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15/10/2020 | FRANCE | N°19PA03044

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 15 octobre 2020, 19PA03044


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 26 septembre 2019, complétée par des mémoires les 28 octobre 2019 et 2 juin 2020, l'association A... Espace Mercantour, représentée par la SAS Colin-Stoclet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1°) d'annuler la décision du 17 juillet 2019 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature pour la diffusion du service A... de catégorie A dénommé " Oxygène " dans la zone de Gap ;

2°) de mettre à la charge du CSA le versement d'une s

omme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice adminis...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 26 septembre 2019, complétée par des mémoires les 28 octobre 2019 et 2 juin 2020, l'association A... Espace Mercantour, représentée par la SAS Colin-Stoclet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1°) d'annuler la décision du 17 juillet 2019 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a rejeté sa candidature pour la diffusion du service A... de catégorie A dénommé " Oxygène " dans la zone de Gap ;

2°) de mettre à la charge du CSA le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

- le CSA a commis une erreur de droit en se fondant sur un seul des critères fixés par l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ;

- le CSA a commis une erreur d'appréciation en estimant que " A... Oxygène ", qui propose une programmation axée sur la montagne et dont le programme d'intérêt local, d'une durée moyenne de 22 heures 03 par jour, s'adresse aux habitants, aux acteurs socio-professionnels et aux touristes de la zone de Gap, s'avérait susceptible de contribuer dans une moindre mesure à la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et de répondre dans une moindre mesure à l'intérêt du public que les candidats retenus, " Imagine Grand Gap " et " BFM Business " ;

- il a méconnu le critère de la contribution à la production de programmes réalisés localement ;

- il a méconnu le critère de l'expérience acquise dans les activités de communication ;

- il a méconnu les impératifs prioritaires de la diversification des opérateurs et de la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence dès lors que dans la zone de Gap, les groupes Lagardère, M6, Next A..., NRJ et Espace disposent de la majorité des fréquences leur permettant de diffuser des programmes à vocation nationale alors qu'elle proposait un programme d'intérêt local ; - il a méconnu l'objectif du juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d'une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d'autre part ainsi que celui tenant à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association ; le nombre des fréquences attribuées aux radios nationales de catégorie D et E est très supérieur à celui accordé aux radios de catégorie A, catégorie à laquelle appartient A... Oxygène, alors que ces dernières devraient représenter entre 25 % et 30 % des radios de la zone ;

- le CSA a méconnu le critère tiré du financement et des perspectives d'exploitation du service dès lors qu'en 2017, son bilan comptable était bénéficiaire à hauteur de 17 539 euros alors que la A... " Imagine Grand Gap " est confrontée à des difficultés financières qui ont entraîné une coupure de sa diffusion ;

- il n'a pas pris en considération le critère fixé par la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 tiré de la nécessité de tenir compte des contraintes géographiques en zone de montagne afin de permettre une bonne réception des émissions des services de A... ;

- il a commis une erreur d'appréciation en refusant, par la décision du 22 juin 2018, d'affecter la fréquence 103.1 MHz dans la zone de Gap d'une contrainte d'assignation de programme avec celle de la zone de Barcelonnette qui lui est attribuée ; cette absence de contrainte de programme provoque notamment une perte de couverture de la A... " Oxygène " dans la zone de Barcelonnette.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2020, la société Business FM, représentée par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de l'association A... Espace Mercantour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de ce que le CSA aurait omis de prendre en compte les contraintes géographiques en zone de montagne et aurait commis une erreur d'appréciation en n'assortissant pas la fréquence 103.1 MHz de la zone de Gap d'une contrainte d'assignation de programme avec la fréquence 103.1 MHz dans la zone de Barcelonnette est inopérant à l'encontre de la décision du CSA l'autorisant à diffuser le service de A... " BFM Business " sur la fréquence 99.9 MHz ;

- les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 février, 17 juin, 3 juillet et 12 août 2020, le Conseil supérieur de l'audiovisuel conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation des décisions n° 2019-322 et n° 2019-324 du 17 juillet 2019 autorisant l'association Imagine et la société Business FM à exploiter respectivement les services de A... " Imagine Grand Gap " et " BFM Business " dans la zone de Gap sont irrecevables pour tardiveté ;

- la Cour ne saurait, sans méconnaître son office, prendre en considération l'étude de terrain réalisée le 18 mars 2020 qui ne peut révéler la situation existante à la décision attaquée ; en outre, les résultats des études présentées par la requérante sont inexploitables ;

- les moyens soulevés par la requérante à l'encontre de la décision du 17 juillet 2019 rejetant sa candidature ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés les 31 juillet et 18 septembre 2020, l'association A... Espace Mercantour maintient ses conclusions et ses moyens.

