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04/06/2021 | FRANCE | N°19PA00811

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 04 juin 2021, 19PA00811


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... J... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2017 par lequel le préfet de police l'a placé d'office en congé de maladie ordinaire à titre conservatoire pour une durée d'un mois à compter du 18 octobre 2017.

Par un jugement n° 1719091/5-2 du 20 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 février 2019, M. J..., représenté par la SELAFA Cabinet

Cassel, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enj...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... J... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2017 par lequel le préfet de police l'a placé d'office en congé de maladie ordinaire à titre conservatoire pour une durée d'un mois à compter du 18 octobre 2017.

Par un jugement n° 1719091/5-2 du 20 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 février 2019, M. J..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de le réintégrer dans ses fonctions à compter du 18 octobre 2017 ou, à défaut, de réexaminer son dossier dans le sens de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de cet arrêt ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'incompétence de son auteur dès lors que le préfet de police n'a pas démontré que M. I... et M. G... auraient été absents ou empêchés et, à supposer cette condition remplie, que M. E..., qui aurait dû être le signataire de la décision attaquée au regard de son objet, ait été à son tour absent ou empêché ;

- l'arrêté est entaché d'un premier vice de procédure dès lors que le préfet de police a mis en oeuvre la procédure prévue à l'article 24 du décret du 30 juillet 1987 en l'absence de tout rapport du médecin du service de médecine préventive ;

- la lettre du médecin-chef adjoint du service de médecine statutaire et de contrôle du 25 août 2017, demandant au médecin agréé un avis le concernant, comporte des informations erronées en ce qu'il n'a jamais été " suivi " pour des troubles du comportement et n'est fondée sur aucun élément médical ;

- la consultation chez le docteur G., médecin agréé spécialiste, lui a été oralement présentée trompeusement comme une visite relevant de la médecine de prévention, sans quoi il n'aurait pas accepté de s'y conformer ;

- l'arrêté est entaché d'un second vice de procédure en ce que ni le rapport du médecin de prévention, au demeurant inexistant, ni le rapport du médecin agréé ne lui ont été communiqués avant que ne soit pris l'arrêté attaqué ;

- le rapport du docteur G. ne mentionne pas qu'il serait inapte à son emploi et dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions pour une période d'un mois ;

- ni la note du chef du service des affaires juridiques et du contentieux du 16 août 2017 ni l'avis du médecin-chef en date du 11 octobre 2017, ce dernier n'ayant au demeurant pas été produit par le préfet de police, ne permettent d'établir qu'il aurait été atteint d'une maladie dûment constatée le mettant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions ;

- l'avis du docteur D., psychiatre, en date du 29 novembre 2017, confirme qu'il n'était pas dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions ;

- le docteur M., dans ses comptes-rendus des 26 avril 2018 et 27 septembre 2018, a confirmé qu'il n'était pas atteint d'une pathologie invalidante ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par communication des 16 février 2021 et 19 février 2021, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.

Une lettre d'observations en réponse au moyen relevé d'office a été enregistrée le 17 février 2021 pour M. J....

Une lettre d'observations en réponse au moyen relevé d'office a été enregistrée le 22 février 2021 pour la ville de Paris.

Un mémoire présenté sans ministère d'avocat par M. J... a été enregistré le 20 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée,

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984,

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987,

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994,

- le code de justice administrative.

Vu la note en délibéré présentée par M. J... sans ministère d'avocat, enregistrée le 31 mai 2021.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de M. J....

