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31/08/2020 | FRANCE | N°18VE01707

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 août 2020, 18VE01707


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) CTEA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des périodes correspondant aux années 2009 et 2010 et du 1er janvier au 31 août 2011, à concurrence de 1 043 830, 732 858 et 724 914 euros, et de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugem

ent n° 1507850 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prono...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) CTEA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des périodes correspondant aux années 2009 et 2010 et du 1er janvier au 31 août 2011, à concurrence de 1 043 830, 732 858 et 724 914 euros, et de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1507850 du 27 mars 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la décharge, pour partie, des rappels contestés, mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2018 et régularisée le 05 juin 2018, la SARL CTEA, représentée par Me Verdier, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler l'article 3 de ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen de droit tiré de ce qu'elle a présenté, conformément au c) de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts, l'ensemble des imprimés EX1 remis par le transitaire, qui n'ont pas à être revêtus du tampon des douanes ;

- pour les livraisons intracommunautaires de véhicules de tourisme, l'administration fiscale a, à tort, remis en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 1° du I de l'article 262 ter du code général des impôts pour les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre État membre de l'Union européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie, alors qu'elle établit que les acquéreurs roumains et polonais sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée, que les véhicules vendus ne peuvent être ré-immatriculés en France, qu'elle justifie, par un faisceau d'indices, de leur immatriculation en Pologne et en Roumanie, et que le caractère tardif de ces immatriculations ne peut lui être opposé ;

- pour les exportations de véhicules de tourisme vers les pays du Maghreb, l'administration fiscale a, à tort, remis en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 262 du code général des impôts, alors qu'elle a présenté l'ensemble des imprimés EX1 remis par le transitaire, conformément au c) du 1 de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts, et qu'elle justifie, par ailleurs, de l'exportation à leur destination des véhicules.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public

Considérant ce qui suit :

1. La SARL CTEA exerce une activité d'achat-revente de véhicules d'occasion. Elle a, à ce titre, placé la revente de véhicules à différents acheteurs situés dans différents pays de l'Union européenne et hors de l'Union européenne sous les régimes d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée, respectivement, des livraisons intracommunautaires prévu par les dispositions du 1° du I de l'article 262 ter du code général des impôts et des exportations prévu au 1° du I de l'article 262 du même code. A l'issue d'une vérification de comptabilité portant en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er janvier 2008 au 31 août 2011, le service a notamment remis en cause l'application des régimes d'exonération susmentionnés aux motifs, respectivement, que la société ne démontrait pas que les véhicules avaient fait l'objet de livraisons intracommunautaires de biens vers un autre État membre à destination d'un autre assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et qu'elle ne produisait pas davantage les documents exigés par l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts attestant de la réalité de l'exportation hors de France des véhicules en cause. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en résultant ont été assortis des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts. La SARL CTEA doit être regardée comme faisant appel du jugement du 27 mars 2018 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'après avoir prononcé la décharge, pour partie, des impositions contestées et mis à la charge de l'État le versement d'une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il a rejeté le surplus des conclusions sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La SARL CTEA étant désignée en tant qu' " Expéditeur / Exportateur " dans les déclarations d'exportation dont elle se prévaut pour revendiquer le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 1° du I de l'article 262 du code général des impôts, à raison de l'exportation de véhicules d'occasion vers les pays de Maghreb, elle ne pouvait utilement se prévaloir du dernier alinéa du c) du 1. de l'article 74 de l'annexe III à ce code relatif aux seules exportations réalisées par un intermédiaire. Il en résulte que le moyen soulevé en première instance par l'intéressée et tiré de ce que, conformément au c) du 1. de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts, l'ensemble des déclarations produites, présentées comme des imprimés EX1 remis par le transitaire, n'avaient pas à être revêtues du tampon des douanes était inopérant. Par suite, en s'abstenant de répondre à ce moyen, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les livraisons intracommunautaires :

3. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire (...). ". Aux termes de l'article 256 bis du même code : " I. 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises. / (...) / 3° Est considérée comme acquisition intracommunautaire l'obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d'un bien meuble corporel expédié ou transporté en France par le vendeur, par l'acquéreur ou pour leur compte, à destination de l'acquéreur à partir d'un autre Etat membre de la Communauté européenne. ". Selon l'article 258 de ce code : " I. - Le lieu de livraison de biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France : / (...) / c) Lors de la mise à disposition de l'acquéreur, en l'absence d'expédition ou de transport ; / (...) ". Aux termes de l'article 262 ter du même code : " I. Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie. L'exonération ne s'applique pas lorsqu'il est démontré que le fournisseur savait ou ne pouvait ignorer que le destinataire présumé de l'expédition ou du transport n'avait pas d'activité réelle. (...) ". Il résulte de ces dernières dispositions que l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des livraisons intracommunautaires de biens est notamment subordonnée à la condition, d'une part, que l'acquéreur des biens soit assujetti à cette taxe ou ait la qualité de personne morale non assujettie et ne bénéficiant pas, dans l'État membre dans lequel elle est établie, d'un régime dérogatoire l'autorisant à ne pas soumettre à la taxe ses acquisitions intracommunautaires, et, d'autre part, que le bien ait été expédié ou transporté hors de France par le vendeur, par l'acquéreur ou par un tiers pour leur compte, à destination d'un autre État membre.

4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération. S'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre État membre de l'Union européenne, pour l'application des dispositions de l'article 262 ter du code général des impôts, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est en mesure de produire les documents afférents au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur.

5. La SARL CTEA, qui ne produit aucune lettre de voiture, soutient néanmoins pouvoir justifier de l'expédition de chacun des véhicules, identifiés dans ses écritures devant le tribunal administratif sous les nos 1 à 13, cédés à destination d'acquéreurs établis dans d'autres États de l'Union européenne. Elle fait état du caractère suffisant des éléments de preuve produits, à cette fin, devant les premiers juges et consistant en des dossiers propres à certaines de ces cessions. Toutefois, ces dossiers, dont la composition est variable, consistent en des factures, des certificats de cession, des récépissés de déclarations de cession, des certificats d'immatriculation en France, des documents en langue étrangère non traduits, des photocopies de cartes nationales d'identité de ressortissants étrangers, des fiches d'identification du véhicule, des justificatifs de numéros de TVA (site internet Europa), des certificats et états d'immatriculations de véhicules en Pologne ou Roumanie ou encore en des déclarations d'échanges de biens (PRODOUANE), qui ne justifient pas de l'expédition effective des biens auxquels ils se rapportent, une concordance entre les différents documents produits par chaque cession étant d'ailleurs parfois difficile à établir. Les factures et certificats de cession produits ne comportent au demeurant pas le tampon de l'acquéreur ni de signature. Les attestations, certificats ou états d'immatriculation produits, sommaires, parfois établis tardivement, incomplets, illisibles, non datés ou encore non traduits, ne permettent notamment pas d'identifier l'identité et la qualité des personnes à l'origine de ces formalités ou la date auxquelles elles ont été réalisées, ni, en toute hypothèse, d'établir que ces véhicules ont été transportés hors de France par le vendeur ou par un tiers pour son compte. Est donc sans incidence à cet égard la circonstance alléguée par la société requérante selon laquelle les véhicules vendus ne pourraient être ré-immatriculés en France. S'agissant de deux véhicules supposés livrés en Espagne, le service a relevé qu'ils avaient été immatriculés au nom d'une personne autre que l'acquéreur identifié sur la facture. Les déclarations d'échanges de biens produites ne comportent pas les " références factures " et ne permettent pas d'identifier le bien échangé. En outre, plusieurs véhicules d'occasion prétendument expédiés hors de France au cours de la période en litige, ont été réglés soit intégralement en espèces, privant, par là même, l'administration de la possibilité de déterminer l'identité et la nationalité de l'acquéreur, soit par des personnes morales établies en France distinctes de celles mentionnées sur les factures de vente. Ainsi, les documents produits ne sont pas de nature, à eux-seuls, à établir le caractère effectif de l'expédition des véhicules hors de France à un acquéreur assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, alors qu'au surplus les demandes d'assistance administratives internationales concernant plusieurs entreprises clientes de la société requérante, effectuées par le service fiscal français auprès des autorités fiscales roumaines, ont fait ressortir que celles-ci ont cessé leur activité au début de l'année 2010 et se sont avérées avoir été des " missing trader " en l'absence de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée et d'activité à leur siège social.