Elle soutient, en outre, que :

- les services RMC Story et BFM Business diffusent simultanément plusieurs programmes portant ainsi atteinte au pluralisme des courants d'expression socioculturels ;

- il n'y a pas lieu d'écarter l'étude de terrain qui ne fait que confirmer la situation existante à la date de la décision ; c'est à tort que le CSA ne prend pas en compte les axes routiers.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me F... de la SAS Colin-Stoclet, pour l'association A... Espace Mercantour et de Me D... de la SCP Piwnica et Molinié, pour la société Business FM.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision n° 2018-148 du 28 mars 2018, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a lancé un appel à candidatures pour l'exploitation de services radiophoniques par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence à temps complet dans le ressort du comité territorial de l'audiovisuel de Marseille. Par des décisions n° 2019-322 et n° 2019-324 du 17 juillet 2019, il a autorisé respectivement l'association Imagine à exploiter le service de A... " Imagine Grand Gap " en catégorie A et la société Business FM à exploiter le service de A... dénommé " BFM Business " en catégorie D dans la zone de Gap. Par une décision du même jour, notifiée le 31 juillet 2019, il a rejeté la candidature de l'association A... Espace Mercantour. Par la présente requête, cette dernière demande à la Cour l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision rejetant la candidature de l'association A... Espace Mercantour :

- En ce qui concerne la légalité externe :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 : " Les autorisations prévues à la présente section sont publiées au Journal officiel de la République française avec les obligations dont elles sont assorties. Les refus d'autorisation sont motivés et sont notifiés aux candidats dans un délai d'un mois après la publication prévue à l'alinéa précédent. Lorsqu'ils s'appliquent à un service de A... diffusé par voie hertzienne terrestre, ils peuvent être motivés par référence à un rapport de synthèse explicitant les choix du conseil au regard des critères mentionnés aux articles 1er et 29. ".

3. La lettre du 31 juillet 2019, par laquelle le CSA a notifié à l'association A... Espace Mercantour le rejet de sa candidature se réfère à l'extrait du procès-verbal de la séance plénière du 17 juillet 2019, vise les dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 et mentionne de façon suffisamment circonstanciée les éléments de fait sur lesquels le CSA s'est fondé pour rejeter la candidature de la requérante. En application des dispositions ci-dessus rappelées de l'article 32 de la loi du 30 septembre 1986 le CSA n'était pas tenu de formuler une motivation spécifique sur chacun des critères énumérés à l'article 29 dès lors qu'il comparait l'intérêt des projets de l'association intéressée à ceux des candidats qui avaient été retenus, comme il l'a fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée doit être écarté comme manquant en fait.

4. En second lieu, l'association A... Espace Mercantour n'assortit pas le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.

- En ce qui concerne la légalité interne :

