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12/11/2020 | FRANCE | N°19PA03634

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 12 novembre 2020, 19PA03634


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Real Estate Commercial Advisers a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations primitive et supplémentaire d'impôt sur les sociétés et des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre respectivement des exercices clos en 2010 et 2011, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1801094 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris

a prononcé la réduction des cotisations primitive et supplémentaire d'impôt sur les ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Real Estate Commercial Advisers a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations primitive et supplémentaire d'impôt sur les sociétés et des cotisations de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre respectivement des exercices clos en 2010 et 2011, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1801094 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris a prononcé la réduction des cotisations primitive et supplémentaire d'impôt sur les sociétés réclamées à la société Real Estate Commercial Advisers, mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2019, la société Real Estate Commercial Advisers, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801094 du 24 septembre 2019 du tribunal administratif de Paris, en tant qu'il lui est défavorable ;

2°) de prononcer la décharge des impositions, taxes et majorations restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Real Estate Commercial Advisers soutient que :

- elle n'a pas été informée de l'origine d'informations utilisées par l'administration, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et des droits de la défense ; certains documents mentionnés dans la proposition de rectification ne lui ont pas été communiqués ;

- le service a exigé la communication de documents couverts par le secret professionnel ;

- le versement de l'indemnité d'un montant de 1,5 millions d'euros procède d'une gestion commerciale normale ;

- elle justifie d'un projet de réalisation d'un musée historique ;

- les salaires versés à son dirigeant ne devaient pas être soumis à la taxe sur les salaires ;

- l'administration n'établit pas le caractère délibéré du manquement qui lui est reproché.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens soulevés par la société Real Estate Commercial Advisers ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., avocat de la société Real Estate Commercial Advisers.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Real Estate Commercial Advisers, holding mixte qui gère des titres de participation notamment dans le cadre d'opérations immobilières et réalise des prestations de service auprès de ses filiales, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service l'a assujettie à des cotisations primitive et supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2010 et 2011, assortis des intérêts de retard et de pénalités pour manquement délibéré et pour manoeuvres frauduleuses sur le fondement des a) et b) de l'article 1729 du code général des impôts, ainsi qu'à un rappel de taxe sur les salaires au titre de ces deux années, assortis des intérêts de retard et de la majoration de 10 % mentionnée au a) du 1 de l'article 1728 de ce code. Par un jugement du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Paris, saisi par la société Real Estate Commercial Advisers, a prononcé la réduction des cotisations d'impôt sur les sociétés réclamées à l'intéressée, mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la demande. La société Real Estate Commercial Advisers fait appel de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

3. Si l'administration ne peut en principe, en application de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, fonder le redressement des bases d'imposition d'un contribuable sur des renseignements ou documents qu'elle a obtenus de tiers, notamment par l'exercice du droit de communication, sans l'avoir informé, avant la mise en recouvrement, de l'origine et la teneur de ces renseignements, cette obligation d'information sur l'origine des renseignements ne s'étend pas aux informations nécessairement détenues par les différents services de l'administration fiscale en application de dispositions législatives ou réglementaires. Par ailleurs, elle n'est tenue à cette obligation qu'en ce qui concerne ceux des renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements.

4. D'une part, la société Real Estate Commercial Advisers soutient que le service n'a pas précisé dans la proposition de rectification l'origine des renseignements contenus dans une note figurant en bas de la page 9 de ce document et relatifs à 1'acquisition, le 20 décembre 2011, par la société FDV de 100 % du capital de la société Cogito et par M. B..., gérant de la société Cogito, de 50 % de la société FDV. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des mentions de cette proposition de rectification, que le service aurait fondé les impositions en litige sur ces éléments, qui, par ailleurs, n'ont pas été obtenus dans le cadre du droit de communication de l'administration mais sont issus des actes de cession des titres des sociétés précitées transmis pour enregistrement au service des impôts des entreprises conformément aux dispositions des articles 635 et 639 du code général des impôts. Si la société requérante prétend que les renseignements en litige ne procèderaient pas uniquement des actes de cessions de titres du 20 décembre 2011, elle n'a produit aucun élément à l'appui de ses allégations. Dans ces conditions, le service n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ne fournissant pas à la contribuable des indications sur l'origine des informations citées dans cette note en bas de page.

5. D'autre part, si la société Real Estate Commercial Advisers soutient que le service ne lui a pas communiqué certains documents mentionnés dans la proposition de rectification, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait sollicité une telle communication avant la mise en recouvrement des impositions en litige. Elle n'apporte par ailleurs aucun élément à l'appui de ses allégations selon lesquelles le vérificateur aurait utilisé d'autres renseignements ou documents que ceux portés à sa connaissance dans la proposition de rectification, pour lesquels il n'aurait pas respecté ses obligations d'information et de communication. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales de ces chefs doit ainsi être également écarté.

6. En second lieu, aux termes de l'article L. 13-0 A du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts peuvent demander toutes informations relatives au montant, à la date et à la forme des versements afférents aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel en vertu des dispositions de l'article 226-13 du code pénal. Ils ne peuvent demander de renseignements sur la nature des prestations fournies par ces personnes ".

7. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 13-0 A du livre des procédures fiscales, éclairées par les débats parlementaires à l'issue desquels elles ont été adoptées, que le législateur a entendu délimiter strictement le champ des informations que l'administration fiscale est susceptible de demander aux personnes dépositaires du secret professionnel, qui ne peuvent porter ni sur l'identité des clients, ni sur la nature des prestations fournies.

8. La société Real Estate Commercial Advisers soutient que, par un courrier électronique du 22 février 2013, le vérificateur lui aurait indiqué qu'il souhaitait, lors d'une prochaine entrevue, s'entretenir de la nature de prestations juridiques fournies par deux cabinets d'avocat. Toutefois, l'existence de ce courriel, qui est contestée par l'administration, n'est établie par aucune des pièces du dossier. En outre, la seule circonstance que le vérificateur aurait procédé ainsi ne suffit pas à établir qu'il aurait demandé la communication de documents couverts par le secret professionnel. Et il ne résulte pas davantage de l'instruction qu'il aurait fondé tout ou partie des impositions contestées sur de tels documents. Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait entachée d'irrégularité du fait d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 13-0 A du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

9. En premier lieu, aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...). 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ". En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt.

10. Le 15 mars 2011, la société Real Estate Commercial Advisers s'est engagée à céder à la société Fleur de Vignes 25 % des titres qu'elle détenait dans deux sociétés de droit luxembourgeois, les sociétés Istrada Investment et Bricy. Ces sociétés avaient elles-mêmes signé, le 9 novembre 2010, une promesse d'achat de 70 % des parts sociales de la société de droit espagnol Restaura SL, cet accord contenant une clause résolutoire en cas de défaut de refinancement de la dette de la société Restaura SL dans un délai de quarante jours après la signature de l'acte. Le 1er juillet 2011, l'ancien actionnaire de la société Restaura SL a mis en oeuvre la clause résolutoire et la cession des titres de cette société aux sociétés Istrada Investment et Bricy n'a pas abouti. La cession des parts sociales des filiales luxembourgeoises de la société Real Estate Commercial Advisers à la société Fleur de Vignes n'ayant pu en conséquence être définitivement conclue, la société Real Estate Commercial Advisers a versé à la société Fleur de Vignes une indemnité d'un montant de 1,5 millions d'euros en exécution d'une clause figurant au protocole d'accord du 15 mars 2011, modifié par avenant du 19 décembre 2011. La société Real Estate Commercial Advisers a alors constaté une charge exceptionnelle d'un montant de 1,5 millions d'euros qu'elle a déduite du résultat fiscal de son exercice clos en 2011. Le service a remis en cause la comptabilisation de cette charge, au motif que le versement de l'indemnité à la société Fleur de Vignes était contraire à l'intérêt de la société Real Estate Commercial Advisers et procédait en conséquence d'un acte anormal de gestion.

11. Il résulte de l'instruction que la société Real Estate Commercial Advisers, qui était le principal actionnaire de la société Restaura SL, ne pouvait ignorer, lorsqu'elle a conclu le 15 mars 2011 le protocole d'accord portant sur la cession des titres des sociétés Istrada Investment et Bricy, que les négociations engagées avec les banques pour restructurer la dette de la société Restaura SL n'avaient pas abouti dans le délai prévu, impliquant que la vente des titres de cette société soit résiliée de plein droit par la mise en oeuvre à tout moment de la clause résolutoire figurant à l'accord du 9 novembre 2010 et que la cession des parts des sociétés Istrada Investment et Bricy à la société Fleur de Vignes ne puisse être réalisée, la contraignant ainsi à verser à cette dernière l'indemnité prévue au protocole d'accord du 15 mars 2011 en cas d'inexécution de ses obligations contractuelles. En acceptant de signer dans ces conditions ce protocole sans prévoir aucune garantie quant à la réalisation de la vente des titres de la société Restaura SL aux sociétés Istrada Investment et Bricy, dont dépendait la cession des titres de ces sociétés à la société Fleur de Vignes, le versement de l'indemnité en litige étant pratiquement acquis à la société Fleur de Vignes lors de sa signature, la société Real Estate Commercial Advisers, qui ne se prévaut d'aucune contrepartie, a commis un acte anormal de gestion et n'a pas seulement pris un risque excessif dans le cadre d'une gestion commerciale normale. A cet égard, la requérante ne peut utilement faire valoir que l'acquisition des titres de la société Restaura SL n'est pas contraire à ses intérêts et s'inscrit dans ses activités de placement, dès lors que le principe de l'opération n'est pas critiqué par l'administration. De même, la circonstance alléguée qu'au regard de 1'importance du parc immobilier détenu par la société Restaura SL, il était raisonnable d'escompter réaliser des gains sur cette opération avec l'appui du gérant de la société Cogito, administrateur unique de la société Restaura SL, qui a permis de vendre des actifs importants de cette société, n'est pas de nature à justifier le versement dans les conditions précédemment rappelées de l'indemnité en litige. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration, qui justifie de l'existence d'un acte anormal de gestion, a procédé à la réintégration du montant de cette indemnité aux résultats de l'exercice clos en 2011.

