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25/07/2024 | FRANCE | N°23/08131

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 25 juillet 2024, 23/08131


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 25 JUILLET 2024



N°2024/250



Rôle N° RG 23/08131 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPJU







[E] [D]



C/



La [4] - [4]



























Copie exécutoire délivrée

le : 25 juillet 2024

à :



- Me Agnès ERMENEUX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



- [4]





































N° RG 23/08131 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPJU



Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 11 Mai 2023.



Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation l...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 25 JUILLET 2024

N°2024/250

Rôle N° RG 23/08131 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPJU

[E] [D]

C/

La [4] - [4]

Copie exécutoire délivrée

le : 25 juillet 2024

à :

- Me Agnès ERMENEUX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

- [4]

N° RG 23/08131 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPJU

Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 11 Mai 2023.

Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 22 Juin 2021.

Jugement prononcé par le TASS D'AVIGNON en date du 09 novembre 2018

DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur [E] [D], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Frédéric FRANC, avocat au barreau D'AVIGNON

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

La [4] - [4], demeurant [Adresse 1]

représentée par M. [U] [G] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Juin 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente,

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Anne BARBENES.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Juillet 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Juillet 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

N° RG 23/08131 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPJU

Le 4 janvier 2016, la [4] ([4]) a mis en demeure M. [D] de régler la somme de 22.610,39 euros au titre des cotisations sociales pour l'année 2015.

Faute de règlement, la [4] a décerné à son encontre une contrainte le 7 novembre 2016 d'un montant de 20.293,39 euros correspondant à 21.839,75 euros de cotisations dues pour l'année 2015 et 770,64 euros de majorations de retard, après déduction de 2.317 euros.

Contestant devoir cette somme, M. [D] a formé opposition à la contrainte devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vaucluse le 9 décembre 2016.

Par jugement rendu le 9 novembre 2018, le tribunal a :

- reçu l'opposition de M. [D] mais l'a déclarée mal-fondée,

- débouté M. [D] de l'exception de nullité et de l'intégralité de ses demandes,

- validé la contrainte décernée le 7 novembre 2016 par la [4] à l'encontre de M. [D] à hauteur de la somme de 18.115,39 euros, soit 17.344,75 euros en cotisations et 770,64 euros en majorations de retard,

- dit que les frais de signification de la contrainte demeurent à la charge de M. [D],

- rappelé que la présente décision est exécutoire de plein droit à titre provisoire.

Par déclaration envoyée par la voie électronique le 6 décembre 2018, M. [D] a interjeté appel du jugement.

Par arrêt du 22 juin 2021, la cour d'appel de Nimes a :

- infirmé le jugement en toutes ses dispositions,

- constaté que la contrainte décernée le 7 décembre 2016 par la [4] à l'encontre de M. [D] à hauteur de la somme de 18.115,39 euros, soit 17.344,75 euros en cotisations et 770,64 euros en majorations de retard, est nulle,

- condamné la [4] à payer à M. [D] la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles,

- rejeté les demandes plus amples ou contraires,

- condamné la [4] aux dépens de la procédure d'appel.

Sur pourvoi formé par la caisse, par arrêt du 11 mai 2023, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt et remis les parties dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt en les renvoyant devant la présente cour d'Aix-en-Provence, pour les motifs suivants :

'Vu les articles L. 244-2 du code de la sécurité sociale, rendu applicable par l'article L. 623-1 au recouvrement des cotisations afférentes à l'organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales et R. 244-1 du même code, dans leur rédaction applicable au litige :

Il résulte de ces textes que la contrainte décernée par un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement de cotisations et contributions doit permettre au cotisant d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et préciser à cette fin, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations réclamées ainsi que la période à laquelle celles-ci se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

Pour annuler la contrainte, l'arrêt retient que celle-ci, qui mentionne le montant des cotisations réclamées et des majorations de retard dues, ainsi que la période visée, fait référence à une lettre de mise en demeure. Il relève que l'accusé de réception de ce courrier mentionne « pli refusé par le destinataire ». Il énonce qu'à défaut de délivrance effective de la lettre de mise en demeure, la [4] doit rapporter la preuve que la seule contrainte a permis à l'appelant de connaître la cause, la nature et l'étendue de son obligation et ajoute qu'à défaut de préciser le montant des cotisations dues pour chacun des régimes, comme cela figure dans la mise en demeure, la contrainte est insuffisante pour connaître précisément la nature de la dette sociale dont le cotisant reste redevable.

