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07/06/2024 | FRANCE | N°23/13747

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-2, 07 juin 2024, 23/13747


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2



ARRÊT AU FOND

DU 07 JUIN 2024



N° 2024/105













Rôle N° RG 23/13747 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMDX6







[G] [X]





C/



S.A.S. EXPERT RH

















Copie exécutoire délivrée

le : 07 Juin 2024

à :



Me Juliette HUA, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Thibault PINATEL , avocat au barreau de M

ARSEILLE

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 19 Octobre 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 23/00301.





APPELANTE



Madame [G] [X], demeurant [Adresse 2]

...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 07 JUIN 2024

N° 2024/105

Rôle N° RG 23/13747 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMDX6

[G] [X]

C/

S.A.S. EXPERT RH

Copie exécutoire délivrée

le : 07 Juin 2024

à :

Me Juliette HUA, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Thibault PINATEL , avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 19 Octobre 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 23/00301.

APPELANTE

Madame [G] [X], demeurant [Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Juliette HUA de l'AARPI OLLIER JEAN MICHEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

S.A.S. EXPERT RH Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Thibault PINATEL de la SCP BOLLET & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Nicolas ROBINE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2024, délibéré prorogé au 07 Juin 2024

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Juin 2024

Signé par Mme Marianne FEBVRE, Présidente de chambre suppléante et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Mme [G] [X] a été engagée par la société Expert RH en qualité de responsable du développement commercial et du recrutement dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet signé le 2 mai 2022.

Elle était classée cadre, position 2.3, coefficient 150 de la grille des emplois de la convention collective des bureaux d'étude technique (dites Syntec) applicable et percevait une rémunération sur la base d'un salaire mensuel brut de 3.500 € comportant de multiples retenues pour des jours d'absences non rémunérés.

La salariée bénéficie d'un arrêt de travail pour cause de maladie depuis le 22 mai 2023.

Le 23 juillet 2023, après avoir parallèlement engagé une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, Mme [X] a saisi le conseil des prud'hommes de Marseille pour obtenir en référé :

- la communication de son contrat de travail paraphé et signé,

- un complément de salaire au titre du maintien de salaire conventionnel,

- un rappel de salaire pour des jours récupérés,

- une provision sur dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier,

- des bulletins de salaire rectifiés.

Vu l'ordonnance du 19 octobre 2023 disant n'y avoir lieu à référé et renvoyant les parties à mieux se pourvoir au fond et condamnant la partie demanderesse aux dépens,

Vu la déclaration d'appel de Mme [X] en date du 7 novembre 2023,

Vu ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 15 mars 2023, par lesquelles elle demande à la cour d'infirmer l'ordonnance déférée et, en substance, de :

- enjoindre la société Expert RH de lui communiquer le contrat de travail conclu, paraphé et signé en mai 2022, sous astreinte de 100 euros par jour

de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir,

- condamner la société Expert RH au paiement des sommes suivantes :

- 2.029,61 € de complément de salaire au titre du maintien de salaire pour les mois de mai, juin, juillet et août 2023,

- 6.721,36 € au titre de la prévoyance pour les mois de septembre, octobre, novembre, décembre 2023, janvier et février 2024,

- 5.000 € à titre provisionnel à valoir sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice financier lié à l'absence de règlement des salaires pendant l'arrêt maladie,

- condamner également la société Expert RH au paiement du salaire dû pour les jours récupérés les 15-16-17 et 19 mai 2023,

- ordonner la remise des bulletins de salaire rectifiés sur les mois de mai 2023 à février 2024, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir,

- ordonner la régularisation des bulletins de salaire au titre des congés payés acquis pendant la relation contractuelle, y compris lors la période pour arrêt maladie (46 jours à parfaire),

- dire que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil des prud'hommes et ordonner la capitalisation des intérêts de retard,

- condamner solidairement la société Expert RH et de la société Vast à lui payer une indemnité de 1.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

Vu les uniques conclusions en date du 23 février 2024 pour la société Expert RH, aux fins de confirmation de l'ordonnance déférée, rejet de l'intégralité des demandes de Mme [X] et condamnation de cette dernière au paiement d'une indemnité de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites susvisées.

