La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2021 | FRANCE | N°19PA03050

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 30 juin 2021, 19PA03050


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 3 mars 2017 par laquelle le ministre de la culture a rejeté sa demande du 25 janvier 2017 tendant :

- au retrait de l'arrêté du 13 juillet 2010 la nommant chargée de mission à l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2010, à ce qu'elle soit détachée dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter de cette même date, à la reconstitution de sa carrière en co

nséquence et à son intégration dans le corps de l'inspection générale des affaires cult...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 3 mars 2017 par laquelle le ministre de la culture a rejeté sa demande du 25 janvier 2017 tendant :

- au retrait de l'arrêté du 13 juillet 2010 la nommant chargée de mission à l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2010, à ce qu'elle soit détachée dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter de cette même date, à la reconstitution de sa carrière en conséquence et à son intégration dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2015 ;

- à titre subsidiaire, à son intégration directe, à compter du 1er juillet 2015, dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles.

Elle a en outre demandé au tribunal d'enjoindre au ministre de la culture, à titre principal, de la détacher dans ce corps à compter du 1er juillet 2010 et de mettre à la signature du Premier ministre le décret y prononçant son intégration à compter du 1er juillet 2015, à titre subsidiaire d'enjoindre au ministre de la culture de la détacher dans ce corps à compter du 1er juillet 2012 et de mettre à la signature du Premier ministre le décret y prononçant son intégration à compter du 1er juillet 2017. À titre infiniment subsidiaire, elle a demandé au tribunal d'enjoindre au ministre de la culture de réexaminer sa demande et de la placer dans une situation régulière.

Par un jugement n° 1708321/5-1 du 25 juillet 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et cinq mémoires enregistrés les 26 septembre 2019, 27 septembre 2019, 30 janvier 2021, 1er mars 2021, 19 mai 2021 et 8 juin 2021, Mme C..., représentée par la SCP Foussard-A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à ses demandes de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont procédé d'office à une substitution de motifs non sollicitée par le ministre de la culture et ce, sans en informer les parties, en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il ne répond pas à tous les moyens opérants soulevés en première instance ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le corps de l'inspection générale des affaires culturelles n'était pas comparable à celui des administrateurs civils, et en a déduit qu'elle ne pouvait être détachée dans le premier ; en application des dispositions de l'article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983, cette comparaison doit s'effectuer, alternativement, au regard des conditions de recrutement ou au regard de la nature des missions ;

- les missions des inspecteurs généraux des affaires culturelles et des administrateurs civils, au regard des statuts particuliers de ces corps, sont de niveau comparable ;

- le détachement des administrateurs civils dans les corps de l'inspection générale des finances et dans le corps de l'inspection générale des affaires sociales, corps analogues à celui de l'inspection générale des affaires culturelles, est prévu par le statut particulier des deux premiers ;

- le ministre de la culture ne peut opposer, à titre subsidiaire, l'intérêt du service à sa demande de détachement ; les dispositions de l'article 14 bis de la loi du 13 juillet 1983 prévoient en effet qu'un tel refus ne peut être fondé que sur les nécessités du service ou un avis rendu par la commission de déontologie ; en tout état de cause, aucun texte ne prévoit de plafond d'emplois par corps, de telle sorte que le contingentement du corps d'accueil ne peut lui être opposé ; elle remplissait par ailleurs les conditions pour être nommée dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles au mois de février 2014, ayant atteint le septième échelon du grade d'administrateur civil hors classe, si bien que son détachement ne saurait porter atteinte au droit d'autres agents remplissant les conditions pour être nommés ; enfin, son expérience et ses capacités professionnelles à la date de la décision attaquée justifiaient, dans l'intérêt du service, son détachement dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles ;

- les dispositions de l'article 4 du décret du 19 mai 2003 portant statut du corps de l'inspection générale des affaires culturelles, relatives aux conditions de nomination dans ce corps, ne peuvent lui être opposées, dès lors qu'elles méconnaissent les dispositions de l'article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983 issues de la loi du 3 août 2009 ; ces dernières dispositions excluent en effet que soit pris en compte, pour refuser un détachement, des limitations tenant à la grille indiciaire des corps et cadres d'emplois concernés ou à la référence à un indice brut sommital ;

- elle est fondée à solliciter une mesure de détachement rétroactive dès lors que sa nomination en qualité de chargée de mission à l'inspection générale des affaires culturelles pour une durée de deux ans, par arrêté du 13 juillet 2010, l'a placée dans une situation irrégulière.

