DU 17 Janvier 2006 -------------------------
N.R/S.B Nadine X... épouse Y... Z.../ Alain A...
Aide juridictionnelle RG N : 04/01565 - A R R E T No - ----------------------------- Prononcé par mise à disposition au greffe le dix sept Janvier deux mille six, LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : Madame Nadine X... épouse Y... née le 23 Septembre 1954 à ALENCON (61000) Demeurant "Les Baraques" 32450 FAGET ABBATIAL (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2004/004699 du 17/12/2004 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AGEN) représentée par la SCP Henri TANDONNET, avoués assistée de Me Anne-Sophie BABIN, avocat APPELANTE d'un jugement rendu par le Tribunal d'Instance d'AUCH en date du 06 Septembre 2004 D'une part, ET : Monsieur Alain A... né le 02 Août 1960 à MONTPELLIER (34000) Demeurant "Héréchou" 32450 FAGET ABBATIAL représenté par la SCP A.L. PATUREAU etamp; P. RIGAULT, avoués assisté de Me Nathalie PICCIN, avocat
INTIME
D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique, le 13 Décembre 2005, devant Nicole ROGER, Présidente de Chambre, Catherine LATRABE et Christian COMBES, Conseillers, assistés de Dominique SALEY, Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. FAITS ET PROCEDURE
Suivant acte d'acquisition de Maître BOUSSAT en date du 28/01/1999, Nadine Y... a acheté une maison d'habitation avec dépendances, sol et pré figurant au cadastre rénové de la commune de FAGET ABBATIAL lieudit "Hécherou" section F no 274 et 276 pour une contenance de 07 a 56 ca.
Cette propriété est limitrophe de la propriété de Alain A... , cadastrée section F no 256, 106, 275 et 277 pour une contenance de 25 a 94 ca.
Nadine Y... a considéré qu'elle bénéficiait d'une servitude de passage sur les parcelles cadastrées section F no 275 et 277, ainsi que d'une servitude de puisage et de passage de canalisation sur la parcelle cadastrée section F no 275 ; elle a constaté qu' Alain A... avait placé une barrière avec cadenas pour empêcher son passage, retiré la moto pompe se trouvant dans sa cave, édifié un mur empêchant l'accès et n'a plus, selon elle, respecté les limites de sa propriété.
Aussi a t-elle sollicité que soit ordonné le bornage judiciaire à frais partagés de la limite séparative des parcelles cadastrées section F no 274 et 276 et les parcelles no 275 et 277.
Suivant exploit du 24 février 2004, Nadine Y... a demandé au tribunal de désigner tel expert qu'il plaira pour procéder à un bornage, mais également d'avoir à ordonner à Alain A... de procéder à ses frais, à l'enlèvement de la barrière cadenassée et de démolir le mur édifié au besoin sous astreinte de 50 ç par jour de retard, ainsi que sa condamnation au paiement de la somme de 1000 ç à titre de dommages et intérêts ainsi qu'aux dépens.
Par jugement du 6 septembre 2004, le tribunal d'instance d'AUCH a :
- déclaré la demande en bornage de Nadine Y... irrecevable au vu du bornage déjà intervenu le 4 août 1998
- débouté Nadine Y... du surplus de ses demandes
- condamné Nadine Y... à payer à Alain A... :
[* 1500 ç de dommages et intérêts
*] 1000 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure Civile
- d'ordonné l'exécution provisoire
- condamné Nadine Y... aux dépens à recouvrer aux formes de l'aide juridictionnelle.
Le 13 octobre 2004, Nadine Y... a relevé appel de cette décision.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Au soutien de son appel, Nadine X... épouse Y... fait valoir que sa demande en bornage judiciaire est parfaitement fondée et qu'il convient de réformer le jugement du tribunal d'instance d'Auch sur ce point.
B... explique que pour ne pas accueillir sa demande en bornage le tribunal d'instance a indiqué qu'un bornage amiable serait intervenu entre Alain A... et madame C... et que le plan serait annexé à l'acte de vente de 1998.