A l'issue de l'audience, les parties présentes ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être rendue le 24 mai 2024 par mise à disposition au greffe. Elles ont été informées par le greffe du prorogé de ce délibéré au 7 juin 2024.

SUR CE :

En application des dispositions de l'article R.1455-5 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner des mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

L'article R.1455-6 énonce pour sa part que la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Enfin, en application de l'article R.1455-7 du même code, dans le cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En l'espèce, Mme [X] n'inscrit ses demandes sur aucune de ces dispositions et se borne à reprendre les demandes qu'elle avait présentées devant la formation des référés du conseil des prud'hommes de Marseille et dont elle a été déboutée.

Sur la remise d'un contrat de travail paraphé :

La salariée appelante affirme qu'elle ne parvient pas à retrouver le contrat de travail qu'elle a signé et qui prévoyait une rémunération mensuelle brute de 3.500 € outre une prime de 200 € par mois, ce qui devait lui permettre de percevoir une somme de 3.000 € en net conformément à l'accord auquel il avait été abouti avec l'employeur.

Elle affirme avoir été rémunérée sur cette base et demande que la société Expert RH soit condamnée à produire ce contrat. Elle déclare en effet que la pièce n°1 versée aux débats par la société Expert RH n'est pas celui qui avait été signé et qu'elle avait paraphé sur chacune des pages : le contrat aurait ainsi été falsifié au niveau des premières pages qui - au vu de la pièce produite par l'employeur - ne comportent aucun paraphe de sa part : de ce fait, les dispositions relatives à sa rémunération ont été tronquées, ainsi que concernant celles concernant la durée de son travail puisque la stipulation relative aux jours de RTT n'apparaît plus.

Elle produit un projet de contrat en déclarant ne pas y avoir donné de suite et affirme que la société Expert RH a mis en place un mécanisme financier à partir d'éléments fictifs pour la rémunérer. Mme [X] conteste ainsi les modalités de sa rémunération dont elle déclare qu'elles résultent d'un montage frauduleux, ce dont elle ne tire aucune conséquence en terme de provision sur rappel de salaire.

Elle affirme avoir déposé plainte à l'encontre de l'employeur pour faux, usage de faux et escroquerie au jugement.

S'agissant de la demande de production d'un exemplaire de contrat de travail paraphé sur toutes les pages par la salariée, la société Expert RH oppose cependant à juste titre que cette demande se heurte à une contestation sérieuse.

En effet et au vu des bulletins de salaire versés aux débats, la salariée a bien été rémunérée conformément aux dispositions du contrat de travail produit en pièce n°1 par l'employeur et il n'est justifié d'aucune réclamation de la part de la salariée durant l'année d'exécution de la relation contractuelle avant son arrêt maladie.

Il convient également d'observer que la plainte pénale évoquée n'est pas versée aux débats et que la salariée ne fournit aucune information sur la suite qui lui aurait été donnée.

Enfin et indépendamment de l'existence d'une contestation plus que sérieuse, l'appelante n'offre pas de prouver la nécessité d'ordonner à titre de mesure conservatoire la communication de la pièce sollicitée, que ce soit pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée sur ce premier point.

Sur le maintien de la rémunération pendant l'arrêt maladie , le salaire dû pendant des jours de récupération et les dommages et intérêts :

Mme [X] affirme qu'eu égard aux dispositions conventionnelles relatives au maintien du salaire et à la prévoyance, elle aurait dû percevoir chaque mois l'équivalent de 3.000 € nets pour la période entre mai et août 2023, puis 2.550 € nets entre septembre 2023 et février 2024 sur la base d'un salaire brut fixé à minima à 3.700 €, si bien qu'elle est en droit de réclamer en référé les sommes suivantes :

- 2.029,61 € entre mai et août 2023 au titre du maintien de salaire à 100%,

- 4.956,13 € entre septembre et décembre 2023 au titre de la prévoyance qui prévoit un maintien de salaire à 85% (cf. Ses conclusions page 12, premier parag.).

Or la cour constate que la salariée appelante a été contrainte d'effectuer, sur 3 pages, des calculs qu'il est difficile - voire impossible - de suivre cela pour aboutir - en page 14 (avant dernier parag.) - à un résultat différent, à savoir à l'octroi d'une somme de 6.721,36 € au titre du maintien de salaire à 85% entre septembre 2023 et janvier 2024. En l'état de ces différents résultats, l'obligation dont l'exécution est sollicitée s'avère sérieusement contestable.

