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15/11/2018 | FRANCE | N°18/06787

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 15 novembre 2018, 18/06787


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 15 NOVEMBRE 2018



N° 2018/ 454













N° RG 18/06787 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCJ55







Me [I] liquidateur de SAS ALEXANDRE III





C/



[F] [X]

[I] [K] épouse [B]









Copie exécutoire délivrée

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Me ALLIGIER



Me ERMENEUX














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Décision déférée à la Cour :



Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 28 Mars 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017L00409.





APPELANT





Maître [J] [I] es qualités de la SELARL JSA pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ALEXANDRE III,

dem...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 15 NOVEMBRE 2018

N° 2018/ 454

N° RG 18/06787 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCJ55

Me [I] liquidateur de SAS ALEXANDRE III

C/

[F] [X]

[I] [K] épouse [B]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me ALLIGIER

Me ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 28 Mars 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 2017L00409.

APPELANT

Maître [J] [I] es qualités de la SELARL JSA pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ALEXANDRE III,

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté et plaidant par Me Pascal KLEIN de la SCP KLEIN, avocat au barreau de NICE substituée par Me Kévin GRAZIANI, avocat au barreau de NICE,

INTIMEES

Madame [F] [X],

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée et plaidant par Me Jean luc BOUCHARD, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Tanguy CARA, avocat au barreau de GRASSE

Madame [I] [K] épouse [B]

assignée à personne habilitée le 20/09/2018,

domicile élu Chez Maitre [M] [N] [Adresse 3]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2018.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Novembre 2018

Signé par Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente et Madame Viviane BALLESTER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SAS ALEXANDRE III est propriétaire des droits et biens immobiliers dépendant d'un ensemble sis à [Adresse 4].

La SAS ALEXANDRE III avait pour objet social l'acquisition, la rénovation, la gestion, l'administration et l'exploitation de tous immeubles à usage commercial, professionnel ou d'habitation et notamment de l'ensemble des lots immobiliers dont elle est propriétaire.

Dans le cadre de son activité commerciale de bailleur, la SAS ALEXANDRE III a acquis en 2008 de son associé unique monsieur [X] pour un prix de 440.000 euros un appartement sis à [Localité 1] comprenant 3 chambres et un dressing d'une superficie de 115 m2.

Ce même appartement a été sous loué sous le régime des meublés par la SAS ALEXANDRE III, gérée par madame [I] [K] à madame [F] [X], épouse de monsieur [X], à effet du 1er décembre 2014 pour une durée d'un an moyennant un loyer mensuel de 1.100 euros charges inclues.

Dans le cadre d'un important contentieux opposant les copropriétaires et le syndicat des copropriétaires à la société ALEXANDRE III, le TGI de Grasse a prononcé par jugement du 8 Juin 2016 assorti de l'exécution provisoire l'interdiction à la SAS ALEXANDRE III de louer ses lots ou de les faire occuper par sa clientèle, assortie d'une astreinte de 3.000 euros par jour à compter de la signification de la décision.

En l'état de l'appel formé par la SAS ALEXANDRE III, le Premier Président de la Cour a fait droit à sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire concernant l'interdiction d'exploiter les lots sous astreinte aux termes d'une ordonnance de référé du 25 juillet 2016.

Le Tribunal de commerce de Grasse a prononcé par jugement du 22 Février 2017 1'extension de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. NOUVELLE VIGNETTE HAUTE à la SAS ALEXANDRE III et a désigné la SELARL JSA en qualité de Liquidateur judiciaire.

Par un second jugement du 26 Avril 2017, le Tribunal a rejeté la demande de la société tendant à ce que soit autorisée la poursuite de son activité de location.

Maître [J] [I] es qualités faisant valoir qu'ayant vainement mis en demeure la locataire par courrier du 14 avril 2017 d'avoir à verser entre ses mains les loyers échus depuis la liquidation judiciaire et les loyers à venir, a fait notifier le 30 mai 2017 un congé pour vendre à effet au 30 août 2017.