En statuant ainsi, alors que le défaut de réception effective par le destinataire de la mise en demeure qui lui avait été adressée par lettre recommandée avec avis de réception n'affectait pas la validité de celle-ci et qu'il ressortait de ces constatations que cette mise en demeure, à laquelle faisait expressément référence la contrainte, permettait au cotisant d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l' étendue de son obligation, quels qu'en aient été les modes de délivrance, la cour d'appel a violé les textes susvisés.'

Par déclaration au greffe de la cour en date du 20 juin 2023, M. [D] a saisi la cour aux fins de former appel du jugement initialement critiqué.

A l'audience du 6 juin 2024, M. [D] reprend les conclusionscommuniquées par RPVA le 18 août 2023. Il demande à la cour de :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter la [4],

- annuler la contrainte du 7 novembre 2016, signifiée le 28 novembre 2016 à M. [D],

- condamner la [4] à lui payer 5.000 euros à titre de frais irrépétibles et à payer les dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que si la Cour de cassation a soutenu que la mise en demeure du 4 janvier 2016 était valide et contenait toutes les informations nécessaires permettant au cotisant d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, il n'en demeure pas moins que la contrainte du 7 novembre 2016 ne fait pas référence de manière précise à cette mise en demeure.

Il indique que la contrainte ne précise pas, elle-même, la nature des cotisations réclamées en visant un montant global des cotisations dues sur l'exercice 2015 sans le ventiler entre le régime de base tranche 1 et tranche 2, la complémentaire vieillesse, les allocations supplémentaires de vieillesse et l'invalidité-décès. Il continue en faisant valoir que la contrainte ne vise pas précisément la mise en demeure identifiée MD 2015 et datée du 4 janvier 2016 en ne rappelant pas la référence de la mise en demeure, de sorte que la mise en demeure n'est pas clairement identifiable.

Il ajoute que la contrainte fait état d'une somme de 2.317 euros à titre de déductions, sans que cette mention ne permette de lui donner connaissance de la nature, la cause et l'étendue de son obligation. Il cite la jurisprudence de la cour d'appel de Toulouse ayant statué en ce sens dans un cas similaire (CA Toulouse 25 octobre 2019 n°18/03360).

La [4] reprend sa note récapitulative du 27 mai 2024. Elle demande à la cour de :

- débouter M. [D],

- confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale en ce qu'il a validé la contrainte en cause,

- suite à l'imputation d'un crédit en date du 30 avril 2019, valider la contrainte pour un montant réduit à 16.768,89 euros, dont 15.998,25 euros en principal et 770,64 euros en majorations de retard arrêtées à la date de la mise en demeure,

- condamner M. [D] à payer une amende civile pour procédure abusive et dilatoire,

- condamner M. [D] à lui payer la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles.

Au soutien de ses prétentions, elle rappelle les modalités de calcul des cotisations sociales dues par les médecins et explique que les cotisations réclamées ont été calculées sur la base des revenus d'activité nets déclarés par M. [D] au titre de l'année 2013 à hauteur de 271.958 euros, de sorte que les cotisations dues pour l'exercice 2015 s'élevaient initialement à 30.612 euros. Elle indique avoir encaissé deux prélèvements mensuels pour un total de 4.450 euros , les autres étant revenus impayés, de sorte que les sommes réclamés au titre de l'exercice 2015 ont été ramenées à un principal de 26.162 euros. Elle ajoute que le médecin ayant choisi d'exercer en secteur 1 à effet au 1er avril 2015, une somme de 4.322,25 euros a été annulée au titre du régime [3], ramenant ses cotisations 2015 à un total de 21.839,75 euros, montant figurant sur la mise en demeure du 4 janvier 2016.

Elle fait noter que suite à la déclaration de ses revenus 2014 par le médecin, à hauteur de 247.945 euros, elle a procédé à l'ajustement de la cotisation de base 2015, en annulant 2.317 euros et ramenant les cotisations 2015 à 19.522,75 euros, montant figurant dans la contrainte du 7 novembre 2016.

Elle indique encore que, postérieurement, le médecin a bénéficié d'une réduction pour insuffisance de revenus au titre de ses cotisations de 2017, en date du 30 août 2017 et qu'un crédit de 2.178 euros a alors été imputé sur l'exercice 2015, permettant de ramener les cotisations à la somme de 17.344,75 euros.

Enfin, elle explique que M. [D] a cessé son activité et a été radié le 30 avril 2019 avec effet au 1er janvier 2019 et le médecin ayant versé, au titre de l'exercice 2019, la somme de 1.346,50 euros, cette somme a été ré-imputée sur l'exercice 2015, permettant de ramener le principal au montant de 15.998,75 euros.

