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22/03/2018 | FRANCE | N°16/13584

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre b, 22 mars 2018, 16/13584


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

11e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2018



N°2018/86













Rôle N° 16/13584







SCI LES RIGON





C/



SAS FABEMI PROVENCE





































Grosse délivrée

le :

à :

Me Roselyne SIMON-THIBAUD



Me Etienne DE VILLEPIN




>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 13 Juin 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 13/06999.





APPELANTE



SCI LES RIGON agissant par la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]



représentée par ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

11e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 22 MARS 2018

N°2018/86

Rôle N° 16/13584

SCI LES RIGON

C/

SAS FABEMI PROVENCE

Grosse délivrée

le :

à :

Me Roselyne SIMON-THIBAUD

Me Etienne DE VILLEPIN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 13 Juin 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 13/06999.

APPELANTE

SCI LES RIGON agissant par la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Maître Guillaume LEFEVRE avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SAS FABEMI PROVENCE prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me Bruno WERTENSCHLAG avocat au barreau des HAUTS DE SEINE substitué par Me Mathilde VERVYNCK avocat au barreau des HAUTS DE SEINE, plaidant.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2018 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente, et Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente

Mme Brigitte PELTIER, Conseiller

Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Agnès SOULIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Mars 2018.

Signé par Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente et Mme Agnès SOULIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et prétentions

Depuis 1965, la société Fabemi, venant aux droits de la société Omnium de préfabrication industrielle, est locataire d'un terrain nu situé à [Adresse 3] appartenant à la SCI les Rigon venue aux droits de la société immobilière [Adresse 4].

Le 1er mars 2005, le bailleur a fait délivrer un congé avec refus de nouvellement du bail, lequel a été annulé par jugement du tribunal de grande instance d'Aix en Provence du 31 mars 2008.

Le 6 avril 2010, les parties signaient un protocole d'accord transactionnel aux termes duquel le propriétaire pouvait exercer jusqu'au 31 janvier 2012 une option consistant en la réalisation d'une opération immobilière emportant soit résiliation du bail moyennant le versement d'une indemnité soit le maintien dans les lieux de la locataire moyennant un nouveau bail. Le défaut d'exercice du droit d'option emportait pour la locataire la possibilité soit de bénéficier d'un nouveau bail soit de résilier le bail existant moyennant le versement d'une indemnité de 2 250 000~.

Arguant d'un défaut d'exercice de son droit d'option dans les délais, la société Fabemi Provence a restitué le bien immobilier à la bailleresse laquelle s'est opposée au paiement de l'indemnité invoquant l'absence de dépollution du site tel que prévue au protocole d'accord.

Par jugement contradictoire du 13 juin 2016, le tribunal de grande instance d'Aix en Provence a condamné la SCI les Rigon à payer à la société Fabemi Provence la somme de 2 250 000€ avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, rejeté les demandes de dommages et intérêts et a condamné la SCI les Rigon aux entiers dépens.