6. Si la SARL CTEA soutient, de manière générale, devant le juge d'appel, apporter des éléments de preuve relatifs à 370 cessions effectuées auprès de sociétés roumaines et à de très nombreuses cessions effectuées auprès de sociétés polonaises, elle se borne à produire deux listes, sommaires et non traduites, d'attestations d'immatriculation émises par les autorités de ces États, sans d'ailleurs effectuer aucun recoupement avec les cessions pour lesquelles l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée a été remise en cause par l'administration fiscale, listes d'ailleurs déjà produites, pour partie, pour ce qui concerne les cessions discutées devant les premiers juges et précédemment évoquées, alors qu'ainsi qu'il a été rappelé au point 5., de tels documents, qui n'identifient d'ailleurs pas, pour la première, la date d'immatriculation et, pour la seconde, la personne ayant procédé à cette immatriculation, ne permettent en tout état de cause pas d'établir l'existence d'une cession, ni, au surplus, l'identité et la qualité du vendeur et de l'acquéreur, ni que ces véhicules ont été transportés hors de France par le vendeur ou par un tiers pour son compte et qu'est sans incidence à cet égard la circonstance alléguée par la société requérante selon laquelle les véhicules vendus ne pourraient être ré-immatriculés en France.

7. Les conditions de fond pour bénéficier de l'exonération qu'elle réclame n'étant, de la sorte, pas réunies, et alors même qu'elle justifie pour certains des acquéreurs mentionnés sur les factures de vente produites auraient par ailleurs disposé d'un numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée à la date de réalisation des ventes litigieuses, c'est à bon droit que l'administration a pu lui refuser le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue par les dispositions précitées du 1° du I de l'article 262 ter du code général des impôts au titre des ventes de ces véhicules.

En ce qui concerne les exportations :

