La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/07/2017 | FRANCE | N°15PA03551

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 18 juillet 2017, 15PA03551


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) a fait opposition à la déclaration préalable qu'elle avait présentée en vue de la division du terrain dont elle est propriétaire au 6 rue Paul Roger, ainsi que l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur son recours gracieux exercé le 21 novembre 2014.

Par un jugement n° 1501871 du 10 ju

illet 2015, le tribunal administratif de Melun a annulé les décisions litigieuses....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) a fait opposition à la déclaration préalable qu'elle avait présentée en vue de la division du terrain dont elle est propriétaire au 6 rue Paul Roger, ainsi que l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur son recours gracieux exercé le 21 novembre 2014.

Par un jugement n° 1501871 du 10 juillet 2015, le tribunal administratif de Melun a annulé les décisions litigieuses.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 septembre 2015 et trois mémoires complémentaires enregistrés le 27 avril 2016, le 17 aout 2016 et le 10 mars 2017, la commune de Sucy-en-Brie, représentée par Me Grau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501871 du 10 juillet 2015 du tribunal administratif de Melun ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Melun ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Sucy-en-Brie soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors qu'elle n'a pas bénéficié d'un délai suffisant pour répondre aux mémoires de Mme B..., que le moyen soulevé d'office par le tribunal administratif n'a pas fait l'objet d'un débat contradictoire, que les premiers juges ont omis de statuer sur la demande de substitution de motifs demandée et sur la fin de non recevoir opposée en défense ;

- la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Melun est irrecevable pour défaut de qualité pour agir ;

- les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article UC 11 du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et n'ont pas pris en compte la volonté des auteurs du plan local d'urbanisme relative à la préservation de l'identité paysagère et architecturale de la zone UC et à l'insertion des projets d'urbanisme dans les lieux avoisinants.

Par un mémoire enregistré le 13 juin 2016, MmeB..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune de Sucy-en-Brie à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu :

- le code de justice administrative ;

- le code de l'urbanisme.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,

- et les observations de Me Grau, avocat de la commune de Sucy-en-Brie.

1. Considérant que Mme B... a déposé auprès des services de la mairie de Sucy-en-Brie (Val-de-Marne) une déclaration préalable en vue de la division du terrain dont elle est propriétaire, situé 6 rue Paul Roger ; que, par un arrêté du 13 novembre 2014, le maire de la commune s'est opposé à cette déclaration préalable ; qu'après avoir exercé un recours gracieux, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2014 et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; que la commune de Sucy-en-Brie relève appel devant la Cour du jugement du 10 juillet 2015 par lequel ce tribunal a annulé ces deux décisions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il est constant que, dans son mémoire en défense n° 2 communiqué par télécopie et enregistré par le tribunal administratif le 22 juin 2015 antérieurement à la clôture de l'instruction, la commune de Sucy-en-Brie a soulevé une fin de non recevoir tirée de ce que Mme B...n'avait pas qualité pour agir devant le tribunal administratif dès lors qu'elle n'avait pas été régulièrement habilitée à déposer la demande de division parcellaire litigieuse ; que cette fin de non-recevoir n'a pas été visée par le tribunal, qui n'y a pas répondu ; qu'en omettant de répondre à ce moyen de défense qui n'était pas inopérant, les premiers juges ont entaché leur décision d'irrégularité ; que dès lors, la commune de Sucy-en-Brie est fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier et qu'il doit, en conséquence, être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Melun ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

En ce qui concerne la qualité pour agir de Mme B... :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) "; qu'aux termes de l'article R. 441-1 du même code : " La demande de permis d'aménager précise : a) L' identité du ou des demandeurs (...). La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les demandes de permis d'aménager doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 précité ; que les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis de construire ou d'aménager, la validité de l'attestation établie par le demandeur ;

5. Considérant, d'une part, que si la commune de Sucy-en-Brie soutient que Mme B... n'avait pas la qualité pour agir à l'encontre des décisions d'opposition à décision préalable, il ressort des pièces du dossier que le terrain objet de la déclaration préalable est un bien indivis propriété de Mme B... et M. C... ; qu'en l'absence de contestation sérieuse sur la qualité d'indivisaire de Mme B..., cette dernière était ainsi recevable à présenter la déclaration préalable en vue de la division parcellaire ; qu'elle avait, en tout état de cause, qualité pour contester devant le juge administratif le refus opposé à cette demande, qui n'était d'ailleurs pas motivé par son défaut de qualité pour la présenter ;

6. Considérant, d'autre part, que si la commune soutient que Mme B... était dépourvue de qualité pour agir, faute de produire une habilitation délivrée par l'association syndicale du lotissement auquel appartient le terrain d'assiette du projet, il ne résulte d'aucun texte ni d'aucun principe qu'une habilitation préalable de l'association syndicale du lotissement aurait été nécessaire pour procéder à la division du terrain ou saisir le juge ;

En ce qui concerne le caractère collectif réel de la demande de première instance :