La juridiction a estimé qu'au terme du protocole transactionnel, la libération des lieux s'entendait d'une restitution de tous terrains et constructions édifiées par elle ou de son chef sur le terrain donné à bail, libres de toute occupation, vides de tout stock, matière première ou autres, que la société Fabemi Provence s'engageait également à 'restituer le terrain, les sous-sols et les constructions édifiées entièrement dépollués... la société Fabemi Provence afin de justifier de la dépollution remettra au bailleur... un certificat de la DREAL ou tout organisme substitué ou tout organisme habilité officiellement à délivrer ce type de certificat... toutes pollutions... devront être supprimées dans le respect des normes de dépollution', qu'il convenait de rechercher la commune intention des parties contractantes et d'interpréter les clauses les unes par rapport aux autres et dans le sens qu'elle peut avoir un effet plutôt que dans un sens ou elle n'est produirait aucun, que l'expression 'entièrement dépollués' est tempérée par la référence au certificat de la DREAL ou tout autre organisme et à la notion de 'dans le respect des normes de dépollution', que l'opération de dépollution envisagée est bien liée aux normes et procédures de dépollution existantes, qu'il ne résultait pas du protocole que les parties ont entendu alourdir les obligations de la locataire en tenant compte d'un projet qu'aurait eu le bailleur, qu'aucun site ne peut être totalement exempt de pollution de quelle que nature que ce soit , que si le terme 'entièrement' est maladroit, la convention doit s'interpréter en faveur de la société Fabemi Provence qui a contracté l'obligation, que la société Fabemi Provence s'engageait à dépolluer selon les normes en vigueur, que l'agence Burgeap le 7 août 2013 fait apparaître que la société Fabemi Provence a restitué un terrain dont la qualité du sol est compatible avec un usage industriel, que les pollutions résiduelles laissées sur le site n'engendraient pas de risque sanitaire inacceptable, que la présence de matériaux contenant de l'amiante non friable et en bon état de conservation pas susceptible de libérer spontanément des fibres n'offrait aucun danger immédiat ; que la société Fabemi Provence a exécuté son obligation telle que prévue par le protocole ainsi qu'en rapporte la preuve le rapport de la DREAL du 28 octobre 2013.

Le 26 juillet 2016, la SCI les Rigon a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions du 15 février 2017, elle demande à la cour de :

*infirmer le jugement déféré,

*dire que la société Fabemi Provence est redevable d'une indemnité d'occupation de 900 000€ par an indexée à compter du 1er janvier 2014

*condamner la société Fabemi Provence à lui verser la somme de 2 250 000€ à parfaire sur la base de l'indemnité contractuelle annuelle forfaitaire de 900 000€ HT et HC montant qui courra jusqu'à la dépollution des lieux,

à titre subsidiaire : * mettre à la charge de la société Fabemi Provence les frais de dépollution du site soit la somme de 1 331854€HT et ordonner la compensation avec la somme de 2 250 000~,

en tout état de cause : *condamner la société Fabemi Provence à lui verser la somme de 20 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que le protocole prévoyait dans le cas où le bailleur n'exercerait pas son droit d'option, une faculté de départ anticipé pour le preneur, que tel était le cas en l'espèce, le bailleur n'ayant pas exercé son doit d'option dans le délai imparti, la locataire s'engageait à restituer les lieux 'entièrement dépollués', que le preneur devait remettre un certificat attestant 'd'une absence de pollution tant sur les terrains et sous-sol que dans les constructions édifiées sur ce site '.

Elle soutient que l'obligation légale de dépollution visée à l'article L 511-1 du code de l'environnement ne coïncide pas avec l'obligation contractuelle de droit privé qui concerne uniquement deux parties, que la société Fabemi Provence était tenue d'une part d'une obligation de dépollution légale en sa qualité d'exploitant et d'autre part d'une obligation contractuelle en sa qualité de contractant au protocole, que cette obligation contractuelle est plus contraignante et plus exigeante que l'obligation légale, qu'il lui appartient de rendre les lieux exempts de toute pollution ainsi que le démontre l'usage du terme de 'dépollution totale ' qui a été utilisé afin d'être le plus large possible, que le preneur doit non seulement respecter une obligation légale mais en plus opérer une dépollution totale du site, que la société Fabemi Provence s'est peut être conformée aux dispositions légales et réglementaires mais sans pour autant rendre les lieux exempts de toute pollution, que l'article 3.8 du protocole précise que la société Fabemi Provence s'engage à rendre les lieux 'entièrement dépollués... toutes pollutions devront être supprimées dans le respect des normes de dépollution... une absence de pollution ' ; que la volonté des parties a été exprimée très clairement dans le protocole qui n'a nul besoin d'être interprété par la juridiction, que le jugement a, à tort, limité les obligations de dépollution aux seules normes et procédures légales et réglementaires.

