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13/07/2022 | FRANCE | N°21PA04111

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 13 juillet 2022, 21PA04111


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 juin 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2012390 du 7 avril 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par un

e requête et un mémoire enregistrés le 20 juillet et le 15 octobre 2021, M. C..., représenté par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 9 juin 2020 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par un jugement n° 2012390 du 7 avril 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 juillet et le 15 octobre 2021, M. C..., représenté par Me Blanc, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2012390 du 7 avril 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 juin 2020 du préfet de police ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blanc de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L.761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 novembre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 21 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- et les observations de Me Blanc, pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., né le 15 octobre 1998 à Shegbwema (Sierra Leone), entré en France en 2015, a demandé le bénéfice de l'asile, qui lui a été refusé par décision du 30 septembre 2019 du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 septembre 2018. Il a fait l'objet de deux obligations de quitter le territoire français prises par le préfet de l'Essonne le 14 novembre 2018 et le 18 février 2019, qui ont été annulées par le tribunal administratif de Versailles. Par un arrêté du 9 juin 2020, le préfet de police a refusé à M. C... la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai. M. C... relève appel du jugement du 7 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré en France en décembre 2015, alors âgé de dix-sept ans selon ses déclarations. Après avoir vécu à la rue quelques mois, il a été pris en charge par des structures associatives. Depuis juillet 2017, il est hébergé à titre gratuit chez M. E... et Mme D..., qui produisent en ce sens une attestation en date du 11 mars 2019, dans laquelle ils déclarent par ailleurs considérer M. C... comme leur fils et avoir un projet d'adoption. Plusieurs témoignages de voisins et de membres de la famille de M. E... et Mme D... et de deux responsables du secours populaire, auprès duquel M. B... est bénévole depuis avril 2016, attestent de l'intensité des liens tissés par le requérant sur le territoire français. Après une année en capacité de droit à l'université de Nanterre, pour l'année universitaire 2017/2018, qu'il n'a pas validée, M. B... poursuit depuis 2019 une formation pour l'obtention d'un CAP de boulangerie, dans laquelle il donne entière satisfaction, ainsi qu'en atteste notamment la cheffe du rayon boulangerie pâtisserie et la gestionnaire des ressources humaines du magasin Carrefour dans lequel il travaille en alternance. Ainsi, M. C... démontre une volonté manifeste de s'insérer socialement en France et d'y mener à bien des études ainsi qu'une formation professionnelle lui assurant un emploi, dans un secteur en tension. Il fait par ailleurs valoir que sa mère est décédée et qu'il n'a plus de contacts avec son père avec lequel il était en conflit. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, et eu égard en particulier aux relations que M. C... entretient avec M. E... et Mme D..., dont le projet d'adoption apparaît comme étant sérieux alors même qu'à la date de la décision attaquée, il n'était pas encore engagé, le préfet de police, en rejetant la demande de titre de séjour de M. C..., a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juin 2020 du préfet de police.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

4. Le présent arrêt implique nécessairement qu'un titre de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " soit délivré à M. C.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder à cette délivrance, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blanc de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L.761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2012390 du 7 avril 2021 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 9 juin 2020 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de délivrer à M. C... un titre de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Blanc la somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Cécile Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2022.

La rapporteure,

C. F...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04111 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 13/07/2022
Date de l'import : 26/07/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21PA04111
Numéro NOR : CETATEXT000046060876 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-13;21pa04111 ?
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