En l'état de la nécessité selon lui, de procéder à la réalisation d'actifs non grevés de baux manifestement anormaux, Me [J] [I] es qualités, a saisi le juge Commissaire de deux requêtes tendant à obtenir la résiliation des baux d'habitation des consorts [J] et de Mme [X] et auxquelles il a été fait droit par deux ordonnances distinctes du 13 Septembre 2017.

Madame [X] a formé opposition devant le Tribunal de commerce de Grasse aux fins de contester l'ordonnance rendue en ce que le Juge commissaire s'est reconnu compétent pour connaître de la demande du liquidateur judiciaire.

Aux termes d'un jugement du 28 Mars 2018, le Tribunal de commerce de Grasse a :

- dit que le juge commissaire est incompétent pour juger dans ce cadre (L 641.11.1 IV du code du commerce) de la demande de résiliation du bail à usage d'habitation et de toute demande y afférente, lesquelles relèvent de la compétence exclusive du tribunal d'instance,

- débouté madame [X] et la SELARL JSA es qualités de liquidateur judiciaire de la SAS ALEXANDRE III de l'ensemble de leurs demandes

- s'est déclaré incompétent au profit du tribunal d'instance de Cannes,

- taxé les dépens en frais privilégiés de justice,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître [J] [I] es qualités de la SELARL JSA pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ALEXANDRE III a interjeté appel de cette décision le 19 avril 2018 suivant autorisation du premier président du 23 avril 2018.

Dans ses dernières écritures en date du 12 juillet 2018 Maître [J] [I] es qualités demande de :

vu les articles R 621-21 et R 641-1I du Code de commerce,

- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Grasse du 28 Mars 2018 en 1'ensemble de ses dispositions,

- dire et juger que la juridiction compétente était le Tribunal de commerce de Grasse,

- se déclarer compétent pour connaître de la présente procédure,

- dire n`y avoir lieu à renvoi devant le Tribunal d'instance de Cannes,

et la Cour usant de sa faculté d'évocation prévue à l'article 568 du CPC,

vu l'article R 221- 38 du COL,

vu l'article L.641-11-1 du Code de commerce,

- constater que la résiliation du bail d'habitation liant la société ALEXANDRE III à madame [X] a été prononcée en considération des seuls besoins de la procédure de liquidation judiciaire,

- dire et juger qu'il est dans l'intérêt de la procédure de liquidation judiciaire de procéder à la résiliation du bail liant la SAS ALEXANDRE III à madame [F] [X],

- confirmer l'ordonnance du 13 Septembre 2017 en toutes ses dispositions,

- condamner madame [X] au paiement de la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance et débours qui ne devront pas être supportés par la procédure collective.

Au soutien de ses demandes, Maître [I] es qualités, fait valoir qu'en se déclarant incompétent au profit du Tribunal d'instance de Cannes pour statuer sur le recours formé à l'encontre d'une ordonnance du Juge commissaire rendue sur le fondement des dispositions de l'article L 641-11-1 du Code de commerce, les premiers juges ont manifestement mal interprété les dispositions de l'article R.621-21 du Code de commerce, applicables en liquidation judiciaire par renvoi de l'article R.641-11, lequel prévoit que les ordonnances du juge commissaire peuvent faire l'objet d'un recours devant le tribunal dans les dix jours de la communication ou de la notification par déclaration faite contre récépissé ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au greffe.

Qu'il en ressort que seul le Tribunal de la procédure collective, en l'espèce le Tribunal de commerce de Grasse, était compétent pour statuer sur un recours formé à l'encontre d'une ordonnance du Juge commissaire et c'est donc à tort qu'il s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal d'instance de Cannes ;

Qu'en l'absence de toute décision d'infirmation ou de confirmation de la décision du juge commissaire, il faut considérer que le Tribunal de commerce de Grasse a entendu simplement décliner sa compétence au profit du Tribunal d'instance ce qui n'est pas régulier ;

Il ajoute, qu'es qualités il entend se prévaloir des dispositions de l'article 568 du Code de procédure civile et sollicite de la Cour qu'elle fasse usage de sa faculté d'évocation et statue sur les points non jugés par le Tribunal de commerce de Grasse.