Par trois mémoires enregistrés les 13 mars 2020, 16 février 2021 et 7 juin 2021, le ministre de la culture conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il a sollicité, en première instance, une substitution de motifs portant, d'une part, sur la différence de niveau entre les missions des inspecteurs généraux des affaires culturelles et celles des administrateurs civils, et, d'autre part, sur l'intérêt du service ; à titre subsidiaire, il sollicite cette substitution de motifs dans le cadre de l'instance en appel ;

- le jugement n'est pas irrégulier, dès lors que les moyens auxquels il ne répond pas sont devenus inopérants du fait de la substitution de motifs à laquelle ont procédé les premiers juges ;

- le corps de l'inspection générale des affaires culturelles et celui des administrateurs civils ne sont pas comparables, les missions confiées, les conditions de recrutement et les niveaux de rémunération étant substantiellement différents ;

- il était fondé, dans l'intérêt du service, à refuser la demande de détachement rétroactif formée par Mme C..., au regard notamment de son parcours professionnel et de ses évaluations.

Par courrier du 25 mai 2021, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que les premiers juges ont à tort, en méconnaissance du champ d'application de la loi, estimé que les motifs par lesquels le ministre de la culture a justifié la décision du 3 mars 2017 étaient entachés d'erreur de droit au regard de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration, qui n'était pas applicable ; une mesure de détachement dans un autre corps ne saurait en effet, en vertu du principe de distinction du grade et de l'emploi, être regardée comme une décision susceptible d'être substituée à une affectation sur un emploi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 99-945 du 16 novembre 1999 ;

- le décret n° 2003-446 du 19 mai 2003 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... a été nommée à compter du 1er avril 1997, à l'issue de sa scolarité à l'École nationale d'administration, dans le corps des administrateurs civils. Elle a d'abord été affectée au ministère de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme, puis au ministère de la culture et de la communication à compter du 1er juin 2001. Elle a effectué une mobilité statutaire au Conseil d'État entre avril 2005 et mars 2008, puis a été réintégrée au ministère de la culture à compter du 1er avril 2008, dans le corps des administrateurs civils.

2. Par un arrêté du 13 juillet 2010, le ministre de la culture et de la communication a nommé Mme C... sur l'emploi de chargée de mission à l'inspection générale des affaires culturelles, pour une durée de deux ans, à compter du 1er juillet 2010. Par courrier du 25 janvier 2017, la requérante a demandé au ministre de la culture de retirer cet arrêté du 13 juillet 2010, de la détacher dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2010, de reconstituer sa carrière en conséquence et de procéder à son intégration dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2015 ; à titre subsidiaire, elle a sollicité son intégration directe dans ce corps à compter du 1er juillet 2015. Par une décision du 3 mars 2017, le ministre de la culture et de la communication a rejeté sa demande.

