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05/05/2022 | FRANCE | N°21PA01554

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 05 mai 2022, 21PA01554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 20 février 2019 par laquelle la ville de Paris a refusé de reconnaître le caractère professionnel de sa tendinopathie à l'épaule gauche, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1914597 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2021, et un mémoire enregistré le 18

mars 2022, qui n'a pas été communiqué, Mme A..., représentée par la SELAFA cabinet Cassel, avocat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 20 février 2019 par laquelle la ville de Paris a refusé de reconnaître le caractère professionnel de sa tendinopathie à l'épaule gauche, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1914597 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2021, et un mémoire enregistré le 18 mars 2022, qui n'a pas été communiqué, Mme A..., représentée par la SELAFA cabinet Cassel, avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1914597 du 4 février 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du 20 février 2019 de la ville de Paris, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ;

3°) en tant que de besoin, d'ordonner une expertise, par jugement avant-dire droit, aux fins pour l'expert de prendre connaissance de l'intégralité de son dossier médical, de se faire communiquer l'ensemble des rapports médicaux la concernant, d'entendre les praticiens qu'elle a consultés, de relater les constatations médicales faites à la suite des divers examens de santé consignés dans les documents, de l'examiner, de décrire et déterminer son état de santé, de déterminer si cet état de santé est en relation directe et certaine avec son activité professionnelle, de fixer son taux d'incapacité permanente, de procéder contradictoirement lors de sa mission et de dresser un rapport qui sera déposé dans les meilleurs délais ;

4°) d'enjoindre à la ville de Paris de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie ou à tout le moins de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de la ville de Paris le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- sa pathologie à l'épaule gauche aurait dû être présumée imputable au service ;

- il existe en tout état de cause un lien direct entre cette pathologie et l'exercice de ses fonctions.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2021, la ville de Paris représentée par la SELARL Centaure avocats conclut au rejet de la requête et ce que soit mis à la charge de Mme A... le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme A... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique,

- et les observations de Me Safatian, pour la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., titularisée en 2008, exerce les fonctions d'agent spécialisé des écoles maternelles. Le 29 septembre 2015, la ville de Paris a admis l'imputabilité au service de la tendinopathie à l'épaule droite relevant du tableau n° 57 A des maladies professionnelles présentée par Mme A.... En janvier 2018, Mme A... a présenté une nouvelle demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la ville de Paris pour la " tendinopathie non rompue non calcifiante " affectant son épaule gauche qui lui a été diagnostiquée à l'occasion d'une IRM. Par un avis du 17 janvier 2019, la commission de réforme s'est prononcée en défaveur de la reconnaissance du caractère professionnel de sa pathologie aux motifs, d'une part, qu'il n'y avait pas d'exposition au risque telle qu'elle est définie au tableau n° 57 A des maladies professionnelles et, d'autre part, qu'il s'agit d'une pathologie dégénérative non professionnelle déjà constatée en 2016. A la suite de cet avis, la ville de Paris a rejeté la demande de Mme A... par une décision 20 février 2019. Mme A... relève appel du jugement du 4 février 2021par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 février 201, ainsi que de la décision rejetant son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Hormis dans le cas où les juges de première instance ont méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à eux et ont ainsi entaché leur jugement d'irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, Mme A... ne peut, en tout état de cause, pas utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'erreurs de droit et d'erreur d'appréciation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée en vigueur au jour où la pathologie de l'intéressée a été diagnostiquée : " (...) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions ".

4. Au sein de l'annexe II du code de la sécurité sociale, le tableau de maladies professionnelles n° 57 vise les " Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail " et mentionne, dans sa partie A, " Epaule ", la " tendinopathie aiguë non rompue non calcifiante (...) ", la " tendinopathie chronique non rompue non calcifiante (...) objectivée par IRM " et la " rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM ". S'agissant des conditions d'exercice des tâches de nature à ouvrir droit au bénéfice de la présomption instituée par l'article L. 461-1 du même code, sont visés : " Les travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction ", c'est-à-dire " entraînant un décollement des bras par rapport au corps ", avec " un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins 3 heures 30 par jour en cumulé " s'agissant de la tendinopathie aiguë, et avec " un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé " ou " un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé " s'agissant de la tendinopathie chronique et de la rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs.

