COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 10 NOVEMBRE 2022
N°2022/733
Rôle N° RG 22/00836 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIWUU
Jonction avec
Rôle N° RG 22/08369 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJRN6
[E], [T] [P]
C/
Ste Coopérative banque Pop. BANQUE POPULAIRE MÉDITERRANÉE
Syndic. de copro. [Adresse 4]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Hélène TEYSSERRE-ORION
Me Christophe MACHART
Me Philippe CORNET
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution de MARSEILLE en date du 07 Décembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 21/00108.
APPELANT
Monsieur [E], [T] [P]
né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 4]
représenté et assisté par Me Hélène TEYSSERRE-ORION, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMÉS
Société Coopérative BANQUE POPULAIRE MÉDITERRANÉE
créancier inscrit
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]
assignée à jour fixe le 4 mai 2022 à personne habilitée
représentée et assisté par Me Christophe MACHART, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Jean-Philippe MONTERO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4]
représenté par son syndic le cabinet CITYA CARTIER , immatriculée au RCS de MARSEILLE sous le n° 347 503 583, lui même pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 3]
représenté et assisté par Me Philippe CORNET de la SELARL C.L.G., avocat au barreau de MARSEILLE, substitué par Me Lionel CHARBONNEL, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 29 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Evelyne THOMASSIN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2022, puis prorogé au 10 Novembre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022.
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits, procédure et prétentions des parties :
Le SDC de la résidence [Adresse 4] poursuit à l'encontre de monsieur [P] la vente sur saisie immobilière d'un bien dont il est propriétaire à [Adresse 4]. Monsieur [P] est en procédure de surendettement et la créance de la copropriété est mentionnée dans cette instance pour 4 565.75 euros .
Par jugement du 7 décembre 2021, le juge de l'exécution du tribunal de Marseille a :
- validé la procédure,
- mentionné la créance du SDC pour un montant de 5 619.97 euros en principal arrêté au 10 décembre 2019 outre intérêts et accessoires jusqu'à parfait paiement,
- autorisé la vente amiable du bien constitué d'un appartement, un garage et une cave pour le prix plancher de 115 000 €,
- renvoyé le dossier au 5 avril 2022 pour suivi de la procédure,
- déclaré les dépens frais privilégiés de vente.
Il considérait que le surendettement de monsieur [P] n'empêchait pas la vente, puisque la caducité de la procédure était intervenue, monsieur [P] ayant aggravé son endettement en ne payant pas de nouvelles charges de copropriété. Il autorisait la vente à l'amiable de l'immeuble saisi sur un prix plancher de 115 000 €.
Monsieur [E] [P] a fait appel de la décision par déclaration au greffe le 19 janvier 2022 (RG22-836). Régulièrement autorisé par ordonnance du 27 janvier 2022 à assigner à jour fixe, il a déposé les actes ainsi délivrés au greffe en application de l'article 922 du code de procédure civile.
Il a formé un second appel, le 10 juin 2022 (RG8369).
Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions en date du 21 juin 2022, auxquelles il est renvoyé, il demande à la cour de :
- réformer le jugement rendu le 7 décembre 2021,
- débouter le SDC de ses demandes,
- annuler la procédure de saisie qui ne pouvait être entreprise alors qu'il est en procédure de surendettement,
A titre subsidiaire,
- fixer la créance du SDC à la somme de 4 595.75 euros qui ne porte plus intérêt depuis le 26 mars 2020, date de recevabilité de son dossier de surendettement,
- l'autoriser à se libérer de sa dette par 24 mensualités ou reporter le paiement à 24 mois,
A titre plus subsidiaire,
- suspendre la procédure de saisie immobilière jusqu'à la fin du plan conventionnel de redressement arrêté par la commission, soit jusqu'au 30 septembre 2022,
A titre encore plus subsidiaire,
- l'autoriser à vendre amiablement au prix de 80 000 €,
En tout état de cause,
- condamner le SDC à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les entiers dépens de l'instance comprenant ceux de première instance.
