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29/03/2016 | FRANCE | N°15VE01482

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 29 mars 2016, 15VE01482


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, la société Publications du Nouvel Economiste a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2013 du préfet du Val-d'Oise fixant la liste des journaux autorisés à publier des annonces judiciaires et légales dans le département pour l'année 2014, en tant que la société ne figure pas sur cette liste, ainsi que l'arrêté du 25 mars 2014 abrogeant l'arrêté du 30 décembre 2013 et la décision implicite de rejet résultant du s

ilence gardé par le préfet sur son recours gracieux en date du

6 mai 2014.

Par ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, la société Publications du Nouvel Economiste a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2013 du préfet du Val-d'Oise fixant la liste des journaux autorisés à publier des annonces judiciaires et légales dans le département pour l'année 2014, en tant que la société ne figure pas sur cette liste, ainsi que l'arrêté du 25 mars 2014 abrogeant l'arrêté du 30 décembre 2013 et la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet sur son recours gracieux en date du

6 mai 2014.

Par jugement nos 1402088-1406854 du 4 mars 2015, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a joint les deux requêtes et les a rejetées.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2015 et le 24 février 2016, la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE, venant aux droits de la société Publications du Nouvel Economiste, représentée par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler les arrêtés du 30 décembre 2013 et du 25 mars 2014, ainsi que la décision implicite rejetant sa demande de retrait de l'arrêté du 25 mars 2014, en tant que ces décisions ne font pas figurer le journal Le Nouvel Economiste sur la liste des journaux autorisés à publier des annonces judiciaires et légales dans le département du Val-d'Oise pour l'année 2014 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société soutient que :

- les arrêtés ont été pris à la suite d'une procédure irrégulière dès lors que l'avis conforme, rendu le 27 décembre 2013 par la commission consultative départementale du

Val-d'Oise, a méconnu le principe d'impartialité et les stipulations de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, en raison de la présence de directeurs de journaux concurrents ayant un intérêt à écarter la candidature du

Nouvel Economiste ;

- le directeur de cabinet n'était pas habilité à représenter le préfet à cette commission ;

- la commission, qui rend des avis conformes, n'a pas été réunie à nouveau pour modifier son avis du 27 décembre 2013 ; que le préfet ne pouvait ainsi autoriser le journal Les Echos à publier des annonces judiciaires et légales ;

- les arrêtés méconnaissent les dispositions de l'article 2 de la loi du 4 janvier 1955 dès lors que les critères tirés du volume d'informations suffisant intéressant le département et du lieu d'édition du journal dans ce même département ne figurent pas dans ces dispositions, mais uniquement dans la circulaire n° 4486 du 30 novembre 1989 du ministre délégué auprès du ministre de la Culture, de la communication, des grands travaux et du Bicentenaire, chargé de la communication, qui est dépourvue de valeur réglementaire ;

- le critère fondé sur le contenu de l'information est contraire aux objectifs poursuivis par la directive 2006/132/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur dès lors qu'il ne serait pas objectif et transparent ; il est sans rapport avec l'objet de l'autorisation ;

- quand bien même ce critère s'appliquerait, les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en estimant que le journal Le Nouvel Economiste ne le remplissait pas.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955 concernant les annonces judiciaires et légales ;

- le décret n° 55-1650 du 17 décembre 1955 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif ;

- le décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif ;

- la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nicolet,

- les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Leron, avocat de la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE.

1. Considérant que la société Publications du Nouvel Economiste a sollicité, par courrier en date du 27 novembre 2013, l'inscription du journal Le Nouvel Economiste sur la liste des journaux habilités à publier les annonces judiciaires et légales dans le département du

Val-d'Oise pour l'année 2014 ; que, par arrêté du 30 décembre 2013, pris après avis de la commission consultative prévue par l'article 2 de la loi du 4 janvier 1955 concernant les annonces judiciaires et légales, le préfet du Val-d'Oise a fixé cette liste pour l'année 2014, sur laquelle ne figurait pas le journal Le Nouvel Economiste ; que, par un arrêté du 25 mars 2014, pris à la suite d'un recours gracieux du journal Les Echos, le préfet du Val-d'Oise a abrogé l'arrêté du 30 décembre 2013 et complété la liste initiale en ajoutant cette publication, sans réunir à nouveau la commission consultative ; que la société Publications du Nouvel Economiste a formé le 6 mai 2014 un recours gracieux contre l'arrêté du 25 mars 2014 ; que la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE, venant aux droits de la société Publications du Nouvel Economiste, demande l'annulation du jugement nos 1402088-1406854 en date du

4 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2013, de l'arrêté du 25 mars 2014 et de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le préfet du Val-d'Oise sur son recours gracieux en date du 6 mai 2014, en tant que ces décisions refusent d'inscrire le journal

