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19/10/2021 | FRANCE | N°20VE01363

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 octobre 2021, 20VE01363


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance du 30 mars 2017, enregistrée le même jour au greffe du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la présidente du tribunal administratif de Melun a transmis, en application des articles R. 312-1 et R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par M. A... B....

Par cette demande, M. B... a sollicité la décharge des amendes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 à 2013 sur le fondement des dispositions du 2 du paragraphe IV de l'article 1736 du

code général des impôts.

Par un jugement n° 1702995 du 12 juin 2020, le tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance du 30 mars 2017, enregistrée le même jour au greffe du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la présidente du tribunal administratif de Melun a transmis, en application des articles R. 312-1 et R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par M. A... B....

Par cette demande, M. B... a sollicité la décharge des amendes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 à 2013 sur le fondement des dispositions du 2 du paragraphe IV de l'article 1736 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1702995 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur d'un dégrèvement prononcé en cours d'instance à hauteur de 27 559 euros, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée, le 12 juin 2020, M. B..., représenté par Me Planchat, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'amende forfaitaire de 1 500 euros, prévue par les dispositions du premier alinéa du 2 du paragraphe IV de l'article 1736 du code général des impôts, ne lui est pas applicable ;

- l'application de cette amende méconnaît les dispositions de l'article 1er du 1er protocole de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pham, première conseillère,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui était titulaire d'un compte bancaire non déclaré au Luxembourg, a régularisé sa situation fiscale au cours de l'année 2014 dans le cadre défini par la circulaire n° 672 du 21 juin 2013 dite " circulaire Cazeneuve " en déposant des déclarations rectificatives pour les années 2011, 2012 et 2013. Il a signé avec l'administration fiscale, le 20 juillet 2016, un contrat de transaction en conséquence duquel a été émis, le 31 août 2016, un avis de mise en recouvrement de l'amende fiscale prévue au IV de l'article 1736 du code général des impôts pour les années 2011 à 2013. Suite à la décision n° 2016-554 QPC du 22 juillet 2016 par laquelle le Conseil constitutionnel a censuré le deuxième alinéa du paragraphe IV de l'article 1736 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012, M. B... a contesté, au cours de l'année 2017, les amendes mises à sa charge devant le tribunal administratif de Melun, qui a transmis sa requête au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Par décision du 15 septembre 2017 prise en cours d'instance, l'administration fiscale a partiellement fait droit à sa demande en lui accordant un dégrèvement de 27 559 euros des amendes litigieuses tout en laissant à sa charge une somme de 4 500 euros correspondant à l'amende forfaitaire de 1 500 euros au titre des années 2011, 2012 et 2013. Par le jugement n° 1702995 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de ce dégrèvement et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. B.... Celui-ci relève régulièrement appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa du 2 du IV de l'article 1736 du code général des impôts : " Les infractions aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A et de l'article 1649 A bis sont passibles d'une amende de 1 500 € par compte ou avance non déclaré ". Aux termes de l'article 344 A de l'annexe III au code général des impôts, pris pour l'application des dispositions précitées de l'article 1649 A du même code : " (...) Les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l'étranger. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret. / Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables. ". Aux termes de l'article 344 A de l'annexe III au code général des impôts, pris pour l'application des dispositions précitées de l'article 1649 A du même code : " II. Les personnes physiques joignent la déclaration de compte à la déclaration annuelle de leurs revenus. (...) III. La déclaration de compte mentionnée au II porte sur le ou les comptes ouverts, utilisés ou clos, au cours de l'année ou de l'exercice par le déclarant, l'un des membres de son foyer fiscal ou une personne rattachée à ce foyer. Un compte est réputé avoir été utilisé par l'une des personnes visées au premier alinéa dès lors que celle-ci a effectué au moins une opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration, qu'elle soit titulaire du compte ou qu'elle ait agi par procuration, soit pour elle-même, soit au profit d'une personne ayant la qualité de résident ".

3. Ainsi qu'il a été mentionné au point 1, l'administration a, par la décision d'admission partielle du 15 septembre 2017, substitué à l'amende proportionnelle prévue par le deuxième alinéa du 2 du IV de l'article 1736 du code général des impôts qu'elle avait initialement appliquée et qui a été déclaré contraire à la constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-554 QPC du 22 juillet 2016, l'amende forfaitaire prévue par le premier alinéa du 2 du IV du même article. M. B... a ainsi été assujetti à une amende de 1 500 euros pour chacune des années 2011, 2012 et 2013.

4. Il est constant que le requérant détenait au Luxembourg un compte qu'il n'avait pas déclaré dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 1649 A du code général des impôts. Cette carence était de nature à justifier l'application de l'amende forfaitaire prévue au premier alinéa du paragraphe IV de l'article 1736 du code précité. Contrairement à ce qui est soutenu, ladite amende forfaitaire s'applique, suite à la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-554 QPC du 22 juillet 2016, indépendamment du montant du solde des comptes non déclarés et ne saurait être regardée comme inapplicable aux comptes dont le solde était supérieur à 50 000 euros.

5. En second lieu, aux termes de l'article 1 du protocole n° 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. ". L'amende prévue au premier alinéa du paragraphe IV de l'article 1736 du code général des impôts constitue une ingérence prévue par la loi et visant un but d'intérêt général, à savoir la lutte contre l'évasion fiscale. Si le montant de cette amende doit maintenir un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et la protection des droits fondamentaux de l'individu, compte tenu de la marge d'appréciation reconnue à l'Etat en pareille matière, cette proportionnalité doit être appréciée par rapport à la gravité du manquement à l'obligation de déclaration et non par rapport au montant des impôts éludés. Par suite, M. B... ne peut conclure au caractère disproportionné de l'amende mise à sa charge au seul motif qu'il n'était redevable que de la somme de 1 001 euros au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales des années 2011 à 2013.

6. En l'espèce, il est constant que M. B... n'avait pas déclaré avoir ouvert un compte bancaire au Luxembourg, dont le solde créditeur a varié de 375 000 à 340 000 euros au titre des années d'imposition litigieuses. Le montant de l'amende contestée, de 1 500 euros par exercice clos, ne constitue pas une charge excessive, ni ne porte une atteinte fondamentale à sa situation financière. Au vu de ces éléments, ce montant est proportionné à la gravité du manquement du requérant à l'obligation de déclaration qui lui incombait. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 1 du protocole n° 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus des conclusions de sa demande, au surplus irrecevable dès lors que la transaction du 20 juillet 2016 était devenue définitive en raison du paiement par M. B..., le jour même de sa signature, des sommes dues, l'avis de mise en recouvrement du 31 août 2016 ne pouvant avoir pour effet de rouvrir le délai de réclamation. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

4

N° 20VE01363


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01363
Date de la décision : 19/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-015 Contributions et taxes. - Généralités. - Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Christine PHAM
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-10-19;20ve01363 ?
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