Il expose à cet effet qu'en application de l'article L.641-11-1 du Code de commerce, lorsque la prestation du débiteur ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent, le liquidateur judiciaire peut saisir le Juge commissaire aux fins de faire prononcer la résiliation d'un contrat en cours si celle-ci est nécessaire aux opérations de liquidation ;

Que s'agissant d'une disposition d'ordre public dérogatoire (au même titre que l'ensemble des dispositions du livre VI du Code de commerce), celle-ci ne peut recevoir exception au profit d'une autre disposition d'ordre public que lorsque le texte le prévoit ; que l'article L.641-l1- I ne prévoit que deux exceptions pour lesquelles la compétence du Juge commissaire est écartée au profit du juge de droit commun à savoir les contrats de travail et de fiducie ; que les baux d'habitation ne sont à aucun moment visés ou évoqués ;

Que les exceptions devant être interprétées restríctivement, il n'y a donc pas lieu d'y ajouter le contrat de bail d'habitation de sorte que le Juge Commissaire était et demeure pleinement compétent pour statuer sur la requête présentée par le Liquidateur judiciaire.

Il poursuit en indiquant que la résiliation prononcée ne repose pas sur l'exécution ou l'inexécution du contrat de bail mais n'est fondée que par les seuls besoins de la liquidation judiciaire conformément à l'article L 541-11-1 ;

Que reconnaître la compétence du juge d'instance reviendrait alors à permettre à celui-ci de s'immiscer dans le déroulement de la procédure collective dont le seul garant est le Juge commissaire en application de 1'article L.621-9 du Code de commerce.

Que l'ordonnance attaquée sera confirmée en ce que le Juge Commissaire s'est déclaré compétent pour prononcer la résiliation du bail d'habitation fondée sur les seuls besoins de la procédure de liquidation judiciaire.

Il rappelle que les actifs du débiteur doivent être réalisés dans les meilleurs délais par le liquidateur judiciaire afin d'intégrer le prix de cession au gage commun des créanciers de la procédure.

Qu'íl est évident que la liquidation judiciaire ne pourra obtenir au profit des créanciers un juste prix de cet actif gravé d'un tel bail anormal voire frauduleux consenti en complet abus de l'usage des biens sociaux ;

Qu'il est donc dans 1'intérêt de la procédure collective de voir prononcer la résiliation dudit bail de sorte que l'ordonnance du 13 Septembre 2017 sera confirmée en toutes ses dispositions.

Il précise que dans le cadre de son activité de loueur meublé saisonnier, la société aurait pu réaliser un chiffre d'affaires de l'ordre de 25.000 euros sur ce seul bien immobilier ; qu'il est évident que sa valeur locative annuelle est largement supérieure à 13.200 euros et qu'on imagine mal comment la gérance de la société a pu dispenser madame [X] d' avoir à justifier d'un dépôt de garantie ou de l'absence d'indexation depuis 2014 ;

Qu'en conséquence, Me [J] [I] es qualités entend qui lui soit donné acte de ce qu'il se réserve la faculté de tirer toutes conséquences de ses constatations et du caractère manifestement anormal et lésionnaire de l'acte au regard de l'intérêt social et de celui des créanciers.

