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02/07/2013 | FRANCE | N°12VE03262

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 02 juillet 2013, 12VE03262


Vu la requête enregistrée le 5 septembre 2012, présentée pour la SOCIETE CELLECTIS, dont le siège se situe au 102 rue de Noisy à Romainville (93235), par Me Blancpain, avocat;

La SOCIETE CELLECTIS demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1013065 du 17 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 6 décembre 2010 par laquelle la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité a décidé de présenter ses observations devant toute juridiction judiciaire compé

tente dans le litige opposant la société à Mme A...pour faits de discrimi...

Vu la requête enregistrée le 5 septembre 2012, présentée pour la SOCIETE CELLECTIS, dont le siège se situe au 102 rue de Noisy à Romainville (93235), par Me Blancpain, avocat;

La SOCIETE CELLECTIS demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1013065 du 17 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 6 décembre 2010 par laquelle la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité a décidé de présenter ses observations devant toute juridiction judiciaire compétente dans le litige opposant la société à Mme A...pour faits de discrimination ;

La SOCIETE CELLECTIS soutient que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses prétentions pour incompétence de la juridiction administrative dès lors que la délibération du 6 décembre 2010, qui n'a pas pour objet de saisir la juridiction prudhommale, est un acte détachable de la procédure suivie devant celle-ci ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ;

Vu la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité ;

Vu la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 18 juin 2013 :

- le rapport de M. Formery, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que la SOCIETE CELLECTIS a présenté en première instance une requête tendant à l'annulation de la délibération du 6 décembre 2010 par laquelle la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité a reconnu des faits de discrimination allégués à son encontre et a décidé de présenter des observations devant toute juridiction judiciaire compétente ; qu'elle conteste le jugement du 17 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur la compétence de l'ordre administratif :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, " Il est institué une autorité administrative indépendante dénommée haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité / La haute autorité est compétente pour connaître de toutes les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement international auquel la France est partie " ; qu'aux termes de l'article 13 de la même loi dans sa rédaction alors applicable, " Les juridictions civiles, pénales ou administratives peuvent, lorsqu'elles sont saisies de faits relatifs à des discriminations, d'office ou à la demande des parties, inviter la haute autorité ou son représentant à présenter des observations / La haute autorité peut elle-même demander à être entendue par ces juridictions ; dans ce cas, cette audition est de droit " ;

3. Considérant que la délibération par laquelle la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité décide d'intervenir devant toute juridiction judiciaire compétente ne conditionne pas la saisine du juge prudhommal, que seul le salarié ou l'entreprise peuvent déclencher ; que ledit juge, à qui il revient d'apprécier la valeur probante des observations soumises au débat contradictoire, n'est pas lié par les constatations de la haute autorité, dont les recommandations n'ont qu'une autorité morale ; que, dès lors, c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a estimé que la délibération du 6 décembre 2010 par laquelle la haute autorité a reconnu les faits de discrimination allégués à l'encontre de la SOCIETE CELLECTIS et a décidé de présenter ses observations devant toute juridiction judiciaire compétente, constituait un acte non détachable de la procédure suivie devant le juge judiciaire et a écarté pour ce motif la compétence de la juridiction administrative ;

4. Considérant, dès lors, qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de statuer, par voie d'évocation, sur les conclusions présentées en première instance par la SOCIETE CELLECTIS ;

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de la loi du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité que lorsque la haute autorité, comme en l'espèce, émet des recommandations sans faire usage de la possibilité dont elle dispose de leur assurer une publicité particulière, elle n'énonce pas des règles qui s'imposeraient aux personnes privées ou aux autorités publiques, mais recommande aux personnes concernées les mesures qui lui semblent de nature à remédier à tout fait ou pratique qu'elle estime être discriminatoire ou à en prévenir le renouvellement et que, par suite, ces recommandations ne constituent pas, par elles-mêmes, des décisions administratives susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que, si la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances a attribué à la haute autorité la faculté de décider par elle-même de présenter des observations devant le juge compétent, cette audition étant alors de droit, ces dispositions n'ont pas pour effet de conférer à ses délibérations une portée décisoire dès lors qu'en elles-mêmes elles ne modifient pas l'ordonnancement juridique et, ainsi qu'il a été dit plus haut, ne s'imposent pas au juge saisi qui demeure seul à même de constater la matérialité des faits et éventuellement de les sanctionner ; que, par conséquent, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la délibération litigieuse sont irrecevables et la demande doit être rejetée ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1013065 du 17 juillet 2012 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SOCIETE CELLECTIS devant le Tribunal administratif de Montreuil est rejetée.

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12VE03262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03262
Date de la décision : 02/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-01-02 Procédure. Introduction de l'instance. Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours. Actes ne constituant pas des décisions susceptibles de recours.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Simon FORMERY
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : SCP CELICE - BLANCPAIN - SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-07-02;12ve03262 ?
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