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06/06/2017 | FRANCE | N°16PA03469

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 06 juin 2017, 16PA03469


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...Blanchinet a saisi le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation du compte-rendu de son entretien d'évaluation au titre de l'année 2014, d'autre part, au retrait de son dossier administratif dudit compte-rendu.

Par un jugement n° 1500266 du 17 mars 2016, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance du 28 octobre 2016, enregistrée au greffe de la Cour

le 7 novembre 2016, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...Blanchinet a saisi le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation du compte-rendu de son entretien d'évaluation au titre de l'année 2014, d'autre part, au retrait de son dossier administratif dudit compte-rendu.

Par un jugement n° 1500266 du 17 mars 2016, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance du 28 octobre 2016, enregistrée au greffe de la Cour le 7 novembre 2016, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour le jugement de la requête d'appel de Mme Blanchinet.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juin et 21 septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme Blanchinet, représentée par la SCP Potier de la Varde - Buk Lament, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500266 du 17 mars 2016 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux de retirer le compte-rendu litigieux de son dossier administratif ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier faute de réponse aux moyens opérants tirés, d'une part, de ce que sa supérieure hiérarchique, dont le contrat n'avait pas été renouvelé, ne pouvait légalement procéder à l'entretien litigieux, d'autre part, du défaut de signature du compte-rendu litigieux ;

- le compte-rendu d'évaluation litigieux est irrégulier faute d'être signé ;

- la procédure d'évaluation est irrégulière, d'une part, car sa supérieure hiérarchique, dont le contrat n'avait pas été renouvelé, ne pouvait légalement procéder à l'entretien litigieux, d'autre part, du fait du délai insuffisant entre la date de convocation à l'entretien d'évaluation et la date dudit entretien, eu égard à la période de congés ;

- elle a été victime de harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique directe et, dès lors, l'évaluation litigieuse est entachée de partialité et de détournement de pouvoir ;

- ladite évaluation est fondée sur des faits matériellement inexacts ;

- ladite évaluation est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mai 2017, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme Blanchinet ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la

Nouvelle-Calédonie ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le décret n° 92-413 du 30 avril 1992 portant statut particulier des greffiers en chef des services judiciaires ;

- le décret n° 2002-682 du 29 avril 2002 relatif aux conditions générales d'évaluation, de notation et d'avancement des fonctionnaires de l'Etat ;

- l'arrêté du 21 décembre 2004 relatif aux conditions générales d'évaluation et de notation des fonctionnaires du ministère de la justice ;

- l'arrêté du 25 janvier 2011 relatif à l'entretien professionnel et à la reconnaissance de la valeur professionnelle des greffiers en chef et des greffiers des services judiciaires du ministère de la justice et des libertés ;

- le code de l'organisation judiciaire ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.

1. Considérant que Mme Blanchinet, greffier en chef du Tribunal de première instance de Nouméa, a saisi le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation du compte-rendu de son entretien d'évaluation au titre de l'année 2014, d'autre part, au retrait de son dossier administratif dudit compte-rendu ; que Mme Blanchinet relève régulièrement appel du jugement du 17 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen opérant tiré du défaut de signature du compte-rendu litigieux ; que, dès lors, Mme Blanchinet est fondée à soutenir que le jugement attaqué, entaché d'omission à statuer, est irrégulier pour ce motif et doit être annulé, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen afférent à la régularité dudit jugement ;

3. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme Blanchinet devant le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la demande :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 25 janvier 2011 susvisé : " Les fonctionnaires du ministère de la justice et des libertés appartenant aux corps des greffiers en chef et des greffiers des services judiciaires bénéficient chaque année d'un entretien professionnel dans les conditions prévues par les décrets du 17 septembre 2007, du 15 octobre 2007 et du 28 juillet 2010 susvisés ainsi que par le présent arrêté. L'agent est prévenu, par écrit, de la date de l'entretien dans un délai d'au moins dix jours précédant cette date. (...) " ; qu'aux termes de l'article 5 du même arrêté : " Le compte-rendu de l'entretien professionnel, établi et signé par le supérieur hiérarchique direct, est communiqué à l'agent en double original. Celui-ci dispose alors d'un délai de dix jours francs, à compter de la date de cette communication, pour en prendre connaissance et le compléter, le cas échéant, de ses observations. Si l'agent refuse de signer le compte rendu lors de sa communication, le supérieur hiérarchique direct le constate en indiquant la date et le motif du refus. Au terme de ce délai, le compte rendu est ensuite visé par l'autorité hiérarchique qui peut formuler, si elle l'estime nécessaire, ses propres observations. Le compte rendu est ensuite notifié au fonctionnaire qui le signe pour attester qu'il en a pris connaissance puis le retourne à l'autorité hiérarchique qui le verse à son dossier. Le fonctionnaire peut, le cas échéant, former une demande de révision auprès de l'autorité hiérarchique (...) " ;

5. Considérant que le procès-verbal de notification de l'évaluation professionnelle en date du 22 décembre 2014, signé par Mme B...A..., directrice de greffe, et par la requérante, indique notamment : " Il convient de préciser qu'au moment de la remise, nous constatons que la fiche d'évaluation n'a pas été signée par l'évaluateur " ; que le défaut de signature de l'évaluateur est donc établi, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 5 de l'arrêté du 25 janvier 2011 susvisé ; que, par ailleurs, la signature de l'autorité hiérarchique ne saurait suppléer à l'absence de signature de l'évaluateur, supérieur hiérarchique direct, dès lors que les dispositions précitées prévoient expressément que le compte-rendu d'évaluation professionnelle doit être signé et par l'évaluateur, supérieur hiérarchique direct, et par l'autorité hiérarchique ; que, s'agissant d'un vice de forme et non de procédure il n'y a pas lieu, contrairement à ce que demande le ministre de la justice dans son mémoire en défense, de rechercher si en l'espèce ce vice a eu ou non une influence sur le sens de la décision ; que ce vice de forme entache d'illégalité le compte-rendu d'évaluation professionnelle de Mme Blanchinet au titre de l'année 2014 ; que, par suite, ce dernier doit, pour ce motif, être annulé ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Considérant que du fait de l'annulation pour excès de pouvoir, par le présent arrêt, du compte-rendu d'évaluation professionnelle de Mme Blanchinet au titre de l'année 2014, celui-ci est censé n'avoir jamais existé ; que, par suite, les conclusions de Mme Blanchinet tendant à ce qu'il soit fait injonction au garde des sceaux de retirer ce compte-rendu de son dossier administratif sont sans objet et doivent donc être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme Blanchinet et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1500266 du 17 mars 2016 du Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie et le compte-rendu d'évaluation professionnelle de Mme Blanchinet au titre de l'année 2014 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme Blanchinet au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...Blanchinet et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2017 à laquelle siégeaient :

M. Auvray, président de la formation de jugement,

M. Pagès, premier conseiller,

M. Legeai, premier conseiller,

Lu en audience publique le 6 juin 2017.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

B. AUVRAY

Le greffier,

C. RENE-MINE

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 16PA03469


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06 Fonctionnaires et agents publics. Notation et avancement.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE -BUK-LAMENT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Date de la décision : 06/06/2017
Date de l'import : 20/06/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16PA03469
Numéro NOR : CETATEXT000034899842 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-06;16pa03469 ?
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