Considérant ce qui suit :

1. M. J..., secrétaire administratif des administrations parisiennes de classe normale, a exercé, depuis le 1er février 1999, les fonctions de rédacteur au sein du service des affaires juridiques et du contentieux de la préfecture de police qu'il a intégrée en 1990. Par lettre du 21 juillet 2017, adressée au chef du service précité, M. J... a expliqué les raisons de son refus de se conformer à l'examen médical périodique d'information et de prévention organisé au profit de tous les agents et pour lequel il avait été convoqué. A la suite de cette lettre, par une note en date du 16 août 2017 adressée au directeur des ressources humaines de la préfecture de police, le chef du service des affaires juridiques et du contentieux a alerté ce dernier du comportement fortement dégradé de M. J..., en sus de l'absence totale de service fait, révélant des signes de souffrance de l'agent. En considération de cette note, le médecin-chef adjoint du service de médecine statutaire et de contrôle de la préfecture de police a saisi le docteur G., psychiatre agréé, par lettre du 25 aout 2017, afin que ce dernier émette un avis concernant M. J.... A la suite des conclusions du rapport du docteur G., en date du 12 septembre 2017, le médecin-chef de la préfecture de police a émis un avis, en date du 11 octobre 2017, mentionnant que M. J... était susceptible de bénéficier d'un placement en congé de longue maladie " dès que possible ". Par une décision du 16 octobre 2017, le préfet de police a placé d'office M. J... en congé de maladie ordinaire, à titre conservatoire, pour une durée d'un mois, dans l'attente que le comité médical statue sur le placement de celui-ci en congé de longue maladie d'office. M. J... relève appel du jugement du 20 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, par un arrêté n° 2017-00955 en date du 22 septembre 2017, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 29 septembre 2017, le préfet de police a donné délégation à M. H... K..., administrateur général et sous-directeur des personnels, pour signer tous actes, arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent l'édiction de mesures de placement d'office en congé de maladie à titre conservatoire des agents, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées. En outre, la circonstance que la décision attaquée aurait relevé davantage des attributions de M. D... E..., médecin-chef, chef du service de la médecine statutaire et de contrôle, à qui le préfet de police a également donné délégation de signature, que de celles de M. K..., à la supposer établie, est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de cette décision. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté comme manquant en fait.

3. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée ". Aux termes de l'article 14 du décret du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Sous réserve des dispositions de l'article 17 ci-dessous, en cas de maladie dûment constatée et mettant le fonctionnaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé de maladie ". Aux termes de l'article 24 du même décret : " Lorsque l'autorité territoriale estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs d'un fonctionnaire, que celui-ci se trouve dans la situation prévue à l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée, elle peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 25 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive attaché à la collectivité ou établissement dont relève le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier ".

4. Les dispositions de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987 susvisées ne subordonnent pas la mise en congé de maladie à une demande du fonctionnaire et ne sauraient donc par elles-mêmes faire obstacle à ce qu'un fonctionnaire soit placé d'office dans cette position dès lors que sa maladie a été dûment constatée et qu'elle le met dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Ainsi, lorsque l'administration a engagé une procédure de mise en congé de longue maladie conformément à ces dispositions, elle peut, à titre conservatoire et dans l'attente de l'avis du comité médical sur la mise en congé de longue maladie, placer d'office l'agent concerné en congé lorsque sa maladie a été dûment constatée et le met dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions.

5. En second lieu et ainsi qu'il a été dit au point 1, M. J... a refusé de se présenter à la visite médicale périodique organisée par le service de médecine préventive de la préfecture de police à laquelle il avait été convoqué à la date du 13 juillet 2017. Ce faisant, il n'a pas mis en mesure le médecin du service de médecine préventive d'établir un rapport le concernant. Par suite, M. J... ne saurait opposer au préfet de police l'absence au dossier d'un tel rapport, prévu par les dispositions de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, le moyen tiré du vice de procédure constitué par l'absence au dossier de M. J... d'un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive doit être écarté.

