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12/06/2007 | FRANCE | N°04VE02869

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 12 juin 2007, 04VE02869


Vu l'arrêt n° 04VE02869, en date du 21 mars 2006, par lequel la Cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur la requête de Mme Florianne X tendant à l'annulation du jugement du 13 mai 2004 du Tribunal administratif de Versailles ayant rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, ainsi que des intérêts de retard y afférents, à ce que la Cour prononce la décharge demandée et mette à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 000 euros au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a décid...

Vu l'arrêt n° 04VE02869, en date du 21 mars 2006, par lequel la Cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur la requête de Mme Florianne X tendant à l'annulation du jugement du 13 mai 2004 du Tribunal administratif de Versailles ayant rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, ainsi que des intérêts de retard y afférents, à ce que la Cour prononce la décharge demandée et mette à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du même code, de transmettre le dossier de la requête au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions de savoir : 1°) si, dans le cas où elle détient des documents, qui ne sont pas obtenus dans l'exercice de son droit de communication, mais qui se trouvent dans le dossier fiscal d'un tiers, telle la déclaration de revenus de ce dernier, l'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements ainsi obtenus et de communiquer, avant la mise en recouvrement, au contribuable qui en fait la demande les documents faisant ressortir ces renseignements ; 2°) si les documents fiscaux détenus par l'administration qui sont relatifs à un tiers sont protégés par le secret professionnel ou par toute autre disposition protégeant la vie privée des parties concernées dans des conditions qui font obstacle à la communication par l'administration de ces documents au contribuable ; 3°) quel est le régime de la charge de la preuve dans un litige où l'administration oppose une situation de concubinage pour refuser une demi-part de quotient familial et notamment à qui, de l'administration ou du contribuable, il incombe de prouver que la condition de vivre seul posée par les dispositions de l'article 194-I du code général des impôts est ou n'est pas remplie, et par quels moyens cette preuve peut être apportée ' ;

Vu l'avis n° 293749, en date du 21 décembre 2006, par lequel le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, s'est prononcé sur les questions posées par la Cour ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2007 :

- le rapport de Mme Brin, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier de première instance que, contrairement à ce que soutient Mme X, le mémoire en défense du directeur des services fiscaux, enregistré le 19 septembre 2003, lui a été communiqué ; qu'en revanche, pour faire droit à la fin de non-recevoir opposée par l'administration dans ce mémoire en ce qui concerne les conclusions relatives à l'année 1998 et pour retenir qu'au titre des années 1999 et 2000, les conclusions de la demande de Mme X étaient recevables à hauteur des montants contestés, le tribunal administratif s'est appuyé sur une pièce produite par l'administration qui n'a pas été communiquée ; qu'il s'est également appuyé, pour rejeter au fond les conclusions de la demande, sur des pièces qui n'ont pas davantage été communiquées ; que, dès lors, la procédure suivie devant le tribunal a méconnu le principe du contradictoire ; que, par ailleurs, les premiers juges, en ce qui concerne la déduction supplémentaire de 30 % prévue en faveur des voyageurs, représentants et placiers, contestée au titre des années 1999 et 2000, ont omis de répondre au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition ; que le jugement est, par suite, entaché d'irrégularité sur ce point ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme X présentée devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le directeur des services fiscaux :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : « Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial … de l'administration des impôts … dont dépend le lieu d'imposition » ; qu'aux termes de l'article R. 200-2 du même livre : « Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation préalable » ; qu'enfin, selon l'article L. 199 C de ce livre, le contribuable, dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités, peut faire valoir tout moyen nouveau, tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction ;

Considérant qu'il est constant que Mme X a présenté le 12 novembre 2002 une fiche de visite valant réclamation qui était limitée aux cotisations supplémentaires établies au titre des années 1999 et 2000 et au bien-fondé de la remise en cause de la demi-part supplémentaire de quotient familial en faveur des parents isolés ; que, dans ces conditions, ainsi que le fait valoir l'administration, d'une part, les conclusions de la requérante relatives à l'année 1998 ne sont pas recevables et, d'autre part, Mme X ne saurait obtenir une décharge supérieure à celle résultant de la prise en compte de cette demi-part ;

Sur la déduction supplémentaire de 30 % prévue en faveur des voyageurs, représentants et placiers :

