La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2019 | FRANCE | N°17VE03107

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 06 juin 2019, 17VE03107


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 18 mai 2018 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a assigné un pays de retour.

Par un jugement n° 1704081 en date du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre

2017, M.B..., représenté par Me Saidi, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté en date du 18 mai 2018 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a assigné un pays de retour.

Par un jugement n° 1704081 en date du 28 septembre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2017, M.B..., représenté par Me Saidi, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer sans délai un récépissé assorti d'une autorisation de travail ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen un récépissé avec autorisation de travail ;

4° et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B...soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le jugement est entaché d'une erreur de droit au regard de l'application des stipulations de l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

S'agissant de la légalité de la décision portant refus de séjour :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit en lui opposant les dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail ;

- le préfet a également entaché sa décision d'une erreur de droit consécutive au défaut d'examen de sa demande de titre de séjour " salarié " sur le fondement de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- cette décision a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale par voie de conséquence ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Sur proposition du rapporteur public, le président de la formation de jugement a dispensé ce dernier de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Soyez a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant tunisien né le 21 mars 1984, a sollicité le 26 janvier 2017 son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Il relève appel du jugement du 28 septembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mai 2017 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a assigné un pays de retour.

Sur la régularité du jugement :

2. M. B...fait grief aux premiers juges d'avoir commis une erreur de droit en estimant que le préfet n'avait pas à faire application, à sa situation, de l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988. Toutefois, ce moyen, qui se rattache au bien-fondé de la décision juridictionnelle et n'affecte pas sa régularité, ne peut qu'être écarté.

Sur le fond :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif de Versailles par M.B.... Il y a lieu, dès lors, de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.

4. En deuxième lieu, il ressort des termes de l'arrêté en litige que la situation de M. B... a été notamment examinée au regard des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé, le préfet ayant retenu que l'intéressé ne pouvait se voir délivrer un titre de séjour en vertu de ces stipulations au motif que ce dernier était dépourvu du visa de long séjour exigé par ces dernières. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit consécutive au défaut d'examen de sa demande de titre de séjour " salarié " sur le fondement de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ne peut qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé : " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable et portant la mention "salarié". ". L'article 11 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. ". Aux termes de l'article 2 du protocole du 28 avril 2008 relatif à la gestion concertée des migrations pris en application de l'accord précité : " (...) 2.3.3. Le titre de séjour portant la mention " salarié ", prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) " et aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; ". Pour examiner une demande d'admission au séjour en qualité de salarié d'un ressortissant tunisien, il incombe à l'administration de se fonder sur l'ensemble des critères afférents à l'examen de la situation de cet étranger, à l'exception du 1° de l'article R. 5221-20 du code du travail dans le cas où le métier envisagé figure sur la liste annexée à l'accord du 28 avril 2008.

6. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord. Toutefois, si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une telle mesure de régularisation.

7. Il ressort des stipulations et dispositions précitées que, pour refuser la régularisation du séjour de M. B...au titre de son pouvoir discrétionnaire, le préfet pouvait se fonder notamment sur la circonstance que la société qui se proposait d'embaucher M. B... ne respectait pas la législation du travail au sens des dispositions du 3° de l'article R. 5221-20 du code du travail, comme le mentionnait l'avis défavorable émis par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi en date du 11 avril 2017. Par conséquent, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en tenant compte de ces dispositions.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". M. B...fait valoir qu'il est marié à une compatriote depuis le 2 avril 2016, enceinte à la date de l'arrêté en litige, et qu'il fait preuve d'une réelle volonté d'intégration professionnelle afin d'assumer son futur foyer, par la production de bulletins de paie en qualité de chauffeur livreur entre juillet 2015 et décembre 2016 puis entre mars et mai 2017. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa domiciliation au domicile de sa future épouse dans l'Essonne, n'est établie qu'à compter du mois de décembre 2015, que son épouse a obtenu le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiante à l'université d'Aix Marseille auprès de la préfecture des Bouches-du-Rhône, et qu'ainsi M. B..., qui ne démontre pas, par ailleurs, une insertion professionnelle significative dans sa durée, ne justifie pas de l'ancienneté de ses liens personnels et familiaux en France, alors qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 29 ans. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne a porté à son droit à mener une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté a été pris, à la date du 18 mai 2018. Le préfet n'a pas davantage, dans les circonstances particulières de l'espèce, commis une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui a été dit plus haut que cette mesure d'éloignement n'a pas été prise en application d'une décision illégale. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité entachant cette mesure ne peut qu'être écarté.

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8 du présent arrêt, les moyens tirés d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

N° 17VE03107 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03107
Date de la décision : 06/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SAIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-06-06;17ve03107 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award