Madame [F] [X], intimée, demande dans ses dernières écritures en date du 24 septembre 2018 de :

vu les dispositions de l'article L 641-11-1 du Code de Commerce,

vu les dispositions de l'article 25-8 de la loi du 6 Juillet 1989,

vu l'article 1244-1 du code civil,

- voir confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Grasse en date du 28 Mars 2018,

à titre principal,

-voir dire et juger qu'en vertu de la loi du 6 Juillet 1989, ces dispositions étant d'ordre public, le Tribunal d'Instance de Cannes est compétent pour connaître de tout litige relatif au bail d'habitation conclu entre la société ALEXANDRE III et madame [C] [X],

- voir dire et juger que le congé pour vendre notifié le 30 Mai 2017 par la Société JSA à madame [F] [X] n'est pas fondé comme reposant sur un motif sérieux et légitime, et est irrecevable dans la mesure où il n'a pas été dénoncé à l'autre co-titulaires du bail d'habitation meublé,

- voir dire et juger que le congé pour vendre notifié le 30 Mai 2017, par la Société JSA à madame [F] [X] est nul et de nul effet dans la mesure où il n'indique par le motif réel et sérieux de ce congé, ni les conditions de la vente de ce bien,

- voir dire et juger que l'ordonnance rendue le 13 Septembre 2017 n'est pas opposable à madame [V] [C],

à titre subsidiaire,

si la Cour d'appel de Céans devait estimer l'expulsion de madame [F] [X] fondée,

- voir constater le paiement de madame [F] [X] entre les mains de la Société JSA de la somme de 2.200 euros en date du 20 Mai 2017,

- voire dire et juger qu'à la délivrance du congé pour vendre en date du 30 Mai 2017, madame [F] [X] n'était redevable d'aucune somme au titre des loyers,

- voir constater l'impossibilité de paiement spontané pour madame [F] [X] de la somme restant due d'un montant de 5.500 euros, correspondant aux loyers de Juillet 2017 à Novembre 2017 inclus,

- voir accorder les délais les plus larges de six mois de paiement de madame [F] [X]., afin d'apurer la dette locative de 5.500 euros,

en tout état de cause,

- voir dire et juger que la Société JSA devra être condamnée à payer une somme d'un montant de 3.000 euros à madame [F] [X] au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- voir condamner tout succombant aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de SCP ERMENEUX- ARNAUD CAUCHI & ASSOCIES, Avocats près la Cour d'Appel d'Aix-en- Provence, sous sa due affirmation de droit.

Elle fait valoir au soutien de ses demandes que le bail dont s'agit a été conclu entre la société ALEXANDRE III et madame [F] [X], monsieur [L] [X], monsieur [P] [X], ses deux enfants qui n'ont pas la personnalité juridique, et madame [V] [C], sa mère ; qu'elle est intervenue en représentation de ces personnes et qu'elle les représente implicitement à l'acte ;

Que le conseil de Maître [J] [I], es qualité de liquidateur de la Société ALEXANDRE III devait signifier un congé en vue de vendre, prenant effet au terme d'un délai de trois mois à réception de la lettre adressée à madame [F] [X] du 30 Mai 2017 ; que cependant ce congé pour vendre n'a pas été signifié à madame [V] [C], l'autre co-titulaire du bail.

Que néanmoins, et préalablement le 2 Mai 2017 et le 20 Mai 2017, madame [F] [X] avait réglé leur arrière locatif en payant la somme de 2.200 euros entre les mains de la Société JSA, correspondant aux loyers des mois d'Avril et Mai 2017.

Que ce n'est que le 14 Avril 2017 que la Société JSA devait avertir madame [F] [X] que les loyers devaient être versés directement entre ses mains ;

Que par ailleurs les dispositions citées de l'article 25-8 de la loi du 6 Juillet 1989 dans cette correspondance du 30 Mai 2017, valant prétendument congé pour vendre, n'ont pas été respectées dans la mesure où le bailleur n'a pas motivé sa décision de manière réelle et sérieuse, en n'indiquant pas notamment à madame [F] [X] le prix auquel ce bien pourrait être vendu, et ne le lui, proposant pas par priorité,

Elle précise que ordonnance du 13 Septembre 2017 rendue par le Juge Commissaire près le Tribunal de Commerce de Grasse a seulement été notifiée à madame [F] [X], alors que le bail en date du 1er Décembre 2014 a été conclu entre d'une part la société ALEXANDRE III et d'autre part madame [F] [X], monsieur [L] [X], monsieur [P] [X] (ses deux enfants) et madame [V] [C].