B... ajoute que le document d'arpentage dont il s'agit annexé à l'acte de vente est un faux et n'a pas été signé de la main de Madame C... B... explique que cette dernière, aujourd'hui décédée a attesté de son vivant, le 25 août 2001 que ce plan n'a jamais été signé par elle et que seul, le précédent bornage de Monsieur SAINT D... est valable.
B... ajoute qu'une expertise graphologique réalisée à sa demande le 7 mai 2004 par monsieur E... permet avec certitude que la signature apposée sur le plan cadastral ne saurait être de la main de Suzanne C...
B... ajoute que Monsieur Y... s'est rendu au cabinet de Maître CLERC le 27 avril 2004 et que ce dernier lui a confirmé avoir réalisé le plan de bornage dans son cabinet avec Alain A... hors la présence de Madame C..., et que seul Alain A... a réglé le coût du bornage.
B... fait valoir qu'aux termes de l'acte authentique du 18 août 1998,
il a été crée une servitude de passage et de puisage selon lequel le nouveau propriétaire constituait à titre de servitude réelle et perpétuelle un droit de passage et de puisage sur le bien suivant :
une maison d'habitation avec pré cadastrée F 275 "Héréchou" d'une contenance de quatre ares et vingt quatre centiares en nature de sol. B... estime qu'il résulte de ces dispositions que Suzanne C... aurait souhaité avoir un droit viager qui se serait éteint à son décès, et souligne que la rédaction de l'acte est sans équivoque, puisqu'en définitive, le propriétaire a constitué une servitude réelle et perpétuelle qui ne s'est pas éteinte avec le décès de Suzanne C...
B... explique que Alain A... a édifié un mur l'empêchant d'accéder au moto pompe, et la privant ainsi de sa servitude de puisage.
B... s'estime bien fondée à réclamer que l'intimé fasse cesser ce trouble en démontant le mur édifié en toute illégalité.
B... soutient également que Alain A... empêche l'usage de sa servitude de passage en ayant placé une barrière avec cadenas, lui refusant l'accès nécessaire au passage d'engins. B... explique que cette servitude était consentie pour le passage d'engin pour travaux, et que la réfection de la couverture de sa maison nécessitait le passage d'engins lourds et notamment d'un chariot élévateur.
B... ajoute que Monsieur F..., artisan a attesté de la nécessité de passage d'engin, et qu'il n'a pu réaliser ces travaux, Alain A... ayant placé une barrière avec cadenas refusant l'accès.
En conséquence, elle demande à la cour :
- de réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance d'AUCH le 6 septembre 2004
- de désigner tel expert qu'il plaira avec mission de procéder au bornage de la limite séparative des parcelles cadastrées section FNo 274 et 276 et les parcelles cadastrées section FNo 275 et 277
- de dire que le bornage se fera à frais partagés
- d'ordonner à Alain A... de procéder à ses frais à l'enlèvement de la barrière cadenassée et de démolir le mur édifié qui ne respecte nullement les limites et les servitudes
- de dire que cette remise en état se fera sous astreinte de 50 ç par jour de retard à l'expiration du délai de quinze jours à compter de la signification du jugement à intervenir
- de condamner Alain A... à lui payer la somme de 1000 ç à titre de dommages et intérêts au titre du trouble de jouissance subi
- de condamner Alain A... aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SCP TANDONNET an application de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile. * * *
Alain A..., intimé, réplique que Nadine Y... doit être déboutée de sa demande de bornage judiciaire. Il explique que cette demande n'est pas fondée en présence d'un bornage amiable, régulier, annexé par maître TRILHA, notaire ayant rédigé l'acte authentique vente. Il expose qu'un bornage judiciaire ayant pour objet de procéder à la délimitation des mêmes parcelles est sans objet.
Il souligne que devant le tribunal d'instance, Nadine Y... a contesté la validité du bornage réalisé entre Alain A... et Suzanne G... lors de la vente et qu'elle a produit divers documents au soutien de ses dires. Il fait valoir que le document de bornage qu'il a produit devant le tribunal d'instance comportait la signature non
contestable de Madame G... alors que l'attestation (supposée être celle de Suzanne G...) produite par Nadine Y... fait naître de fortes interrogations sur l'identité de son auteur. Il conteste également les garanties d'impartialité du rapport du 7 mai 2004 émis par monsieur E..., celui-ci n'étant pas expert judiciaire, produit au soutien des dires de l'appelante.
