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10/02/2015 | FRANCE | N°14VE00988

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 10 février 2015, 14VE00988


Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014, présentée pour la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE, dont le siège est 8 boulevard Buffon, BP 2239, Laval cedex 9 (53022), par la société d'avocats Ateleia ; la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1304810 du 17 mars 2014 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à la taxe d'apprentissage et à la contribution au développement de l'apprentissage auxquelles elle a été assuj

ettie au titre des années 2009 et 2010 ;

2° de prononcer la décharge d...

Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014, présentée pour la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE, dont le siège est 8 boulevard Buffon, BP 2239, Laval cedex 9 (53022), par la société d'avocats Ateleia ; la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1304810 du 17 mars 2014 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à la taxe d'apprentissage et à la contribution au développement de l'apprentissage auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010 ;

2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat aux entiers dépens ;

Elle soutient que :

- elle ne dispose pas des éléments permettant d'asseoir correctement les taxes en cause, comme l'ensemble des entreprises du BTP, qui enregistrent un coefficient important de rotation de leur effectif salarié ; lorsqu'elle doit déterminer le montant des indemnités de congés payés, elle ne dispose pas de cette information s'agissant des salariés qui n'étaient pas les siens l'année précédente, ou bien qui n'étaient pas uniquement les siens durant cette année ; elle se trouve donc dans l'impossibilité de liquider le montant des congés payés selon les principes prévus par la loi, tels qu'ils ont été rappelés par l'avis Vignola ;

- elle conteste le nouveau mode de calcul forfaitaire des bases d'imposition de 11,5 % des rémunérations brutes versées au cours de l'année, fixé par le Conseil d'Etat dans sa décision Olivo du 20 novembre 2013, dont elle ne comprend pas les tenants et les aboutissants ;

- elle attend la réponse du Conseil d'Etat aux questions prioritaires de constitutionnalité introduites le 30 janvier 2014 à l'appui des pourvois nos 362263 à 362275, fondées sur l'insuffisance de précision avec laquelle la loi a défini l'assiette de cette taxe, méconnaissant ainsi l'article 34 de la Constitution ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Moulin-Zys,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public ;

1. Considérant que la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE fait appel du jugement du 17 mars 2014 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu pour lui de statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance par l'administration et résultant de l'application d'un taux de 11,5 % aux salaires versés pour l'évaluation des indemnités de congés payés, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à la taxe d'apprentissage et à la contribution au développement de l'apprentissage mises à sa charge au titre des années 2009 et 2010 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 224 du code général des impôts, alors en vigueur : " 1. Il est établi une taxe, dite taxe d'apprentissage, dont le produit, net des dépenses admises en exonération en application des articles 226 bis, 227 et 227 bis, est versé au Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage mentionné à l'article

L. 118-2-3 du code du travail (...) " ; qu'aux termes de l'article 225 du même code : " La taxe est assise sur les rémunérations, selon les bases et les modalités prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou au titre IV du livre VII du code rural pour les employeurs de salariés visés à l'article L. 722-20 dudit code (...) " ; qu'aux termes de l'article 1599 quinquies A dudit code : " I.-Il est institué une contribution au développement de l'apprentissage dont le produit est reversé aux fonds régionaux de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue mentionnés à l'article L. 4332-1 du code général des collectivités territoriales / Cette contribution est due par les personnes ou entreprises redevables de la taxe d'apprentissage en application de l'article 224. / Elle est assise sur les rémunérations retenues pour l'assiette de la taxe d'apprentissage en application des articles 225 et 225 A (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale : " Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire. La compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire (...) " ;

3. Considérant, par ailleurs, d'une part, que, selon l'article L. 223-11 du code du travail, devenu l'article L. 3141-22, l'indemnité afférente au congé annuel est égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours d'une période de référence définie par décret ; que cet article prévoit le calcul de la rémunération brute totale en fonction du salaire gagné dû pour la période précédant le congé et de la durée du travail effectif de l'établissement, en précisant qu'il est tenu compte de l'indemnité de congé de l'année précédente ; que toutefois, selon l'article L. 223-6 du même code, devenu l'article L. 3141-10, ces dispositions ne portent pas atteinte aux stipulations des conventions ou accords collectifs de travail ou des contrats de travail ni aux usages qui assurent des congés payés de plus longue durée ;