3. Mme C... relève appel du jugement du 25 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 mars 2017, à ce qu'il soit enjoint au ministre de la culture, à titre principal, de la détacher dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2010 et de mettre à la signature du Premier ministre le décret y prononçant son intégration à compter du 1er juillet 2015, ou à titre subsidiaire, de la détacher dans ce corps à compter du 1er juillet 2012 et de mettre à la signature du Premier ministre le décret y prononçant son intégration à compter du 1er juillet 2017, ou à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa demande et de la placer dans une situation régulière.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. D'une part, Mme C... soutient que les premiers juges ont, pour écarter l'illégalité de la décision du 3 mars 2017, procédé d'office à une substitution de motifs non sollicitée par le ministre de la culture et sans en informer les parties, en méconnaissance du principe du contradictoire. Il ressort toutefois des écritures de première instance du ministre de la culture, qui avait demandé une substitution de motifs, que celui-ci a opposé à la demande de détachement de l'intéressée la circonstance que les corps des administrateurs civils et de l'inspection générale des affaires culturelles n'étaient pas comparables, motif retenu par le tribunal pour rejeter la demande. Ainsi, et alors même que ce motif a été articulé par le ministre dans le cadre de sa réponse aux conclusions à fin d'injonction de Mme C..., lesquelles avaient le même objet que sa demande du 25 janvier 2017, les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire.

5. D'autre part, Mme C... soutient que le tribunal a omis de répondre à certains des moyens qu'elle a soulevés en première instance, tirés de l'illégalité de l'arrêté du 13 juillet 2010 et des conditions générales de recrutement des chargés de missions, ainsi que de la situation de " vide juridique " dans laquelle elle se serait trouvée depuis le mois de juillet 2012. Toutefois, le motif retenu par les premiers juges impliquant à lui seul le rejet de la demande de l'intéressée, ces moyens étaient inopérants. Par suite, ils n'étaient pas tenus d'y répondre.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision du 3 mars 2017 :

S'agissant de la décision du 3 mars 2017 en tant qu'elle rejette la demande de retrait de l'arrêté du 13 juillet 2010 et la demande de détachement rétroactif :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Sur demande du bénéficiaire de la décision, l'administration peut, selon le cas et sans condition de délai, abroger ou retirer une décision créatrice de droits, même légale, si son retrait ou son abrogation n'est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers et s'il s'agit de la remplacer par une décision plus favorable au bénéficiaire ".

8. Par ailleurs, aux termes de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Le grade est distinct de l'emploi. / Le grade est le titre qui confère à son titulaire vocation à occuper l'un des emplois qui lui correspondent. (...) ".

9. Enfin, aux termes de l'article 3 du décret du 1er août 2003 portant organisation de l'inspection générale des affaires culturelles : " L'inspection générale de l'administration des affaires culturelles est composée des membres du corps régi par les dispositions du décret du

19 mai 2003 susvisé. / Elle peut s'adjoindre des chargés de mission choisis parmi les membres des corps et emplois classés en catégorie A dont les statuts prévoient des missions d'inspection, de conception ou d'administration ou parmi les membres des corps exerçant une mission juridictionnelle ou scientifique. Les chargés de mission peuvent également être choisis parmi des agents non titulaires de droit public d'un niveau équivalent à la catégorie A. / Les chargés de mission sont nommés sur proposition du chef du service de l'inspection générale des affaires culturelles par arrêté du ministre chargé de la culture pour une durée de deux ans renouvelable. Ils concourent aux travaux de l'inspection générale des affaires culturelles sous l'autorité exclusive du chef du service. Ils disposent dans l'exercice de leurs fonctions des mêmes pouvoirs et sont soumis aux mêmes obligations que les membres de l'inspection générale des affaires culturelles. (...) ".

10. Il résulte des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1983 qu'une mesure de détachement dans un corps de la fonction publique ne saurait être regardée comme susceptible de remplacer, en application de de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration, une décision légale ou illégale nommant un agent sur un emploi, cette dernière étant une simple mesure d'affectation, lorsqu'il ne s'agit pas d'un emploi fonctionnel. Or, Mme C..., qui relève du corps des administrateurs civils, a demandé par courrier du 25 janvier 2017 la substitution de la décision du 13 juillet 2010 la nommant sur un emploi de chargé de mission, qui ne constitue par un corps de la fonction publique, par une mesure de détachement dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles. Par suite, et sans qu'ait donc d'incidence le caractère " plus favorable " ou non d'un détachement au regard d'une nomination sur un emploi, le ministre de la culture n'a pas entaché sa décision du 3 mars 2017 d'erreur de droit en refusant de faire droit à sa demande sur le fondement des dispositions de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration, lesquelles n'étaient pas applicables.