Considérant qu'il ressort des énonciations de la réponse aux observations de la contribuable en date du 14 janvier 2002 qu'en ce qui concerne ce chef de redressement, cette réponse maintient le rehaussement au même montant que celui initialement notifié ; qu'elle réitère l'absence de justificatif apporté par la contribuable de nature à permettre d'apprécier le bien-fondé du bénéfice de cette déduction supplémentaire, qu'elle fait référence à l'article 83-3° 3ème alinéa du code général des impôts pour expliquer et confirmer les raisons pour lesquelles, ainsi que l'indique la notification de redressement du 17 février 2001, il y a incompatibilité, par application des articles 80 ter et 81-1 du même code, entre les allocations pour frais d'emploi et le bénéfice de la déduction supplémentaire de 30 % ; que, dans ces conditions, la réponse aux observations de la contribuable ne saurait être regardée comme procédant à une substitution de base légale nécessitant un nouveau délai de trente jours afin que la contribuable fasse valoir ses observations ; qu'à défaut de tout autre moyen invoqué par la requérante, ses conclusions tendant à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu résultant de la remise en cause de cette déduction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la demi-part de quotient familial en faveur des parents isolés :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme X a déclaré, au titre de chacune des années 1999 et 2000, deux parts de quotient familial ; qu'à la suite du contrôle sur pièces dont elle a fait l'objet, le service, par notification de redressement en date du 17 décembre 2001, a ramené ce nombre à 1,5 en se fondant sur les éléments de fait dont il disposait, laissant présumer que l'intéressée était en situation de concubinage dès lors que le local où elle demeurait était occupé conjointement par M. Y ; que, dans sa réponse aux observations de la contribuable en date du 14 janvier 2002, le service se prévaut de ce que ce dernier déclarait à son employeur être domicilié à l'adresse qui est celle de Mme X ; qu'ainsi l'administration a indiqué, avant la mise en recouvrement de l'imposition contestée, la teneur et l'origine des renseignements dont elle disposait ; qu'il résulte de l'instruction que, dans sa lettre du 11 janvier 2002, consécutive à la notification de redressement du 17 décembre 2001, Mme X a demandé au service la communication des éléments contenus dans son propre dossier fiscal relatifs aux traitements et salaires qu'elle avait déclarés ; qu'ainsi, en l'absence de demande de communication de documents concernant M. Y, la requérante ne saurait reprocher à l'administration de ne pas lui avoir transmis de tels éléments ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure d'imposition et le respect des droits de la défense auraient été méconnus ;

Considérant, en second lieu, que Mme X invoque en vain les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne sont pas applicables aux procédures administratives ; qu'elle n'est pas fondée, non plus, à soutenir que le droit au respect de la vie privée reconnu par l'article 8 de la même convention aurait été méconnu dès lors qu'il ne prive pas l'administration de pouvoir contrôler, comme ce fut le cas en l'espèce, les déclarations des contribuables selon les procédures législatives organisées, au nombre desquelles figure le contrôle sur pièces prévu par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article 3 de la loi n° 95-1436 du 30 décembre 1995 portant loi de finances pour 1996 dont les dispositions ont été incorporées au I de l'article 194 du code général des impôts : « I. A compter de l'imposition des revenus de 1995, le nombre de parts prévu au premier alinéa de l'article 194 est diminué de 0,5 pour l'imposition des contribuables célibataires ou divorcés ayant un ou plusieurs enfants à charge » ; qu'aux termes du II de cet article 3 dont les dispositions ont été codifiées au II de l'article 194 du code général des impôts : « Les dispositions du I ne s'appliquent pas au contribuable qui vit seul et supporte effectivement la charge du ou des enfants, nonobstant la perception d'une pension alimentaire versée pour leur entretien en vertu d'une décision de justice » ; qu'il résulte des termes mêmes de l'article 194 modifié du code général des impôts que le bénéfice d'une demi-part supplémentaire ne constitue un droit pour les contribuables que sous la double condition qu'ils vivent seuls et qu'ils supportent effectivement la charge du ou des enfants ;

Considérant, en second lieu, que lorsque, dans le cadre de son pouvoir de contrôle des déclarations des contribuables, l'administration remet en cause, selon la procédure contradictoire, la majoration du quotient familial, il lui incombe d'établir que le contribuable ne vit pas seul au 1er janvier de l'année d'imposition et qu'ainsi il ne remplit pas l'une des conditions auxquelles est soumis le bénéfice de ce droit ; que le contribuable peut néanmoins, par tous moyens, apporter la preuve contraire ;

Considérant que, devant le juge, l'administration fait état de ce que les déclarations de revenus souscrites par M. Y ainsi que les avis d'imposition établis au nom de ce dernier au titre des années 1999 et 2000 mentionnent que l'adresse de ce dernier était celle de Mme X ; que la requérante, en se bornant à faire valoir qu'elle ne partage aucune communauté de vie avec lui « sur un plan pécuniaire et patrimonial » n'établit pas l'absence de cohabitation avec M. Y ni celle de vie maritale ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que Mme X ne vivait pas seule au 1er janvier des années 1999 et 2000 ; que, par suite, c'est à bon droit qu'elle a remis en cause le bénéfice de la demi-part du quotient familial déclarée par la requérante dont la demande doit donc être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante à l'instance, les conclusions de Mme X tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0300122 en date du 13 mai 2004 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande et le surplus des conclusions de la requête de Mme X sont rejetés.

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Dominique BRIN
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : LEVI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 12/06/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 04VE02869
Numéro NOR : CETATEXT000017988289 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-06-12;04ve02869 ?
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