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19/11/2020 | FRANCE | N°19VE01511

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 19 novembre 2020, 19VE01511


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris, qui a transmis ce recours au tribunal administratif de Montreuil, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1711757 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 26

avril 2019 et le 7 juillet 2019, M. C..., représenté par Me Lagneaux, avocat, demande à la Cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris, qui a transmis ce recours au tribunal administratif de Montreuil, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1711757 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 avril 2019 et le 7 juillet 2019, M. C..., représenté par Me Lagneaux, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 février 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments d'imposition en litige ;

3°) d'ordonner la restitution des sommes payées par lui, assortie d'intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les conditions énoncées au c) de l'article 111 du code général des impôts ne sont pas réunies, dès lors que l'administration aurait dû prendre en compte la valeur vénale de l'appartement reçu dans le cadre d'une dation en paiement à la date de sa prise de possession en 2000, les actes notariés de 2010 venant simplement régulariser une cession antérieure ;

- il n'est pas contesté qu'à la date de la prise de possession, en 2000, l'appartement en cause était brut de béton et que M. C... y a réalisé des travaux à ses frais postérieurement.

.................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Illouz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... est gérant et associé de la société civile immobilière Gervais Huguette Caouanne (SCI IGH CAOUANNE) à hauteur de 7,25 % du capital. Cette SCI est elle-même détenue à hauteur de 92,75 % par la société par actions simplifiée GSI Gervais C... Industries (SAS GSI), dont M. C... détient 99,97 % des parts. Par deux actes notariés du 18 juin 2010, M. C... a vendu à la SCI IGH CAOUANNE un terrain situé sur la commune de Cluses, soutenant un bâtiment à usage d'habitation édifié par l'acquéreur, pour un prix fixé à 120 000 € et reçu en dation en paiement au titre de cette cession un appartement triplex d'une superficie de 140 m2. L'administration fiscale a considéré que l'estimation de la valeur de ce dernier appartement était minorée et devait être fixée à 310 480 €. Elle a, par suite, considéré que M. C... avait été bénéficiaire d'une libéralité constitutive d'une rémunération occulte de la part de la SCI IGH Caouanne et a rehaussé sa base imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des capitaux de revenus mobiliers au titre de l'année 2010 de 185 018 euros. M. C... a donc été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales portant sur des revenus de capitaux immobiliers au titre de l'année 2010. Par une décision du 25 mars 2017, l'administration a fait partiellement droit à sa réclamation du 10 mars 2017 en laissant à sa charge les sommes de 144 130 euros au titre de l'impôt sur le revenu et de 34 592 euros au titre des contributions sociales de l'année 2010. Par jugement n° 1711757 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête tendant à la décharge de ces impositions. M. C... fait appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minorée, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du co-contractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession. Cette intention est présumée lorsque les parties sont en relation d'intérêts.

Sur l'existence d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale de l'appartement reçu par M. C... dans le cadre d'une dation en paiement :

3. Le service vérificateur a remis en cause, selon la procédure contradictoire, la valeur du bien tel qu'il figurait dans l'acte de dation en paiement et a retenu, d'après des mutations immobilières réalisées entre 2007 et 2010 dans la même commune pour des biens présentant des caractéristiques similaires, cinq termes de comparaison qui ont permis de déterminer une évaluation du bien litigieux de 319 480 € (2 282 € /m2). M. C... ne conteste pas le contenu de ces cinq estimations, mais soutient que, pour le calcul d'une éventuelle plus-value, la valeur de l'appartement donné en dation en paiement devait être calculée à la date du 1er juillet 2000, dès lors que les actes notariés de vente conclus en juin 2010 prévoient une rétroactivité de la vente au 1er juillet 2000 et que, ayant pris possession de cet appartement en 2000, il y a réalisé des travaux à ses frais postérieurement.

4. Aux termes de l'article 1583 du code civil relatif à la vente : " Elle est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ". Il résulte de ces dispositions que la date à laquelle la cession d'un ensemble immobilier doit être regardée comme réalisée est celle à laquelle s'opère entre les parties le transfert de propriété, indépendamment des modalités de paiement, ce transfert ayant lui-même lieu, sauf stipulations contractuelles contraires, à la date où un accord intervient entre les parties sur la chose et le prix.

5. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. " Il résulte de ces dispositions qu'un bilan doit être établi à la date de clôture de chaque période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt et que ce bilan doit exprimer de manière régulière et sincère la situation de l'entreprise, telle qu'elle résulte à cette date des opérations de toute nature faites par l'entreprise. Si, parmi ces opérations, figurent des contrats conclus avec des tiers dans le cadre d'une gestion commerciale normale, les conséquences de ces contrats pour l'entreprise, qu'il s'agisse des droits et des obligations résultant de leurs stipulations ou des profits et des charges entraînés par leur exécution, doivent être reprises dans le bilan établi à la date de clôture de la période au cours de laquelle les contrats ont été conclus, mais ne peuvent l'être dans le bilan précédent, expression de la situation de l'entreprise à une date à laquelle les contrats n'étaient pas encore conclus. Par suite, lorsqu'un effet rétroactif est attaché à ces contrats par la volonté des parties ou par la loi civile ou commerciale, les conséquences de cette rétroactivité peuvent affecter les résultats de la période au cours de laquelle de pareils contrats ont été effectivement conclus, mais ne peuvent en aucun cas conduire à rectifier ceux de la période précédente.

6. Ainsi, la rétroactivité mentionnée dans les actes notariés conclus en juin 2010 ne pouvait affecter la valeur de l'appartement telle qu'elle figurait à l'actif du bilan de l'exercice 2000 de la SCI IGH Caouanne, dès lors que ces actes notariés n'étaient pas conclus au cours de cet exercice. Par suite, la circonstance que M. C... aurait pris possession de l'appartement en 2000 et y aurait réalisé des travaux à ses frais est sans incidence sur la légalité des impositions en litige. C'est donc à bon droit que l'administration, qui s'est fondée sur cinq termes de comparaison non utilement contestés par le requérant, a constaté l'existence d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale de l'appartement litigieux.

Sur l'intention libérale :

7. Eu égard à la relation d'intérêt existant entre M. C... et la SCI IGH Caouanne, l'intention pour cette société, d'octroyer, et, pour le requérant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession doit être présumée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

2

N° 19VE01511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01511
Date de la décision : 19/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Christine PHAM
Rapporteur public ?: M. ILLOUZ
Avocat(s) : CABINET GL CONSEILS ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-11-19;19ve01511 ?
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