Elle fait valoir que la société Fabemi Provence, entreprise importante assistée d'un conseil lors de la signature du protocole, a donné un consentement clair et parfaitement éclairé.

Elle indique que la société Fabemi Provence disposait de la faculté d'édifier des constructions sur le terrain, constructions qui deviendraient la propriété du bailleur à l'échéance du bail et d'où la société Fabemi Provence devra avoir supprimé toute pollution, que l'obligation de dépollution concernait les bâtiments édifiés, que ces constructions contiennent de l'amiante, que le protocole a pris le soin de préciser que l'opération de dépollution concernant non seulement le sous-sol, le sol et les bâtiments que la société Fabemi Provence n'ignorait pas la présence d'amiante dans les constructions qu'elle a donc accepté le protocole en connaissance de cause ;

Elle soutient que le juge ne peut interpréter les conventions que si le doute persiste sur le sens, que tel n'est pas le cas en l'espèce, le protocole étant clair et précis, que toute interprétation tendrait à la dénaturation des termes.

Elle indique que la société Fabemi Provence soutient avoir rempli son obligation en produisant divers rapports et courriers, que ces documents ne justifient pas d'une dépollution totale telle que contractuellement exigée puisque le rapport Burgeap du 27 novembre 2012 fait état de 'pollutions résiduelles laissées sur le site', que le rapport établit la présence de terres imprégnées d'hydrocarbures localisées et circonscrites à des zones limitées, que lors des travaux de dépollution, la société Fabemi Provence n'a pas pris en compte les préconisations de la société URS qui proposait des travaux supplémentaires, que la société Fabemi Provence a certes entrepris des travaux mais qui se sont révélés incomplets ainsi qu'en atteste la société Burgeap dans un document de juin 2013 et notamment en raison de la présence d'amiante au niveau du toit et du sol de certains bâtiments dans des plaques de fibrociment dégradées, que les travaux entrepris sont insuffisants et qu'un degré élevé de pollution subsiste en raison de l'amiante, que dès le mois de mai 2013, la SCI les Rigon a informé la société Fabemi Provence de sa volonté de transformer le site pour en faire un usage commercial et que des populations sensibles accéderaient à ce site, qu'eu égard à l'activité habituelle de la SCI les Rigon, à la publicité dans les médias, la société Fabemi Provence ne pouvait ignorer cet usage commercial, qu'un tel usage nécessite une dépollution totale, qu'en tout état de cause, quel qu'en soit usage que la SCI les Rigon souhaite en faire, la société Fabemi Provence devrait rendre les lieux exempts de toute pollution.

Elle fait valoir que la société Fabemi Provence déclare avoir rempli son obligation en se fondant sur l'obligation de dépollution telle que prévue par la loi, mais qu'elle n'a pas rempli son obligation contractuelle de dépollution totale qu'elle n'a pas respecté les termes du protocole, que de surcroît, la société Fabemi Provence n'a pas remis de certificats de dépollution, le récépissé de réception de la déclaration de fin de travaux du préfet du 6 juin 2013 ne peut faire office de certificat de dépollution, qu'ainsi la société Fabemi Provence, qui n'a pas rempli ses obligations, ne peut exiger le versement de la somme de 2 250 000€, que la remise des clés n'entraîne pas la restitution du bien exempt de pollution comme l'exige le protocole, que le coût moyen des travaux de dépollution a été évalué à 1 331 854€, somme à laquelle la société Fabemi Provence devra être condamnée, ainsi qu'une indemnité d'occupation.

Par conclusions du 21 septembre 2017, la société Fabemi Provence demande à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêt et de condamner la SCI les Rigon à lui verser la somme de 750 000€ à titre de dommages et intérêts et 30 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec distraction des dépens.