Pour contester le congé pour vendre qui lui a été délivré elle se fonde sur les dispositions suivantes :

Les alinéas 4 à 6 de l'article 25-8 la loi du 6 Juillet 1989 disposent :

'Le bailleur qui ne souhaite pas renouveler le contrat doit informer le locataire avec un préavis de trois mois et motiver son refus de renouvellement du bail soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant.

A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué et, en cas de reprise, les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise ainsi que la nature du lien existant entre le bailleur et le bénéficiaire de la reprise qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé, son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, de son partenaire ou de son concubin notoire.

En cas de contestation, le juge peut, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues au présent article. Il peut notamment déclarer non valide le congé si la non-reconduction du bail n'apparaît pas justifiée par des éléments sérieux et légitimes.

L'article 641-11-1-1 du code du commerce dispose :

'Nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture ou du prononcé d'une liquidation judiciaire.

Le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture. Le défaut d'exécution de ces engagements n'ouvre droit au profit des créanciers qu'à déclaration au passif '.

L'alinéa IV de l'article 641-1 1-1 indique :

'A la demande du liquidateur, lorsque la prestation du débiteur ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent, la résiliation est prononcée par le juge-commissaire si elle est nécessaire aux opérations de liquidation et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant.'

Qu'il apparaît donc que le liquidateur qui procède aux opérations de liquidation et souhaite réaliser l'actif immobilier doit respecter les droits du cocontractant.

Elle fait valoir que les premiers juges ont méconnu les dispositions précitées en prétendant que l'expulsion de la locataire est nécessaire aux opérations de liquidation que son droit au logement n'ont pas été respectés.

Elle ajoute que le congé pour vendre est inopposable à la co-locataire pour ne pas lui avoir été dénoncé et qu'il est nul car jusqu'au mois de juin compris tous les loyers et charges étaient régulièrement acquittés et le motif du congé n'est pas inscrit dans la correspondance du 30 mai 2017 alors qu'il aurait du mentionner un motif légitime et sérieux.

Elle poursuit en indiquant qu'aucune disposition de l'article L 641-11-1 du code du commerce invoqué par la société ISA ne permet d'obtenir la résiliation d'un bail soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 par le juge commissaire, ces dispositions étant d'ordre public.

Elle soutient que la société JSA n'apporte aucun élément permettant de mettre en avant la nécessité de réaliser l'actif de la société ALEXANDRE III en vendant ce bien et ce notamment du fait qu'elle ne décrit nullement la valeur vénale de l'ensemble des actifs de la société ALEXANDRE III et ne lui propose pas le prix auquel elle souhaite procéder pour la vente de ce bien alors que la résiliation du bail aurait de graves conséquences eu égard à sa situation personnelle.

Elle fait également valoir qu'elle n'est redevable que des loyers à partir du mois de juillet 2017 ; qu'elle est redevable seulement des loyers des mois de mars 2017, juillet à novembre 2017 ayant procédé à un virement de 7.700 euros le 14 janvier 2017 et un autre le 10 mars 2017 de 5.500 euros.

Elle prétend que le loyer correspond à l'état de la résidence qui est en totale décrépitude et ajoute que son indexation n'est que modique et n'est pas obligatoire.

Elle sollicite à titre subsidiaire les plus larges délais de paiement et la conservation du bail.

Madame [I] [K] épouse [B] n'a pas comparu.

SUR CE

Il convient de préciser de façon liminaire que contrairement à ce que soutient l'intimée le bail a été conclu exclusivement par madame [F] [X] qui l'a signé seule sans mentionner agir pour le compte d'autrui.