7. Considérant, d'une part, que les conclusions d'une requête dirigée contre plusieurs décisions sont recevables dans leur totalité si elles présentent entres elles un lien suffisant ; que le rejet implicite du recours gracieux formé contre l'arrêté du 13 novembre 2014 d'opposition à déclaration préalable est purement confirmatif de cette première décision ; que Mme B... était donc recevable à demander l'annulation de ces deux décisions par une seule requête ;

8. Considérant, d'autre part, que les conclusions figurant dans le mémoire en réplique enregistré le 12 juin 2015 et tendant à l'annulation de deux nouvelles décisions d'opposition à déclaration préalable en date des 13 avril et 4 mai 2015 se rattachent à une autre instance introduite devant le tribunal administratif le 15 juin 2015 et jugée le 18 décembre 2015 ; qu'elles sont sans lien suffisant et doivent être rejetées dans le cadre de la présente instance, sans que cette circonstance rende irrecevable la demande d'annulation de la décision du 13 novembre 2014 implicitement confirmée sur recours gracieux ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par la commune de Sucy-en-Brie doivent être écartées ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 novembre 2014 et de la décision implicite de rejet du recours gracieux :

10. Considérant que l'arrêté du 13 novembre 2014, par lequel le maire de Sucy-en-Brie a fait opposition à la déclaration préalable déposée par Mme B...en vue de la division en deux lots à bâtir du terrain dont elle est propriétaire indivis, est motivé par la circonstance que cette division qui ne permet pas de garantir une insertion dans le paysage naturel et bâti est de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants et ainsi méconnait les dispositions de l'article UC 11 du plan local d'urbanisme ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Sucy-en-Brie, modifié par délibération du 14 octobre 2013 : " Rappel de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. / Une harmonie doit être recherchée par un traitement cohérent et de qualité de toutes les façades des constructions principales A...des annexes (matériaux et coloration). / Les constructions doivent s'insérer dans le paysage naturel et bâti. Cette intégration doit respecter la végétation existante, le site bâti ou non, le relief naturel du terrain. La construction tiendra compte de la pente du terrain, les remblais et les décaissements de terrains seront limités (...) " ;

12. Considérant, que contrairement à ce que soutient Mme B..., l'opération de division foncière de son terrain en deux lots à bâtir a le caractère d'une opération d'aménagement constituant un lotissement au sens des dispositions des articles L. 442-1 et suivants du code de l'urbanisme alors en vigueur ; que les opérations d'aménagement, ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même si elles n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière ; qu'il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable demandée sur le fondement de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises ;

13. Considérant qu'en application des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et de l'article UC 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune citées au point 11, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer un permis de construire ou l'assortir de prescriptions spéciales lorsque les constructions envisagées sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ; que, pour rechercher l'existence d'une telle atteinte, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel ou urbain sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site ;

14. Considérant que l'opération de division foncière envisagée se situe en zone UC du plan local d'urbanisme de la commune, dans un quartier pavillonnaire sans caractéristiques particulières ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué que la réalisation d'une construction supplémentaire sur le lot à détacher de l'actuelle parcelle de 667 m² serait impossible, y compris en sauvegardant une servitude de passage, dans le respect des dispositions du plan relatives à l'implantation des constructions, à leur volumétrie ou à la sauvegarde des espace verts ; que les vues aériennes et le plan cadastral ne permettent pas de déduire que la division foncière, par sa nature, porterait atteinte au caractère aéré et paysager des lieux environnants ; que si la commune se prévaut de la volonté des auteurs du plan local d'urbanisme de respecter la " trame urbaine ", le plan cadastral ne permet pas de considérer que les parcelles auraient une forme homogène donnant un caractère particulier aux lieux environnant le projet ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le maire de la commune doit être accueilli ;

15. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens articulés par Mme B... en première instance et en appel n'apparait susceptible, en l'état du dossier, d'entrainer l'annulation des décisions litigieuses ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...est fondée à demander l'annulation de la décision du 13 novembre 2014 par laquelle le maire de Sucy-en-Brie a fait opposition à sa déclaration préalable en vue de la division en deux lots du terrain sis 6 rue Paul Roger, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 21 novembre 2014 ;

Sur les frais de procédure :

17. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Sucy-en-Brie le versement à Mme B... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce que la commune de Sucy-en-Brie, partie perdante, en puisse invoquer le bénéfice ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun n° 1501871 du 10 juillet 2015 est annulé.

Article 2 : La décision du 13 novembre 2014 par laquelle le maire de Sucy-en-Brie a fait opposition à la déclaration préalable déposée par Mme B... ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux sont annulées. Le surplus des conclusions de la demande de première instance de Mme B...est rejeté.

Article 3°: Le surplus des conclusions de la requête d'appel est rejeté.

Article 4 : La commune de Sucy-en-Brie versera la somme de 1 500 euros à Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Sucy-en-Brie et à Mme D...B....

Délibéré après l'audience du 22 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 juillet 2017.

Le président assesseur,

S. DIÉMERTLa présidente,

S. PELLISSIERLe greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA03551


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03551
Date de la décision : 18/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : COMME

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-07-18;15pa03551 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award