Sur la présomption d'imputabilité :

5. D'une part, Mme A... n'indique pas précisément celle des trois pathologies énumérées au tableau n° 57 de l'annexe II du code de la sécurité sociale à laquelle elle entend se référer, les différents documents médicaux qu'elle produit au dossier de l'instance étant, à cet égard, peu précis voire contradictoires. L'avis du médecin de prévention du 6 mars 2018 mentionne ainsi une " tendinopathie chronique du muscle supra épineux / fissure tendineuse transfixiante épaule gauche ", alors que le résultat de l'IRM du 2 janvier 2018 mentionne une " probable rupture non communicante du tendon du supra épineux " et une " tendinopathie infra-épineux , et le certificat du docteur B... du 28 mai 2019, une " rupture non transfixiante du sous épineux épaule gauche ", et que selon le certificat établi par le docteur C... le 11 octobre 2019, postérieurement à la décision attaquée, Mme A... " a présenté au cours des dix dernières années une atteinte de la coiffe des rotateurs de l'épaule initialement sous la forme d'une tendinopathie aigüe puis d'une tendinopathie chronique puis d'une rupture partielle de la coiffe des rotateurs, objectivées par IRM ".

6. D'autre part et en tout état de cause, la ville de Paris fait valoir en défense que le poste de travail de Mme A... a été aménagé en 2015, à la suite de la reconnaissance du caractère professionnel de la tendinopathie affectant son épaule droite. Cette affirmation est confirmée par le rapport du docteur F..., du service de la médecine statutaire, en date du 23 mai 2018, ainsi que par le document de suivi des aménagements établi par le chef de Pôle des ressources humaines de la circonscription des affaires scolaires et de la petite enfance (CASPE), dont il ressort que Mme A... a notamment été exemptée de l'usage du monobrosse, de la manutention d'objet de plus de 5 kilos, ainsi que des manipulations ou travaux nécessitant de lever les bras au-dessus des épaules. Si Mme A... conteste, en appel, cette affirmation, les éléments qu'elle apporte à l'appui de ses allégations, notamment le certificat médical établi par le docteur C... le 11 octobre 2019, selon lequel " malgré l'aménagement du poste de travail, les travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction n'ont pas complètement disparu (...) ", ne permettent pas de démontrer que même après cet aménagement, et alors qu'il est constant qu'elle est droitière, elle serait amenée à effectuer des travaux comportant des mouvements ou le maintien de son épaule gauche sans soutien en abduction dans les conditions et pendant les durées cumulées prévues par les dispositions précitées du tableau. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle remplissait les conditions pour que sa pathologie soit présumée imputable au service.

Sur le lien direct avec l'exercice des fonctions :

7. Si l'imputabilité au service d'une maladie peut être reconnue indépendamment des conditions fixées aux tableaux des maladies professionnelles, le fonctionnaire qui ne bénéficie pas de la présomption évoquée ci-dessus doit, pour obtenir une telle reconnaissance, établir que cette maladie est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions.

8. Pour justifier du lien direct entre sa pathologie et l'exercice de ses fonctions, Mme A... produit différents certificats médicaux de son rhumatologue, d'un médecin de la médecine préventive et du chirurgien ayant opéré son épaule droite en 2015, ainsi que d'un spécialiste de l'évaluation juridique des dommages corporels et du médecin qui la suit en consultation de pathologie professionnelle et de l'environnement à l'hôpital Fernand Widal. Toutefois, ces pièces se bornent à décrire la pathologie de Mme A... ou à déduire un lien avec l'exercice de ses fonctions du fait de la reconnaissance du caractère professionnel de sa pathologie affectant son épaule droite. Par ailleurs, elles ne remettent pas en cause l'appréciation de la commission de réforme selon laquelle il s'agit d'une pathologie dégénérative non professionnelle déjà constatée en 2016. Elles ne sauraient, à elles seules et compte tenu du rapport d'expertise du 23 mai 2018, suffire à établir que la pathologie de l'épaule gauche de Mme A... serait, au sens des dispositions précitées, directement imputable à l'exercice des fonctions de Mme A... ou à ses conditions de travail.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquences, celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme que la ville de Paris demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et à la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 31 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 mai 2022.

La rapporteure,

C. E...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA01554 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01554
Date de la décision : 05/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SELARL CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-05-05;21pa01554 ?
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