Elle expose que les parties ont signé un protocole transactionnel en vertu duquel le bailleur disposait jusqu'au 31 janvier 2012 d'une option : soit consentir un nouveau bail soit régler une indemnité de 4 500 000€, que passé ce délai, le preneur bénéficierait d'une option : soit bénéficier d'un nouveau bail soit résilier le bail moyennant le versement par le bailleur d'une somme de 2 250 000€, que le preneur a usé de cette faculté et a restitué les lieux le 23 juin 2013,que le bailleur s'est opposé à tout paiement en arguant d'une absence de dépollution totale des biens.

Elle soutient que l'article L5112-12-1 du code de l'environnement exige de placer le site dans un état tel qu'il permettrait un usage futur comparable à la dernière période d'activité de l'installation, qu'elle avait une activité industrielle, qu'elle avait donc l'obligation de réhabiliter le site pour un usage industriel, qu'elle ne conteste pas cette obligation légale en sa qualité de dernier exploitant et qu'elle s'y est conformée ainsi qu'en atteste la DREAL, que les opérations ont été menées conformément à la méthodologie arrêtée par les pouvoirs publics dans deux circulaires du 8 février 2007, qu'il s'agit d'une procédure obligatoire que les exploitants industriels doivent respecter pour se libérer de leur obligation de dépollution, que cette méthodologie préconise l'examen du risque plus que celui d'un niveau de pollution intrinsèque et une gestion des sites en fonction de l'usage auxquels ils sont destinés que quand la suppression totale des sources de pollution n'est pas possible il faut garantir des impacts de pollution résiduels maîtrisés et acceptables pour les occupants, que le cabinet Burgeat s'est inspiré de cette méthodologie pour réaliser son étude, que la méthodologie précise que les pollutions connues et localisées ne sont pas un obstacle à la conduite d'un projet d'aménagement et qu'il est possible de prévoir des restrictions d'usage, que la locataire a exécute les obligations de réhabilitation environnementales et qu'elle a obtenu un acquis le 28 octobre 2013 de la Dreal qui a indiqué au préfet que l'exploitant avait rempli ses obligations au regard de l'article R512-66-1 du code de l'environnement.

Elle souligne que la SCI les Rigon conclut à la persistance d'impacts résiduels composés hydrocarbures mais qu'il s'agit d'un usage tronqué du rapport BURGEAT qui conclut qu'il n'y a 'pas de risques sanitaires inacceptables pour les travailleurs...'que la société Fabemi Provence peut 'restituer un terrain dont la qualité du sol est compatible avec l'usage industriel actuel ', que les travaux très complets ont été menés conformément à l'étude de la société Burgeat et ont obtenu quitus de l'administration, que la société Fabemi Provence s'est entièrement conformée aux obligations légales qui étaient les siennes.

Elle critique la position du bailleur qui établit une distinction artificielle entre les obligations légales et l'obligation contractuelle, qui n'est fondée ni sur la législation ni sur les termes de l'accord, que le contrat se réfère aux termes employés par la méthodologie française, que le terme dépollution totale ne peut s'entendre que d'une opération de réhabilitation entérinée par l'administration permettant de réutiliser le site, que les parties ont expressément renvoyé à cette méthodologie et aux articles du code de l'environnement pour définir ce qu'elles entendaient par dépollution totale.

Elle précise que s'agissant d'une installation classée soumise au régime déclaratif, la remise en état doit permettre un usage futur comparable à la dernière période d'activité de l'installation, article L512-12-1 du code de la consommation, que les parties ne font pas allusion à une activité autre que celle industrielle de la société Fabemi Provence, que le bailleur avait renoncé à son projet d'opération immobilière à usage commercial faute d'avoir exercé son droit d'option avant le 31 janvier 2012, qu'en tout état de cause, la société BURGEAT a examiné les deux hypothèses : soit un usage commercial soit un usage industriel et a conclu à une absence de risques sanitaires quelle que soit l'hypothèse retenue, aucune réhabilitation n'étant plus nécessaire du point de vue sanitaire, que le protocole renvoie au certificat d'absence de pollution de la DREAL, que la délivrance du certificat est présentée comme l'objet de l'engagement, que la locataire a rempli ses obligations, que les matériaux contenant de l'amiante sont décrits comme en bon état de conservation et non friables sans possibilité de libérer des fibres, que les lieux donc sont parfaitement dépollués.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 janvier 2018.

