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19/02/2021 | FRANCE | N°20PA03767

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 19 février 2021, 20PA03767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... D... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite de rejet née du silence conservé par le préfet de la Seine-Saint-Denis sur sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 1905484 du 5 novembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du

Tribunal administratif de Montreuil du 5 novembre 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... D... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite de rejet née du silence conservé par le préfet de la Seine-Saint-Denis sur sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 1905484 du 5 novembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 5 novembre 2020 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... D... devant le Tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a accueilli la demande d'annulation de

Mme A... D..., alors que cette demande était irrecevable puisque dirigée contre une décision inexistante, Mme A... D... ne s'étant pas présentée en personne à la préfecture, et aucune décision implicite de rejet n'étant donc intervenue à la suite de son courrier en date du

29 novembre 2018 ;

- le silence conservé à la suite de ce courrier ne pouvait pas donner naissance à une décision de refus de titre de séjour soumise à l'obligation de motivation ;

- les moyens soulevés en première instance, tirés de violations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11, 6°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'étaient pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2021, Mme A... D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par le préfet de la Seine-Saint-Denis ne sont pas fondés ;

- la décision en litige méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11, 6°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les observations de Me C... pour Mme A... D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... D..., ressortissante tunisienne née le 12 décembre 1958 à Zaghouan (Tunisie) a, par un courrier daté du 29 novembre 2018, reçu le 11 décembre 2018, sollicité son admission au séjour auprès du préfet de la Seine-Saint-Denis. Le préfet de la Seine-Saint-Denis fait appel du jugement du 5 novembre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence conservé à la suite de ce courrier.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter, à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient. / Toutefois, le préfet peut prescrire que les demandes de titre de séjour soient déposées au commissariat de police ou, à défaut de commissariat, à la mairie de la résidence du requérant./ Le préfet peut également prescrire : / 1° Que les demandes de titre de séjour appartenant aux catégories qu'il détermine soient adressées par voie postale ; / 2° Que les demandes de cartes de séjour prévues aux articles L. 313-7 et L. 313-27 soient déposées auprès des établissements d'enseignement ayant souscrit à cet effet une convention avec l'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 311-12 du même code : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet ". Aux termes de l'article R. 311-12-1 de ce code : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois ". Il résulte de ces dispositions que, pour introduire valablement une demande de carte de séjour, il est nécessaire, sauf si l'une des exceptions est applicable, que les intéressés se présentent physiquement à la préfecture. A défaut de disposition expresse en sens contraire, une demande de titre de séjour présentée par un ressortissant étranger en méconnaissance de la règle de présentation personnelle du demandeur en préfecture fait naître, en cas de silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois, une décision implicite de rejet susceptible d'un recours pour excès de pouvoir. Le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est donc pas fondé à soutenir que la demande d'annulation présentée par Mme A... D... devant le tribunal administratif était dirigée contre une décision inexistante, Mme A... D... ne s'étant pas présentée en personne à la préfecture.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 232-4 de ce code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier daté du 20 mai 2019, reçu le

22 mai 2019, Mme A... D... a demandé la communication des motifs de la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour. Le préfet ne conteste pas ne pas avoir répondu à cette demande. Il n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision implicite en litige comme entachée d'un défaut de motivation.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... D... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A... D... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme F... A... D....

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 4 février 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. E..., président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 février 2021.

Le rapporteur,

J-C. E...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

T. ROBERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03767


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SELARL LEVY AVOCAT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Date de la décision : 19/02/2021
Date de l'import : 03/03/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20PA03767
Numéro NOR : CETATEXT000043172179 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-19;20pa03767 ?
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