8. Aux termes du I de l'article 262 du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1°les livraisons de biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation (...) " et aux termes de l'article 74 de l'annexe III au même code, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du décret n° 2010-233 du 5 mars 2010 relatif aux formalités requises en matière de preuve des exportations de biens bénéficiant de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée : " 1. Les livraisons réalisées par les assujettis et portant sur des objets ou marchandises exportés sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée à condition : [...] c. Que le fournisseur établisse pour chaque envoi une déclaration d'exportation, conforme au modèle donné par l'administration, qui doit, après visa par l'autorité douanière compétente, conformément au code des douanes communautaire et ses dispositions d'application, être mise à l'appui du registre visé au a. Toutefois, lorsque l'exportation est réalisée par l'entremise d'un intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui, et que celui-ci est désigné comme expéditeur des biens sur la déclaration d'exportation, le fournisseur met à l'appui du registre prévu au a un exemplaire de sa facture visée par le service des douanes du point de sortie [...] / d. Que, dans les cas où le fournisseur ne détient pas la déclaration d'exportation visée conformément au premier alinéa du c (...), il mette à l'appui du registre mentionné au a, pour justifier de la sortie des biens expédiés vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, (...) en plus de la déclaration en douane enregistrée par le bureau des douanes où elle a été déposée, l'un des éléments de preuve complémentaires ci-après : / 1° La déclaration en douane authentifiée par l'administration des douanes du pays de destination finale des biens ou une attestation de cette administration accompagnée, le cas échéant, d'une traduction officielle ; / 2° Tout document de transport des biens vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer ou tout document afférent au chargement du moyen de transport qui quitte la Communauté européenne pour se rendre dans le pays ou le territoire de destination finale hors de la Communauté ; / 3° Tout document douanier visé par le service des douanes compétent et utilisé pour la surveillance de l'acheminement des biens vers leur destination finale hors de la Communauté, lorsqu'il s'agit de biens soumis à des contrôles particuliers ; / (...) " et, dans sa rédaction issue du décret du 5 mars 2010 : " 1. Les livraisons réalisées par les assujettis et portant sur des objets ou marchandises exportés sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée à condition : / (...) / c. que l'assujetti exportateur établisse pour chaque envoi une déclaration d'exportation, conforme au modèle donné par l'administration et détienne à l'appui de sa comptabilité ou du registre prévu au a l'exemplaire numéro 3 de la déclaration d'exportation visé par l'autorité douanière compétente, conformément au code des douanes communautaires et ses dispositions d'application. Lorsque la déclaration d'exportation est établie dans le cadre de la procédure électronique telle que prévue par le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 modifié établissant le code des douanes communautaires et les textes pris pour son application, il produit la certification de sortie délivrée par le bureau d'exportation. Toutefois, lorsque la sortie du territoire communautaire effectuée à partir de la France est réalisée par l'entremise d'un intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui désigné comme expéditeur des biens sur la déclaration d'exportation, ou lorsque des opérateurs interviennent dans une livraison commune de marchandises à l'exportation, ou en cas de groupage, les assujettis exportateurs qui ne figurent pas dans la rubrique exportateur de la déclaration en douane mettent à l'appui de leur comptabilité ou du registre prévu au a un exemplaire de leurs factures visées par la personne habilitée ou autorisée à déclarer en douane et annotées des références permettant d'identifier la déclaration en douane correspondante. / Lorsque l'intermédiaire est habilité ou autorisé à déclarer en douanes et a obtenu de l'administration des douanes et droits indirects un agrément spécifique à la procédure du dédouanement des envois express, l'assujetti exportateur met à l'appui de sa comptabilité ou du registre prévu au a le document comportant tous les éléments d'information requis par l'administration, qui lui a été remis par cet intermédiaire. / d. que, dans les cas où l'assujetti exportateur ne produit pas les justificatifs prévus au c (...), il mette à l'appui de sa comptabilité ou du registre mentionné au a l'un des éléments de preuve alternatifs ci-après, pour justifier de la sortie des biens expédiés vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, (...) : / 1° La déclaration en douane authentifiée par l'administration des douanes du pays de destination finale des biens ou une attestation de cette administration accompagnée, le cas échéant, d'une traduction officielle ; / 2° Tout document de transport des biens vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, (...) ou tout document afférent au chargement du moyen de transport qui quitte la Communauté européenne pour se rendre dans le pays ou le territoire de destination finale hors de la Communauté ; / 3° Tout document douanier visé par le service des douanes compétent et utilisé pour la surveillance de l'acheminement des biens vers leur destination finale hors de la Communauté, lorsqu'il s'agit de biens soumis à des contrôles particuliers ; / (...) ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu'elles prévoient, à raison des exportations réalisées au profit de clients établis en dehors de la Communauté européenne, est subordonnée à la condition que le contribuable établisse la réalité des opérations d'exportations par la production des pièces justificatives mentionnées ci-dessus.

9. Par ailleurs, aux termes de l'article 793 bis du règlement (CEE) n° 2454/93 fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire, alors applicable : " 1. Le bureau de douane de sortie procède aux contrôles appropriés fondés sur l'analyse de risque avant la sortie des marchandises du territoire douanier de la Communauté et s'assure principalement que les marchandises présentées correspondent aux marchandises déclarées. Le bureau de douane de sortie surveille la sortie physique des marchandises. / (...) / 2. Lorsque le déclarant appose la mention "RET-EXP" dans la case 44, ou le code 30400, ou exprime autrement son souhait de récupérer l'exemplaire 3, le bureau de douane de sortie certifie la sortie physique des marchandises par un visa au verso de cet exemplaire. / Il rend cet exemplaire à la personne qui le lui a présenté ou à l'intermédiaire désigné sur ledit exemplaire et établi dans la circonscription du bureau de douane de sortie, en vue de sa remise au déclarant. / Le visa est constitué par un cachet sur lequel figurent le nom du bureau de douane de sortie et la date de sortie des marchandises. ".

