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04/12/2018 | FRANCE | N°16VE01014

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 04 décembre 2018, 16VE01014


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 16 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail de la 7ème section de l'unité territoriale du Val-d'Oise a autorisé l'administrateur judiciaire de la société STERI CHEM TBM à procéder à son licenciement pour motif économique, ensemble la décision du 21 novembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé cette autorisation de licenciement

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Par un jugement n° 1300211 du 11 février 2016, le Tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 16 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail de la 7ème section de l'unité territoriale du Val-d'Oise a autorisé l'administrateur judiciaire de la société STERI CHEM TBM à procéder à son licenciement pour motif économique, ensemble la décision du 21 novembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a confirmé cette autorisation de licenciement.

Par un jugement n° 1300211 du 11 février 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2016, M.B..., représenté par Me Brun, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement et les décisions du 16 mai 2012 de l'inspecteur du travail et du 21 novembre 2012 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

2° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que dans le cas d'une liquidation judiciaire le périmètre de la cause économique était circonscrit à l'entreprise. Les décisions en litiges sont illégales faute pour l'autorité administrative d'avoir examiné le motif économique au niveau du groupe Gems Industries ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé que le respect par l'employeur de l'obligation conventionnelle de reclassement avait été justement apprécié par l'inspecteur du travail, alors que l'employeur était tenu de saisir la commission paritaire territoriale et non les syndicats patronaux, en application des articles 5 et 15 de l'ANI du 10 février 1969 et de l'article 28 de l'accord national de la métallurgie du 12 juin 1987 ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé qu'il ne revenait pas à l'autorité administrative de vérifier si le comité d'entreprise avait bien été consulté sur le projet de déclaration de cessation de paiement envisagé par l'employeur lors de la réunion du 21 novembre 2011. La faillite de l'entreprise étant directement à l'origine de la demande d'autorisation de licenciement, il revenait à l'autorité administrative de vérifier si le comité d'entreprise avait bien été consulté sur le projet de déclaration de cessation de paiement. Les dispositions de l'article L. 2323-44 du code du travail ont en conséquence été méconnues.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord national interprofessionnel du 10 février 1969 sur la sécurité de l'emploi modifié ;

- l'accord national du 12 juin 1987 sur les problèmes généraux de l'emploi ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Besson-Ledey,

- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par jugement du 19 avril 2012, le Tribunal de commerce de Paris a, d'une part, placé en liquidation judiciaire la société STERICHEM TBM, spécialisée dans la conception et la fabrication d'autoclaves et stérilisateurs destinés notamment aux laboratoires et à l'industrie pharmaceutique et, d'autre part, arrêté un plan de cession partielle de cette société à la société STERIFLOW, incluant 11 postes sur 28 postes au total. Par courrier du 29 juin 2012, l'administrateur judiciaire a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de licencier pour motif économique M.B..., délégué du personnel, exerçant les fonctions de magasinier. Par décision du 16 mai 2012, l'inspecteur du travail de la 7ème section de l'unité territoriale du Val-d'Oise a autorisé le licenciement de M.B.... Saisi d'un recours hiérarchique par ce salarié, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, par une décision du 21 novembre 2012, confirmé l'autorisation de licenciement. Par jugement du 11 février 2016 dont M. B...relève appel, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 16 mai et 21 novembre 2012.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement présentée par l'employeur est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié.

3. A ce titre, lorsque la demande d'autorisation de licenciement pour motif économique est fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise, il appartient à l'autorité administrative de contrôler que cette cessation d'activité est totale et définitive. Il ne lui appartient pas, en revanche, de contrôler si cette cessation d'activité est justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise. Il incombe ainsi à l'autorité administrative de tenir compte, à la date à laquelle elle se prononce, de tous les éléments de droit ou de fait recueillis lors de son enquête qui sont susceptibles de remettre en cause le caractère total et définitif de la cessation d'activité. Il lui incombe également de tenir compte de toute autre circonstance qui serait de nature à faire obstacle au licenciement envisagé, notamment celle tenant à une reprise, même partielle, de l'activité de l'entreprise impliquant un transfert du contrat de travail du salarié à un nouvel employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail. Lorsque l'entreprise appartient à un groupe, la seule circonstance que d'autres entreprises du groupe aient poursuivi une activité de même nature ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la cessation d'activité de l'entreprise soit regardée comme totale et définitive.

