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30/06/2022 | FRANCE | N°21PA02437

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 30 juin 2022, 21PA02437


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 août 2019 D... lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

D... jugement n° 2009039/6-3 du 21 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

D... une requête et un mémoire

enregistrés les 5 mai et 7 juillet 2021, Mme A..., représentée D... Me Blanc, demande à la Cour :
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 août 2019 D... lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement.

D... jugement n° 2009039/6-3 du 21 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

D... une requête et un mémoire enregistrés les 5 mai et 7 juillet 2021, Mme A..., représentée D... Me Blanc, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2009039/6-3 du 21 janvier 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 août 2019 D... lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros D... jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros D... jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil Me Blanc de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- elle est fondée sur un avis médical rendu D... le collège de médecins de l'OFII irrégulier ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle en ne lui accordant pas un délai supérieur à trente jours.

D... un mémoire en défense enregistré le 1er octobre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés D... Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale D... une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 18 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante sénégalaise née le 14 juillet 1952, est entrée en France le 7 février 2015. Elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D... arrêté du 21 août 2019, le préfet de police a refusé de renouveler le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. Mme A... relève appel du jugement n°2009039/6-3 du 21 janvier 2021 D... lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, si Mme A... a soutenu dans sa requête introductive d'instance que la décision contestée était illégale en raison de l'illégalité de l'avis médical rendu D... le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), ce moyen n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Ainsi, à supposer même que Mme A... puisse être regardée comme y ayant renoncé, ce moyen ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 425-9 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise D... l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies D... décret en Conseil d'État (...) ".

4. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un ressortissant étranger qui se prévaut des dispositions précitées de vérifier, au vu de l'avis émis D... le collège de médecins de l'OFII, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays d'origine. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

5. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser de renouveler le titre de séjour de Mme A..., le préfet de police s'est notamment fondé sur l'avis du 19 novembre 2018 du collège de médecins de l'OFII qui précise que si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié au Sénégal, son pays d'origine. Si Mme A..., qui est atteinte d'une anémie hémolytique, soutient qu'elle bénéfice en France d'un traitement à base de Lansoprazole, pour lequel elle ne produit qu'une ordonnance médicale postérieure à la date de l'arrêté contesté et verse au dossier un courrier du laboratoire " Biogaran " affirmant ne pas exporter cette spécialité au Sénégal, il ressort également des pièces du dossier qu'un traitement alternatif à base d'Oméoprazole, un inhibiteur de la pompe à protons tout comme le Lansoprazole, est disponible dans son pays d'origine, cette spécialité figurant sur la liste nationale des médicaments essentiels au Sénégal. En outre, si Mme A... remet en cause la disponibilité et l'accessibilité effectives des médicaments et soins au Sénégal, en se fondant notamment sur un rapport stratégique de coopération de l'Organisation mondiale de la santé avec le Sénégal pour les années 2016-2018 ainsi que sur un mémoire de recherche publié en 2015, elle n'établit pas, D... la production de ces documents rédigés en termes généraux, qu'elle serait personnellement confrontée à des difficultés dans l'accès aux soins qui lui sont nécessaires ni notamment que sa fille ne pourrait pas continuer à subvenir à ses besoins au Sénégal. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce qu'en refusant de renouveler son titre de séjour pour raisons de santé, le préfet de police aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue D... la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Mme A... se prévaut de la présence en France de sa fille unique de nationalité française, qui l'héberge et subvient à ses besoins, ainsi que de ses petits-enfants et de l'état d'isolement dans lequel elle serait en cas de retour au Sénégal, pays dans lequel elle soutient ne plus avoir d'attaches. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la requérante est célibataire et sans charge de famille en France, pays dans lequel elle ne justifie pas d'une insertion particulière. En outre, les attestations rédigées D... sa fille et ses petits-enfants ne sont pas suffisamment circonstanciées pour établir la nécessité pour l'intéressée de demeurer à leurs côtés en France ni qu'elle serait dépourvue d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 63 ans. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police, en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité, aurait méconnu son droit au respect de la vie privée et familiale. D... suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, il ne résulte pas de ce qui précède que le préfet de police en prenant la décision attaquée aurait entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de Mme A....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

8. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

9. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 5 du présent arrêt, l'obligation de quitter le territoire français contestée qui a été opposée à Mme A... D... le préfet de police ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 du présent arrêt, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en faisant obligation à Mme A... de quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

11. En premier lieu, en dehors de l'hypothèse d'absence de délai de départ volontaire prévue au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de rejet d'une demande expresse d'un délai supérieur à trente jours, la décision fixant le délai de départ volontaire n'a pas le caractère d'une décision devant être motivée au sens de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. La requérante ne saurait ainsi utilement soutenir que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est insuffisamment motivée alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait sollicité le bénéfice d'un délai supérieur.

12. En second lieu, si Mme A... se prévaut de son état de santé et de la nécessité de mettre en place un programme de transition vers un nouveau protocole médical et une nouvelle équipe médicale, elle n'établit pas, D... ses allégations, l'existence de circonstances exceptionnelles qui justifieraient que lui soit accordé D... le préfet de police un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. D... suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, D... le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2019 D... lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une mesure d'éloignement. L'ensemble des conclusions à fin d'annulation, d'injonction sous astreinte et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du

10 juillet 1991 ne peuvent ainsi qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public D... mise à disposition au greffe le 30 juin 2022.

La rapporteure,

A. B... Le président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA02437 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Date de la décision : 30/06/2022
Date de l'import : 12/07/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21PA02437
Numéro NOR : CETATEXT000046018465 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-30;21pa02437 ?
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