5. Aux termes de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA " accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. / Il tient également compte : 1° De l'expérience acquise par le candidat dans les activités de communication ; 2° Du financement et des perspectives d'exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle ; 3° Des participations, directes ou indirectes, détenues par le candidat dans le capital d'une ou plusieurs régies publicitaires ou dans le capital d'une ou plusieurs entreprises éditrices de publications de presse ; 4° Pour les services dont les programmes comportent des émissions d'information politique et générale, des dispositions envisagées en vue de garantir le caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion, l'honnêteté de l'information et son indépendance à l'égard des intérêts économiques des actionnaires, en particulier lorsque ceux-ci sont titulaires de marchés publics ou de délégations de service public ; 5° De la contribution à la production de programmes réalisés localement ; 6° Pour les services dont les programmes musicaux constituent une proportion importante de la programmation, des dispositions envisagées en faveur de la diversité musicale au regard, notamment, de la variété des oeuvres, des interprètes, des nouveaux talents programmés et de leurs conditions de programmation ; 7° S'il s'agit de la délivrance d'une nouvelle autorisation après que l'autorisation précédente est arrivée à son terme, du respect des principes mentionnés au troisième alinéa de l'article 3-1. / Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille, sur l'ensemble du territoire, à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité, entendue comme le fait de favoriser les échanges entre les groupes sociaux et culturels, l'expression des différents courants socioculturels, le soutien au développement local, la protection de l'environnement ou la lutte contre l'exclusion. / Le conseil veille également au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d'une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d'autre part. Il s'assure que le public bénéficie de services dont les programmes contribuent à l'information politique et générale. / En zone de montagne, il est tenu compte des contraintes géographiques pour faciliter l'attribution d'iso-fréquences et permettre aux services de radios de surmonter ces difficultés ".

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le CSA s'est fondé, pour écarter la candidature de l'association A... Espace Mercantour, sur l'intérêt de chaque projet pour le public de la zone de Gap au regard de l'impératif de la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels dans cette zone. En se fondant ainsi sur le premier des impératifs prioritaires énoncés au premier alinéa de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA, qui n'était pas tenu de se prononcer sur l'ensemble des critères énoncés dans cet article, n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit.

7. En deuxième lieu, il ressort de l'examen des dossiers de candidatures des associations A... Espace Mercantour et Imagine que les programmations parlées des services de A... " Oxygène " et " Imagine Grand Cap " étaient axées sur la même thématique de la " montagne" et s'adressaient à un même public, les habitants, les acteurs socio-professionnels et les touristes de la zone de Gap. Elles comprenaient notamment des informations internationale, nationale, régionale et locale dont des chroniques d'information dédiées à la montagne ainsi que des chroniques sur l'emploi et la formation, sur le tourisme et la vie associative locale comprenant notamment des interviews des acteurs de la vie locale. En outre, leurs programmations musicales étaient proches, les deux services de radios proposant de diffuser les mêmes genres musicaux ainsi que des titres " Gold " et des nouveautés dans les mêmes proportions. Toutefois, le programme d'intérêt local (PIL) du service de A... " Imagine Grand Cap " était d'une durée supérieure d'1 heure 14 à celle du PIL proposée par la A... " Oxygène " et était, en outre, spécifique à la zone de Gap alors que celui d'" Oxygène " concernait également les zones de Barcelonnette et d'Allos. Par ailleurs, même si une de ses émissions est diffusée simultanément sur la chaîne de télévision RMC Story, la programmation entièrement parlée et axée sur l'information économique et financière du service de A... " BFM Business " s'avérait plus originale dans la zone de Gap que celle de la A... " Oxygène " qui était très proche, comme il a été dit, de celle du service de A... retenu " Imagine Grand Cap " et qui était également déjà représentée dans la zone, s'agissant de la thématique de la montagne, par les radios " Fréquence Mistral " et " A... Alpine Meilleure " et s'agissant de la programmation musicale, par les radios " Chérie FM ", " Nostalgie ", " M A... " et " RFM " pour la variété et par les radios " RTL2 ", " Virgin A... " et " Rire et Chansons " pour la pop-rock. Par suite, eu égard à l'ensemble de ces éléments ainsi qu'à l'offre relativement large de services de radios autorisés dans la zone de Gap, le CSA n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard de l'impératif de la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socioculturels et de l'intérêt du public de cette zone en rejetant la candidature de l'association A... Espace Mercantour au motif qu'elle propose une programmation axée sur la montagne avec un PIL d'une durée moyenne de 22 h 03 par jour.

8. En troisième lieu, par deux communiqués n° 34 du 29 août 1989 et n° 281 du 10 novembre 1994, le CSA, faisant usage de la compétence qui lui a été conférée par l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, a déterminé cinq catégories de services en vue de l'appel à candidature pour l'exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre. Ces cinq catégories sont ainsi définies : services associatifs éligibles au fonds de soutien, mentionnés à l'article 80 (catégorie A), services locaux ou régionaux indépendants ne diffusant pas de programme national identifié (catégorie B), services locaux ou régionaux diffusant le programme d'un réseau thématique à vocation nationale (catégorie C), services thématiques à vocation nationale (catégorie D), et services généralistes à vocation nationale (catégorie E).

