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05/10/2017 | FRANCE | N°16VE02914

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 05 octobre 2017, 16VE02914


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2015 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1507468 du 5 juillet 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2016, M.A..., représenté par

MeC..., demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement

;

2° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2015 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1507468 du 5 juillet 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2016, M.A..., représenté par

MeC..., demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour provisoire sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 et / ou de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- le Tribunal ne pouvait déduire des seules condamnations pénales prononcées à son encontre l'existence d'un trouble à l'ordre public au sens des dispositions de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le Tribunal a commis une erreur de droit en acceptant le caractère suffisant de la motivation de l'arrêté du 9 novembre 2015 ;

- le Tribunal a entaché le jugement d'une omission à statuer en ne répondant pas aux moyenx tirés du défaut de motivation de la décision attaquée et de l'erreur de droit du préfet qui s'est à tort cru placé en situation de compétence liée ;

- il y a des incertitudes concernant le pays de retour bien que le tribunal ait écarté ce moyen en reconnaissant sa nationalité algérienne ;

- le Tribunal a rejeté à tort les moyens tirés de la violation des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de l'arrêté du 9 novembre 2015 :

- la décision du préfet de l'Essonne est insuffisamment motivée au regard du critère de la menace que son comportement ferait peser sur l'ordre public ;

- l'arrêté viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il viole les stipulations de l'article 8 de la convention précitée car le préfet n'a pas tenu compte de son projet d'insertion professionnelle ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation car il y a des incertitudes sur son pays d'origine ;

- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car il est domicilié.chez sa tante et il a fui sa famille d'origine du fait des violences de son père

..................................................................................................................chez sa tante et il a fui sa famille d'origine du fait des violences de son père

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, alors applicable ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guével a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien, entré en France en 2011 selon ses déclarations à l'âge de quatorze ans, a été condamné le 24 septembre 2015 par le Tribunal correctionnel pour enfants de Paris à une peine de deux mois d'emprisonnement et par le Tribunal correctionnel de Paris le 17 août 2015 à une peine de 6 mois d'emprisonnement ; que, par des décisions du 9 novembre 2015, le préfet de l'Essonne a décidé de sa reconduite à la frontière et en a fixé le pays de destination ;

Sur la légalité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'en reprenant intégralement au point 1. de son jugement, les motifs de l'arrêté attaqué, puis en relevant au point 5., que l'arrêté comportait les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, le tribunal administratif a suffisamment répondu au moyen tiré du caractère insuffisamment motivé de l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du

9 novembre 2015 ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité pour ce motif ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; qu'en relevant au point 3. qu'il est constant que M. A...a été condamné respectivement le 17 août 2015 et le 24 septembre 2015 par le Tribunal correctionnel de Paris à des peines d'emprisonnement de six mois pour vol en réunion en récidive et de deux mois pour vol, qu'il entrait, par suite, dans le champ d'application du 1° de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pouvait légalement faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière sur ce fondement et qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne se serait cru en " situation de compétence liée ", le Tribunal administratif a suffisamment répondu aux moyens invoqués en première instance tirés de ce que le préfet s'est uniquement fondé sur les informations transmises par les autorités judiciaires et sur une audition en date du 12 octobre 2015 ; que le jugement est ainsi suffisamment motivé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'un défaut de motivation sur ce point ;

Sur la décision de reconduite à la frontière :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 533-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger, sauf s'il est au nombre de ceux visés à l'article L. 121-4, doit être reconduit à la frontière : / 1° Si son comportement constitue une menace pour l'ordre public (...). " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

5. Considérant que l'arrêté litigieux, pris au visa notamment des dispositions de l'article L. 533-1 (1°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relève, en particulier, que le comportement de M. A...constitue un trouble récurrent à l'ordre public dès lors, d'une part, que l'intéressé a été condamné le 17 août 2015 par le Tribunal correctionnel de Paris à une peine d'emprisonnement de six mois pour vol en réunion, récidive, tentative, fourniture d'identité imaginaire pouvant provoquer des mentions erronées au casier judiciaire et le 24 septembre 2015 par le Tribunal correctionnel pour enfants de Paris à une peine d'emprisonnement de deux mois pour vol commis dans un lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs, et, d'autre part, que l'intéressé a précédemment fait l'objet de vingt-six signalements pour vol aggravé (octobre 2012), vols à la tire (octobre, novembre et décembre 2012), cambriolage de lieux d'habitation principale (novembre 2012), autres coups et blessures volontaires criminels ou correctionnels (décembre 2012), vols à la tire (juillet 2013), violences volontaires aggravées (juillet 2013), vol aggravé (août, décembre 2013), vol à la portière en réunion (septembre 2013), vols à la tire, recels (février 2014), vols à la tire (mars, avril 2014), vol en réunion (avril 2014), recels (mai 2014), recels (mars 2015), port ou détention d'armes prohibées (mai 2015), tentative de vol à la tire (juin 2015), recels (juillet 2015), vols en réunion, recels (juillet 2015), tentative de vol aggravé par deux circonstances (août 2015) ; que cet arrêté mentionne, par ailleurs, que M. A...constitue une menace réelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société, qu'il se maintient irrégulièrement en France, qu'il est célibataire et sans charge de famille et n'établit pas être démuni d'attaches dans son pays, de sorte qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il relève, enfin, que l'intéressé n'établit pas qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ou dans tout pays dans lequel il serait légalement admissible ; que, par suite, l'arrêté litigieux, qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation personnelle ou professionnelle de