Il explique que le bornage amiable intervenu entre les parcelles no274 et 275 est réel et régulier, que Nadine Y... n'a pas procédé à une critique sérieuse du jugement entrepris, ni versé au débat des éléments nouveaux.
Il expose que la servitude de passage des canalisations et de puisage sur la parcelle no275 a été consentie pour une durée déterminée, c'est à dire du vivant de Madame G...
Il fait valoir que Suzanne G... n'a pas souhaité créer une servitude perpétuelle bénéficiant à son fond mais créer à son profit personnel et pour le temps où elle resterait propriétaire de ladite servitude. Il rappelle que la question de l'interprétation de la nature viagère ou perpétuelle de ladite servitude telle qu'elle est libellée dans l'acte authentique ne relève pas de l'action possessoire mais de celui du pétitoire.
Il affirme qu'aucune preuve du trouble invoqué par l'appelante n'est versée au débat.
Concernant la servitude de passage sur les parcelles no275 et 277, il indique que cette servitude ne permet pas à l'appelante d'y passer librement et à sa guise ; il ajoute que cette servitude n'a pas été conçue pour permettre aux artisans de passer pour réaliser des travaux, mais uniquement pour permettre à des engins d'accéder au fond dominant.
Il souligne que Nadine Y... est mal fondée à exposer que le mur séparant les deux fonds empiétait sur sa parcelle d'une part, et
qu'il empêcherait d'autre part l'accès de ses véhicules automobile.
Il soutient que l'appelante n'a pas respecté les dispositions de l'article 702 du code civil et qu'en conséquence, il y a lieu de la débouter de ses demandes.
Il soutient que la servitude de puisage et de passage des canalisations est éteinte.
Il expose que Nadine Y... n'a pas rapporté la preuve de ce que Alain A... n'aurait pas respecté la servitude de passage sur les parcelles no275 et 277.
Il estime que le tribunal d'instance ne pouvait examiner une demande relevant du domaine du pétitoire.
A titre surabondant, il fait observer que le quantum de la demande n'est pas justifié et qu'il ne fait l'objet d'aucune justification particulière.n particulière.
Il expose que l'attitude de l'appelante et de sa famille est un des exemples multiples de la mauvaise foi de Nadine Y... dont l'état d'esprit est à l'instar de celui de son mari et de son fils.
Il estime qu'il serait inéquitable de lui laisser supporter les frais irrépétibles qu'il a dû engager pour assurer la défense de ses droits.
En conséquence, il demande à la cour :
- de débouter Nadine Y... de toutes ses demandes
- de condamner Nadine Y... à lui verser la somme de 1500 ç à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Et y ajoutant,
- de dire et juger que l'appelante n'a pas usé de la servitude de passage suivant son titre
- de dire et juger que cette violation des dispositions de l'article 702 du code civil l'a conduit à installer un cadenas sur la barrière
garnissant la parcelle no274
- de condamner Nadine Y... à lui verser la somme de 2000 ç sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel étant recouvrés par l'avoué soussigné. MOTIFS DE LA DECISION
1) Sur la demande en bornage
Attendu que la demande en bornage judiciaire est irrecevable lorsqu'il existe un procès-verbal antérieur de bornage amiable régulier et opposable aux parties ;
Attendu que les documents produits par Alain A... démontrent que Madame C... avait bien donné son accord à la modification du document d'arpentage précédemment établi où la vente à Monsieur SAINT D... et qui n'avait pas eu lieu ;
Qu'il produit notamment la lettre adressée à la propriétaire et lui adressant : "les documents modifiés" ; qu'il indique expressément que la modification du plan de division et le bornage a été réalisée avec le consentement des deux parties Madame C... et Monsieur A... ; qu'il n'y a pas eu nécessité de revenir sur les lieux puisque sur le premier plan de division figurait tous les points qui ont servi à décrire la nouvelle limite ;
Attendu dès lors qu'il convient de retenir la réalité du bornage amiable intervenu entre Suzanne C... et Alain A..., plan repris dans l'acte de vente qui fait foi entre les parties.