Du reste Mme [X] n'évoque pas l'urgence de l'article R.1455-5 du code du travail et il convient de rappeler que le juge des référés prud'homal ne peut condamner une partie au paiement d'une somme d'argent. Tout comme le juge des référés de droit commun, il peut seulement allouer une provision sur le fondement de l'article R.1455-7 du code du travail, ce qui n'est pas sollicité en l'espèce par Mme [X] s'agissant de ses réclamations au titre du maintien des salaires et de la prévoyance.

Quant à la demande présentée au titre des jours récupérés pour la période du 15 au 19 mai 2023,la cour constate que l'appelante ne sollicite le paiement d'aucune somme chiffrée. En outre, et comme déjà constaté à juste titre par les premiers juges, elle ne justifie pas de l'accord de l'employeur quant à la requalification de ses journées d'absences non rémunérées en jours de récupération. A cet égard, son mail daté du 15 mai 2023 est un élément de preuve tout à fait insuffisant.

Pour ce qui concerne la demande de provision sur dommages et intérêts en réparation du préjudice financier lié à l'absence de règlement des salaires pendant l'arrêt maladie, l'ordonnance qui l'a rejetée sera confirmée par voie de conséquence faute de preuve d'un quelconque manquement imputable à l'employeur.

Sur la demande de régularisation des bulletins de salaire au titre des congés payés acquis :

Mme [X] soutient qu'au cours de la relation contractuelle, la société Expert RH n'a pas procédé à un décompte régulier et conforme des congés payés qu'elle avait acquis jusqu'à mai 2023 puis durant son congés maladie. Elle affirme que l'employeur avait d'ailleurs cessé de mentionner ses droits à congés payés à compter de janvier 2023. Et elle estime qu'il lui est dû 46 jours - 'à parfaire' - au regard des 57 jours auxquels elle peut prétendre avec une ancienneté de 23 mois et des 12 jours de congés qu'elle a effectivement pris sur la période.

Il sera cependant constaté que l'ensemble des bulletins de paie mentionnent bien, au pied, les congés acquis et les congés pris l'année N (en cours) et l'année N-1 (précédente) et ce, y compris après le mois de janvier 2023.

Il résulte par ailleurs de leur examen que Mme [X] a effectivement bénéficié de 6 jours de congés payés en décembre 2022 et autant en avril 2023 et qu'elle cumule désormais 2,5 jours de congés payés par mois depuis le début de son arrêt maladie.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée pour avoir rejeté la demande de condamnation 'par provision (...) à régulariser les bulletins de salaire au titre des congés payés acquis pendant la période contractuelle, y compris lors la période pour arrêt maladie (46 jours à parfaire)' et ce, après avoir justement constaté que l'acquisition des congés mentionnés sur les bulletins de salaire était en cohérence au regard des absences non rémunérées de la salariée.

La cour ajoutera simplement que cette demande ne se rattache pas à une situation d'urgence au sens de l'article R.1455-5 du code du travail tandis que la salariée ne fait état d'aucun dommage imminent ou trouble manifestement illicite qu'il conviendrait de prévenir en application de l'article R.1455-6 de ce code. Inversement, l'obligation de faire dont l'exécution est sollicitée est sérieusement contestable en l'état de l'énoncé de la demande de régularisation sur la base de '46 jours à parfaire', en l'état des multiples absences non rémunérées et de la formulation par la salariée de bases de calcul non explicites.

Sur les autres demandes :

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [X] supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à la société Expert RH une indemnité au titre des frais qu'elle a dû exposer en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et par arrêt mis à la disposition des parties au greffe et dans les limites de sa saisine :

- Confirme l'ordonnance déférée, rendue le 19 octobre 2023 par le conseil des prud'hommes de Marseille en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- Condamne Mme [G] [X] à payer à la société Expert RH la somme de 1.500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

- Condamne également Mme [G] [X] aux dépens de l'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-2
Numéro d'arrêt : 23/13747
Date de la décision : 07/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-07;23.13747 ?
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