Sur ce

Attendu que les parties sont en l'état d'un protocole transactionnel signé le 6 avril 2010 qui prévoyait en son article 3.8 que ' la société Fabemi Provence s'engage à restituer le terrain, les sous-sols et constructions qui y sont édifiées, entièrement dépollués. Toutes pollutions qui pourraient être portées à la connaissance de la société Fabemi et/ou de la société IPM dans le cadre de leurs investigations devront être supprimées dans le respect des normes de dépollution. La société Fabemi afin de justifier de la dépollution remettra au bailleur, au plus tard le jour de son départ effectif un certificat de la DREAL ou tout autre organisme substitué ou de tout organisme habilité officiellement à délivrer ce type de certificat attestant de l'absence de pollution tant sur les terrains et sous-sols que dans les constructions édifiées sur le site. En outre, en cas d'activités relevant des activités classées auprès de la préfecture de Police, qu'elles soient soumises à autorisation ou simple déclaration, la société Fabemi s'engage à effectuer toutes formalités nécessaires auprès des services compétents pour signaler sa cessation d'activités sur le site. Elle devra en justifier auprès du bailleur au moment de son départ. Il est rappelé que seule la remise de ces certificats de dépollution et des justificatifs de formalités de déclaration de cessation d'activités après de la DREAL ou tout autre organisme substitué au plus tard le jour de la restitution des lieux permettra au bailleur de procéder au paiement du solde de l'indemnité ' ;

Attendu que le terme 'entièrement dépollués' s'oppose à celui de 'respect des normes de dépollution'et fait naître une ambiguïté sur la portée de l'obligation de la société Fabemi et son étendue ; qu'il convient dès lors de rechercher la commune intention des parties en interprétant les clauses les unes par apport aux autres et en donnant à chacune un sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier, plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral des termes ;

Attendu que le terme 'entièrement dépollués ' doit s'apprécier à l'aune des autres termes du contrat et notamment ' dans le respect des normes de dépollution' et en justifier par 'un certificat de la Dreal ou tout autre organisme' ; que ces renvois à la procédure de dépollution envisagée par le code de l'environnement et ses règles démontrent que les parties entendaient inscrire l'obligation de dépollution contractuelle dans le cadre de l'obligation légale de dépollution qui s'impose à tous exploitants ; que toute autre interprétation heurterait la cohérence d'ensemble du protocole ; que les références à la procédure et aux normes prévues pour l'exécution de l'obligation légale et l'absence de modalités spécifiques pour l'obligation de dépollution contractuelle, ni même de définition de cette dépollution 'totale' permettent de retenir une concomitance parfaite de ces deux obligations;

Attendu que le protocole se réfère à la méthodologie en vigueur en France qui consiste à retenir une réhabilitation des sols pollués en assurant une comptabilité entre la qualité des milieux et l'usage attendu du site et de ses environs ; que l'opération de dépollution légale n'a pas pour objectif d'éliminer toute trace de polluants mais de ramener une qualité du sol compatible avec l'usage qui en est fait ; que les parties ont soumis le paiement de l'indemnité à la remise des certificats délivrés par la DREAL qui atteste uniquement d'un état des sols compatible avec l'usage industriel qui était celui de l'exploitant et que ce denier a rempli ses obligations au sens de l'article R 512-66-1 du code de l'environnement, qu'il n'est nullement exigé dans le protocole que le preneur justifie de la remise d'un bien exempt de toute pollution pour obtenir le versement de l'indemnité de 2 225 000€;