La Banque Populaire a bien été attraite à la procédure en qualité de créancier inscrit, même si son nom figure sous la mention 'partie intervenante'. L'appel est recevable. Quoiqu'il en soit, un second appel a été formé sous le numéro RG22-8369 et il n'y a aucune difficulté procédurale. Sa demande à bénéficier d'une procédure de surendettement a été déclarée recevable le 26 mars 2020. Il a bénéficié d'un délai moratoire de deux ans qui devait lui permettre d'apurer les dettes, notamment par la vente du bien immobilier, ce délai expire le 30 septembre 2022. Le SDC ne pouvait entreprendre une procédure de saisie immobilière sur ce bien alors que le moratoire était en cours, le commandement de payer valant saisie ayant été délivré le 23 février 2021. Sa situation financière est un peu améliorée, il a pu verser des acomptes et doit percevoir dans quelques mois une indemnisation après une agression qui lui permettra de solder la dette. Il demande des délais de paiement ou un report de la dette sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil. Le prix plancher pour une vente amiable est trop élevé car il doit être tenu compte de la commission d'agence.
Le SDC les Planes, dans des conclusions du 23 juin 2022 auxquelles il est renvoyé, demande à la cour de :
- déclarer l'appel irrecevable,
- confirmer la décision en toutes ses dispositions,
- rejeter les délais de paiement,
- à titre subsidiaire lui donner acte qu'il s'en rapporte à justice sur une vente amiable à 95 000€,
En tout état de cause,
- condamner monsieur [P] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Sa créance à ce jour, arrêtée au 15 février 2021, s'élève à 5 619.97 euros sauf mémoire, détaillée dans ses écritures. Sur le fondement de l'article 553 du code de procédure civile, l'appel serait irrecevable car la Banque Populaire n'a pas été intimée. Le plan est caduc car monsieur [P] s'est abstenu de payer les charges courantes et il a aggravé la situation de sa dette, le plan est donc caduc car il a été mis en demeure, le 8 décembre 2020, de respecter ses obligations, mais en vain. Aujourd'hui, plus de 11 126.29 euros lui sont dûs. La copropriété a besoin de cette trésorerie, monsieur [P] n'a toujours pas vendu le bien. Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de nouveaux délais de paiement.
La Banque Populaire Méditerranée, assignée a constitué avocat le 26 juin 2022 mais n'a pas conclu.
MOTIVATION DE LA DÉCISION :
Les appels interjetés se rapportent à la même décision du juge de l'exécution de Marseille en date du 7 décembre 2021. Il convient d'ordonner la jonction des dossiers.
Sur la recevabilité de l'appel :
Monsieur [P] observe à juste titre que la BPM, est partie pour avoir été appelée à la présente instance, comme créancier inscrit dans un litige indivisible. La seconde déclaration d'appel formée par lui, régularise l'omission de certaines parties, alors qu'il a bien eu recours à la procédure à jour fixe dont l'objet est avant tout de déterminer la date de l'audience, ce qui le dispensait, dans un litige indivisible de présenter à nouveau une requête afin d'assignation à jour fixe pour attraire un intimé omis à l'origine. L'appel sera jugé recevable.
Sur la caducité du plan de surendettement :
Le plan conventionnel de redressement en date du 27 août 2020, a accordé à monsieur [P] un moratoire de deux ans afin de lui permettre de vendre, au prix du marché, le bien immobilier dont il est propriétaire, estimé, lors du dépôt du dossier à la somme de 95 000 €, ce afin de désintéresser les créanciers. Ce plan comporte au titre des obligations du débiteur, une clause de non aggravation du passif et une clause de caducité, qui en cas de non respect du plan, permet à un créancier, par l'envoi d'une lettre de mise en demeure, et 15 jours plus tard, d'invoquer à défaut de régularisation, la perte du bénéfice du surendettement pour le débiteur.
