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16/02/2012 | FRANCE | N°10VE02864

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 16 février 2012, 10VE02864


Vu le recours, enregistré le 30 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par lequel le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706091 du 1er juillet 2010 par lequel le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé les décisions ministérielles portant retrait de points du permis de conduire de M. Fikret A à la suite des infractions constatées les 29 mars 2005 (4 points), 8 février 2006 à 19h15 (4 points) et 8 février

2006 à 22h40 (4 points), ensemble de la décision 48S du 2 mai 2007 inv...

Vu le recours, enregistré le 30 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par lequel le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0706091 du 1er juillet 2010 par lequel le vice-président désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé les décisions ministérielles portant retrait de points du permis de conduire de M. Fikret A à la suite des infractions constatées les 29 mars 2005 (4 points), 8 février 2006 à 19h15 (4 points) et 8 février 2006 à 22h40 (4 points), ensemble de la décision 48S du 2 mai 2007 invalidant le permis de conduire de l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif ;

Il soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit ; que la réalité des infractions est établie ; que la procédure de retrait de points dépend uniquement de la réalité de l'infraction telle qu'elle résulte de la procédure judiciaire ; que le ministre se trouve en situation de compétence liée ; que, si le requérant souhaitait contester la réalité des infractions qui lui sont reprochées, il lui appartenait de formuler, dans les délais impartis, une réclamation auprès de l'officier du Ministère public compétent ; que la preuve du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire est suffisamment apportée par les mentions figurant au relevé d'information intégral ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 2012 :

- le rapport de M. Diémert, président assesseur ;

Considérant que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES relève appel du jugement du 1er juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision 48S du 2 mai 2007 invalidant le permis de conduire de M. Fikret A au motif que la réalité des infractions commises les 29 mars 2005 (4 points), 8 février 2006 à 19h15 (4 points) et 8 février 2006 à 22h40 (4 points) n'était pas établie ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée (...) ;

Considérant qu'en appel, le ministre de l'intérieur verse au dossier le relevé d'information intégral relatif à la situation de M. A, extrait du système national du permis de conduire, ainsi que la carte attestant du paiement de l'amende forfaitaire consécutive à l'infraction du 29 mars 2005 ; qu'il ressort de ces documents que les trois infractions susvisées ont donné lieu au paiement de l'amende forfaitaire par l'intéressé ; qu'eu égard à ces mentions et en l'absence de tout élément avancé par l'intéressé permettant de mettre en doute leur exactitude, ces documents suffisent à établir la réalité des infractions en cause ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge a annulé les retraits de points consécutifs à ces infractions au motif que leur réalité n'était pas établie ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A ;

Considérant, en premier lieu, que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévues par les dispositions de l'article L. 223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant la légalité de ces retraits ; que cette notification a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que l'administration ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors que la décision procédant au retrait des derniers points récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur ; que M. A ne saurait dès lors utilement se prévaloir de ce que divers retraits de points ne lui auraient pas été notifiés avant l'intervention de la décision constatant la perte de validité de son permis de conduire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 225-3 du code de la route : Le titulaire du permis de conduire a droit à la communication du relevé d'information intégral le concernant ; qu'aux termes de l'article L. 225-4 dans sa rédaction alors applicable : Les autorités judiciaires, les officiers de police judiciaire chargés de l'exécution d'une ordonnance juridictionnelle ou agissant dans le cadre d'une enquête de flagrance, le représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice de ses compétences en matière de permis de conduire, les militaires de la gendarmerie et les fonctionnaires de la police nationale habilités à effectuer des contrôles routiers en application du présent code sont autorisés à accéder directement aux informations enregistrées en application de l'article L. 225-1 et que, selon l'article L. 225-6 du même code, aucune information nominative relative au permis de conduire ne peut être divulguée en dehors des cas expressément prévus par la loi ;