12. En second lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " I. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment : 1º Les frais généraux de toute nature (...) ".

13. Il ressort des mentions de la proposition de rectification adressée à la société Real Estate Commercial Advisers que celle-ci a comptabilisé au titre de chacun des exercices vérifiés des rémunérations et charges patronales à raison de l'emploi d'une salariée occupant les fonctions de documentaliste-archiviste. Toutefois, il résulte de l'instruction que, lors des opérations de contrôle sur place, le vérificateur a constaté que cette employée, chargée de l'historique et des fiches techniques pour la " Napoleon Art Collection ", n'exerçait pas ses fonctions au sein des locaux de la société mais assurait, au lieu du domicile personnel de son dirigeant et associé, collectionneur d'art, la mise en valeur de la collection privée de ce dernier. Si la société requérante fait valoir qu'elle a souhaité diversifier son activité et que le recrutement d'un documentaliste s'inscrit dans un projet de création d'un musée historique dans l'aile du Palais du Roi de Rome devant accueillir une collection de souvenirs de l'époque napoléonienne, elle n'a produit aucun élément susceptible d'établir qu'elle serait associée à la création et à l'exploitation de ce musée. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a considéré que cette salariée ne dédiait pas son travail à l'activité de la Real Estate Commercial Advisers et que les charges salariales correspondantes, étrangères aux besoins de l'exploitation de la société, ne pouvaient être déduites de son résultat imposable.

En ce qui concerne les cotisations de taxe sur les salaires :

14. Aux termes de l'article 231 du code général des impôts : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant (...) et à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations (...) ".

15. D'une part, lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts au sens de l'article 209 de l'annexe II au code général des impôts, la taxe sur les salaires doit être déterminée par secteur, en appliquant aux rémunérations des salariés affectés spécifiquement à chaque secteur le rapport d'assujettissement propre à ce secteur. Toutefois, la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. D'autre part, les fonctions de président d'une société par actions simplifiée confèrent à leurs titulaires, en vertu de l'article L. 227-6 du code de commerce, les pouvoirs les plus étendus dans la direction de l'entreprise. Il résulte des articles L. 225-51 et L. 222-51-1 du même code, auxquels renvoie l'article L. 227-8, que le président et le directeur général d'une société par actions simplifiée sont investis d'une responsabilité générale.

16. S'agissant d'une société holding, les pouvoirs visés au point précédent s'étendent en principe au secteur financier, même si le suivi des activités est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés à ce secteur et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible. Toutefois, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires.

17. Il résulte de l'instruction que la société Real Estate Commercial Advisers avait, en tant que société exerçant une activité de holding mixte, deux secteurs d'activité, l'un à caractère financier comprenant l'acquisition et la gestion de titres de participations dans un secteur non soumis à la taxe sur la valeur ajoutée et l'autre à caractère administratif ayant pour objet la réalisation de prestations de services destinées à ses filiales. La société requérante était soumise au titre de ce second secteur à la taxe sur la valeur ajoutée pour moins de 90 % de son chiffre d'affaires et était ainsi passible de la taxe sur les salaires au titre des années en litige.

18. Il est constant que la société Real Estate Commercial Advisers est dirigée par son président, dont les fonctions lui conféraient les pouvoirs les plus étendus dans la gestion de la société. Elle n'établit pas que son dirigeant n'avait pas d'attribution dans le secteur financier en se bornant à relever qu'il n'est pas intervenu dans la gestion des comptes courants et que seules des écritures de frais financiers ont été passées par un cabinet comptable externe. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a assujetti les rémunérations versées par la société Real Estate Commercial Advisers à son président à la taxe sur les salaires.

Sur les pénalités :

19. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de :

a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

20. Le service a majoré les droits procédant de la remise en cause de la déduction des charges correspondant aux dépenses exposées pour l'emploi d'une salariée en qualité de documentaliste-archiviste des pénalités pour manquement délibéré prévues au a) de l'article 1729 du code général des impôts. En relevant que la société Real Estate Commercial Advisers, qui ne vise dans sa requête que ces pénalités, avait pris en charge des dépenses dont elle savait qu'elles ne présentaient pas de lien avec son activité mais constituaient des dépenses personnelles de son associé et dirigeant, ce qui lui avait permis d'augmenter ses charges déductibles et ainsi de réduire le montant de l'impôt sur les sociétés dont elle était normalement redevable, alors que, parallèlement, les mêmes dépenses n'ouvraient droit à aucune déduction fiscale du chef de l'associé-gérant, l'administration établit le caractère délibéré des manquements reprochés, et, par suite, le bien-fondé des pénalités infligées sur le fondement du a) de l'article 1729 du code général des impôts.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la société Real Estate Commercial Advisers n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par suite, sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'État n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Real Estate Commercial Advisers est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Real Estate Commercial Advisers et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Île-de-France - Division juridique.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. C..., président de la formation de jugement,

- Mme Marion, premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.

Le président-rapporteur,

F. C...L'assesseur le plus ancien,

I. MARION

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03634


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03634
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour distribution occulte de revenus.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : CABINET BERNARD LAGARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-12;19pa03634 ?
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