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10/12/2020 | FRANCE | N°19PA02722

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 10 décembre 2020, 19PA02722


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Loisirs associés a demandé au tribunal administratif de Paris :

- d'annuler la décision du 3 juillet 2017 par laquelle le maire de Paris a décidé de ne pas renouveler la convention d'occupation du domaine public dont elle était titulaire du 12 octobre 2015 jusqu'au 12 octobre 2021.

- d'accueillir la demande de contestation de validité de certaines dispositions du chapitre 6 de la convention, de juger nulles les stipulations " deux ans renouvelables deux fois " et de remplacer ces

stipulations par " six ans ", cette durée correspondant à l'amortissement de ses in...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Loisirs associés a demandé au tribunal administratif de Paris :

- d'annuler la décision du 3 juillet 2017 par laquelle le maire de Paris a décidé de ne pas renouveler la convention d'occupation du domaine public dont elle était titulaire du 12 octobre 2015 jusqu'au 12 octobre 2021.

- d'accueillir la demande de contestation de validité de certaines dispositions du chapitre 6 de la convention, de juger nulles les stipulations " deux ans renouvelables deux fois " et de remplacer ces stipulations par " six ans ", cette durée correspondant à l'amortissement de ses investissements et prenant en compte une rémunération équitable et suffisante des loyers investis, de sorte que la stipulation se lise comme ceci " l'occupation du domaine public est consentie pour une durée de six ans pour une période de 74 jours par année " ; en conséquence, juger que cette convention doit se poursuivre jusqu'au 12 octobre 2021 ;

- d'enjoindre à la Ville de Paris de lui signifier les dates de montage, de démontage et d'ouverture au public de la prochaine session du " marché de Noël " et de répondre aux questions posées par elle dans sa lettre du 21 mars 2017 pour la prochaine session du " marché de Noël " à venir immédiatement après le jugement à intervenir, dans le délai de cinq jours à compter de ce jugement, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

- de condamner la Ville de Paris à lui verser une somme de 4 755 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2017, en réparation du préjudice résultant pour elle du non-renouvellement de la convention conclue le 12 octobre 2015 en vue de permettre l'organisation d'un " marché de Noël " sur les Champs-Élysées.

Par un jugement n° 1713918-1806043 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 août 2019, la société Loisir associés, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1713918-1806043 du 11 juillet 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de juger illégale la décision de la Ville de Paris en date du 3 juillet 2017, de ne pas renouveler la convention d'occupation du domaine public du 12 octobre 2015 ;

3°) d'accueillir la demande de la société Loisirs Associés " en contestation de validité " de certaines dispositions du chapitre 6 de la convention d'occupation du domaine public du 12 octobre 2015, et juger nulles les dispositions " deux ans renouvelable deux fois " pour ne pas assurer au cocontractant de la Ville de Paris qu'est la requérante, en infraction à la règle de droit, " l'amortissement des investissements [consentis par la société Loisirs Associés], en prenant en compte une rémunération équitable et suffisante des capitaux investis " ;

4°) de juger que les dispositions annulées seront remplacées par " 6 ans " correspondant, au sens des règles applicables, à l'amortissement des investissements de la société Loisirs associés, et prenant en compte une rémunération équitable et suffisante des capitaux investis, de sorte que le chapitre 6 de la convention d'occupation du domaine public du 12 octobre 2015 se lit comme suit : " l'occupation du domaine public est consentie pour une durée de 6 ans, pour une période de 74 jours chaque année " (suite sans changement) ;

5°) de juger que la convention d'occupation du domaine public du 12 octobre 2015 doit, en droit, se poursuivre jusqu'au 12 octobre 2021 ;

6°) d'enjoindre à la Ville de Paris de répondre aux questions posées par la société requérante dans sa lettre du 21 mars 2017, pour la prochaine session du marché de Noël à venir immédiatement après sa décision, sous 5 jours ouvrés à compter de la décision à intervenir, la Ville de Paris sera redevable d'une astreinte d'un montant de 5 000 euros par jour de retard ;

7°) de condamner la Ville de Paris à payer, à titre d'indemnisation, à la société Loisirs associés la somme de 4 755 000 euros, à parfaire, sous réserve d'ajustements à hauteur du préjudice réellement éprouvé selon le nombre de saisons manquées jusqu'au mois de janvier 2022 (session 2021/2022), avec intérêts au taux légal sur le montant d'indemnisation à compter du 29 décembre 2017 ;

8°) de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 10 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en rejetant comme irrecevables les conclusions visant à l'annulation de la décision de non-renouvellement du 3 juillet 2017, et par suite les conclusions visant à la reprise des relations contractuelles ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en rejetant comme entachée d'une irrecevabilité propre les conclusions visant à la modification du chapitre 6 de la convention du 12 octobre 2015 ;

- le chapitre 6 de la convention du 12 octobre 2015, en fixant une durée contractuelle inférieure à celle qui serait nécessaire pour assurer l'amortissement des investissements de la société à une rémunération équitable des capitaux investis, méconnait les dispositions de la directive n° 2006/123/CE du 27 décembre 2006, lesquelles consacrent un droit à l'amortissement des investissements réalisés par l'occupant du domaine public ;