Attendu que dans un courrier du 14 mai 2013 adressé à la société Fabemi, la SCI Les RIGON reconnaissait 'souhaité une approche pragmatique et raisonnée du dossier, ceci va également dans le sens de la méthodologie française en matière de sites et sols pollués...cette approche repose notamment sur un l'établissement d'un bilan coût avantage... souhaitons que l'ensemble des matériaux soit traité dans le respect des règles de l'art et dans les normes de sécurité en vigueur' que ce rappel de la législation française démontre que les parties ont voulu la mise en place d'une dépollution telle que déterminée dans le code de l'environnement et les circulaires s'y référant du 8 février 2007 et d'avril 2017 et non pas une opération d'une plus grande ampleur de nature à obtenir des sols et constructions exempts de toute trace de pollution, que par courrier du 5 août 2013, la bailleresse s'inquiète de l'avancé des travaux et de savoir si ' ceux ci ont ils été réalisés conformément à la méthodologie des sols pollués du ministère de l'environnement ', corroborant ses précédents dires ;

Attendu qu'en l'espèce, la société Burgeat dans son rapport du novembre 2012 conclu à ' absences de risques sanitaires...quel que soit le scénario envisagé', que le 7 août 2013, elle indique 'qu'il n'y a pas d'enjeu hors du site et que les pollutions résiduelles laissées sur le site n'engendrent pas de risques inacceptables pour des travailleurs adultes travaillant dans les locaux présents actuellement sur le site,...qu'à l'issue des travaux de réhabilitation, la société Fabemi peut donc restituer...un terrain dont la qualité des sols est compatible avec l'usage industriel actuel', que le 28 octobre 2013, la Dreal donnait un avis au préfet aux termes duquel elle concluait ' le dossier de recollement de travaux transmis par la société Fabemi n'appelle pas de remarque particulière de l'inspection des installations classées qui considère que l'exploitant a rempli ses obligations au titre de l'article R 512-66-1 du code de l'environnement', que 7 novembre 2013, le préfet a pris acte de la cessation d'activité sans formuler de remarques particulières et sans imposer de travaux supplémentaires de remise en état du site ; que le protocole ne fait nullement mention d'un changement d'activité de nature à engendrer une obligation de dépollution plus importante pour le preneur et qu'en tout état de cause, le cabinet Burgeat conclut à une absence de risque sanitaire quel que soit l'usage envisagé;

Attendu que la société Fabemi en remettant un certificat d'absence de pollution a parfaitement respecté l'obligation contractuelle de dépollution à laquelle elle s'était engagée et telle qu'elle était définie dans le protocole du 6 avril 2010 et qu'elle a remis les clés le 28 juin 2013, restituant ainsi le bien donné à bail ;

Attendu que le droit d'agir en justice est ouvert à tout plaideur qui s'estime léser dans ses droits, son exercice ne dégénérant en abus qu'autant que les moyens qui ont été invoqués à l'appui de la demande sont d'une évidence telle qu'un plaideur, même profane, ne pourra pas ignorer le caractère abusif de sa démarche ou qu'il n'a exercé son action qu'à dessein de nuire en faisant un usage préjudiciable à autrui ; qu'en l'espèce, l'appréciation inexacte de ses droits par l'appelante n'est pas constitutive d'une faute ; que s'estimant lésées dans son droit, elle a pu, sans abus, demander à ce qu'il soit statué sur ses demandes ; que la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive doit être rejetée ;

Attendu qu'il convient de condamner la société les Rigon au paiement d'une somme de 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à la disposition des parties au greffe de la Cour, conformément à l'article 450 al 2 du Code de procédure civile.

- CONFIRME la décision de première instance

- CONDAMNE la société les Rigon aux dépens et au paiement d'une somme de 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la société Fabemi.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/13584
Date de la décision : 22/03/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence B1, arrêt n°16/13584 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-22;16.13584 ?
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