Considérant que, si, en vertu de l'article L. 225-4 précité du code de la route, seules les autorités judiciaires sont autorisées à accéder directement aux informations enregistrées dans le fichier informatique dit relevé d'information intégral du conducteur, il appartient toutefois au juge administratif de requérir des administrations compétentes la production de tous les documents nécessaires à la solution des litiges qui lui sont soumis à la seule exception de ceux qui sont couverts par un secret garanti par la loi ; qu'il ne résulte ni de l'article L. 225-4 du code de la route, ni d'aucune disposition législative que les informations nominatives contenues dans le relevé d'information intégral relatif à la situation d'un conducteur ne puissent par leur nature être communiquées par l'administration au juge administratif à l'occasion d'un litige relatif au permis de conduire de ce conducteur ; que cette communication n'a ni pour objet d'ouvrir au juge administratif un accès direct aux informations enregistrées dans le relevé d'information intégral ni pour effet d'autoriser la divulgation de ce fichier en dehors des cas prévus par la loi dès lors que cette communication se limite au juge administratif ; qu'enfin, et en tout état de cause, l'article L. 225-4 du code de la route, dans sa rédaction issue de l'article 79 de la loi du 14 mars 2011, autorise les magistrats de l'ordre administratif dans le cadre des recours formulés contre les décisions de retrait de point du permis de conduire à accéder directement aux informations enregistrées dans le relevé d'information intégral ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration ne serait pas habilitée à produire devant le juge administratif le relevé d'information intégral relatif à la situation de M. A ne peut être accueilli ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;

Sur l'infraction du 8 février 2006 à 22h40 (4 points) :

Considérant que le ministre produit le procès-verbal relatif à cette infraction, établi selon un formulaire conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale et revêtu de la signature du requérant ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le requérant n'aurait pas reçu les informations requises par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route manque en fait ;

Sur l'infraction du 29 mars 2005 (4 points) :

Considérant que le ministre produit le procès-verbal relatif à l'infraction en cause, établi selon un formulaire conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale, sur lequel la mention selon laquelle le contrevenant a reçu l'avis de contravention n'est pas contresignée par l'intéressé ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A s'est acquitté du paiement de l'amende forfaitaire consécutive à l'infraction en cause ; que, par suite, il s'est nécessairement vu remettre l'avis de contravention normalement revêtu des informations requises ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de délivrance de l'information préalable doit être écarté ;

Sur l'infraction du 8 février 2006 à 19h15 (4 points) :

Considérant que, si le relevé d'information intégral relatif à la situation de M. A fait état du paiement de l'amende forfaitaire afférente à l'infraction en cause, qui n'a pas été relevée par un moyen de contrôle automatisé, l'administration ne produit pas le procès-verbal d'infraction et, par suite, n'établit pas avoir délivré à l'intéressé un formulaire de contravention conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale ; qu'il en résulte que la décision par laquelle le ministre a retiré quatre points du permis de conduire de M. A, à la suite de l'infraction commise le 8 février 2006 à 19h15, est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière et doit être annulée ;

Considérant qu'eu égard à l'annulation du retrait de quatre points intervenu à la suite de l'infraction du 8 février 2006 à 19h15, le solde du capital de points du permis de conduire de M. A n'était pas nul lors de l'édiction, le 2 mai 2007, de la décision 48 S invalidant le permis de conduire de l'intéressé ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement en tant que le premier juge a annulé cette décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est seulement fondé à demander l'annulation des articles 2 et 3 du jugement attaqué en tant qu'ils annulent ses retraits de points consécutifs aux infractions des 29 mars 2005 (4 points) et 8 février 2006 à 22h40 (4 points) et lui enjoignent de restituer les points correspondants à M. A ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 0706091 du Tribunal administratif de Versailles du 1er juillet 2010 sont annulés :

- en tant que l'article 2 annule les décisions de retrait de quatre et quatre points du permis de conduire de M. A consécutives aux infractions commises les 29 mars 2005 et 8 février 2006 ;

- et en tant que l'article 3 enjoint au ministre de l'intérieur de restituer lesdits points.

Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif tendant à l'annulation des décisions de retrait de points de son permis de conduire mentionnées à l'article 1er du présent arrêt sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre est rejeté.

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N° 10VE02864


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02864
Date de la décision : 16/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04-025 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: M. Stéphane DIÉMERT
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : SAMSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-02-16;10ve02864 ?
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