M.A..., comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivé ;

6. Considérant que, si M. A...fait valoir que le tribunal ne pouvait déduire des seules condamnations pénales prononcées à son encontre l'existence d'un trouble à l'ordre public selon les dispositions de l'article L. 533-1, il n'en demeure pas moins que, bien qu'âgé seulement de 19 ans, l'intéressé, connu par les services de police sous au moins douze identités différentes, a déjà fait l'objet, comme il est recensé au point 5, de vingt-six autres signalements à raison de faits délictueux dont il ne conteste pas la matérialité ; qu'eu égard à la gravité et au caractère répété et récent des actes commis par M.A..., le préfet de l'Essonne, qui pouvait tenir compte de l'ensemble de ces actes alors même qu'ils n'auraient pas fait l'objet de poursuites pénales, n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que le comportement de l'intéressé, caractérisant une délinquance d'habitude, constituait une menace pour l'ordre public au sens des dispositions de l'article L. 533-1 (1°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que M. A...fait valoir qu'entré en France en 2011 à l'âge de quatorze ans, il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance et a ensuite bénéficié d'un contrat jeune majeur ; que, toutefois, l'intéressé, qui indique lui-même n'avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance des Bouches-du-Rhône qu'en 2012, avant d'être confié à ceux du département de Paris du 22 novembre 2014 au 20 octobre 2015, n'apporte aucune preuve de sa présence sur le territoire national avant 2012 ; que si, à partir de juin 2015, il a suivi un stage, de courte durée, dans le domaine de l'apprentissage du français et des mathématiques, il ne se prévaut d'aucune qualification particulière hormis une attestation scolaire de sécurité routière obtenue en 2014, ni d'aucune insertion professionnelle ; qu'il n'allègue aucune attache familiale en France autre qu'une tante ; que M.A..., âgé de 18 ans, ne fait surtout état d'aucune circonstance faisant obstacle à ce qu'il poursuive sa vie dans son pays d'origine où résident encore notamment ses parents et ses cinq frères et soeurs ; que, dans ces conditions, la décision attaquée ne peut être regardée, au regard du but d'ordre public qu'elle poursuit, comme portant une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M.A... ; qu'elle ne méconnaît donc pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant que le requérant ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant reconduite à la frontière qui ne fixe pas par elle-même le pays de renvoi ; qu'en tout état de cause, les circonstances dont se prévaut M. A...ne démontrent pas la réalité des risques actuels et personnels qu'il courrait en cas de retour en Algérie, à supposer qu'il en soit le ressortissant ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui reprend les mêmes arguments que ceux développés à l'encontre de la décision de reconduite à la frontière, doit être écarté, en tout état de cause, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de cette dernière décision ;

11. Considérant, en second lieu, que si M. A...soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison des incertitudes sur son pays d'origine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que tous les signalements judiciaires dont il a fait l'objet depuis 2012 mentionnent qu'il est né en Algérie, qu'il indique lui-même dans son curriculum vitae avoir travaillé en Algérie en 2011 et que l'attestation scolaire de sécurité routière obtenue le 8 juillet 2014 indique qu'il est né en Algérie ; que, si lors de son audition en date du 12 octobre 2015 à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis dont il ressort d'ailleurs qu'il déclare lui-même avoir utilisé les nationalités marocaine et algérienne, il affirme être né à Oudja au Maroc et avoir la nationalité marocaine, il ne l'établit par aucun document d'identité ; qu'un tel moyen n'est manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 et celles de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

N° 16VE02914 2


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Benoist GUÉVEL
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : VERNEREY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 05/10/2017
Date de l'import : 24/10/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16VE02914
Numéro NOR : CETATEXT000035841008 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-10-05;16ve02914 ?
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