Le SDC verse aux débats un courrier daté du 8 décembre 2020, adressé en LRAR, selon lequel monsieur [P] qui n'a pas été retirer le pli, a été mis en demeure de régulariser dans les 30 jours, l'aggravation de sa dette puisqu'indépendamment du moratoire, il ne payait pas les charges courantes de copropriété et aggravait donc son endettement. Il n'est pas remis en cause qu'aucune régularisation n'a été faite, de sorte que le plan est devenu caduc avant la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière, délivré le 23 mars 2021. En effet aucun versement n'est mentionné entre le mois de mars 2020 et le mois de septembre 2021 sur le relevé de compte copropriétaire.
En conséquence de quoi, il n'y a pas lieu d'invalider la procédure de saisie immobilière.
Sur la demande de délais de paiement :
Le titre exécutoire basant la mesure d'exécution date du 25 août 2020, les difficultés de paiement sont anciennes et récurrentes, compte tenu des paiements partiels qui ont pu être faits mais n'effacent jamais totalement le retard ainsi que l'établit le relevé de compte copropriétaire. Par ailleurs, plusieurs copropriétaires sont défaillants dans cette résidence, ce qui reportent sur les autres les dépenses indispensables à la conservation de l'immeuble. L'assemblée générale tenue le 19 novembre 2020 énonce le recours à des saisies immobilières pour 4 copropriétaires. Monsieur [P] ne justifie pas que sa situation puisse s'améliorer notablement et lui permettre de se mettre à jour dans le délai impératif de deux ans, énoncé par l'article 1343-5 du code civil. Il ne sera donc pas fait droit à la demande de ce chef.
Sur le montant de la créance :
Durant la validité et la mise à exécution du plan de surendettement, les intérêts avaient été bloqués. Compte tenu du délai de 30 jours laissé au débiteur par le SDC pour régulariser avant caducité, les intérêts ne seront à nouveau décomptés qu'à partir du 8 janvier 2021.
Il convient donc de réduire en conséquence la créance du SDC :
Principal 4 595.75 euros
Intérêts du 27.11.2019 au 30.06.2020 304.30 euros
Intérêts du 08.01.2021 au 15.02.2021 61.12 euros
Article 700 du code de procédure civile 600.00 euros
dépens 195.47 euros
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5 766.64 euros
intérêts postérieurs taux légal majoré Pour mémoire
Autres frais PM.
Sur la vente amiable :
Aux termes de l'article R322-21 du code des procédures civiles d'exécution, le juge autorise la vente amiable en fixant le montant minimum du prix, en tenant compte des conditions économiques du marché et des conditions particulières de la vente, le cas échéant.
Un mandat de vente avait été consenti au prix de 130 000 euros qui n'a pas eu de suite concrète. Il convient dès lors de reprendre le montant énoncé dans le dossier de surendettement comme une valeur minimal à laquelle l'immeuble pourra être vendu, soit la somme de 95 000 €.
Sur les autres demandes :
Il est inéquitable de laisser à la charge du SDC les frais irrépétibles engagés dans l'instance, une somme de 1 500 euros lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La partie perdante supporte les dépens, ils seront à la charge de monsieur [P] qui succombe en son recours.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe,
ORDONNE la jonction des dossiers RG22-8369 et RG 22-836,
DECLARE l'appel formé par monsieur [P] recevable,
CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant de la créance et le prix en deça duquel la vente amiable ne peut être réalisée,
Statuant à nouveau de ces chefs,
FIXE à la somme de 95 000 euros net vendeur, le prix en deçà duquel les biens saisis ne pourront être vendus à l'amiable,
FIXE la créance du SDC à 5 766.64 euros outre intérêts postérieurs au taux légal majoré à compter du 16 février 2021 sur la somme de 4 595.75 euros jusqu'à parfait paiement, outre frais de procédure pour mémoire,
Y ajoutant,
CONDAMNE monsieur [P] à payer au SDC [Adresse 4], la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute autre demande,
CONDAMNE monsieur [P] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE