que la désignation de Maître Christian Raeis en tant que mandataire ad hoc est sans effet, dans la mesure où cette désignation, faite d'office et sans mandat spécifique du tribunal, n'est pas régulière (cour de cassation 29 novembre 2000). En toute hypothèse, en tant que mandataire ad 'hoc, Maître Christian Raeis ne pouvait reprendre une procédure qui n'avait pas été préalablement poursuivie par le commissaire à l'exécution du plan.

La banque fait enfin valoir que Maître Christian Raeis ne pouvait, dans le même temps et devant la même juridiction, intenter une action en nullité spécifique à la procédure collective (action en annulation des articles L 621-107 et L 621-108 du Code de commerce) où il agissait en tant qu'organe autonome de cette procédure, et une action de droit commun (nullité pour dol) appartenant au contractant lésé ou à son administrateur, pris en sa qualité de mandataire. Pour la banque, l'action fondée sur le dol ne constituait pas un moyen nouveau comme l'a admis le premier juge, mais une action nouvelle que ne pouvait exercer Maître Christian Raeis, es qualités d'organe autonome de la procédure collective.

Subsidiairement sur le fond, la banque reprend la motivation du tribunal en ce qu'il a écarté les prétentions de Maître Christian Raeis fondées sur le dol et sur les dispositions de l'article L 621-108 du Code de commerce.

Sur le fondement de l'article L 621-107- 4° du Code de commerce, elle soutient que ce texte a pour objet de sanctionner des modalités de paiement "anormales"- au titre desquelles ne figurent pas les prélèvements sur compte courant (comme l'a d'ailleurs admis le tribunal) - mais non le détournement du versement effectué par un associé au moyen d'un mode régulier de paiement.

Sur ce point, l'appelante fait tout d'abord observer que l'apport en compte courant de M. Y... ne pouvait "renforcer les fonds propres" de la société, puisque cet apport constituait une dette de la société à l'égard de l'un de ses associés. De plus et même en admettant cette analyse, rien ne permet de dire que ces fonds, qui ont vocation à assurer le fonctionnement de l'entreprise, devaient rester bloqués sur le compte courant. Il en résulte que leur emploi pour le paiement de dettes échues n'a rien d'anormal. De plus, le paiement d'une dette ayant pour contrepartie la diminution du passif, il ne peut être question d'appauvrissement.

Suivant conclusions déposées le 15 mai 2003, Maître Christian Raeis, en qualité de mandataire ad'hoc de la SARL Rest Ho Net Internationale demande à la cour : - de déclarer l'appel irrecevable et en tous cas mal fondé ; - de confirmer le jugement entrepris ;

- de condamner la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg aux dépens de l'instance ainsi qu'au paiement d'une somme de 4.000 ä en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'intimé soutient que le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande est totalement dilatoire, dès lors qu'en sa qualité de mandataire ad

hoc de la SARL Rest Ho Net Internationale, il est parfaitement habilité à poursuivre la procédure introduite en tant qu'administrateur judiciaire de cette société, et qu'une régularisation a été faite en ce sens en cours de procédure.

Il reconnaît qu'il n'est pas intervenue en qualité de commissaire à l'exécution du plan dans la présente procédure, mais invoque les dispositions de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985 qui n'imposent pas une continuité dans la succession des différentes interventions. Contrairement à ce que soutient la partie appelante, Maître Christian Raeis fait valoir qu'il n'est pas davantage nécessaire que le mandataire ad hoc soit désigné par une décision indépendante de celle qui a nommé le commissaire à l'exécution du plan. En l'espèce, c'est bien en raison de la procédure en cours, et parce que l'affaire risquait de ne pas être terminée au moment de sa cessation de ses fonctions en tant que commissaire à l'exécution du plan, que le tribunal a pris la précaution de désigner Maître Christian Raeis en tant que mandataire ad'hoc.

Ce choix s'explique par la parfaite connaissance de la procédure par l'intimé, qui suivait cette affaire depuis l'origine.

Maître Christian Raeis considère que la jurisprudence à laquelle se réfère la banque est sans emport dans la mesure où il s'agissait, dans cette espèce, d'une procédure introduite par des commissaires à l'exécution du plan, postérieurement au jugement ayant arrêté le plan de cession. Ici, l'instance en cause avait été initiée bien avant le jugement d'homologation.

S'agissant enfin de la nullité pour dol, Maître Christian Raeis soutient que cette demande tend aux mêmes fins que la demande initiale fondée sur les dispositions spécifiques de la loi sur les procédures collectives. De plus, en sa qualité de mandataire ad'hoc, Maître Christian Raeis dispose des mêmes droits que tout plaideur y

compris la formulation d'une demande incidente.

Sur le fond, le mandataire ad'hoc de la SARL Rest Ho Net Internationale conclut à la confirmation de la décision entreprise, qui, selon lui, était également fondée au titre de l'article L 621-108 du Code de commerce.

Par référence aux dispositions de l'article L 621-107, le demandeur affirme que les écritures débitrices passées le 23 juin 2000 constituent bien des paiements anormaux au sens de ce texte dans la mesure où : - les prélèvementsstituent bien des paiements anormaux au sens de ce texte dans la mesure où : - les prélèvements litigieux n'ont pas été autorisés par le titulaire du compte ;

- le remboursement des loyers impayés a été effectué, trois jours avant le dépôt de bilan, avec des fonds constituant des apports d'associés, qui, sur demande de la banque devaient être affectés au renforcement des capitaux propres ;

- ces opérations ont eu pour effet de réduire le montant du solde débiteur du compte ainsi que "l'égalité des créanciers soumis à la procédure collective" ;

- le montant des apports consentis par M. Y... ne correspond pas à la somme des chèques et des échéances impayés ce qui aurait été le cas s'ils avaient eu pour objet de régler ces dettes.

Sur le fondement de l'article L 621-108 du Code de commerce, Maître Christian Raeis maintient que la banque avait connaissance de l'état de cessation des paiements au moment où les écritures litigieuses ont été passées. En effet, le 29 avril 2000, M. Marcel Z... avait présenté à la Banque Populaire un bilan faisant état d'une perte nette de 666.687 francs et d'un endettement de 6.045.174 francs dont 3.062.305 au seul titre du prêt consenti à la SARL Rest Ho Net Internationale. A la lecture de ce document, la banque connaissait nécessairement l'état de cessation des paiements de cette société. Le

prêt complémentaire sollicité par la société débitrice était en relation directe avec cette situation.

Il en résulte que le jugement qui a annulé les effets des écritures contestées doit être confirmé, en sorte que la banque reste devoir la somme de 178.437 francs ou 27.202,55 ä qui pourra ainsi être réintégrée dans le patrimoine de la SARL Rest Ho Net Internationale avant clôture de la procédure collective.

Le procureur général s'en rapporte à l'appréciation de la cour.

Vu le dossier de la procédure, les pièces régulièrement versées au dossier et les mémoires des parties auxquels la cour se réfère pour plus ample exposé de leurs moyens;

Sur la recevabilité de l'appel

Tout en concluant dans le dispositif de ses conclusions à l'irrecevabilité de l'appel, Maître Christian Raeis n'expose aucun moyen au soutien de cette demande.

Dès lors en l'absence de motif d'ordre public susceptible d'être soulevé d'office, il y a lieu de déclarer l'appel de la Banque Populaire d'Alsace, recevable.

Sur la recevabilité de la demande de Maître Christian Raeis

La Banque Populaire d'Alsace fait valoir que Maître Christian Raeis n'a pas qualité pour poursuivre la procédure en annulation des cinq prélèvements opérés sur le compte courant de la SARL Rest Ho Net Internationale le 23 juin 2000, aux motifs que :

- d'une part il ne s'est pas prévalu de sa qualité de commissaire à l'exécution du plan dans le cadre de cette procédure ; - sa désignation en qualité de mandataire ad'hoc est irrégulière.

Maître Christian Raeis répond que les fins de non recevoir tirées du défaut de qualité pour agir peuvent être régularisées en cours de procédure et que s'il n'est pas intervenu en tant que commissaire au plan, il s'est prévalu de la qualité de mandataire ad'hoc qui lui a

été conférée par le tribunal, dans son jugement du 30 octobre 2000, ayant arrêté le plan de cession.

L'article L 621-68 du Code de commerce relatif aux effets du jugement arrêtant le plan, dispose en son alinéa 2 :

"Les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan, soit par l'administrateur, soit par le représentant des créanciers, sont poursuivies par le commissaire à l'exécution du plan."

L'article 90 du décret du 27 décembre 1985 précise :

"Les instances auxquelles est partie l'administrateur ou le représentant des créanciers et qui ne sont pas terminées lorsque la mission de ces derniers a pris fin, sont poursuivies par le commissaire à l'exécution du plan ou si celui-ci n'est plus en fonction, par un mandataire de justice désigné spécialement à cet effet par le tribunal devant lequel se déroule la procédure de redressement judiciaire."

En l'occurrence, il est constant que la procédure en cours a été intentée par Maître Christian Raeis suivant assignation signifiée à la Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg, le 16 août 2000, alors qu'il exerçait les fonctions d'administrateur judiciaire de la SARL Rest Ho Net Internationale aux termes d'un jugement d'ouverture du 26 juin 2000. A ce stade, Maître Christian Raeis avait qualité pour introduire et poursuivre l'action.

Il a toutefois été mis fin à la mission de l'administrateur par jugement du 30 octobre 2000 de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg ayant arrêté le plan de cession de la SARL Rest Ho Net Internationale.