4. Considérant, d'autre part, que, si l'article L. 223-16 du code du travail, devenu l'article L. 3141-30 de ce code, prévoit l'affiliation obligatoire de certains employeurs à une caisse de congés payés, notamment lorsque les salariés ne sont pas habituellement occupés de façon continue chez un même employeur au cours de la période reconnue pour l'appréciation du droit au congé, ce qui est notamment le cas, en vertu de l'article D 732-1 du code du travail, devenu l'article D 3141-12 de ce code, dans les entreprises relevant du secteur du bâtiment et des travaux publics, l'assiette de la taxe d'apprentissage, de la contribution au développement de l'apprentissage et de la participation des employeurs à l'effort de construction est constituée par l'ensemble des rémunérations dues en contrepartie ou à l'occasion du travail, y compris les indemnités de congés payés, quand bien même le service de ces indemnités est assuré pour le compte de cet employeur par la caisse de congés payés à laquelle il est obligatoirement affilié ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant des indemnités de congés payés à prendre en compte dans l'assiette de la taxe d'apprentissage, de la contribution au développement de l'apprentissage et de la participation des employeurs à l'effort de construction correspond à celui que l'employeur aurait versé à ses salariés en l'absence d'affiliation obligatoire à une caisse, en application des dispositions du code du travail et des conventions collectives ou accords applicables à la profession ; que ce montant ne saurait donc être évalué en retenant les cotisations versées par l'employeur à la caisse de congés payés dès lors que ces cotisations, qui ne constituent pas des rémunérations au sens des dispositions précitées, couvrent par ailleurs des charges autres que les indemnités versées aux salariés, notamment les frais de fonctionnement des caisses ; que le montant à prendre en compte ne saurait davantage être fixé à partir des indemnités versées par les différentes caisses aux salariés au titre d'une période retenue pour l'appréciation du droit au congé, dès lors que les sommes versées par les caisses à un salarié peuvent correspondre aux droits à congés payés qu'un salarié a acquis auprès de plusieurs employeurs, qui sont seuls redevables de la taxe d'apprentissage et de la participation des employeurs à l'effort de construction ;

6. Considérant qu'à défaut de pouvoir établir exactement les sommes que l'employeur aurait versées à ses salariés au titre des indemnités de congés payés, en l'absence d'affiliation obligatoire à une caisse, il y a lieu de retenir, compte tenu à la fois du taux prévu par l'article L. 233-1 du code du travail, devenu l'article L. 3141-22, de l'indemnité de congé payé qui aurait, le cas échéant, été versée par l'employeur au titre de l'année précédente et des indemnités prévues par les conventions collectives, un montant évalué à 11,5 % des rémunérations brutes versées au cours de l'année d'imposition ;

7. Considérant, en outre, qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ;

8. Considérant qu'il est constant que la société requérante n'a pas apporté les éléments permettant de procéder à la reconstitution des montants des indemnités de congés payés qu'elle aurait versées, au cours des années en litige, à ses salariés en l'absence d'affiliation obligatoire à une caisse de congés payés ; que, par suite, faute, ainsi qu'elle l'a elle-même reconnu, de pouvoir établir exactement le montant des indemnités en cause, c'est à bon droit que le service les a finalement évaluées à 11,5 % des rémunérations brutes versées au cours des années concernées ;

9. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier si une loi est entachée d'incompétence négative et, par suite, méconnaît la Constitution ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le législateur n'aurait, pour la définition de l'assiette des taxes en litige, pas épuisé la compétence qu'il tient à cette fin des dispositions de l'article 34 de la Constitution est inopérant ; qu'au demeurant, le Conseil d'Etat, dans sa décision n° 362263 du 9 avril 2014, a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité tirée de ce que les articles 225 et 235 bis du code général des impôts et L. 242-1 du code de la sécurité sociale portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus de sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles tendant à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens, doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS EIFFAGE ENERGIE ANJOU-MAINE est rejetée.

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N° 14VE00988


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE00988
Date de la décision : 10/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-05-03 Contributions et taxes. Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés. Taxe d'apprentissage.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Marie-Cécile MOULIN-ZYS
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : SOCIETE ATELEIA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-02-10;14ve00988 ?
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