Qu'il convient en conséquence de confirmer l'irrecevabilité de la demande en bornage judiciaire présentées par Nadine Y... ;
2) Sur les servitudes
Attendu que l'acte du 12 août 1998 décrit de façon particulièrement précise les servitudes de passage consenties à Suzanne C... par Alain A... ;
Que la première de ces servitudes concerne un droit de passage à titre de servitude réelle et perpétuelle ou les besoins suivants :
passage d'engins pour travaux ;
Que l'assiette de cette servitude est clairement indiquée et qu'Alain A... ne peut y mettre obstacle ;
Que Nadine Y... doit en conséquence obtenir une clé de la barrière fermant l'accès de cette servitude, de manière à pouvoir l'utiliser en cas de besoin ;
Qu'il est prévu en page 10 de l'acte que le propriétaire du fonds servant ne pourra rien faire qui tende à diminuer l'usage de ces servitudes ou de les rendre plus incommodes et que notamment il ne pourra ni changer l'état des lieux servant à ces servitudes ni en modifier l'assiette; attendu que s'il est admissible qu'Alain A... ait fait poser une barrière à l'entrée de la servitude de passage pour les engins servant aux travaux, il doit en remettre immédiatement une clé à Nadine Y....
3) Sur la servitude de puisage et de canalisation
Attendu que cette servitude est également clairement décrite dans l'acte, qu'il est constitué à titre de servitude réelle et perpétuelle un droit de passage et de puisage sur la parcelle 275 au bénéfice des parcelles 274 et 276 pour les besoins suivants : passage de canalisation souterraine pour l'amenée d'eau depuis le puits ; que l'assiette de la servitude est clairement indiquée comme devant s'exercer le long de la parcelle figurant sous le numéro 275 de la section F et qu'elle est indiquée comme figurant sous introrse sur le plan visé et approuvé par les parties ;
Que le propriétaire du fonds dominant doit user des servitudes dans la limite des besoins pour lesquelles elles ont été établies et que là encore le propriétaire du fonds servant ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage ou à les rendre plus incommodes ;
Qu'il est encore prévu que la pompe électrique se trouve dans la cave de la maison vendue et que le moteur doit être déplacé aux frais de Nadine Y... à première demande d'Alain A... ;
Qu'en application de ces clauses dont le caractère précis ne peut être interprété, Alain A... ne peut s'opposer à la servitude de puisage et de passage de canalisation prévue par l'acte ;
Attendu que la cour ne dispose pas des éléments lui permettant de juger si Alain A..., par le mur qu'il a construit fait obstacle à l'exercice de ces servitudes et pas davantage s'il a mis en demeure Nadine Y..., conformément aux termes de l'acte de déplacer le moteur électrique.
Qu'il convient, avant dire droit sur ce point d'ordonner une consultation destinée à éclairer la cour sur le bien fondé de la plainte de Nadine Y... tenant à l'exercice de la servitude de puisage et de passage de canalisation.
Attendu que chaque partie succombant partiellement dans l'instance devra supporter la charge de ses propres dépens ; qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe conformément à l'article 453 du nouveau code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande en bornage judiciaire formée par Nadine Y... à l'encontre d'Alain A...
Sur la servitude de passage pour engins de travaux, dit et juge que
cette servitude doit être intégralement respectée par Alain A... qui devra notamment remettre une clé du portail dont Nadine Y... pourra faire usage sans autorisation particulière du propriétaire en cas de besoin.
Sur la servitude de puisage et de passage de canalisation,
Avant dire droit ordonne une consultation ;
Désigne pour y procéder Monsieur Michel H... demeurant 12, Avenue Emile Zola - 47500 FUMEL - Tél : 05.53.40.80.40 - Fax : 05.53.40.92.15, qui aura pour mission de rechercher si la servitude de puisage et de passage de canalisation est respectée par Alain A... dans les termes prévus à son acte d'achat.
Dit n'y avoir lieu à provision, Nadine Y... bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale.
Impartit au consultant un délai de deux mois pour accomplir sa mission.
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions.
Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.
Le présent arrêt a été signé par Nicole ROGER, Présidente de Chambre et Dominique SALEY, Greffier.
Le Greffier
La Présidente