10. Pour les opérations d'exportation demeurant en litige à la suite de la procédure de rectification et du jugement du 27 mars 2018 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la SARL CTEA soutient qu'elle justifie de leur réalité par la production d'imprimés EX1 qui lui ont été remis par son transitaire et qui n'avaient pas à être revêtus du tampon des douanes, conformément au second alinéa du c) du 1 de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts, dans ses rédactions respectivement applicables aux cas d'espèce. Toutefois, ainsi qu'il a été précisé au point 2., les documents produits, dans lesquels la SARL CTEA est désignée en tant qu'" Expéditeur / Exportateur ", ne constituent pas les documents visés au second alinéa du c) du 1 de l'article 74, mais des déclarations d'exportation dites " document administratif unique " (DAU) au sens du premier alinéa du même c), remises à l'assujetti-exportateur, non pas par un intermédiaire au sens de ces dispositions, mais par son déclarant.

11. Il résulte de l'instruction que, pour les opérations d'exportation des véhicules dont les numéros de série sont WBANX31090C179927 et WFOEXXGDE8R38115, la SARL CTEA produit une copie de leurs déclarations d'exportation revêtues du tampon des douanes polonaises du point de sortie du territoire datés des 23 juin et 11 octobre 2010, dont la validité n'est pas contestée par le ministre de l'action et des comptes publiques et qui, contrairement à qu'il soutient, n'ont pas été établies en janvier 2015, postérieurement aux opérations, mais éditées respectivement les 17 juin et 8 octobre 2010. Dès lors, ces véhicules doivent être regardés comme ayant fait l'objet d'une exportation effective. Pour les autres opérations restant en litige, il est constant que ces déclarations d'exportation, lorsqu'elles sont produites, n'ont pas été visées par l'autorité douanière ou, pour celle afférente au véhicule dont le numéro de série est WVWZZZ1KZ8W127971, est assortie de tampons illisibles. Les autres documents produits par la SARL CTEA consistant seulement, de façon variable selon l'opération d'exportation en cause, en des factures, des copies de cartes nationales d'identité ou de passeports de ressortissants étrangers, des certificats d'immatriculation, certificats provisoires ou des demandes de tels certificats, des fiches d'identification de véhicules, une " boarding card véhicule " non identifiable, des documents difficilement identifiables ou encore des attestations de la société Lagardère Transitaire indiquant avoir effectué " toutes les démarches auprès des douanes françaises et avoir délivré (...) les déclarations d'exportation des véhicules ", ne peuvent être regardé comme des éléments de preuve complémentaires ou alternatifs au sens des 1° à 4° du d) de l'article 74, dans ses rédactions respectivement applicables aux cas d'espèce. Dans ces conditions, la SARL CTEA n'est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause le régime d'exonération sous lequel la SARL CTEA a placé ses opérations d'exportation, que pour les seuls véhicules WBANX31090C179927 et WFOEXXGDE8R38115.

12. La SARL CTEA ne développe par ailleurs, aucun moyen propre aux pénalités de 40 % pour manquement délibéré que lui a appliquées l'administration.

13. Il résulte de ce qui précède que la SARL CTEA est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondant à l'année 2010 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel elle a placé ses opérations d'exportation pour les véhicules WBANX31090C179927 et WFOEXXGDE8R38115. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à la SARL CTEA de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La SARL CTEA est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondant à l'année 2010 à raison de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel elle a placé ses opérations d'exportation pour les véhicules WBANX31090C179927 et WFOEXXGDE8R38115.

Article 2 : Le jugement n° 1507850 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 27 mars 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL CTEA la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL CTEA est rejeté.

2

N° 18VE01707


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : VERDIER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 31/08/2020
Date de l'import : 03/10/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18VE01707
Numéro NOR : CETATEXT000042363838 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-08-31;18ve01707 ?
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