Les ordonnances du juge commissaire rendues sur le fondement l'article L 641-11 du code du commerce, pouvant, selon les dispositions de l'article R 621-21 du même code, faire l'objet d'un recours devant le tribunal, c'est à dire en l'espèce, le tribunal de commerce de Grasse, c'est donc à tort que ce dernier s'est déclaré incompétent pour connaître du recours de l'ordonnance du juge commissaire du tribunal de commerce de Grasse en date du 13 septembre 2017 rendue sur le fondement des premières dispositions précitées.

Selon l'article L 641-11-1 du code du commerce .......IV : A la demande du liquidateur, lorsque la prestation du débiteur ne porte pas sur le paiement des sommes d'argent, la résiliation est prononcée par le juge commissaire si elle nécessaire aux opérations de liquidation et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du co contractant.

S'agissant d'un contrat en cours au sens de l'article L 641-11-1 précité, la requête en résiliation du contrat de location présentée par le liquidateur judiciaire, ressortait à la compétence du juge commissaire.

Il convient en conséquence, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Grasse du 28 mars 2018.

Eu égard à la nature de l'affaire il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 568 du code de procédure civile et d'évoquer l'affaire, le premier juge s'étant déclaré incompétent au profit du tribunal d'instance de Cannes sans se prononcer sur les requêtes de Maître [I] es qualités.

Le liquidateur ayant notamment pour mission de réaliser les actifs de la SAS ALEXANDRE III dans les meilleurs délais et aux meilleurs conditions, c'est à bon droit que le juge commissaire a fait droit à ses demandes de résiliation d'un bail conclu de façon évidente au détriment des intérêts de la société bailleresse eu égard à sous évaluation du montant de loyer consenti par des membres de l'entourage proche du locataire, et donc des créanciers alors qu'il est fait depuis interdiction à la SAS ALEXANDRE III de louer les lots dont elle est propriétaire.

Le prononcé par le juge commissaire de la résiliation du bail dans de telles circonstances ne revêt pas pour la locataire, qui ne le démontre pas, de conséquences manifestement excessives.

Par ailleurs, les dispositions de l'article L 641-11-1 du code du commerce étant dérogatoires au droit commun, celles-ci ne peuvent, à défaut de dispositions d'exception expressément mentionnées , recevoir exception au profit de la loi du 6 juillet 1989 relatives au congé pour vendre, hors champ d'application dudit article.

Il convient en conséquence de confirmer l'ordonnance du juge commissaire en date du 13 septembre 2017 en toutes ses dispositions.

Le comportement de madame [X] étant exclusif de bonne foi il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de délai d'expulsion.

Les juridiction ayant pour mission de trancher les litiges et non d'apprécier l'intention future des parties, la demande de donner acte est sans objet.

L'équité commande de condamner madame [F] [X] au paiement de la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la liquidation judiciaire de la SAS ALEXANDRE III.

Les dépens resteront à la charge de madame [X] qui succombe.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire en dernier ressort,

Dit que la juridiction compétente était le tribunal de commerce de Grasse,

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Grasse du 28 mars 2018,

Evoque l'affaire,

Rejette l'ensemble des demandes de l'intimée,

Dit que la résiliation du bail d'habitation liant la société ALEXANDRE III à madame [F] [X] a été prononcée en considération des seuls besoins de la procédure de liquidation judiciaire,

Dit qu'il est dans l'intérêt de la procédure de liquidation judiciaire de procéder à la résiliation du bail liant la SAS ALEXANDRE III à madame [F] [X],

Confirme l'ordonnance du 13 septembre 2017 en toutes ses dispositions,

En conséquence,

Prononce la résiliation du bail d'habitation liant la société ALEXANDRE III à madame [F] [X],

Condamne madame [F] [X] à payer à Maître [I] es qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SAS ALEXANDRE III la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette le surplus des demandes de l'appelant,

Condamne madame [F] [X] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 18/06787
Date de la décision : 15/11/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°18/06787 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-15;18.06787 ?
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