11. En deuxième lieu, une décision administrative ne saurait revêtir une portée rétroactive en dehors des cas dans lesquels l'administration est légalement tenue de régulariser la situation administrative d'un agent, afin notamment de tirer les conséquences d'une annulation contentieuse ou du retrait d'un acte, ou pour mettre fin à la situation irrégulière d'un agent. Pour refuser de faire droit aux demandes de Mme C..., le ministre de la culture a fait valoir, dans sa décision du 3 mars 2017, qu'elle ne se trouvait pas dans une situation irrégulière justifiant qu'il soit dérogé au principe général de non-rétroactivité des actes administratifs. Il ressort des pièces du dossier que si l'intéressée a été nommée chargée de mission à l'inspection générale des affaires culturelles pour une durée de deux ans à compter du 1er juillet 2010, cette affectation a été tacitement mais nécessairement renouvelée, comme le permettent les dispositions précitées de l'article 3 du décret du 1er août 2003, dès lors qu'il est constant qu'elle a continué d'exercer, au-delà du 1er juillet 2012, les fonctions de chargée de mission. Elle était ainsi, dans le corps des administrateurs civils, affectée sur un emploi, placée en position régulière d'activité. Mme C... n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle se serait trouvée, à compter du 1er juillet 2010 ou à compter du 1er juillet 2012, dans une position irrégulière justifiant que soit nécessairement prise une mesure rétroactive de détachement dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles.

12. En dernier lieu et en tout état de cause, à supposer même qu'une mesure de détachement, qu'elle soit ou non plus favorable à l'intéressée, puisse être regardée comme susceptible d'être substituée à une affectation sur un emploi en application de l'article L. 242-4 du code des relations entre le public et l'administration, l'article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction applicable au 1er juillet 2010, dispose que : " Tous les corps et cadres d'emplois sont accessibles aux fonctionnaires civils régis par le présent titre par la voie du détachement suivi, le cas échéant, d'une intégration, ou par la voie de l'intégration directe, nonobstant l'absence de disposition ou toute disposition contraire prévue par leurs statuts particuliers. / Le détachement ou l'intégration directe s'effectue entre corps et cadres d'emplois appartenant à la même catégorie et de niveau comparable, apprécié au regard des conditions de recrutement ou de la nature des missions. Lorsque le corps d'origine ou le corps d'accueil ne relève pas d'une catégorie, le détachement ou l'intégration directe s'effectue entre corps et cadres d'emplois de niveau comparable. ".

13. Or, il résulte, d'une part, des dispositions du décret du 16 novembre 1999 portant statut particulier du corps des administrateurs civils que ces derniers " sont recrutés parmi les anciens élèves de l'Ecole nationale d'administration ; ils sont nommés et titularisés en cette qualité à compter du lendemain du dernier jour de leur scolarité à l'école ", tandis que les inspecteurs généraux des affaires culturelles sont, en vertu de l'article 4 du décret précité du 19 mai 2003, recrutés parmi les hauts-fonctionnaires occupant un emploi fonctionnel à haute responsabilité ou ayant déjà atteint un des grades les plus élevés de leur corps. La circonstance que l'article 4 du décret du 19 mai 2003 se réfère, pour préciser le niveau de responsabilité devant être atteint par les chefs de service, directeurs adjoints et sous-directeurs d'administration centrale, directeurs régionaux des affaires culturelles et fonctionnaires occupant un emploi fonctionnel, à la grille indiciaire applicable à ces emplois fonctionnels, alors que l'article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983 exclut toute limitation au détachement ou à l'intégration autre que la catégorie ou le niveau comparable des missions, ne saurait entacher d'illégalité les dispositions de cet article, qui ont pour objet de déterminer des conditions de recrutement en fonction, principalement, du grade, donc du niveau atteint par les agents. Enfin, Mme C... ne peut utilement se prévaloir des statuts particuliers régissant les corps de l'inspection générale des affaires sociales et de l'inspection générale des finances, qui ne sauraient être assimilés au corps de l'inspection générale des affaires culturelles dès lors qu'ils prévoient, comme c'est le cas pour le corps des administrateurs civils, un recrutement à l'issue de la scolarité à l'École nationale d'administration, et qu'ils comportent différents grades, le premier étant le grade d'inspecteur, tandis que le statut du corps de l'inspection générale des affaires culturelles prévoit en son article 2 un grade unique d'inspecteur général.