6. En troisième lieu, les dispositions susvisées de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987 n'imposent pas que l'autorité territoriale qui provoque l'examen médical de l'agent dont elle estime qu'il se trouve dans la situation prévue à l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 se fonde nécessairement sur des éléments médicaux, le rapport d'un supérieur du fonctionnaire étant suffisant à cet égard. Si, ainsi que le prévoient ces mêmes dispositions, un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive attaché à la collectivité ou établissement dont relève le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier, ce rapport n'a pu, ainsi qu'il a été dit au point 5, être établi du fait même de M. J.... Par suite, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que le médecin-chef adjoint du service de médecine statutaire et de contrôle aurait irrégulièrement saisi le médecin agréé du fait de l'absence d'éléments médicaux fondant cette saisine. En outre, alors que la lettre du 25 août 2017 adressée par le médecin-chef adjoint du service de médecine statutaire et de contrôle au médecin agréé mentionne que M. J... était suivi de longue date pour des troubles du comportement, la circonstance qu'aucun document concernant de tels troubles n'aurait été porté à la connaissance de l'intéressé avant le 16 octobre 2017, à la supposer même établie, n'est en tout état de cause pas de nature à établir que celui-ci n'aurait pas fait l'objet d'un tel suivi. A cet égard, il résulte notamment de la note du chef du service des affaires juridiques et du contentieux du 16 août 2017, mentionnée au point 1, que dès le début de son parcours professionnel à la préfecture de police, en 1991, puis de manière récurrente jusqu'en 2017, M. J... a présenté des troubles du comportement qui ont été identifiés par ses différents chefs de service, ainsi qu'en attestent les nombreux extraits produits d'appréciations littérales accompagnant ses notations, en sus de difficultés d'adaptation et d'investissement dans le travail ainsi que d'importantes difficultés relationnelles tant avec ses collègues qu'avec sa hiérarchie. Enfin, les allégations de M. J... selon lesquelles la consultation chez le docteur G., médecin agréé, lui aurait été trompeusement présentée comme une visite relevant de la médecine de prévention ne sont pas établies, dès lors notamment qu'il ressort clairement de la convocation du 28 août 2017 de M. J... à cette consultation qu'elle émanait du service de la médecine statutaire et de contrôle.

7. En quatrième lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou règlementaire, notamment issue de celles mentionnées au point 3, que le préfet de police aurait été tenu, avant de placer d'office M. J... en congé de longue maladie à titre conservatoire pour une durée d'un mois, de lui communiquer, d'une part, le rapport du médecin de prévention, inexistant du fait même de l'agent ainsi qu'il a été dit, d'autre part, le rapport du médecin agréé sur lequel s'est fondé par la suite le comité médical et, enfin, l'avis du médecin-chef de la préfecture de police du 11 octobre 2017 qui mentionne que M. J... était susceptible de bénéficier d'un placement en congé de longue maladie " dès que possible ". Par suite, ce moyen tiré du vice de procédure doit être également écarté.

8. Enfin, il ressort des conclusions du rapport du docteur G. du 12 septembre 2017 que, contrairement à ce que soutient le requérant, son état de santé justifiait sa mise en congé de maladie pour une durée d'un mois. La circonstance que la décision attaquée ne vise pas ce rapport est sans incidence sur sa légalité dès lors qu'elle vise l'avis du médecin-chef du 11 octobre 2017 précité. Ni le certificat du docteur D. du 29 novembre 2017, au demeurant postérieur à la date de la décision attaquée, ni les comptes-rendus du docteur M. des 26 avril 2018 et 27 septembre 2018, ce dernier ayant été consulté dans le cadre de la demande de prolongation du congé de longue maladie de M. J..., ne sont de nature à remettre en cause les appréciations portées par le médecin agréé dans son rapport du 12 septembre 2017. Par suite, et dès lors que la préfecture de police avait engagé à l'encontre de M. J... une procédure de mise en congé de longue maladie conformément aux dispositions de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987, elle pouvait, à titre conservatoire et dans l'attente de l'avis du comité médical, placer légalement d'office le requérant en congé de maladie ordinaire dès lors que sa maladie avait été dûment constatée et le mettait dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. J... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. J... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... J..., au préfet de police et à la ville de Paris.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2021 à laquelle siégeaient :

- Mme B..., présidente de chambre,

- M. C..., premier conseiller,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2021.

Le rapporteur,

P. C...

La présidente,

M. B... La greffière,

A. BENZERGUA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 19PA00811


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00811
Date de la décision : 04/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-02 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Congés de longue maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : S.E.L.A.F.A. CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-04;19pa00811 ?
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