le Nouvel Economiste sur la liste des journaux habilités à publier les annonces judiciaires et légales dans le département du Val-d'Oise pour l'année 2014, ainsi que l'annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 4 janvier 1955 concernant les annonces judiciaires et légales : " Tous les journaux d'information générale, judiciaire ou technique, inscrits à la commission paritaire des publications et agences de presse, et ne consacrant pas en conséquence à la publicité plus des deux tiers de leur surface et justifiant une vente effective par abonnements, dépositaires ou vendeurs, sont inscrits de plein droit sur la liste prévue ci-dessous sous les conditions suivantes : / 1° Paraître depuis plus de six mois au moins une fois par semaine ; / 2° Etre publiés dans le département ou comporter pour le département une édition au moins hebdomadaire ; / 3° justifier d'une diffusion atteignant le minimum fixé par décret après avis de la commission prévues ci-dessous, en fonction de l'importance de la population du département ou de ses arrondissements. / La liste est préparée chaque année au mois de septembre, en vue de l'année suivante, par une commission consultative présidée par le préfet et composée du président de la chambre départementale des notaires ou de son représentant et, s'il existent en nombre suffisant, de trois directeurs de journaux désignés par le préfet, dont au moins deux directeurs de journaux ou publications périodiques susceptibles de recevoir les annonces légales désignés par le préfet. / Cette liste de journaux susceptibles de recevoir les annonces légales, soit dans tout le département, soit dans l'un ou plusieurs de ses arrondissements, est publié par arrêté du préfet. (...) " ; qu'aux termes de l'article 14 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dont la date de transposition était fixée au 28 décembre 2009 au plus tard : " Les Etats membres ne subordonnent pas l'accès à une activité de services ou son exercice sur leur territoire au respect de l'une des exigences suivantes : / (...) / 6) l'intervention directe ou indirecte d'opérateurs concurrents, y compris au sein d'organes consultatifs, dans l'octroi d'autorisations ou dans l'adoption d'autres décisions des autorités compétentes (...) " ; que les dispositions précitées de la loi du 4 janvier 1955, qui prévoient l'intervention, au sein de la commission chargée d'établir la liste des journaux habilités à publier des annonces légales, d'au moins deux directeurs de journaux eux-mêmes susceptibles de recevoir de telles annonces, et font ainsi intervenir des opérateurs concurrents dans la procédure de délivrance de cette habilitation, sont incompatibles avec les dispositions du point 6 de l'article 14 de la directive 2006/123/CE, dont le délai de transposition était expiré à la date des décisions attaquées ;

3. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte ;

4. Considérant que la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE soutient que la composition de la commission consultative départementale du Val-d'Oise était irrégulière lorsqu'elle s'est réunie le 27 décembre 2013 pour rendre son avis, en raison de la présence de directeurs des journaux concurrents ayant un intérêt à écarter sa candidature de la liste des journaux habilités à publier les annonces judiciaires et légales dans le département du

Val-d'Oise, en violation du principe d'impartialité et des stipulations de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ; que le ministre de la culture et de la communication soutient pour sa part que, lorsqu'elle s'est réunie pour statuer sur la demande de la société requérante, la commission n'était composée que du directeur de cabinet représentant le préfet du Val-d'Oise et du président de la chambre départementale des notaires, régulièrement convoqué par courrier du 18 décembre 2013, les directeurs de journaux n'ayant pas été convoqués afin de respecter le principe d'impartialité ; que cependant, d'une part l'arrêté du 8 janvier 2007, qui fixe la composition de la commission consultative départementale des annonces judiciaires et légales du Val-d'Oise, dispose que cette commission est composée du préfet, du président de la chambre départementale des notaires ou de son représentant, ainsi que des directeurs des journaux Le Parisien, L'Echo-Le Régional et

La Gazette du Val-d'Oise, et d'autre part le compte-rendu de la réunion de la commission du

27 décembre 2013 ne mentionne pas l'identité des personnes ayant siégé lors de cette séance ; que, dans ces circonstances, et faute notamment de la production d'attestation des directeurs de journaux, membres de cette commission, et du président de la chambre départementale des notaires certifiant l'absence des trois directeurs de journaux membres de la commission à cette séance, le ministre n'établit pas l'absence de ces trois représentants de la presse à cette séance, au cours de laquelle a été examinée la candidature de la société requérante ; qu'une telle irrégularité, concernant trois membres concurrents ayant voix délibérative, et qui ont un intérêt direct à écarter la candidature de la société requérante, a affecté la composition de cet organisme consultatif de cinq membres, dont l'objet est de rendre un avis conforme dans le cadre d'une procédure d'autorisation, lors d'une séance à l'issue de laquelle seules ont été retenues les candidatures des publications dirigées par ces trois représentants de la presse ; qu'ainsi la société requérante est fondée à soutenir qu'elle a, dans les circonstances de l'espèce, été privée de la garantie d'impartialité prescrite par les stipulations précitées du point 6 de l'article 14 de la directive 2006/123 CE du 12 décembre 2006 ; que ce vice de procédure est de nature à entacher d'illégalité les décisions contestées ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE est, pour ce motif, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du

30 décembre 2013 et du 25 mars 2014, ainsi que de la décision implicite rejetant sa demande de retrait de l'arrêté du 25 mars 2014, en tant que le journal Le Nouvel Economiste ne figure pas sur la liste des journaux autorisés à publier des annonces judiciaires et légales dans le département du Val-d'Oise pour l'année 2014 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement nos 1402088-1406854 du 4 mars 2015 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 30 décembre 2013, en tant que le journal Le Nouvel Economiste ne figure pas sur la liste des journaux autorisés à publier des annonces judiciaires et légales dans le département du Val-d'Oise pour l'année 2014, l'arrêté du 25 mars 2014 abrogeant l'arrêté du

30 décembre 2013, en tant que le journal Le Nouvel Economiste ne figure pas sur cette même liste, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux en date du 6 mai 2014, sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera à la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la société NOUVELLE DU NOUVEL ECONOMISTE est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15VE01482
Date de la décision : 29/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Philippe NICOLET
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN et THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-03-29;15ve01482 ?
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