Elle rappelle que la mise en demeure est valable quels qu'en soient les modes de délivrance de celle-ci, de sorte que la mention 'pli refusé par le destinataire' sur l'accusé de réception de la mise en demeure du 4 janvier 2016 ne la rend pas irrégulière. Elle fait valoir que c'est conformément à la jurisprudence que les mise en demeure et contrainte émises ont permis au médecin de connaître la nature, la cause et l'étendue des sommes réclamées à titre obligatoire.

Il convient de se reporter aux écritures reprises oralement par les parties à l'audience pour un plus ample exposé des faits.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon les articles L. 244-2 et L. 244-9 du code de la sécurité sociale, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, et la contrainte délivrée à la suite de cette mise en demeure restée sans effet, doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

En l'espèce, la contrainte établie le 7 novembre 2016 par la [4] à l'encontre de M. [D] est suffisamment motivée dés lors qu'elle vise la nature, le montant des cotisations réclamées et les périodes auxquelles elles se rattachent en ces termes :

- 21.839,75 euros de cotisations, 770,64 euros de majorations, 2.317 euros de d'acomptes versés après mise en demeure, régularisation ou remise sur majorations, soit un total de 20.293,39 euros au titre de l'exercice 2015,

- en renvoyant pour le détail à la mise en demeure envoyée le 4 janvier 2016.

En effet, la mise en demeure datée du 4 janvier 2016 visant le même montant en principal et en majorations de retard, ainsi que la même période de 2015 que la contrainte, précise le montant dû pour chaque nature de cotisations différentes (base vieillesse provisionnel, base vieillesse régularisation 2013, complémentaire vieillesse, allocations supplémentaires vieillesse ASV forfaitaire,allocations supplémentaires vieillesse ASV , invalidité décès).

Il importe peu que la contrainte ne vise pas précisément la référence de la mise en demeure : 'MD 2015" alors même qu'il est indiqué dans la mise en demeure qu'il s'agit d'une référence à rappeler. En effet, cette mention est destinée au cotisant qui doit rappeler la référence de la mise en demeure s'il entend la payer ou la contester. Le défaut de cette référence ne peut sérieusement pas être opposée à la caisse pour faire valoir que la mise en demeure visée dans la contrainte n'est pas identifiable, alors même que la date de la mise en demeure est précisée, que la mise en demeure et la contrainte qui s'y réfère portent les mêmes montants en principal et en majorations de retard, et que la différence du montant total réclamé est explicité par le montant de la déduction précisée dans la contrainte.

Enfin, il importe peu que la mise en demeure n'ait pas été effectivement reçue par le cotisant, l'accusé de réception de la lettre de mise en demeure ayant été retourné avec la mention 'pli refusé par le destintaire', dès lors qu'il ne fait pas débat que, comme l'ont pertinemment fait remarquer les premiers juges, la lettre a été envoyée à l'adresse à laquelle la contrainte a été régulièrement notifiée et à laquelle M. [D] a été régulièrement convoqué aux audiences dans le cadre de la première instance, comme en appel.

Il s'en suit que la contrainte n'encourt pas la nullité.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Compte tenu d'une réduction de cotisations 2017 et de la radiation du médecin le 30 avril 2019 avec effet rétroactif au 1er janvier 2019, il convient de prendre en compte les sommes portées au crédit de son compte à hauteur de 2.178 euros et de 1.346 euros pour les affecter au paiement des cotisations 2015 et d'ajouter au dispositif du jugement confirmé, que M. [D] sera condamné au seul montant de 16.768,89 euros dont 15.998,25 euros en principal et 770,64 euros en majorations de retard arrêtées à la date de la mise en demeure, au titre des sommes dues sur l'exercice 2015.

Le caractère parfaitement infondé du nouvel argument soulevé par l'appelant pour poursuivre son appel après cassation, ne suffit pas à caractériser l'appel dilatoire ou abusif au sens de l'article 559 du code de procédure civile, de sorte que la demande tendant à la condamnation à une amende civile sera rejetée.

M. [D], succombant à l'instance, sera condamné au paiement des dépens en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, il sera également condamné à payer à la [4] la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles, et sera débouté de sa propre demande présentée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [D] à payer à la [4] le seul montant de 16.768,89 euros dont 15.998,25 euros en principal et 770,64 euros en majorations de retard arrêtées à la date de la mise en demeure, au titre des sommes dues sur l'exercice 2015,

Rejette la demande d'amende civile,

Condamne M. [D] à payer à la [4] la somme de 1.000 euros à titre de frais irrépétibles,

Condamne M. [D] aux dépens de l'appel.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 23/08131
Date de la décision : 25/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-25;23.08131 ?
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