14. D'autre part, s'agissant de la nature des missions exercées, il résulte des dispositions de l'article 1er du décret du 16 novembre 1999 portant statut particulier du corps des administrateurs civils, dans sa rédaction en vigueur du 5 juin 2010 au 6 août 2015, que ces derniers exercent des fonctions supérieures d'encadrement, de direction, d'expertise ou de contrôle dans les administrations de l'État, les services administratifs d'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif ainsi que dans les établissements publics administratifs de l'État, sous l'autorité des responsables de ces administrations, juridictions et établissements, ainsi que des fonctions de conception, de mise en œuvre et d'évaluation des politiques publiques, en assurant notamment l'encadrement, l'animation et la coordination des services. Les inspecteurs généraux des affaires culturelles, selon l'article 1er du décret précité du 19 mai 2003, sont quant à eux chargés, sous l'autorité directe du ministre, d'une mission générale de contrôle, d'audit, d'étude, de conseil et d'évaluation à l'égard des services centraux et déconcentrés, des établissements publics relevant du ministère de la culture et de la communication et de tous organismes relevant ou bénéficiant d'un concours de celui-ci. Ainsi, si les administrateurs civils peuvent être amenés à exercer des fonctions de contrôle, il ne résulte pas de la comparaison de ces statuts que les membres des deux corps conduiraient de telles missions de contrôle dans des conditions comparables, s'agissant tant de leur positionnement hiérarchique, du périmètre d'intervention des contrôles et de la place qu'occupent lesdites missions dans l'ensemble des fonctions qui peuvent leur être attribuées. Les autres missions, opérationnelles, normalement dévolues aux administrateurs civils, ne sont quant à elles pas assimilables à celles exercées par les inspecteurs généraux des affaires culturelles, qui relèvent des domaines non opérationnels de l'étude, du conseil et de l'évaluation.

15. Il résulte de ce qui vient d'être dit que les corps des administrateurs civils et de l'inspection générale des affaires culturelles, s'ils relèvent de la même catégorie A de la fonction publique, ne peuvent être regardés comme étant de niveau comparable, apprécié au regard de leurs conditions de recrutement ou de la nature des missions, au sens des dispositions de l'article 13 bis de la loi du 13 juillet 1983.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 mars 2017 en tant qu'elle rejette sa demande de retrait de l'arrêté du 13 juillet 2010 et sa demande de détachement rétroactif.

S'agissant de la décision du 3 mars 2017 en tant qu'elle rejette la demande d'intégration directe dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles à compter du 1er juillet 2015 :

17. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 11 à 15 du présent arrêt, Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 mars 2017 en tant qu'elle rejette sa demande d'intégration directe dans le corps de l'inspection générale des affaires culturelles, à titre rétroactif, à compter du 1er juillet 2015.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

18. Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme C... devaient être rejetées. Par suite, elle n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... et au ministre de la culture.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président,

- Mme Marie-Dominique Jayer, premier conseiller,

- Mme Gaëlle B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2021.

Le rapporteur,

G. B...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de la culture, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

9

N° 19PA03050


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03050
Date de la décision : 30/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Détachement et mise hors cadre. - Détachement.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SCP FOUSSARD-FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-30;19pa03050 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award