Or, il résulte incontestablement des textes précités que lorsque la mission de l'administrateur judiciaire (ou du représentant des créanciers) prend fin, seul le commissaire à l'exécution du plan est habilité à poursuivre l'action encore en cours, sans qu'il soit

nécessaire de procéder à une désignation spéciale à cet effet. Selon M. A..., le commissaire à l'exécution du plan, d'abord administrateur "se succède à lui même et doit alors substituer sa qualité nouvelle à celle en laquelle il avait précédemment engagé l'instance continuée". Cette analyse est conforme à celle de la Cour de cassation (Cour de cass. Ch. Com. 14 avril 1992 D.92 Somm. P. 374) Or, bien que Maître Christian Raeis ait été désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan par décision précitée du 30 octobre 2000, il est constant et reconnu qu'il ne s'est jamais prévalu de cette qualité dans le cadre de la présente instance, la circonstance qu'il exerce effectivement ces fonctions étant indifférente au regard de l'objet du litige.

Maître Christian Raeis n'a pas davantage soutenu que sa mission de commissaire à l'exécution du plan avait pris fin. Dès lors, l'intimé ne peut écarter la fin de non recevoir qui est invoquée par la banque en se prévalant de :

- sa désignation en qualité de "mandataire ad'hoc" - et plus précisément de mandataire de justice puisque, depuis le décret du 21 octobre 1994, la qualification de "mandataire ad'hoc" est réservée à celui qui intervient en cas de défaut de paiement du prix de cession de l'entreprise ; - son intervention à ce titre dans la présente instance ;

puisque, tant qu'il reste en fonction, c'est au commissaire visé à l'article 90 du décret qu'il appartient de poursuivre les procédures en cours.

En admettant que cette mission ait pris fin à l'occasion du paiement du prix de cession, l'intervention de Maître Christian Raeis à l'instance en qualité de mandataire de justice suppose que cette désignation ait été faite de manière régulière. A cet égard, il

importe de rappeler que la matière relève de la compétence de la juridiction gracieuse (Cour cass. 9 juin 1998, JCP 98 G. 98 IV 2729) et que la décision doit être spécialement motivée, c'est à dire qu'elle doit, pour le moins, préciser les procédures en cours concernées par la requête ("mandataire de justice désigné spécialement à cet effet" selon les termes de l'article 90 précité) . En l'occurrence, Maître Christian Raeis a été désigné d'office, mandataire de justice, dans le corps même du dispositif du jugement qui a arrêté le plan de cession de l'entreprise. Aucune précision n'a été donnée sur les procédures visées par cette désignation, les références des "instances en cours" n'étant pas non plus énoncées dans les motifs de cette décision - dont l'objet était de déterminer l'offre de cession la plus favorable entre les cinq propositions qui avaient été formulées.

D'ailleurs, l'emploi dans le dispositif du jugement, de l'expression "en tant que de besoin", atteste de ce que le tribunal n'avait aucune connaissance précise des procédures concernées.

Il en résulte que cette désignation n'est pas régulière, en sorte que Maître Christian Raeis ne peut s'en prévaloir.

Faute de justifier de sa qualité pour agir - laquelle doit exister tout au long de la procédure - la demande est irrecevable.

Par ailleurs, s'agissant de l'action en nullité pour dol, il importe également de relever que Maître Christian Raeis : - d'une part sollicite la confirmation du jugement qui a rejeté ce moyen comme mal fondé ; - d'autre part ne reprend pas ce moyen dans les écritures

qu'il a fait déposer devant la cour.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris, de déclarer la demande irrecevable et de condamner Maître Christian Raeis, es qualités aux dépens de l'instance ainsi qu'au versement d'une somme de 1.500 ä en application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DÉCLARE l'appel régulier et recevable en la forme ;

AU FOND :

INFIRME le jugement entrepris ;

ET STATUANT À NOUVEAU :

DÉCLARE la demande de Maître Christian Raeis irrecevable ;

CONDAMNE Maître Christian Raeis aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement de la somme de 1.500 ä (mille cinq cents euros)Maître Christian Raeis par application des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Et le présent arrêt a été signé par M. HOFFBECK, Président de Chambre, et par Mme SCHOENBERGER, Greffier présent au prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de colmar
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006944324
Date de la décision : 30/03/2004

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Organes - Commissaire à l'exécution du plan - Attributions

Il résulte des articles L 621-68 du Code de commerce et 90 du décret du 27.12.1985 que lorsque la mission de l'administrateur prend fin, seul le commissaire à l'exécution du plan est habilité à poursuivre l'action en cours. Dès lors, ne s'étant jamais prévalu de cette qualité dans le cadre de l'instance et n'ayant pas davantage soutenu que sa mission de commissaire à l'exécution du plan avait pris fin, l'intimé ne peut poursuivre la procédure en annulation de prélèvement opérés par la banque sur le compte courant de la société en cessation de paiement, en se prévalant de sa désignation de mandataire ad hoc


Références :

Code de commerce : L. 621-68 Décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.colmar;arret;2004-03-30;juritext000006944324 ?
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