- le chapitre 6 de la convention est également contraire à l'article L. 2122-2 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 ;

- la décision du 3 juillet 2017 de ne pas renouveler la convention litigieuse a été incompétemment prise ;

- cette décision est irrégulière faute d'être motivée comme l'auraient imposé les articles L.211-2 et L.211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- cette décision est illégale pour les mêmes motifs que ceux allégués précédemment au soutien des conclusions tendant à obtenir la nullité des clauses du chapitre 6 de la convention ;

- elle méconnait le principe de confiance légitime, applicable quand la situation relève du droit de l'Union européenne, combiné à celui de la loyauté contractuelle ;

- elle est contraire au droit au respect des biens tel qu'il est protégé par l'article 1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait les principes constitutionnels de propriété et de libre entreprise consacrés respectivement aux articles 2 et 17, d'une part, et 4, d'autre part, de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 ;

- le préjudice qui lui a été causé consiste en 900 000 euros au titre du manque à gagner, correspondant aux gains attendus des cessions qui n'ont pas pu se tenir pendant les quatre années suivant la mesure de non-renouvellement ; 2 390 000 euros au titre des investissements non amortis, cette somme se décomposant en deux chefs, 1 320 000 euros correspondant aux dépenses d'investissements réalisées en vue de la conclusion de la convention litigieuse, et qui n'ont pas pu être amortis du fait du non-renouvellement à l'issue d'une première période de deux ans, et 1 070 000 euros, à raison de dépenses qui auraient été engagées en 2017 en vue de l'édition 2017-2018, et n'ont pu être couvertes en raison de l'interruption de l'activité de la société ; une indemnité de 697.838,86 euros au titre de la perte définitive de son fonds de commerce évalué au prix qu'elle aurait pu en tirer, sur la base d'une valeur actuelle nette de quatre résultats nets moyens, avec un taux d'actualisation à 5 % ; 69 784 euros au titre des frais de remploi ; 200 000 euros au titre du licenciement des personnels ; un déficit d'exploitation supporté pour la période 2017-2018 ; 500 000 euros, au titre d'un préjudice d'image et du trouble commercial.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 septembre 2020, la Ville de Paris, représentée par Me B... (D...-B..., avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation), conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 5 000 euros à la charge de la société Loisirs associés en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son préambule et la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive n° 2006/123/CE du parlement européen et du conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi des 2-17 mars 1791 sur la liberté du commerce et de l'industrie ;

- l'ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., avocat de la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention conclue le 12 octobre 2015, la Ville de Paris a autorisé la société Loisirs associés à occuper l'avenue des Champs Élysées, entre le rond-point Marcel Dassault et la place de la Concorde, en vue de l'organisation d'un " marché de Noël " pendant une période de 74 jours par an sur une durée de deux ans, cette convention étant renouvelable deux fois. Lors de la séance des 3, 4 et 5 juillet 2017, le conseil de Paris a émis le voeu que soit engagée une réflexion avec les groupes politiques afin de diversifier la programmation des animations sur ce secteur en cohérence avec les orientations du mandat, et qu'il en soit rendu compte. Par une décision du 3 juillet 2017, la directrice de l'attractivité et de l'emploi de la ville de Paris a décidé de ne pas reconduire la convention du 12 octobre 2015. La société Loisirs associés a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer l'annulation de cette décision, de décider le remplacement des dispositions du chapitre 6 de la convention prévoyant une durée de deux ans, renouvelable deux fois, et leur remplacement par une durée de six ans, d'enjoindre à la Ville de Paris de procéder à la reprise des relations contractuelles et de condamner cette collectivité à l'indemniser du préjudice qu'elle estime avoir subi. Par un jugement du 11 juillet 2019, dont il est interjeté appel par la présente requête, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Loisirs associés.

2. La société Loisirs associés se borne, dans sa requête d'appel, sans critiquer véritablement le jugement attaqué, à reprendre presqu'intégralement et identiquement l'ensemble des conclusions et moyens présentés en première instance, sans les assortir d'arguments ou d'éléments nouveaux, ni non plus sans répliquer aux écritures en défense de la Ville de Paris qui fait valoir l'irrecevabilité de certaines conclusions ou l'inopérance et le mal fondé des moyens. Dès lors, il a y lieu, par adoption de l'ensemble des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, de rejeter l'ensemble des conclusions de la requête d'appel, en ce comprises celles fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dès lors que la requérante succombe dans la présente instance.

3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Loisirs associés le versement d'une somme de 2 000 euros à la Ville de Paris en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Loisirs associés est rejetée.

Article 2 : La société Loisirs associés versera à la Ville de Paris une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Loisirs associés et à la Ville de Paris.

Copie en sera adressée au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. C..., président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller,

Rendu public par disposition au greffe, le 10 décembre 2020.

Le président,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA02722


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02722
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Recevabilité.

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Pouvoirs et obligations du juge - Pouvoirs du juge du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : HAY-MENDELSOHN ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-10;19pa02722 ?
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