4. Il est constant que, par un jugement du 19 avril 2012, le Tribunal de commerce de Paris a, d'une part, placé en liquidation judiciaire la société STERI CHEM TBM, et, d'autre part, arrêté un plan de cession partielle de cette société à la société STERIFLOW, incluant 11 postes sur 29 postes au total. Dès lors qu'une demande d'autorisation de licenciement fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise n'a pas, ainsi qu'il a été dit au point précédent, à être justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise, il n'appartient pas à l'autorité administrative, pour apprécier la réalité d'un tel motif de cessation d'activité invoqué par une société faisant partie d'un groupe, d'examiner la situation économique des autres entreprises de ce groupe. Par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il appartenait à l'inspecteur du travail et au ministre du travail d'examiner le motif économique en tenant compte de l'ensemble des sociétés du groupe auquel la société STERI CHEM TBM appartenait.

5. En deuxième lieu, en vertu des dispositions du code du travail, l'autorité administrative saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé doit apprécier si les règles de procédure de licenciement économique d'origine conventionnelle préalables à sa saisine ont été observées. Il résulte des stipulations des articles 5 et 15 du titre premier de l'accord national interprofessionnel du 10 février 1969 relatif à la sécurité de l'emploi que les commissions paritaires de l'emploi ont pour tâche " d'examiner en cas de licenciements collectifs les conditions de mise en oeuvre des moyens de reclassement et de réadaptation ". Aux termes des stipulations de l'article 28 de l'accord national du 12 juin 1987 sur les problèmes généraux de l'emploi alors en vigueur : " Lorsqu'une entreprise sera conduite à réduire ou à cesser son activité, elle recherchera en liaison étroite avec le comité d'entreprise, les délégués syndicaux et les organismes habilités toutes les solutions permettant d'assurer le reclassement du personnel. (...) Si toutefois elle est amenée à envisager un licenciement collectif d'ordre économique, elle doit : (...) - rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi ; (...) - informer la commission territoriale de l'emploi conformément aux dispositions de l'article 2 du présent accord. (...) ". Il résulte de ces stipulations qu'il appartient à l'employeur de saisir la commission territoriale de l'emploi compétente afin de rechercher si des possibilités de reclassement externe, en particulier dans le cadre des industries de métaux, existent.

6. Il ressort des pièces du dossier que si l'administrateur judiciaire de la société STERI CHEM TBM a saisi le Groupe des industries métallurgiques et connexes de la région parisienne, ainsi que le Syndicat patronal de la production et de la transformation des métaux de Seine-et-Marne, il a également saisi, par courrier du 19 avril 2012, l'Union des industries des métiers de la métallurgie (UIMM) de la région parisienne afin de recueillir auprès de cet organisme des informations relatives aux postes éventuellement disponibles dans les sociétés adhérentes. Ce courrier, qui comportait en annexe la liste des salariés concernés et les emplois supprimés, valait saisine de la commission territoriale de l'emploi compétente. Le moyen tiré de ce qu'une telle commission n'aurait pas été saisie doit, dès lors, être écarté.

7. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 2323-44 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Le comité d'entreprise est informé et consulté : / 1° Avant le dépôt au greffe d'une demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ; / (...) / 4° Lors d'une procédure de liquidation judiciaire, dans les situations et conditions prévues aux articles L. 641-1 (I), L. 641-4, L. 641-10, troisième alinéa, L. 642-5, dernier alinéa, et L. 642-9, deuxième alinéa, du code de commerce. / En cas de licenciements économiques prononcés dans les cas prévus aux 3° et 4°, le comité d'entreprise est réuni et consulté dans conditions prévues à l'article L. 1233-58 du présent code. ".

8. Alors qu'il n'appartient pas à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique d'un salarié protégé, de contrôler la procédure préalable au dépôt au greffe d'une demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, le moyen tiré d'une violation du 1° de l'article L. 2323-44 du code du travail ne peut-être qu'écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée y compris par voie de conséquence les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la SCP Brouard Daude au titre des dépens est rejeté.

2

N° 16VE01014


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01014
Date de la décision : 04/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : CABINET BRUN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-12-04;16ve01014 ?
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