9. Il ressort des pièces du dossier qu'avant l'appel à candidatures, il existait dans la zone de Gap neuf services radiophoniques présentant un intérêt local et régional répartis pour cinq d'entre eux en catégorie A et quatre en catégorie B, et quinze services radiophoniques à vocation nationale en catégorie D ou E. A la suite de l'appel à candidatures, les autorisations accordées par le CSA conduisent à ce qu'il y ait dix services radiophoniques présentant un intérêt local et régional, et seize services radiophoniques à vocation nationale en catégorie D ou E. Dans ces conditions, en autorisant " Imagine Grand Gap " en catégorie A et " BFM Business " en catégorie D à émettre dans la zone de Gap, le CSA n'a pas méconnu les dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, qui lui prescrivent de veiller à un juste équilibre entre réseaux nationaux et services locaux, régionaux et thématiques indépendants. Au demeurant, retenir la candidature du service A... " Oxygène " en catégorie A en lieu et place de celle de " Imagine Grand Gap " relevant de la même catégorie n'aurait pas conduit à un équilibre différent entre les services radiophoniques dans cette zone.

10. En quatrième lieu, en se fondant notamment sur le rapport n° 1578 du 5 mai 1999 présenté par M. B... C... au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, la requérante soutient que la part des fréquences attribuées aux radios en catégorie A doit correspondre au minimum à 25 % des radios de la zone. Toutefois, si en application des dispositions de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA est tenu de " veiller sur l'ensemble du territoire à ce qu'une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité ", le législateur n'a toutefois fixé aucun taux qui correspondrait à cette part et qui s'imposerait au CSA lors de l'attribution des fréquences. Il ressort des pièces du dossier qu'avant l'appel à candidatures, les services de radios de catégorie A représentaient 20,83 % des radios privées dans la zone de Gap, et qu'en retenant la candidature de l'association Imagine, le CSA a porté ce taux à 23,07 %. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le CSA aurait méconnu les dispositions précitées de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986.

11. En cinquième lieu, si en application du 5° de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 cité au point 5, le CSA doit tenir compte de la contribution des services à la production de programmes réalisés localement, il lui appartient également de concilier l'ensemble des critères énoncés à l'article 29. Comme il a déjà été dit, étaient autorisés dans la zone de Gap, avant l'appel à candidature, cinq services de catégorie A et quatre services de catégorie B qui contribuent à la production locale de programmes. En outre, les programmes de l'association Imagine sont également produits dans la zone de Gap. Ainsi, alors même que la requérante proposait de produire son PIL en s'appuyant sur une équipe locale basée à Gap et sur sa structure de Barcelonnette, le CSA n'a pas commis d'erreur d'appréciation en retenant le service de A... BFM Business en catégorie D dès lors qu'il lui appartient d'attribuer un nombre suffisant de fréquences à des services à vocation nationale relevant des catégories D et E.

12. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'avant l'appel à candidatures, les groupes NRJ et Espace Group disposaient chacun de quatre fréquences dans la zone de Gap, les groupes Lagardère et RTL de trois fréquences chacun, les groupes NextRadio TV, les Echos et Orbus d'une fréquence. L'association requérante, qui se borne à faire valoir qu'en retenant la candidature du service de A... " BFM Business " qui appartient au groupe NextRadio TV, le CSA a conduit ce groupe à disposer de deux fréquences dans la zone de Gap, ne démontre pas que le CSA aurait méconnu les impératifs prioritaires de diversification des opérateurs et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

13. En septième lieu, si l'association A... Espace Mercantour se prévaut de son expérience acquise dans des activités de communication, il ressort des pièces du dossier que l'association Imagine et la société Business FM disposent d'une telle expérience. Ainsi, l'expérience acquise par l'association requérante dans des activités de communication n'est pas, en elle-même, de nature à établir que le CSA aurait entaché la décision attaquée d'illégalité au regard des impératifs et critères prévus par l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986.

14. En huitième lieu, la requérante soutient que son bilan comptable était bénéficiaire à hauteur de 17 539 euros alors que la A... " Imagine Grand Gap " était confrontée à des difficultés financières qui ont entraîné une coupure de sa diffusion. Cependant, la production du seul courrier en date du 27 septembre 2018 par lequel la société TDF mettait en demeure la A... Imagine de procéder au règlement de la somme de 27 565, 20 euros, ne saurait être regardée comme de nature à établir que la A... " Imagine Grand Gap " connaissait à la date de la décision attaquée des difficultés financières telles qu'elles auraient dû amener le CSA à écarter la candidature de cette A... au profit de celle de la requérante pour assurer le respect des impératifs et critères fixés à l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986.

15. En neuvième et dernier lieu, il n'est pas contesté que l'attribution de la fréquence 103.1 MHz à l'association Imagine dans la zone de Gap a généré des interférences dans la réception du programme " Oxygène " diffusé sur cette même fréquence dans la zone de Barcelonnette. Il ressort des pièces du dossier que le taux de brouillage du programme " Oxygène " correspond, selon les différents modèles théoriques de simulations de propagation des ondes appliqués par le CSA et la société K-Plug à la demande de l'association A... Espace Mercantour, à 9,3 % ou à 43,1 % de la surface de la couverture théorique de la A... Oxygène, ce programme A... connaissant en toute hypothèse le taux de brouillage le plus élevé de l'ensemble des services A... de la zone de Barcelonnette depuis l'émission du programme " Imagine grand Gap ". Toutefois, il ressort de la carte relative aux pertes de couverture de la fréquence 103,1 MHz à Barcelonnette, versée au dossier par le CSA, que les zones de brouillage restent limitées aux crêtes et aux pentes de la station touristique de Pra-Loup et ne concernent ainsi que très peu de personnes. Si l'étude de terrain menée par la société K-Plug le 18 mars 2020 démontre que la réception de la fréquence 103,1 MHz fait l'objet d'interférences sur la route départementale D900 entre Champanastais et Méolans-Revel, cette portion de route, certes comprise dans la zone de couverture de la fréquence 103,1 MHz à Barcelonnette, n'est pas située dans la zone de service dans laquelle les phénomènes de brouillage ne sont pas autorisés qui a été définie par le CSA en application de la recommandation UIT-RBS 412-9 de l'Union internationale des télécommunications. Dans ces conditions, au vu de l'intérêt pour le public de la zone de Gap de bénéficier du service " Imagine Grand Gap " spécifique à cette zone et de la nécessité de privilégier la diversité des opérateurs, le CSA, qui avait d'ailleurs pris le 22 juin 2018 une décision refusant d'assortir la fréquence 103.1 MHz d'une contrainte d'assignation dans la zone de Gap à l'encontre de laquelle l'association requérante ne justifie pas avoir introduit un recours contentieux, n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des impératifs et critères prévus par l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986, y compris le critère relatif à la prise en compte des contraintes géographiques en zone de montagne, en rejetant la candidature de l'association A... Espace Mercantour.

16. Il résulte de tout ce qui précède que l'association A... Espace Mercantour n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du CSA du 17 juillet 2019 rejetant sa candidature à fin d'exploiter le service de A... en catégorie A dénommé " Oxygène " dans la zone de Gap.

Sur les frais liés à l'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CSA qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'association A... Espace Mercantour demande au titre des frais liés à l'instance. Par ailleurs, dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'association A... Espace Mercantour le versement de la somme que la société BFM Business demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association A... Espace Mercantour est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société BFM Business tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association A... Espace Mercantour, à la société BFM Business, à l'association Imagine et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2020.

Le rapporteur,

V. E...Le président,

H. VINOT

Le greffier,

C. POVSE

La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 19PA03044


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

56-04-01-01 Radio et télévision. Services privés de radio et de télévision. Services de radio. Octroi des autorisations.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SCP COLIN - STOCLET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Date de la décision : 15/10/2020
Date de l'import : 05/11/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19PA03044
Numéro NOR : CETATEXT000042429322 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-15;19pa03044 ?
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