La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2020 | FRANCE | N°17VE03786

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 18 juin 2020, 17VE03786


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010.

Par un jugement n° 1506596 du 18 octobre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2017, M. B..., re

présenté par Me Canis, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010.

Par un jugement n° 1506596 du 18 octobre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2017, M. B..., représenté par Me Canis, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des amendes et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

* il a apporté la preuve de la réalité des prestations qu'il a fournies au bénéfice de la société FC2I, permettant à celle-ci de développer son activité, et a produit notamment un contrat conclu avec elle le 14 octobre 2008. Il incombe à l'administration fiscale de démontrer que les prestations de service concernées auraient un caractère fictif ou que les pièces qu'il apporte seraient fausses ; en outre, le service ne peut lui reprocher de n'avoir pas produit de comptes rendus d'activité ou de correspondances avec cette société ;

* c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la société FC2I n'aurait pas bénéficié de ses prestations, au motif que les comptes bancaires de cette société ne mentionnaient pas d'encaissement de la part des clients qu'il lui avait présentés, dès lors que c'est la société Coraud qui est le vendeur final des licences Teamquest ;

* il ne peut justifier de la réalité de l'activité de la société FC2I au Luxembourg dès lors qu'il n'en est pas l'associé mais son cocontractant au titre d'une activité d' apporteur d'affaires ;

* le service ne démontre pas que lui-même et les autres salariés des sociétés Seriacom et Coraud auraient été les bénéficiaires d'un montage frauduleux ;

* le bénéficiaire des prestations qu'il a effectuées étant situé au Luxembourg, la TVA française ne pouvait pas s'appliquer et il était fondé à émettre des factures hors taxes à l'attention de cette société ;

- s'agissant de la majoration pour activité occulte :

* l'activité d'apporteur d'affaires ne peut pas être considérée comme une activité occulte dès lors qu'il a adressé au service des impôts un courrier le 15 février 2012, huit mois avant l'envoi de l'avis de vérification de comptabilité, par lequel il demandait la rectification de ses déclarations de revenus afin de tenir compte des commissions facturées à la société FC2I ;

- s'agissant de l'amende pour factures de complaisance :

* la société FC2I ayant bénéficié de ses prestations d'apporteur d'affaires, les factures qu'il a émises ne peuvent être regardées comme de complaisance.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er septembre 2009 au 31 décembre 2011, et d'une vérification de comptabilité de son activité d'apporteur d'affaires, pour la période courant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2011. A la suite de ces contrôles, le service a émis le 11 juillet 2013 deux propositions de rectifications portant sur des rehaussements d'impôt sur le revenu au titre de bénéfices non commerciaux, de taxe sur la valeur ajoutée et d'amendes fiscales, puis a émis les avis d'imposition et les avis de mise en recouvrement correspondant. Par un courrier du 9 décembre 2014, M. B... a contesté les impositions supplémentaires et amendes mises à sa charge. Par une décision du 29 mai 2015, le service a dégrevé une amende d'un montant de 1 500 euros et a rejeté le surplus de la réclamation. M. B... relève appel du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 18 octobre 2017 en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge des amendes et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il est resté assujetti au titre des années 2008 à 2010.

Sur la charge de la preuve :

2. Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...)3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes (...) ". Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". M. B... n'ayant déposé aucune déclaration de taxe sur la valeur ajoutée au titre de son activité d'apporteur d'affaires, l'administration était fondée à taxer d'office la taxe sur la valeur ajoutée due par le contribuable. Par conséquent, contrairement à ce que soutient M. B..., c'est à lui qu'il incombe de prouver le caractère exagéré des impositions en litige.

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

3. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : "Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel." Aux termes de l'article 259 du même code : " Le lieu des prestations de services est situé en France :1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France :a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ; b) Ou un établissement stable auquel les services sont fournis ;c) Ou, à défaut du a ou du b, son domicile ou sa résidence habituelle ".

4. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification, que les services ont estimé que si les prestations de prospection d'apporteur d'affaires assurées par M. B... n'avaient pas bénéficié à la société FC2I immatriculée au Luxembourg, une autre entité en avait bénéficié et qu'à défaut d'une exonération spécifique les prestations facturées par ce dernier étaient, en conséquence, taxables à la taxe sur la valeur ajoutée.

5. M. B... soutient qu'il a apporté la preuve de la réalité des prestations qu'il a fournies au bénéfice de la société FC2I, installée au Luxembourg, et qu'il était en conséquence fondé à émettre des factures hors taxes à destination de cette entreprise située en dehors du territoire national. Cependant s'il produit un contrat d'apporteur d'affaires conclu le 14 octobre 2008 avec cette société, il ne justifie d'aucune correspondance avec elle retraçant la réalité de ses interventions et ne présente que six comptes rendus d'activité très laconiques sur une durée de trois années d'activité, alors qu'il a facturé près de 242 200 euros à la société FC2I sur la période en litige. De plus, la production d'une liste de clients qu'il aurait démarchés pour le compte de la société FC2I, sans aucun autre élément permettant d'établir la réalité de ces démarchages, ne permet pas d'établir la réalité de ses interventions pour cette société. Enfin, M. B... tente de justifier l'absence d'encaissements dans les comptes de la société FC2I de la part des clients qu'il lui aurait présentés, par la circonstance que c'est la société Coraud qui était le vendeur final des licences Teamquest. Cependant il ne conteste pas le service qui, dans sa proposition de rectification, mentionnait que les clients qu'il aurait apportés à la société FC2I n'ont pas davantage fait l'objet de facturation de ventes de licences Teamquest par la société Coraud, notamment au cours de l'année 2008. Ainsi, s'il n'incombait certes pas à M. B... de justifier de la réalité de l'activité de la société FC2I au Luxembourg, il lui revenait en revanche d'établir la réalité des prestations d'apporteur d'affaires qu'il a facturées hors taxes à cette société. Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration a considéré que les prestations d'apporteur d'affaires qu'il avait rendues n'avaient pas bénéficié à la société FC2I.

6. Par ailleurs, il résulte de l'instruction et notamment des constatations de l'administration au siège des entreprises FC2I, Seriacom et Couraud, opérées dans le cadre de la procédure diligentée en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, que la société FC2I, implantée au Luxembourg, n'y disposait pas de moyens matériels et de personnels, n'avait pas d'activité réelle et faisait, en réalité, fonction de société écran gérée depuis la France par les dirigeants des sociétés Seriacom et Couraud. Par suite, et alors qu'il était salarié et actionnaire détenant 20 % du capital de la société Couraud, M. B... qui ne justifie pas de la réalité des prestations facturées hors taxes à la société FC2I et ne verse aucun élément de nature à démentir les données objectives du service selon lesquelles la société FC2I était une société écran, n'apporte aucun élément de nature à démontrer que le bénéficiaire de ses prestations d'apporteur d'affaires, serait situé hors de France.

7. Dans ces conditions, dès lors que le preneur des prestations d'apporteur d'affaires en litige, réalisées par M. B... et pour lesquelles il a effectivement perçu des commissions n'était en réalité pas situé en dehors du territoire français, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a rejeté sa demande tendant au dégrèvement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période en litige.

Sur les majorations et amendes :

En ce qui concerne la majoration pour activité occulte :

8. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : "1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...)c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte". Selon les dispositions de l'article L. 169 du Livre des procédures fiscales : "Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte ou lorsqu'il est bénéficiaire de revenus distribués par une personne morale exerçant une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable ou la personne morale mentionnée à la première phrase du présent alinéa n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. (...)"

9. Il résulte de l'instruction que M. B... n'a pas déposé dans les délais légaux les déclarations qu'il était tenu de souscrire portant sur son activité d'apporteur d'affaires au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 2008 à 2010, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. Par suite, l'administration doit être réputée apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exercice occulte de l'activité professionnelle dès lors que l'intéressé n'est pas lui-même en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ces obligations déclaratives. Ainsi, et alors même que le contribuable aurait ensuite averti l'administration fiscale de l'existence de ces revenus par un courrier du 15 février 2012, l'administration était fondée à assortir les rectifications portant sur le chiffre d'affaires généré par son activité d'apporteur d'affaires de la majoration de 80 % prévue au c. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'amende pour factures de complaisance :

10. Aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : (...) 2. De la facture, le fait de délivrer une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle ; (...) ". Il appartient à l'administration, lorsqu'elle a mis en recouvrement une amende fiscale sur le fondement de ces dispositions, d'apporter la preuve que les faits retenus à l'encontre du redevable entrent dans les prévisions de cet article.

11. Ainsi qu'il a été exposé aux points 5 et 6, la réalité des prestations d'apporteur d'affaires de M. B... auprès de la société FC2I n'est pas établie. Par suite, l'administration, qui doit être regardée comme apportant la preuve que les factures émises par l'intéressé à destination de cette société ne correspondaient pas à une prestation de service réelle, était fondée à appliquer aux montants portés sur ces factures l'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au requérant une quelconque somme sur ce fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

N°17VE03786 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03786
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-05-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices non commerciaux. Personnes, profits, activités imposables.


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: M. Stéphane CLOT
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : CABINET SCP CANIS LE VAILLANT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-18;17ve03786 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award